Ce que tu as fait de moi

J’ai tout à coup réalisé que nous n’étions pas là pour parler boulot ou faire connaissance, comme il l’avait prétendu.

Il voulait me sauter, voilà la vérité.

Parce que je suis une femme, parce que je venais d’arriver, parce qu’il avait du pouvoir.

Ça m’a fait mal.

C’est vrai que ça peut paraître exagéré, mais ça m’a ulcérée. Ce n’était pas la première fois que ça m’arrivait… Pendant mes études de droit, j’ai fait quelques petits boulots et j’ai dû repousser les avances de mes chefs à plusieurs reprises. Je crois que, quand on est jeune et plutôt pas mal, baisable comme ils disent, on rencontre souvent ce genre de problème. J’ai croisé des tas de filles à qui c’est arrivé.

Plus je la regardais, plus je sentais monter un désir violent ; si violent qu’il en devenait douloureux. Plus je la regardais, moins je me souvenais que j’étais marié, que j’avais des enfants.

Pour la première fois depuis quinze ans, je venais d’oublier ma vie.

Les dealers, c’est comme le chiendent : plus t’en arraches à la terre, plus il en repousse partout. Faudrait un bon désherbant style napalm pour éradiquer toute cette merde ! 

Je le trouvais beau, c’est vrai. Beaucoup de charme. Mais surtout… je l’admirais. Intelligent, brillant, charismatique… Il était une sorte de modèle, le flic que je voulais devenir. Parce que, en plus d’être efficace, il était humain et sensible.

C’est vrai, on a toujours peur quand on reçoit un nouveau. Parce que si on tombe sur un tocard, on est obligé de se le coltiner malgré tout.

À ce contact, généralement anodin, une onde de choc m’a secoué de la tête aux pieds. Un truc incroyablement fort. C’était comme si… Comme si la terre tremblait. Comme si mon horloge interne se déréglait. Comme si…

À 15 ans, contre l’avis de mes parents, j’ai pris une décision irrévocable ; je serais flic et rien d’autre. Le lycée, le bac, la fac de droit, le concours de commissaire… J’avais dessiné sur la carte de ma vie un véritable parcours fléché dont je pensais que rien ne pourrait me détourner. Sauf qu’à 17 ans, mon chemin a croisé celui d’un homme qui en avait 25. Un mouvement du corps, un regard, un sourire. Une sensation si forte qu’elle se fait immédiatement certitude.

Lui et personne d’autre.

« Chaque cœur chante une chanson inachevée, jusqu’à ce qu’un autre cœur la chuchote en retour. »
Platon 

Tes yeux ne voient plus que moi, plus qu’elle. Ton cœur ne bat plus que pour moi, pour elle. Ton instinct te guide inexorablement vers moi, vers elle.Ta voix n’est plus qu’un requiem. Pour moi, pour elle.