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Vincent-Mansour Monteil (Éditeur scientifique)
EAN : 9782742718191
308 pages
Sindbad (04/06/1999)
4.15/5   10 notes
Résumé :

Hâfez de Shirâz est, avec Omar Khayyâm, le poète persan le plus célèbre, le plus aimé, le plus récité : même les illettrés en savent de longs fragments par coeur. Il est mort, voici un peu plus de six cents ans, en 1389, dans sa ville natale. Poète d'une époque où le persan était la lingua franca de l'Asie : Iran, Afghanistan, Inde musulmane, Mongolie et Chine, Hâfez a ét... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (1) Ajouter une critique
Suite à un voyage en Iran où j'ai rencontré des gens formidables et visité des sites extraordinaires et, parmi ceux-ci le mausolée de Hafez Shirazi où on m'a conté son histoire et celle des Iraniennes et Iraniens qui viennent là, pour réciter ou chanter ses poèmes. Puis l'envie de découvrir un peu plus son oeuvre.
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Citations et extraits (22) Voir plus Ajouter une citation
Tu es comme le matin. Je suis la lampe qui brille,
Seule, à l’aube. Souris-moi, et je donnerai ma vie.
Tu es le deuil de mon cœur, pour les boucles de ta tête
Que ma tombe fleurira d’un tapis de violettes.
Je me tiens, les yeux ouverts, sur le seuil de ton désir.
Dans l’attente de ton regard, …mais, de moi, tu te retires.
Merci. Que Dieu te protège, ô cohorte de douleurs,
Car, lorsque je serai seul, tu resteras dans mon cœur !
De mes yeux je suis l’esclave, lorsque, malgré leur noirceur,
Le compte de mes chagrins leur fait verser mille pleurs.
Mon idole se dévoile aux regards de tout le monde,
Mais personne ne surprend tant de grâce, que moi seul.
Mon amour, comme le vent, quand tu passes sur ma tombe,
Dans ma fosse, de désir, je déchire mon linceul…

Hâfez de Shiraz
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Tu ne sais pas ce qu’est l’Amour. Il te faudrait être intrépide
Et connaître tout le parcours, si tu veux devenir un guide.
A l’école de Vérité, auprès du professeur d’Amour,
Tâche, ô mon fils, de mériter d’être comme ton père, un jour.
Le cuivre vil de l’existence, laisse-le tomber en chemin,
Et que te transmute en or pur l’élixir de l’Amour divin.
Dormir, manger, voilà ce qui t’a mis au-dessous de toi-même.
Cesse de manger, de dormir, et tu redeviendras toi-même.
Que la lumière de l’Amour embrase ton cœur et ton âme,
Et toi, tu deviendras meilleur que le soleil dans le ciel bleu.
Plonge-toi donc, comme un éclair, dans l’Océan même de Dieu,
Sans penser qu’à l’eau des Sept mers tu puisses mouiller un cheveu.
Tu seras, de la tête aux pieds, baigné de divine lumière :
Tourne-toi vers Sa Majesté, avec un cœur humble et sincère.
Si tout ce que tu vois est la Face de Dieu,
Tu seras l’un de ceux dont le regard profond est pieux.
Si les fondements de ta vie s’écroulent sens dessus dessous,
Ne t’inquiète pas par le fait que tu es sens dessus dessous.
Hâfez, si tu as la passion d’une Union mystique avec Dieu,
Tu ne seras que poussière au seuil de ceux qui contemplent Dieu.
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Ô vous ! dont le resplendissant visage donne à la lune tout l’éclat dont elle brille dans le ciel ! au puits[1] creusé sur votre menton est puisée la plus belle eau des perles de beauté.


Brûlant du désir de se joindre à vous, mon âme est déjà sur mes lèvres[2] : doit-elle retourner sur ses pas ? doit-elle s’envoler vers vous ? dites, quels sont vos ordres ?


Quand donc, ô grand Dieu, se réalisera le projet que je nourris de voir un jour mon cœur en repos auprès de sa chevelure en désordre[3].


