Henri Guaino, ex-plume de Nicolas Sarkozy, a retrouvé sa liberté de parole dans son nouveau livre, et ça dépote.
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La jeunesse qui a 20 ans aujourd'hui ne le sait pas encore, mais les désordres du monde n'ont jamais été aussi grands depuis la fin de la Seconde Guerre Mondiale. Elle n'a connu que ces désordres, on lui a dit que c'était le Monde Nouveau qui était en train de naître et elle l'a cru. On lui a dit que c'était la "destruction créatrice" et elle l'a cru. On lui a dit que dans ce monde il ne tenait qu'à elle d'accomplir tous ses rêves et elle l'a cru. Elle n'avait pas le choix : la jeunesse quand elle commence sa vie d'adulte est obligée de prendre le monde qu'on lui a préparé. Mais elle apprendra bientôt que le monde qu'on lui offre, sous les apparences du neuf, est un vieux monde ou les rêves n'ont pas leur place.
C'est l'un des grands paradoxes de notre époque : le monde politique se voit accusé d'avoir confisqué la souveraineté du peuple à son profit, alors, et c'est beaucoup plus lourd de conséquences, qu'il a renoncé à l'exercer au profit de pouvoirs anonymes tels que les marchés financiers, les autorités indépendantes, les juridictions, les experts, les bureaucrates de toutes sortes auxquels personne ne peut demander de comptes.
C'est un phénomène sans précédent qui touche toutes les démocraties occidentales quelles que soient leurs institutions, une entreprise de déconstruction inédite : la dépolitisation de la société et de l'économie par les nouvelles religions et les nouveaux catéchismes de l'humanité.
L'intelligentsia occidentale semble céder une fois encore, mais avec une intensité peut-être jamais atteinte, à l'illusion que l'homme aurait changé au point que l'Histoire ne pourrait plus être tragique, et qu'il y n'y aurait plus lieu dès lors de s'imposer l'angoisse du choix, ni de se préoccuper d'autres choses que de rechercher sa propre satisfaction.
Le temps du tragique passé, voici celui de la jouissance sans entrave, de la jouissance comme seule et unique réponse à toute question existentielle. Mais jouissance égoïste qui n'est à la portée que du petit nombre qui a les moyens de s'extraire de la dureté de la vie. La frustration des autres, du plus grand nombre, montrera peut-être demain que le tragique n'appartient pas du tout à un passé révolu.
Au croisement entre l'immanence du marché qui dissout l'humanité de l'Homme dans la marchandisation et du dévoiement d'un universalisme qui veut à tout prix faire rentrer le monde dans l'idée pure de la concurrence, la mondialisation s'impose à la fois comme le retour de la fatalité et comme une religion révélée.
Ils veulent tuer l'Occident...
Ils veulent fabriquer un homme nouveau coupé de son histoire, de ses racines intellectuelles, morales, spirituelles, de sa civilisation.