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Spirite est une longue nouvelle écrite dans un style ronflant, baroque et finalement lourd, comme on en rencontre parfois dans la littérature du XIXème siècle.
Un dandy parisien, Guy de Malivert, est soudain abordé par un esprit, alias Spirite, " l'âme " d'une pauvre vierge éperdument amoureuse dudit Guy et qui s'est laissée mourir car croyant son idole amoureux d'une autre.
La pauvre petite était un canon de beauté mais s'est retirée dans un couvent sans même avoir jamais connu ni l'amour ni les plaisirs de la vie.
Elle revient donc en esprit conquérir son hidalgo pour lui faire connaître son merveilleux paradis.
Bref, du cul-cul à souhaits, de bons gros clichés du romantisme et du gothique à la pelle. À oublier assez vite à moins d'aimer vraiment les violons qui couinent ou d'avoir quatorze ans et toute sa naïveté (en outre comme l'a si bien énoncé Montherlant dans La Reine Morte : « Je hais le vice et le crime. Mais, en regard de la naïveté, je crois que je préfère encore le vice et le crime. »).
En somme, une fois encore, vous me direz : " Ceci n'est que votre avis, c'est-à-dire, pas grand-chose ". Et vous aurez raison...
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Plusieurs présages semblent conseiller à Guy de Malivert de se détourner de Mme d'Ymbercourt.
Bien qu'elle soit d'une beauté conforme aux standards, d'une réputation intacte et d'une fortune considérable, bien que leur entourage commun les perçoit comme officieusement mariés, aucune passion n'anime le coeur impassible de Guy envers elle.

Ce jeune homme beau, élégant et riche dédaigne les mondanités et ne privilégie que son confort et sa tranquillité ; reclus dans une paisible et inoffensive misanthropie, il flâne et laisse l'oisiveté inspirer sa vie.

Guy fréquente néanmoins assidument les salons de Mme d'Ymbercourt, comme par une sorte d'obligation ou de contrainte naturelle, mené par la force de ses mauvaises habitudes ; il y participe sans réelle conviction, tout en restant trop attaché à la bienséance pour décliner les invitations.

Cependant, un soir, il compose avec une étonnante spontanéité une lettre à Mme d'Ymbercourt, où il exprime clairement sa lassitude des jeux de salons et représentations fades.
Il est d'une telle franchise dans ses propos, d'un tel aplomb qu'il lui paraît improbable d'en être l'auteur : quelque chose de supérieur lui aurait dicté ces mots et bien qu'il rétracte l'envoi de sa lettre, il en reste boulversé.

D'ailleurs, chaque fois qu'il pénétrait chez Mme d'Ymbercourt, il percevait systématiquement des soupirs et des avertissements brefs d'origine mystérieuse.

L'un de ses amis eut même une attitude étonnante de prophète, l'avertissant plus explicitement : il ne devrait pas s'engager en amour, du moins, pas dans ce monde terrestre, et patienter pour un signe venant de l'extra-monde « Les esprits ont l'oeil sur vous, » lui dit-il.

Déboussolé, se recentrant chez lui, Guy contemplait d'un air distrait son miroir, comme pour mieux sonder ses propres énigmes lorsqu'il fut soudainement intrigué par une seconde silhouette qui se dessinait.
Une forme féminine éthérée apparut dont les contours se précisaient progressivement : était-ce le fruit de son délire, d'une imagination déséquilibrée ?

Il l'ignorait, mais se sentait captivé, happé et déjà envoûté par cette entité qu'il nomma « Spirite ».

Poussé par la curiosité d'un homme qui n'a plus rien à perdre, l'appel de cet « extra-monde » lui paraissait infiniment plus fascinant que le monde visible, qu'importe même que cet inconnu soit périlleux pourvu qu'il puisse se détacher de sa somnolente routine qui ne l'inspire plus.

