Il chaparda un exemplaire d’Ulysse, mais ce fut peut-être le seul ouvrage qu’il n’acheva jamais. « Quel est l’intérêt ? J’imagine que cela se voulait un peu un canular, de la part de Joyce. Il se taisait et laissait les gens rechercher un sens caché qui n’existait pas. Les pseudo-intellectuels aiment bien lancer ce titre, Ulysse, quand on les interroge sur leur livre préféré. J’ai refusé de me laisser intimider intellectuellement et de me sentir obligé de le terminer. »
Il nourrissait envers Thoreau un dédain abyssal – « il n’avait aucune perception profonde de la nature » –, mais il jugeait Ralph Waldo Emerson acceptable. « Il faut prendre les autres à très petites doses, écrivit ce dernier. Rien ne peut vous apporter la paix que vous-même. » Lecteur du Tao Te King, Christopher éprouvait avec ces vers un lien profond. « Celui qui sait marcher ne laisse pas de traces », dit le Tao.
Sur Robert Frost, son jugement était négatif – « Je suis content que sa réputation commence à décliner » – et il confiait que, lorsqu’il était à court de papier toilette, il déchirait parfois des pages des romans de John Grisham. Il ajoutait aussi ne pas apprécier non plus Jack Kerouac, mais ce n’était pas tout à fait vrai. « Je n’aime pas les gens qui aiment Kerouac », nuançait-il.
J'aime être seul. La course de fond en solo, sur de longues distances, constitue mon exercice préféré, et mon métier de journaliste et d'écrivain a souvent un côté asocial.
Notre santé est parfois le prix à payer de la sociabilité.
A l’intérieur d’un livre, la vie lui semblait toujours accueillante.
« Je n’ai jamais été seul », affirmait Christopher. Il était à l’écoute de sa propre présence plutôt que réglé sur l’absence des autres.
Toute sa vie, il s’était senti à l’aise dans la solitude. La relation avec les autres était si souvent frustrante. Chaque rencontre avec autrui lui faisait l’effet d’une collision.
Dans beaucoup de cultures, les ermites ont longtemps été considérés comme des êtres source de sagesse, comme des explorateurs des grands mystères de la vie. Dans d’autres, ils sont perçus comme maudits par le diable.
Ces ermites se demandent souvent comment le reste du monde peut demeurer aussi aveugle, comment nous réussissons à ne pas remarquer ce que nous infligeons à nous-mêmes.
"Plus vous comprenez, plus vous comprenez qu'il n'y a rien à comprendre, affirmait-elle. L'idée d'avoir à nous rendre quelque part, et d'avoir quelque chose à atteindre, est notre illusion fondamentale".
(Tenzin Palmo, née Diane Perry, religieuse Tibétaine, se retira à l'âge de 33 ans dans une grotte reculée au coeur de l'Himalaya, elle y resta 12 ans)
Il était déconcerté de ce que passer les meilleurs années de sa vie dans le box d'un bureau, de passer des heures, tous les jours, devant un ordinateur contre de l'argent, soit jugé acceptable, mais que se détendre dans une tente au fond des bois soit la marque d'un être dérangé. Qu'observer les arbres soit de l'indolence et que les abattre soit un signe d'énergie. Que faisait Knight pour vivre ? Pour vivre, il vivait.