AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
3,68

sur 906 notes

Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Second roman de l'auteure que je lis et cela reste une belle impression. Certes, ce n'est pas un roman inoubliable ni extraordinaire, mais il se lit et bien et qui dresse un portrait d'une époque que l'on s'y croirait. Une ville de province dans les années 50, une terrible dispute parentale, le classicisme ambiant même dans les cours de l'école, les leçons moralisantes à tout va, le passage de l'enfance à l'adolescence. Bref, il y a tellement de choses dans un si court roman, mais c'est à chacun de les retrouver au cours de sa propre lecture. Je recommande !
Commenter  J’apprécie          40
Il est frappant de voir comment une vie peut se diviser en deux pour n'être que le reflet d'une scène de quelques minutes.
L'Avant est plein de conformité, le Pendant est brutal et l'Après est inévitable. le déterminisme effrayant de cette journée démontre la volatilité de notre tranquillité.
Mon seul petit reproche concerne la répétition de certains aspects de sa vie dans plusieurs de ses livres, cela donne l'impression de relire les mêmes passages.
Néanmoins, Annie Ernaux sait parfaitement poser les bon mots au bon endroit.
Commenter  J’apprécie          50
Dans ce court récit poignant, l'auteur nous raconte comment un beau jour de juin 1952 (le 15 juin exactement), son père a failli tuer sa mère. Elle allait avoir douze ans et a été marquée à jamais par la scène terrible à laquelle elle a assisté. Elle ne sera plus jamais la même ensuite.
Pendant toutes ces années jusqu'en 1997, date de sortie du livre elle s'est interdit d'en parler, même dans son journal intime. Mais depuis qu'elle l'a fait, elle ressent une sorte de soulagement comme si le fait d'en avoir parlé rendait l'événement banal. "Peut-être que le récit, tout récit, rend normal n'importe quel acte, y compris le plus dramatique", se demande-t-elle.
Elle se rend compte qu'au fil des ans, seule l'atmosphère de ce moment reste, elle n'a plus du tout les détails en tête sauf le déroulement de la journée avant et après.
Une scène improbable car ces parents étaient aimants et l'aimaient...mais c'est comme si son père avait ce jour-là disjoncté.
A travers les souvenirs des cette année-là, des photos (comme celle où elle est en communiante, celle prise lors d'un voyage avec son père vers Lourdes...), différents objets conservés comme des cartes postales, une trousse...elle tente de comprendre.
Elle va aller fouiller dans les archives pour consulter les faits divers de cette année-là, avant et après, elle va rassembler ses souvenirs qui lui reste du quartier qu'elle n'avait jamais quitté, de l'école privée où elle était scolarisée, listant ce qui était autorisé ou interdit à l'époque, la liste de ce qui était bien vu et mal vu à l'école privée, en ce qui concerne les lectures, les vêtements (la fameuse ceinture noire qui était à la mode et qu'elle n'aura pas le droit de porter car trop féminine), les mots, les films, les attitudes.
Peu à peu, elle nous explique pourquoi elle a commencé à ressentir à cet âge de la honte, un sentiment qui ne l'a plus quitté pendant des années.
La différence de classe est une violence. Il ne faut pas l'oublier.

D'une manière concise et très imagée, Annie Ernaux retrace dans ce récit autobiographique, sa vie avant et après cet événement marquant qui n'aurait pas du avoir lieu. Elle nous explique comment elle a appréhendé le monde ensuite, réussissant moins bien à ses examens, elle qui était brillante, et comment elle a éprouvé de la honte, se sentant seule et indigne par rapport à ses camarades.
Elle montre comment elle n'a pu ensuite que rêver d'un ailleurs plus beau où elle pourrait vivre autrement.
Ce que j'ai aimé, c'est qu'elle parle de cet événement au tout début du roman mais ensuite elle cherche à le relier aux événements de l'année, à la vie que ses parents ou elle-même avaient cette année-là. Elle cherche une raison rationnelle au comportement irrationnel de son père ce jour-là et à la mauvaise humeur de sa mère qui ne cessait de l'asticoter.
Le lecteur a toutes les armes pour comprendre pourquoi sa vie a basculé ce jour-là et déterminé ce qu'elle deviendrait.
Qu'il ait vécu ce sentiment de honte dans son enfance (peut-être pour des raisons différentes) ou pas, le lecteur ne peut qu'être touché par ce texte simple et direct, cette souffrance d'une jeune adolescente qui se croit seule au monde au point d'enfouir cet évènement au plus profond d'elle-même...car elle ne trouve pas d'explications rationnelles à cette scène qui a bousculé sa vie.
Ce roman est le second texte publié dans le recueil "Ecrire la vie".