Submergé par toute cette soudaine volupté ésotérique, Guy cherche à apaiser ses émotions tumultueuses en allant parcourir le bois de Boulogne en hiver, contemplant depuis son fiacre transformé en traineau le « bal masqué de la glace », le ballet des patineurs.
Mais où qu'il soit, il ne cesse d'être tourmenté par Spirite, qui elle aussi se promène dans un fiacre élégant conduit par un cocher. Reconnaissant vaguement ses traits, il se lance dans une course effrénée pour la rattraper, mais l'attelage de la mystérieuse dame s'estompe soudainement, laissant Guy suspendu entre la confusion et l'émerveillement.

Mme d'Ymbercourt, également présente dans le parc, s'est sentie trahie et blessée après avoir observé cette folle poursuite sur la neige.
Spirite s'est malicieusement débarrassée de son ennemie terrestre ; elle peut dorénavant se confier sereinement : elle expose ses mémoires à Guy qui retranscrit ses pensées par la plume dans une lettre.

Spirite, une jeune fille d'une beauté innocente et en quête d'un idéal romantique, avait souvent croisé le regard de Guy ; elle l'admirait depuis son enfance, se délectait de ses écrits, de ses aventures lointaines et de tout ce qui se disait sur lui.
Elle le voyait fréquemment, bien que toujours de façon éphémère, que ce soit au théâtre, au bois de Boulogne ou à l'opéra.
Leur interaction demeurait pourtant trop lointaine et jamais elle n'était reconnue : Guy, absorbé et nonchalant, préférait les discussions avec ses amis plutôt qu'aller valser avec des inconnues.

L'étrange chagrin qu'éprouve Spirite face à cet homme fatalement inaccessible, avec qui elle n'a jamais échangé un seul mot, ne fait que s'approfondir… Chaque tentative infructueuse la laisse plus frustrée, la menant ainsi à se sentir entièrement abandonnée, isolée et incomprise.

Après une éducation au couvent, Spirite, à 18 ans, s'était lancée avec engouement dans l'aventure des bals et salons parisiens, mais n'y avait rencontré qu'une profonde déception envers l'être qu'elle désirait.
Ainsi, faute de reconnaissance dans la sphère parisienne, le retour au bercail par une dévotion s'imposait à elle comme unique refuge.

Elle se cloître ainsi spontanément dans un austère couvent, dépouillé de toute singularité et de vie, où son sacrifice et son renoncement à toutes voluptés terrestres sont symbolisés par une scène où des soeurs lui coupent les cheveux.

Résignée et affaiblie par la rigueur de la vie claustrale, Spirite se rapproche avec curiosité de la mort qu'elle perçoit comme une simple transition, une renaissance d'espoirs nouveaux vers l'au-delà.

Désormais débarrassée de sa carcasse terrestre et infiniment libre, Spirite, sous sa forme métaphysique, explore les confins de l'univers avant d'épier la Terre pour sonder les profondeurs de l'âme de Guy.
Constatant qu'il n'aimait personne, elle voulut se l'accaparer depuis l'au-delà : d'abord par des signes perturbants, ensuite par une apparition, et enfin par une présence constante.

Obnubilé et émerveillé par cette femme qui a tout sacrifié pour lui, Guy renie peu à peu son monde et voue son âme à la sienne.

Sous l'influence envoûtante de Spirite, chaque instant s'embellit, est magnifié : Guy, noyé dans une ferme solitude féérique, entreprend un long voyage en Grèce, se perd dans la contemplation méditative de chaque site ; ses regards plein de rêveries, animés par un amour extatique et une curiosité insatiable pour les mystères que recèlent les panoramas terrestres.

Surpris et tué par des bandits lors de son périple, il décède, mais sa mort se transforme en libération spectaculaire.
Son essence métaphysique, d'une blancheur éblouissante, se détache de son corps, et cette apparition soudaine effraie les bandits ainsi que le guide qui accompagnait Guy.
Dans une acceptation sereine de cette mort inattendue, Guy s'unit immédiatement avec l'âme de Spirite, leurs essences se mêlant en une harmonie parfaite :

« Au centre d'une effervescence de lumière qui semblait partir du fond de l'infini, deux points d'une intensité de splendeur plus grande encore, pareils à des diamants dans de la flamme, scintillaient, palpitaient et s'approchaient, prenant l'apparence de Malivert et de Spirite.
Ils volaient l'un près de l'autre, dans une joie céleste et radieuse, se caressant du bout de leurs ailes, se lutinant avec de divines agaceries. »

Toutes les descriptions sont précisément peintes avec grâce, romantisme et harmonie : de la sphère parisienne, des boulevards parisiens et du Bois de Boulogne enneigés, aux apparitions mystiques de l'extra-monde, jusqu'aux subtiles sensations de l'au-delà lui-même.