Oh ! mon cœur se brise, prévenez-en ma mie. Alerte ! ô mes amis ! faites-le pour l’amour de mon âme, pour l’amour de la vôtre.


Personne, ici-bas, n’a échappé au mal que font vos beaux yeux de narcisse ! Oh ! ne vaudrait-il pas mieux qu’ils ne montrassent jamais leur amoureuse langueur à ceux qui sont ivres de votre amour ?


Notre fortune, endormie comme elle est, se réveillera-t-elle parce que des gouttes de vos joues vermeilles auront perlé sur nos yeux ?


Envoyez-nous par le zéphyr un bouquet cueilli sur vos joues fleuries, peut-être qu’alors nous pourrons respirer le parfum de la poussière du seuil de votre porte.


Je fais des vœux pour l’éternité de votre existence, ô échanson du festin de Djem[4], bien que ma coupe n’ait pas été remplie durant vos libations.


Ô Zéphyr, dis de ma part aux habitants de Yezd : Puissent les têtes des ingrats servir de boules à leur jeu de mail !


Dis-leur que tout éloignés que nous soyons par le fait, nous sommes proches par la force de la volonté ; dis-leur que nous sommes à la fois leur panégyriste et l’esclave de leur roi.


Oh ! quand vous passerez près de nous, relevez le pan de vos robes, évitez de le souiller par le contact de la poussière et du sang[5] où nous gisons, car sur ce chemin de l’amour les victimes sont nombreuses ; puissent-elles toutes vous être offertes en holocauste !


Ô roi des rois, un peu de générosité envers nous, afin que nous puissions — comme le fait le ciel — aller baiser la poussière du seuil de votre porte.


Écoutez la prière que fait Hafiz et dites : Ainsi soit-il ! Puissent vos lèvres roses, d’où découle la douceur, me servir d’aliment !

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Fossette, voir plus loin.
Expression qui se rencontre souvent chez les poètes persans et qui veut dire : je meurs d’amour.
Toutes les odes suivantes sont pleines d’allusions à la chevelure. D’après Darabi : l’Unité dans la multiplicité s’exprime, chez les Soufis, par le mot chevelure. Il en donne pour exemple le vers suivant qu’il explique : Une troupe de gibier s’est prise dans les filets de mon cœur ; cette boucle de cheveux, piège où nous étions retenu, tu l’as défaite, et mon gibier est parti.
Il faut se rappeler qu’en dehors de la secte des Ach’aris aucune religion n’admet que Dieu puisse être vu. Les Soufis, qui disent avoir vu Dieu, n’en ont vu que la réflexion, comme l’image du soleil dans une glace, celle du feu par la chaleur qui en émane. En réalité, le Saleq, qui se dégage des liens de l’existence et de sa personnalité, acquiert un regard qui ne voit plus rien en dehors de Dieu. Il voit Dieu sans voile et c’est pourquoi Hafiz dit « mon cœur a pris une troupe de gibier », c’est-à-dire mon cœur a vu Dieu dans la création. Par suite son cerveau éclairé retrouve la tranquillité, car dans la pensée des savants l’Unité est dans la multiplicité. C’est alors que tu as dénoué tes boucles de cheveux. c’est-à-dire l’image même de la multiplicité et dès lors les pensées matérielles ont été un rideau entre Dieu et moi : mon gibier s’est échappé. Hafiz dit encore : Ne m’interroge pas, car j’ai trop à me plaindre de la noirceur de tes boucles de cheveux, elle a aussi détruit ma fortune de façon que je ne saurais dire. Chébistery écrit : Ne me demandez pas de nouvelles de ses boucles frisées, ne touchez pas les chaînes des fous.

Maintenant que nous avons bien compris de quelle façon on voit Dieu et ce que veut dire cette expression on comprendra que le vers suivant de Hafiz n’enferme aucune faute :

Cette âme que mon amie m’a confiée en dépôt, le jour où je la reverrai je la lui rendrai.

