Une lecture est aussi une histoire de perception. le ressenti peut être différent selon le moment, l'état de fatigue, l'environnement, l'envie, la concentration… Parfois indépendamment des qualités intrinsèques d'un roman.
Je suis un grand amateur de romans d'anticipation réalistes se déroulant juste quelques années en avant. Je me suis pourtant lancé dans cette lecture avec le frein à main, en l'ayant d'ailleurs reportée de plusieurs semaines. La faute à pas de chance, et à sa sortie juste au moment de l'éclatement de la crise sanitaire liée au COVID-19.
Et j'ai eu tort.
Avant de m'y plonger, j'imaginais également plusieurs « pièges » tendus à l'auteur et qui risquaient de modérer mon plaisir de lecture, pourtant largement titillé par un genre littéraire que j'affectionne.
Et j'ai eu tort.
Vincent Hauuy a non seulement évité toutes les embûches que j'avais supposées, et il propose un thriller d'anticipation d'une grande qualité et formidablement prenant. Avec des bonnes idées à la pelle et des rebondissements à foison.
Vu le contexte, j'irai même jusqu'à dire que sa réussite relève de l'exploit, et démontre tout son talent, qui éclabousse ces 425 pages.
Oui, un saisissement que de lire un tel livre durant cette période particulière et d'y prendre un tel plaisir !
Le résumé peut paraître trompeur. J'ai eu un peu peur de me retrouver devant une sorte de Hunger games. Une série de romans que j'avais adorée, mais je ne « sentais » pas le fait de retrouver une intrigue similaire.
J'avais tort.
Parce que ce récit-là n'a pas grand-chose à voir. C'est bien plus réaliste, et l'idée du jeu télévisé n'est qu'un prétexte qui reste en arrière-plan.
Certains pensent que
Vincent Hauuy est sorti de sa zone de confort en écrivant un tel livre, lui qui a proposé jusqu'alors des thrillers et polars plus « traditionnels » (les guillemets sont de mise, parce que tous ses livres ont une personnalité marquée). Ce sentiment me semble erroné, au contraire, l'auteur a toujours baigné dans la SF en tant que lecteur et son métier de concepteur de jeu vidéo explique aussi sa manière de construire cette histoire.
L'idée qu'on aurait pu s'en faire, aurait été qu'il proposerait une anticipation « light ». C'est en fait tout le contraire, tout en étant avéré. Je m'explique : la somme de travail de recherches saute aux yeux (plusieurs mois lui ont été consacré), l'environnement est riche d'informations et de concepts qui rendent cette histoire vraiment crédible. Mais jamais ses recherches n'alourdissent le récit, n'y prennent le pas sur l'intrigue ou ne plombent le rythme élevé. Au contraire, tous les ingrédients sont parfaitement intégrés dans le fil narratif, s'en est saisissant.
le travail sur les personnages principaux est excellent (malgré leurs noms assez caricaturaux). Ils sont attachants, complexes et profondément humains. Et les dialogues sont au diapason.
Quant au final (une autre de mes inquiétudes, et j'ai encore eu tort), il est excellent et digne du reste.
Survivre est une réussite du début à la fin. Un roman profond ET ludique ! C'est fluide et intelligent, prenant, l'histoire et le contexte font réfléchir et distraient. Un tel équilibre est pourtant si difficile à atteindre.
Vincent Hauuy propose là ce qui est, pour moi, son meilleur roman. Il montre à quel point son imagination débordante, sa force de travail, sa volonté de ne pas s'enfermer dans un genre unique, et ses qualités de romancier font qu'il sort vraiment du lot.
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