Le monde réel et imaginaire finissent par se confondre : Guy voit ainsi notamment le Parthénon sous sa splendeur originelle, avant de s'élancer définitivement vers l'au-delà sans le vouloir mais en accueillant cette transition d'une joie sereine.

J'ai beaucoup apprécié ce roman dangereux et envoutant : un danger séduisant, une tentation nous aspirant vers des sphères inconnues, à nous déraciner lentement et inconsciemment au risque de mourir nous même, lecteurs, comme le personnage principal.

C'est une sorte d'autobiographie spirituelle où Gautier nous confie sa lassitude quant aux voluptés terrestres, sa soif de l'inconnu et de l'au-delà, ainsi que sa quête d'un amour pur qu'il regrette de ne pas avoir lui-même rencontré.
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"Spirite", ou "Spirit" à l'origine, est l'histoire d'un amour d'outre-tombe comme Gautier en a tant écrit. Ce thème se rencontre souvent dans ses contes marqués par le Romantisme : deux amants parviennent à s'aimer par-delà des obstacles infranchissables du temps et de la mort. Si la trame du récit de cette longue nouvelle n'étonnera pas un lecteur de Gautier, les splendeurs du style, en revanche, arrêteront son attention. D'une part, le texte est plus long que celui d'Arria Marcella, par exemple, ou de La Morte Amoureuse : l'art verbal prodigieux de Gautier trouve plus d'espace pour se faire admirer. On est plus près de la poésie descriptive que de la prose narrative, et les pages de Gautier pourraient se diviser facilement en morceaux, comme des poèmes en prose de son contemporain, admirateur et quasi-disciple Baudelaire. Son style ne paraîtra "ronflant" qu'à des lecteurs habitués aux misères de la prose française d'aujourd'hui, où la pauvreté, l'ignorance linguistique, voire le ressentiment contre la beauté de la langue, passent pour de la sobriété. Un tel lecteur, déshabitué du luxe littéraire et de la jouissance des images, risque de prendre ces qualités pour de l'emphase. Malgré tout ce qui les sépare, on rappellera la dédicace des Fleurs du Mal à Théophile Gautier : "Au poète impeccable, au parfait magicien ès lettres françaises, à mon très cher et très vénéré maître et ami Théophile Gautier, ... je dédie ces fleurs maladives".
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En deux mots : fantastique et romantisme. Personnellement, je trouve l'écriture de Théophile Gautier sensationnelle. Dans ''Spirite'', un de ses romans peu connu, elle atteint parfois des sommets d'ingéniosité et de poésie. Il y fait une impressionnante description de l'au-delà. C'est une histoire assez simple et tranquille, n'allez pas y chercher beaucoup d'action. Mais quel talent, j'admire !
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Mon dieu quel chef d oeuvre littéraire! Guy de Malivert cet être pragmatique et terre a terre voit sa conception des choses remise en question lorsque suite à plusieurs manifestations étranges, il va perdre le contrôle en tombant amoureux d un fantôme
Cette histoire s accompagne de voyages peints magnifiquement sous la plume de Gautier ... On ne s ennuie jamais et le bouquet final lors de la "fusion" pourrait se métaphoriser dans l art pictural à travers les tableaux symbolistes. Un régal !
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Comme toujours chez Théophile Gautier, l'atmosphère est reine dans ce roman à la frontière du monde des vivants.
Le héros, Guy de Malivert, verra son existence bouleversée le jour où il tombera amoureux d'un fantôme. En distillant habilement divers indices quant à son charmant esprit, Gautier entraîne le lecteur dans une dimension particulière. Ce dernier avancera aux côtés du héros, jeune homme perdu, pas encore mort mais plus tout à fait vivant.
Portée par le charme incontestable de la narration, l'intrigue se dénouera sans lassitude aucune, jusqu'au dénouement, certes prévisible. Mais pouvait-il en être autrement ?