Lien : https://www.bulledemanou.com..
Commenter  J’apprécie          30
C'était mon premier Annie Ernaux et ce ne sera pas le dernier !
J'ai beaucoup aimé ce récit autobiographique, écrit de manière surprenante, brute et touchante.
Le texte est d'une simplicité désarmante mais je suis restée accrochée à cette tranche de vie, cette fameuse année 1952 qu'elle nous décrit.
Les personnages et les lieux reprennent vie sous nos yeux. C'est comme mettre le nez dans une vieille boîte au fond d'un grenier, en sortir des photos et des carnets jaunis et découvrir les moments-clés d'une vie inconnue.
Un vrai plaisir de lecture et une folle envie de découvrir la vie de cette femme à travers ses nombreux écrits !
Commenter  J’apprécie          10
Qu'est-ce que le Moi? le Moi passé, celui dont on croit se souvenir, mais qui définivement n'est plus. Un événement précis du passé a-t-il vraiment eu lieu? Existe-t-il des preuves? Annie Ernaux a concervé deux photographies d'elle avant et après que son père ne veuille tuer sa mère, mais ces images se contredisent, se complémentent bien sûr; mais n'est-on pas trompé par ces vagues reflets d'une réalité si ancienne? Elle n'a parlé de cette scène à personne. Enfin non à y bien réfléchir elle en a parlé à un ou deux amants, mais l'écriture a ceci de bon que le papier ne peut répudier celui qui rédige un texte sur lui. La honte de vivre, de se souvenir, d'écrire une phrase qui relate cette tentative de meurtre est le sujet de ce très court livre. Cette vélléité d'assassinat est une madeleine, ce texte par son style décharné est à la fois une injure et un hommage à Proust. Je n'ai pas assez lu pour savoir s'il y a d'autres exemples en littérature de recherche aussi profonde de soi...
Commenter  J’apprécie          190
Bonjour amis lecteurs ! le Challenge du mois de Février était un prétexte parfait pour continuer ma découverte d'Annie Ernaux. En effet chacun de ses romans étant très court je n'ai eu aucun mal à glisser La Honte dans ma pile de livres à lire. Je dois avouer que ce livre m'intriguais, je me demandais quelle histoire pouvait bien se cacher derrière un titre comme celui là. Et après avoir lu la première phrase, je n'ai eu envie que de m'y plonger pour en savoir plus.

"Mon père à voulu tuer ma mère un dimanche de Juin, au début de l'après-midi." C'est ainsi que débute ce roman. Annie Ernaux revient sur cet événement de son enfance, en nous exposant cette scène sur un ton d'une banalité presque affligeante. A l'été 1952, son père à tenté de tuer sa mère, et c'est le point de départ de toute sa réflexion. Elle remonte alors le fil de ce qui a pu mener à cette scène. Elle évoque son enfance, son village, son école, ses parents. Mais aussi la hiérarchie sociale de son environnement, et la première fois qu'elle s'est rendue compte de sa propre condition. Vient ensuite la honte de la classe sociale dans laquelle elle vivait, et de ce que tout cela représentait pour elle à ce moment là. En tout juste 140 pages, Annie Ernaux raconte son quotidien de fille de commerçants, qui prend conscience que les origines sociales ont un impact sur notre vie, qu'on le veuille ou non.

