Sur une plage , quelque part en France, une
baleine blanche s'est échouée.
C'est le seul élément de la courte nouvelle de
Paul Gadenne, mais quelle nouvelle!
Où l'on découvre une bande de jeunes gens engourdis:"nous étions plusieurs à nous être réfugiés là, dans ce petit coin où nous pensions être oubliés, et nous restions écroulés sur le velours, dans un luxe bizarre de cristaux et d'appliques, nous protégeant, derrière une tenture à emblèmes.....ou attendant , peut être, qu'on nous annonçât une lueur sur la mer."
La veuve du capitaine, "femme assez mystérieuse et de beauté égale", leur demande s'ils ont entendu parler de la
baleine blanche échouée sur le rivage:
"Une masse blanche qui brillait comme une carrière de marbre".
Très vite, toute la ville ne parle plus que de cela.
Pierre et Odile, adolescents du cru, décident d'y aller voir de plus prés.
Afin de mieux comprendre ce secret enfoui, " ce trait jeté en travers de la plage comme une rature".
Pour cela, il leur faut se rendre sur la grève, entre la falaise immobile et les eaux en mouvement." Nous fîmes lentement le tour de la merveille. Elle pesait sur la plage de tout son poids, comme si elle avait décidé d'appartenir dorénavant à la terre- ainsi que lui appartenaient ces rochers bas et anguleux, ces maigres plantes si raides, qui derrière nous étaient plaqués sur le schiste, et que la brise était bien à elle.L'animal tout entier nous mettait ainsi à l'épreuve. Car son aspect était celui de la pierre: c'était une hypogée dont le marbre aurait eu des tendresses de fleur."
"C'était un blanc sans lumière, un blanc gelé, entièrement refermé sur lui même,elle était blanche, d'un blanc fade, comme le blanc du lait épanché...ce blanc était bien à elle,tournant le dos à toute gloire, avec une résignation à peine pathétique, vraiment le blanc d'une
baleine qui ne faisait pas d'histoires, qui fuyait l'éloquence et défiait terriblement les mots, une
baleine d'un naturel trés simple........"en somme, très proche- de nous- une de ces
baleines qui font penser:" Dire que nous aurions pu faire une si bonne paire d'amis!."....
Un texte lumineux et inépuisable, à lire et à relire, une écriture dense d'une pureté totale qui force le respect,un bijou de la langue française où chaque mot compte, un texte allégorique qui nous fait nous interroger et réfléchir à propos de nos destins: "
Un texte d'une sensibilité rare dont on désirerait citer chaque élément dans la collection : Les Inépuisables!, publié en 1949,dans la revue Empédocle
On ne peut en dire trop ......