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La comparaison avec Balzac fait mal à Gautier... Certes, les oeuvres de la section des Études philosophiques évoquant le mystique suédois Swendenborg font parties de celles que j'ai le moins appréciées dans l'ensemble de la Comédie Humaine, par ignorance sans doute des principes philosophiques fascinant tant Balzac et ses personnages, mais aussi par manque d'intérêt et par l'incompréhension des intentions de l'auteur de relier ces thèmes à son oeuvre magistrale.
Mais chez Gautier, le mysticisme et la croyance aux anges ne sont qu'un prétexte pour une histoire d'amour fantastique d'une mièvrerie bien trop dégoulinante pour moi - le personnage principal ne pense jamais au désir ? !
Beaucoup de lieux communs qu'on retrouve dans tous les romans du XIXème sur l'éducation des jeunes filles, le premier bal, la prise de voile... qui m'ont donc ennuyée. La femme du monde coquette n'est, elle, qu'une pâle comparaison face aux héroïnes de caractère De Balzac - j'y reviens...
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Théophile Gautier (1811-1872) est un poète, romancier, peintre et critique d'art. Partisan du romantisme, populaire par ses romans historiques (Capitaine Fracasse), il devient l'un des théoriciens de « l'art pour l'art » et l'un des maîtres de l'école parnassienne qui défendait cette thèse. Spirite est un roman fantastique, d'abord publié en feuilleton en 1865 puis en volume en 1866.
Guy de Malivert est un jeune homme aisé, célibataire mais très sage. Les salons et la bonne société parisienne l'ont marié par avance à la comtesse Cécile d'Ymbercourt, une jeune veuve « assez belle, assez riche, assez à la mode » et celle-ci sensible au charme de Guy tout en ayant eu écho de la rumeur attend en vain une demande officielle. Las, si notre Guy aime se rendre à ses invitations, il n'en est pas amoureux. Un soir se décidant à lui écrire un billet d'excuse pour ne pas venir la voir, sa main prise de fourmillements, écrit un texte qu'il découvre au fil de sa plume tandis qu'un soupir souffle à son oreille. Un membre de son club, le baron de Féroë, « homme à la mode, il vivait d'une façon mystérieuse », va à demi-mots, conseiller Malivert, lui rappelant souvent « que les esprits ont l'oeil sur vous ».
Roman d'amour mais d'un amour étrange puisque Guy est la « victime » d'une passion folle nourrie pour lui par une très jeune fille décédée et décidée. Par ses manoeuvres elle tente d'éloigner la comtesse d'Ymbercourt des pensées du jeune homme et de se rapprocher pour se faire aimer, du jeune homme.
Comme vous ne lirez pas ce livre j'en révèle l'épilogue (il est encore temps de partir… ?) : la morte va parvenir à ses fins et Guy en être très amoureux mais comment unir un vivant et un esprit ? le suicide, envisagé, ne réglerait pas le problème, au contraire. Finalement, une rencontre malheureuse et mortelle avec des brigands lors d'un voyage en Grèce va apporter la délivrance à Guy, les tourtereaux « heureux à jamais ; leurs âmes réunies forment un ange d'amour. »
Dans le genre c'est pas mal, de belles phrases longues en bouche, seul bémol hélas, la jeune morte devra s'identifier auprès de Guy, expliquer d'où elle tient son amour pour lui et sa propre vie d'humaine, et ce sont de trop longues pages qui n'en finissent plus, le problème avec les romans d'alors ayant débuté par être des feuilletons.
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Un livre agréable

Résumé: invité à prendre le thé chez Mme d'Ymbercourt, une jeune veuve dont il est « médiocrement amoureux », Guy de Malivert décide de lui écrire un billet d'excuse. À sa grande surprise, c'est sa main, prise de fourmillements, qui écrit la lettre. Un soupir venu de nulle part, un souffle à son oreille, Malivert vient d'entrer dans le monde du spiritisme…
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