Filip est lycéen, et vit dans une famille un peu excentrique, auprès de sa soeur, son père surnommé le Chef, sa mère au comportement d'oiseau, son grand-père Arnstein qu'il surnomme le Vieux : ce grand-père aux poumons malades qui n'en finit pas de mourir a quelque chose d'un peu effrayant.
Dans la maison voisine vit le grand-oncle de Filip, Truls. Les deux frères, Truls et Arnstein, ne se parlent plus depuis des années. Filip se demande bien pourquoi. Or justement, le Chef demande à Filip de passer un peu de temps auprès de son grand-père. le jeune garçon se met à rendre visite au vieil homme quotidiennement, avec de plus en plus d'enthousiasme ; lors de ces visites Arnstein partage avec son petit-fils ses souvenirs d'enfance : son père, le Kaiser (tiens-donc !) voulant endurcir ses fils alors que la guerre de 14 approche, les envoie passer l'été munis d'un sac de couchage, d'une canne à pêche et d'un couteau au bord d'un étang. Les deux frères sont alors âgés de 9 et 13 ans et malgré le froid et la faim, vivent des moments joyeux en totale liberté, apprenant à se débrouiller dans la nature comme de vrais Robinson. Mais c'est aussi un été où tout bascule, marqué par un drame familial... Je reste sous le charme de ce roman enchanteur d'une finesse exceptionnelle. Rien n'y est laissé au hasard, tout est lié et fait sens, à commencer par le prologue qui évoque le cycle de vie des éphémères, petit insecte dont l'importance sera capitale. Les résonances entre passé et présent sont évoquées au fil du roman, l'air de rien, il faut chercher les signes. La drôle de démarche de Filip qui ressemble étrangement à celle de Totem, le surnom des pères, le Chef ou le Kaiser...
J'ai beaucoup aimé la description des liens qui se tissent entre petit-fils et grand-père : une belle relation qui permettra à l'un de s'épanouir et à l'autre de partir en paix.
L'écriture poétique rend hommage à la nature, surtout dans les passages où les deux petits princes s'y épanouissent. le Lac au nom caviardé est un personnage à part entière, c'est lui qui ouvre et clôt le roman.
Ce fut une très belle découverte ; je ne manquerai pas de suivre l'oeuvre de
Lars Elling.