Djemchid, ancien roi de la Perse.
Comparez ce vers : Oh ! j’étendrais mon cœur comme un tapis sous vos pas si je ne craignais que vos pieds ne se blessent à une des épines que vous y avez enfoncées.
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D’un côté le temps de la jeunesse, d’un autre les jardins fleuris. Les roses semblent donner cette bonne nouvelle au rossignol mélodieux.


Ô Zéphyr, si tu viens à passer près des jeunes plantes de la prairie, présente mes respects au cyprès, aux roses, aux basilics.


Ô toi qui si coquettement formes de tes cheveux ambrés de ravissantes boucles qui encadrent ton visage, oh ! ne martyrise pas ainsi mon cœur, mon cœur déjà si profondément plongé dans le vertige.


J’ai bien peur qu’un jour ceux qui se moquent si ouvertement des buveurs ne finissent eux-mêmes par porter en offrande toute leur dévotion à la taverne.


Sois l’ami de ceux qui aiment Dieu ; car, dans l’arche de Noé, il était une terre qui n’eut rien à voir avec le déluge universel[1].


Va-t-en, sors de ce monde et ne sollicite pas de lui un morceau de pain, car ce mauvais hôte finit toujours par tuer ses convives[2].


Oh ! si c’est avec ce charme que la servante du cabaret remplit son office, je veux désormais que mes sourcils servent de balai au seuil de la taverne.


Chacun ici-bas aura pour couchette deux poignées de terre. Dis donc aux riches : quel besoin avez-vous d’élever jusqu’aux nues les murs de vos palais ?


Je ne sais vraiment pas ce que tu veux faire avec ta chevelure, car tu mets en désordre tes boucles qui embaument le musc[3].


Oh ! ma lune de Chanaan[4], le trône d’Égypte est désormais ta propriété, le temps est donc venu pour toi de dire adieu à la prison[5].


Ô Hafiz, bois du vin, sois insouciant, sois joyeux, mais ne fais pas, comme les autres, du Koran un objet de ruse et d’hypocrisie[6].
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Ceux qui aiment Dieu sont les prophètes. Mohammed a dit : « Les gens de ma maison sont comme ceux de l’arche de Noé ; tous ceux qui y entrèrent furent sauvés, ceux qui restèrent dehors furent noyés. » C’est en conformité avec ce Hadis que Hafiz a dit : « Attache-toi aux pas des hommes du prophète afin d’être délivré de la tempête et de l’ignorance ; car, dans les déserts de l’erreur tu mourras. »
Quelques manuscrits donnent ici ce vers : « Tu n’apprendras jamais un mot des mystères de la création, tant que dans ce monde des possibilités, tu ne seras pas hors de toi-même. »
Quelques manuscrits donnent ici ce vers : « Le royaume de la liberté et la résignation sont un trésor qu’aucun sultan ne pourrait acquérir par la force de son sabre. »
Joseph.
Ô âme du royaume d’Égypte, c’est-à-dire du royaume des cieux ou bien encore du royaume où l’on a abandonné tout désir du monde. Ce royaume t’a appartenu, maintenant il est temps que tu sortes de cette vie corporelle. Dans les hadis il est dit : « Ce bas monde est la prison pour les croyants et le Paradis pour les infidèles. » C’est pour cette raison que le marcheur dans la voie spirituelle désire se débarrasser des liens du corps. Djellal-ed-Din a dit : « Si la mort est un homme, dites-lui de venir chez moi — pour que je l’embrasse étroitement. Je prendrai d’elle une âme immortelle, — elle prendra de moi un vieux vêtement bariolé. » Hafiz dit aussi : « Mon corps est un rideau pour mon âme. Il serait bon que j’éloigne de moi ce rideau. Cette cage est mauvaise pour moi dont la voix est mélodieuse, je veux partir pour les jardins célestes, puisque je suis un oiseau des bosquets du Paradis. »
Allusion aux hypocrites qui cachent leurs déportements sous le voile de la religion. On peut penser aussi qu’il s’agisse ici des Sunnites qui, combattant les Persans, imaginèrent de mettre le Koran au haut d’un étendard et marchèrent ainsi à l’ennemi. Les Chiites n’osèrent tirer sur le livre sacré et furent vaincus.
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Mon cœur m’échappe des mains, ô hommes compatissants ! Pour l’amour de Dieu ! au secours ! hélas ! mon secret le plus caché va être dévoilé.


