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Critiques filtrées sur 4 étoiles  
Attaché culturel à l'ambassade de France au Caire entre 2000 et 2003, Paul Fournel note chaque jour de petits paragraphes sur ce qu'il voit, ce qu'il sent, ce qui le surprend, ce qui l'enchante, ce qui le rend disponible aux variations du lieu et du temps.
« Le Caire fabrique du discontinu, de l'alternatif. La ville envoie des impulsions et, même si elle parait éternelle, elle dicte le fragmentaire, le transitoire. »
Paul Fournel, lui aussi, va décrire le Caire en discontinu, par petite touches, dont je vais seulement vous donner un aperçu, avec l'espoir que les futurs voyageurs suivant Flaubert et l'auteur lisent ce livre.
Avec humour, il nous présente le « Le ministère des Affaires étranges » qui force ses adeptes à se piquer « selon une longue liste établie par des savants eux-mêmes piqués ; il nous apprend à nous garder des moustiques, des tarentules, des jeunes filles impures et des cobras. Il ne veut voir qu'une seule tête, et en pleine forme. »
Il partage son appartement avec deux geckos, dont il analyse les comportements, et dehors, les chats qui se reproduisent, les voitures déchainées, les cent mille taxis qui se percutent,
la danseuse du ventre qui s'ennuie, elle est bulgare, faut dire, les enfants pieds nus portant des plateaux de pains tout chauds, l'iftar ou rupture du jeûne, le troc, les sourates du Coran toujours présentes, la haine d'Israël et des hébreux, les vents brûlants, les policiers affalés sans travail.
Un agent de la sécurité de l'État censure des textes qu'il juge négatifs lors d'une opération culturelle française. Puis revient le lendemain, pour lever la censure : ce sont des textes de Naguig Mahfouz, prix Nobel, alors le censurer, lui, pas question.
« L'État égyptien et les religieux menacent Naguib Mahfouz directement : il aurait signé dans les années quatre-vingt un contrat autorisant la traduction d'une partie de son oeuvre en hébreu. « Si cela est vrai, disent les autorités, il faudra en tirer les conséquences. »
Bien entendu, on ne touchera pas un poil du vieux Mahfouz (il a eu sa dose), mais tous les micro-Mahfouz, tous les apprentis Mahfouz ont le petit doigt sur la couture du pantalon. »

Beaucoup de femmes sont habillées de noir du haut en bas, avec gants et chaussettes assorties, et lunettes de soleil : commentaire de Paul Fournel :
« Les Égyptiens qui ont encore envie d'en rire ont trouvé un nom pour les femmes noires, celles qui sont bâchées de la tête aux pieds, qui portent des gants noirs et des chaussures noires. Ils les nomment les « boîtes aux lettres », à cause de la minuscule fente par où elles peuvent voir et par où on leur glisserait volontiers des messages.
Celles que je préfère sont les boîtes aux lettres à lunettes. »
Même sur les plages, elles restent bâchées.

« Ecran total », commente l'auteur, avec son humour qui jamais ne juge, tellement l'hilarité provoquée par une culture différente est effectivement hilarante. Et a le droit d'exister.
« Record battu : j'ai vu une boîte aux lettres à lunettes avec le voile noir par-dessus les lunettes. Prudente, elle marchait avec la main posée sur l'épaule de son mari, qui pavanait sa barbe dans la ruelle.
Il y a quelque profondeur à porter des lunettes pour y voir clair et à les voiler ensuite pour y voir goutte. Cela devrait logiquement souligner quelque contradiction dans le système, mais je crains bien qu'au mieux cela ne lance une mode. »

Autre spécificité des Égyptiennes : elles se couvrent d'or, y compris dans leurs cheveux et sur les chevilles : autant avoir sur soi sa fortune, car elles peuvent être répudiées en quelques minutes.
Ce livre pour donner une idée du Caire quotidien, loin des pyramides, avec l'art de conclure en quelques mots montrant non sa distance, au contraire, sa manière intelligente de comprendre et d'ironiser ; « pas énervés, mais nerveux. »
« Après la suppression de la peine de fustigation : on ne badine plus avec le fouet. »
Bien entendu, Paul Fournel est un adepte de l'Oulipo de Raymond
Queneau. Ceci explique cela.
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