Le sujet abordé par
Patrice Franceschi est complexe, celui du futur immédiat, c'est-à-dire, celui qui se déroulera d'ici quelques décennies. le jeu peut être séduisant, or il est facile de tomber dans le cliché, voire le ridicule. Alors, avant d'aller plus loin, je trouve que l'exercice a été bien mené. On est pas dans le chef d'oeuvre de l'anticipation (Fahrenheit 451,
1984 ou La Planète des singes), mais la lecture n'est pas désagréable.
On a cette sensation, durant la lecture de ces histoires relativement courtes, d'être plongé dans l'univers, devenu familier, de Black mirror. Un univers dans lequel la surveillance est omniprésente et où l'avenir ne peut être que sombre.
Les premières histoires nous plongent dans cette atmosphère étrange. Celles-ci se terminent d'ailleurs tel un couperet, laissant le lecteur un peu désarmé.
Dans d'autres histoires, on y voit les conséquences de nos inquiétudes actuelles telle la multiplication effrénée de nos déchets. Qu'allons-nous en faire ? Une île, voire même un continent. Faire dans l'anticipation, c'est d'ailleurs une manière de critiquer notre présent et d'exposer, avec exagération, nos peurs.
Dans ces histoires, on y discute également avec une intelligence extraterrestre. Je trouve cette partie là un peu ratée car elle sort du cadre des futurs possibles.
Les dialogues, sont souvent un peu niais « T'es vraiment fortiche, mon gros sucre d'orge » (p.91). Je trouve qu'ils ne collent pas au registre de la narration. Autre exemple « Vous filez un mauvais coton, vous savez ? » (p.154). Bof...
Ce monde, hostile, dans lequel les hommes auraient abdiqué est pourtant combattu par une société parallèle, le « Réseau
Sénèque ». Je dois d'ailleurs avouer que les noms choisis sont plutôt bons, ce qui est relativement difficile dans les romans d'anticipation je trouve. On voit, à travers ce scénario, l'ombre de
George Orwell. Cette société secrète, car divergente, s'oppose aux Nations Unies Universelles, disposant d'une police et d'une justice universelle oeuvrant pour démasquer tout esprit rebelle.
L'auteur s'est évertué à y intégrer chaque nation dans ces histoires, à travers les noms des personnages par exemple, même celles qui, aujourd'hui, ne pèsent pas lourds sur la scène internationale.
Deux dernières histoires viennent clôturer cette fresque futuriste, celle d'un Paris en proie à une guerre civile multidimensionnelle puisqu'on y retrouve des groupes nationalistes, religieux, genrés. Chaque groupe occupant un quartier de la capitale et chacun se livrant à une guérilla sans merci.
Je n'évoquerai pas la dernière histoire pour ne pas dévoiler la fin du livre, je laisserai les lecteurs la découvrir et en juger par eux-mêmes.
Dans l'ensemble, le livre se lit plutôt bien. le moment est agréable tout comme la lecture. Je reprocherais à l'auteur d'avoir fait dans le très (trop) conventionnel. D'être resté trop proche du monde actuel en poussant que trop légèrement le curseur vers un futur trop probable (hormis la présence d'extra-terrestres). C'est le risque pris lorsqu'on aborde le futur immédiat. de manquer d'audace et d'originalité...