Nous voguons sur le vaisseau du monde : ô vent favorable ! lève-toi, il se peut que grâce à toi nous revoyions l’objet chéri de notre cœur[1].


La faveur de ce monde n’est qu’une fable, une fable d’à peine dix jours de durée. Ô amie, ne laisse donc point échapper cette occasion de faire un peu de bien à ceux qui t’aiment.


Le miroir d’Alexandre n’est que la coupe de Djem — considère cette coupe, elle t’apprendra l’état de Darius[2].


Ô toi qui es si généreuse, daigne t’informer, ne fût-ce que sous la forme d’un remerciement à Dieu pour la santé dont tu jouis, de l’état du pauvre derviche dénué de tout.


La paix des deux mondes repose sur ces deux mots : bienveillance envers les amis, modération envers les ennemis.


Il ne nous a pas été donné accès dans la demeure de la bonne renommée : si tel que nous sommes tu te nous agrées pas, va, change les arrêts du destin[3].


Cet amer[4] qu’on qualifie de mère de tous les vices est pour nous plus appétissant, plus doux qu’un baiser sur la joue d’une vierge.


Ne fais point le revêche, car, tu le sais, notre puissante amie pourrait en retour, allumée par le feu de la revanche, te consumer comme une résine[5], le caillou le plus dur étant entre ses mains mou comme de la cire.


Dans ta détresse efforce-toi de te divertir : aie recours à l’ivresse, car cette alchimie de l’être réduit même un Karoun[6] à la mendicité.


Hier, sur le soir, entre les roses et le vin le rossignol chantait joyeusement : apportez la coupe. Oh ! vous tous qui êtes pris de vin, salut sur vous.


Ce n’est pas de plein gré que Hafiz a endossé ce froc souillé de vin. Ô vous, cheikh plein de pudeur, sachez-le et excusez-moi[7].
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Sorti des mains de Dieu et lancé dans le néant de l’existence, l’homme doit aspirer à retrouver la divinité. Les pièges de ce bas monde, les illusions ou plutôt la fantasmagorie d’ici-bas nous trompent et cherchent à nous égarer : perdus sur l’immensité de cet océan sans limite, le poète appelle à lui le vent favorable qui, le poussant dans la bonne direction, le fasse arriver au but pour lequel il a été créé.
Le miroir d’Alexandre, la coupe de Djem : deux objets magiques dans lesquels on pouvait voir ce qui se passait dans le monde. Tu apprendras l’état de Darius, c’est-à-dire tu te rendras compte du néant des grandeurs humaines et de la rapidité de leur chute.
« Ne blâme pas les savants, ô dévot adorateur des choses extérieures, ô dévot dont l’argile est pur, car on ne te rendra pas responsable des fautes d’autrui. » On lit dans le Koran : « On ne rend pas responsable quelqu’un d’un péché commis par autrui. » — « Que je sois bon ou mauvais, va, et occupe-toi de tes affaires, chacun récoltera ce qu’il aura semé. » Ce dernier vers est conforme au verset qui dit : « Ce bas monde est une terre cultivée pour l’autre vie. »
Le vin.
Le texte porte « chandelle ».
Karoun, Corée, cousin de Moïse célèbre par ses immenses richesses : Corée et Djemchid sont les termes de comparaison les plus fréquents pour indiquer un homme possédant tous les trésors de ce monde.
Avant ce vers un manuscrit porte celui-ci : Ces vers persans chantés par le chanteur et par de joyeux convives, mettraient en branle les vieux les plus dévots.
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