Le soleil des Scorta, c'est le soleil qui brûle les collines des Pouilles où se situe le petit village de Montepuccio.
C'est aussi le soleil qui brille dans le coeur des Scorta, lignée maudite de «culs-terreux», née d'une erreur, engendrant une malédiction qui se transmet de génération en génération depuis Luciano Mascalzone.
Après 15 ans de prison, Luciano le brigand revient à Montepuccio pour «prendre son dû» auprès de la femme de ses rêves, bien conscient que son acte signera son arrêt de mort. de facto, lynché par les habitants, Luciano ne survit pas.
L'enfant qui naît de cette étrange union sonne comme une punition céleste pour les Montepucciens. Destiné à être occis, il fut pris en pitié par Don Giorgio, le prêtre du village qui le fait élever dans une bourgade voisine.
C'est ainsi que naît la légende de Rocco Scorta Mascalzone qui, fidèle à son père, devient brigand, voleur et violeur mais aussi et surtout immensément riche et puissant.
Des sentiments contradictoires assaillent dès lors les Montepucciens. La haine, la peur et le mépris laissent place à une étrange fierté, induite par le pouvoir de l'argent qui change ce mécréant en homme respectable.
Affichant ostensiblement sa nouvelle condition de notable, Rocco se marie avec « la Muette » qui donne naissance à 3 enfants dont Carmela, Giuseppe et Domenico rejoints par Raffaele, leur ami de toujours.
Au seuil de sa mort, Rocco lègue sa fortune à l'Eglise, condamnant de ce fait ses enfants à la misère car les Scorta « détruisent ce qu'ils aiment ».
A plusieurs moments-clés, on sent que leur destinée aurait pu être différente et basculer dans la gloire mais que peut-on faire face à la fatalité du destin qui semble inéluctable ? On se met à espérer qu'un Scorta puisse un jour se soustraire à cette terre misérable où rien ne pousse et briser ainsi la malédiction.
L'écriture poétique, profonde et bouleversante de
Laurent Gaudé nous fait ressentir la puissance du récit sous la chaleur écrasante du soleil du Sud «qui fait même suer les lézards ».
Récompensée par le prix Goncourt en 2004, je vous recommande cette magnifique fresque familiale qui s'étend de 1870 à nos jours et nous est contée par Carmela la doyenne sur le ton de la confession à Don Salvatore.