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sur 722 notes
Certains soirs, toute musique prend l'allure d'une berceuse et toute lecture plombe autant qu'un somnifère.
Après avoir feuilleté deux autres livres, j'ai tenté de garder les yeux ouverts avec Ravel de Jean Echenoz. On ne peut rêver meilleure compagnie.
Malheureusement le charme n'a pas opéré, mon regard s'est perdu et le premier mouvement de ce concerto m'a envoyé assez rapidement dans les bras de Morphée.
Mais après une bonne nuit de sommeil et le retour du compositeur d'une tournée aux Etats Unis, mon intérêt s'est éveillé, a grandi et ne m'a plus quittée.

Ravel est décrit comme un individu presque ordinaire, terriblement insomniaque, solitaire, piètre pianiste.
Sa création naît dans la douleur. Il a un regard plutôt modeste sur son travail. Il apparaît assez détaché par rapport à sa gloire qui se confirme et qu'il ne comprend pas toujours, particulièrement concernant le Boléro.

"Chaîne et répétition, la composition s'achève en octobre après un mois de travail seulement troublé par un splendide rhume cueilli, pendant une tournée en Espagne, sous les cocotiers de Malaga. Il sait très bien ce qu'il a fait, il n'y a pas de forme à proprement parler, pas de développement ni de modulation, juste du rythme et de l'arrangement. Bref c'est une chose qui s'autodétruit, une partition sans musique, une fabrique orchestrale sans objet, un suicide dont l'arme est le seul élargissement du son. Phrase ressassée, chose sans espoir et dont on peut rien attendre, voilà au moins, dit-il, un morceau que les orchestres du dimanche n'auront pas le front d'inscrire à leur programme. Mais tout cela n'a pas d'importance, c'est seulement fait pour être dansé. Ce seront la chorégraphie, la lumière et le décor qui feront supporter les redites de la phrase...
Or ça ne se passe pas du tout comme prévu. La première fois que c'est dansé ça déconcerte un peu mais ça marche. Mais c'est ensuite au concert que ça marche terriblement. ça marche extraordinairement. Cet objet sans espoir connaît un triomphe qui stupéfie tout le monde à commencer par son auteur. il est vrai qu'à la fin d'une des premières exécutions, une vieille dame dans la salle crie au fou, mais Ravel hoche la tête: En voilà au moins une qui a compris, dit-il juste à son frère. (pages 80-81)"

Après sa consécration, on assiste, dans un dernier mouvement,à la chute du compositeur: maladie, troubles de la mémoire, accident...
Il quitte ce monde en ayant le sentiment d'avoir seulement esquisser son oeuvre.

"Mais comme il continue à se désoler elle lui fait observer que, même s'il ne peut plus rien produire, son oeuvre est là. Ravel ne la laisse pas finir sa phrase: Mais comment pouvez-vous dire ça? la coupe-t-il désespérément. Je n'ai rien écrit, je ne laisse rien, je n'ai rien dit de ce que je voulais dire. (page 117)"

Lien : http://leslivresdechris.blog..
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Lecture plaisante, mais déconcertante. Jean Echenoz, en nous invitant à suivre les dix dernières années de la vie de Ravel, semble nous faire la conversation. Son style nonchalant (très fluide, très agréable, mais qui paraît un peu détaché, un peu lontain, empreint d'un certain flegme) donne l'impression que l'on est assis à côté de lui, auprès du feu, un verre de cognac à la main, sous un éclairage tamisé, et qu'on l'écoute nous raconter une histoire. Ou, plutôt, évoquer pour nous quelques anecdotes, une par-ci, une par-là, très bien liées les unes aux autres, mais paraissant sortir de sa bouche - pardon : de sa plume - comme elles lui reviennent à l'esprit, entre deux gorgées de l'alcool ambré ou en se rasseyant après avoir remis une bûche dans l'âtre.
Bien sûr, cette fluidité (et cette nonchalance) sont la preuve d'une maîtrise de la narration romanesque : le manque de maîtrise conduit à des textes didactiques et figés, tandis que nous avons là, au contraire, une ambiance dans laquelle on se coule, un personnage auquel on s'attache, une histoire dans laquelle on s'engage sans effort, sans rechigner à suivre l'invitation que nous donne Echenoz (même si, personnellement, je préférerais une mirabelle de Lorraine plutôt qu'un cognac ; mais il me semble que je digresse).
Et puis, il faudrait que je lise un autre roman de Jean Echenoz pour savoir s'il a toujours ce style. Parce qu'il l'a peut-être simplement adapté à son personnage, Maurice Ravel, dont la vie (en dehors de la musique) était ennui, insomnies, solitude, désintérêt pour la compagnie de ses semblables et manque de volonté flagrant quand il s'agissait de se mettre au boulot. Quand on est dans un tel état d'esprit, la vie coule avec la même fluidité que la plume de Jean Echenoz et on la traverse avec un détachement identique à celui qui transparaît dans le style de l'auteur de cette biographie romancée.
Pour preuve de ce détachement, on peut noter les bricolages linguistiques ou les pointes d'humour (pas forcément drôles) dont Echenoz parsème son texte, comme s'il n'était vraiment là que pour s'amuser.
En attendant, et au risque de me répéter, c'était une lecture certes déconcertante, mais indéniablement plaisante.
Lien : http://sebastienfritsch.cana..
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Sont relatées ici les 10 dernières de l'existence du compositeur, médiocre pianiste, chétif et fragile comme un oisillon tombé de son nid, distrait, génial et desinvolte, la gauloise au bec et le costume impeccable.

Son inénarrable participation à la guerre de 14-18, son périple à travers l'Europe et les US, de concerts en réceptions, dans un monde désuet et plein de charme.

Pleine de charme également, l'écriture délicate est truffée d'images dont le lecteur s'imbibe au fil des pages.

(...)
http://lelabo.blogspot.com/2006/02/jean-echenoz-ravel.html
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J'ai beaucoup apprécié ce livre roman/biographie de Ravel par Jean Echenoz.
Ce livre retrace les 10 dernières années de sa vie, le boléro, la tournée triomphale aux US, mais donne une large part à la découverte de l'homme avec son dandysme, son ennui, sa tristesse et dont la fin de vie est particulièrement émouvante.
Un livre tranche de vie qui permet de découvrir le compositeur et qui donne envie d'écouter l'oeuvre de Ravel..et de lire d'autres livres de Jean Echenoz.
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qui suis je pour ne pas encenser Echenoz pour ce roman? Est ce le prrsonnage de Ravel decrit comme un caracteriel un peu snob, qui m a laissee insatisfaite.
certes dix ans d une vie en si peu de pages, c est un challenge, mais je n ai pas réussi à m interesser â l homme ni au musicien. Domage pour les 2 protagonistes. Je ne connaissais Ravel que par son Bolero ou son concerto pour main gauche et Echenoz pour ses excellents livres " Je m en vais".
Je reste donc sur ma faim. Tant pis pour Ravel, mais je vais me précipiter vers d autres oeuvres de Monsieur Echenoz.
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Un super roman par un écrivain inclassable. Bravo
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