Ce roman se déroule l'année des douze ans de l'autrice, et pour autant, bien que tous les faits relatés soit romancés, ils sont d'une précision impressionnante. Ses ressentis sont donc retranscrits à la perfection, au point de nous faire ressentir à nous lecteurs, cette honte dont il est tant question. Une nouvelle fois, la simplicité de cette plume à laquelle je m'étais attachée en lisant L'Evénement, a rendu mon expérience de lecture encore plus intéressante. En effet, Annie Ernaux ne fait que raconter ces petits moments de vie qui, mis bout à bout, ont fait ressortir les différences sociales qu'elle n'avait pas remarqué avant, mais la simplicité de son récit fait que l'on s'identifie d'autant plus facilement à son vécu. Au fur et à mesure de ma lecture j'ai donc, moi aussi, ressenti cette honte. Ce décalage entre la vie au foyer avec ses parents pour modèles, et la vie en société, plus précisément à l'école. Cet aperçu de la vie des autres, de ces modèles qui nous apparaissent soudain comme "mieux" que ce que l'on connait. Mais aussi la culpabilité d'avoir honte d'où l'on vient. Ce que j'aime particulièrement dans ce roman, et plus généralement dans les écrits d'Annie Ernaux, c'est cette façon qu'elle a de prendre du recul sur son propre vécu et de l'analyser. Cela crée des oeuvres à la fois simples dans le style, et riche dans le récit.

Je conclurai donc en disant que cette lecture n'a fait que renforcer mon envie de découvrir cette autrice à travers d'autres de ses oeuvres. Et bien évidemment je ne peux que vous inciter à les découvrir vous aussi !

Il ne me reste plus qu'à vous souhaiter de très belles lectures !
Commenter  J’apprécie          00
L'autrice nous raconte à brûle-pourpoint une scène d'une violente dispute entre son père et sa mère lorsqu'elle avait 12 ans. Son père aurait été en passe de tuer sa mère, aux yeux de Annie Ernaux, petite fille.

Cette scène lui est resté en mémoire depuis de très longues années et pour elle, le raconter comme ça la fait s'interroger sur ce qu'elle pense de cette scène, non pas en tant qu'adulte à notre époque, mais en tant que petite fille, dans une époque révolue.
Alors, elle se met à énumérer le contexte le contexte de l'époque pour essayer de comprendre ce qu'elle a pu ressentir : elle fait des recherches sur le contexte de l'époque (la manière de s'habiller de l'époque, les faits divers qui donnent souvent une idée de la manière de vivre de l'époque au-delà des faits en eux-mêmes, sa vie au lycée, l'environnement familial,…

On dit souvent qu'un enfant jusqu'à un certain âge met ses parents sur un piédestal, que ce sont les plus forts, et que ce qu'ils disent est à la limite parole d'évangile.
A quel âge avons-nous commencé à remettre en cause leur parole ? A quel âge nous nous sommes rendu compte que ce qu'on considère comme « normal » au sein de notre famille, peut être en décalage avec la vie d'autres familles ?

Il s'agit du deuxième roman que je lis de cette autrice. J'ai été en week-end dans une maison que nous avons louée et dans cette maison, il y avait ce roman. Je l'ai lu pendant ce séjour, en le savourant. Malgré le peu de nombre de pages, j'ai mis plus de 5 jours à le terminer. Comme le dernier roman « la place », j'ai mis du temps à entre réellement dans le roman, en partie parce que nous entrons dans le monde de l'autrice, si particulier. A priori, sa bibliographie est en grande partie constituée de ses propres mémoires et sur sa famille. Entrer dans ce monde est toujours particulier, parce que montrer la vie de famille induit nécessairement montrer les petits travers de chacun, et c'est ce qui me semble le plus gênant.

Malgré tout, j'ai beaucoup apprécié cette lecture car se remémorer le passé pour comprendre ce que l'on a pu ressentir à ce moment-là me paraît crucial avec du recul. Si on ne remet pas le contexte dans un évènement passé, on a d'autres perspectives qui peuvent se révéler fausses. Par exemple, après la période « metoo », en tant que femmes, on peut se retourner vers le passé et se dire que ce que l'on a vécu, et parfois oublié, ce n'était en fait pas normal. Ce n'est qu'un exemple qui n'est pas abordé dans le roman.

J'ai adoré ce livre. Je compte bien continuer à découvrir cette autrice.

Lien : https://letempsdelalecture.w..
Commenter  J’apprécie          50
Cela faisait longtemps que je voulais la lire. Au-delà de son prix Nobel, je l'ai beaucoup croisé en littérature et en sociologie, mais de plus j'habite juste à côté d'Yvetot où elle a vécu durant toute son enfance.

Donc premier livre que je lis d'elle et une grande claque. Je comprends l'intitulé de son prix Nobel, la façon qu'elle a à mettre des mots sur des faits sociologiques avec une touche littéraire bien à elle est remarquable. J'aime la façon dont elle cerne petit à petit ce sentiment de honte qu'elle a et que toute personne venant de milieux sociaux défavorisés ont en voyant des personnes au-dessus socialement.
Commenter  J’apprécie          90
Un incipit percutant qui m'a embarquée : "Mon père a voulu tuer ma mère un dimanche de juin, au début de l'après-midi". J'ai lu la suite d'une traite. Certes, c'est un texte court, mais j'ai plongé dans les souvenirs de cette petite fille de 12 ans, sans pouvoir m'arrêter.

"C'était le 15 juin 52. La première date précise et sûre de mon enfance".

Comme le texte est écrit en 1995, soit plus de 40 ans après cet épisode, le récit n'est pas linéaire. Il décrit des faits, des lieux, des tenues, rassemble des bribes de souvenirs et surtout, dresse la peinture d'une époque, d'un choix éducatif (école privé, religion catholique), d'un milieu social avec précision.

Au fil des pages, on comprend que cet évènement marquant est un agrégateur d'autres faits, d'autres ressentis, d'autres craintes. Une toile se dessine et se resserre, pour pointer le noeud central qui semble expliquer ce sentiment intrinsèque qui tenaille Annie Ernaux : la honte.

Cette honte profonde n'est-elle pas le fil directeur de l'ensemble de son oeuvre, de son choix de se raconter de manière brute et frontale ?

« J'ai toujours eu envie d'écrire des livres dont il me soit ensuite impossible de parler, qui rendent le regard d'autrui insoutenable. »
Comment définir la honte mieux que ça.
Commenter  J’apprécie          161
« Ici rien ne se pense, tout s'accomplit ». Un lieu, la mémoire. Ce que l'on vit, ce que l'on montre, ce que l'on cache, ce que l'on tait, ce que l'on crie. Et puis soudain, écrire. Un livre d'images. Ni pieuses, ni insupportables. Dire l'usage du monde. Instant d' une facture. L'instant d'une bascule. A douze ans, on est encore l'enfant, mais l'enfant qui déjà se sent, se désir adulte. La honte, cet instant qui échappe, qui vous échappe, qui s'échappe. Ne pas ressentir la honte eut été l'acceptation, l'allégeance, la fusion. La honte c'est une émotion de rupture. Qui provoque un sentiment de distanciation. La honte est toujours le signe d'une appartenance, d'une reconnaissance, d'un lien. Cela me fait honte, parce que cela me fait monde. On n'a jamais honte de ce qui nous est extérieur, de ce qui nous est indifférent. La honte : la fissure, un déchirement. Dire sa honte, c'est peut être ce qu'il y a de plus intime, de plus intérieur à soi. On partage ses souvenirs, mais peut-on partager sa honte ? Montrer sa défigure ? Alors on remonte les images. Ni archives, ni classement. Même pas une mise en lumière, ni même projection. On remonte la vie, de la source jusqu'au fleuve. Là où le particulier touche à l'universel opère la littérature.
Il faut que les vies s'inscrivent pour que les mots soient mis en commun.

Astrid Shriqui Garain
Commenter  J’apprécie          160




Lecteurs (2681) Voir plus



Quiz Voir plus

La honte (Annie Ernaux)

Quand a lieu la dispute entre le père et la mère de la narratrice ?

Le 15 mars 1952
Le 15 avril 1952
Le 15 mai 1952
Le 15 juin 1952

8 questions
10 lecteurs ont répondu
Thème : La Honte de Annie ErnauxCréer un quiz sur ce livre

{* *}