Me voilà bien ébahi, moi qui pensais, l'oeil déjà pétillant, faire connaissance avec le matelot Jean Costebelle dans ce livre écrit en 1920 par
Henry-Jacques.
Moi qui venais de refermer "
Jean-François de Nantes", écrit par le même
Henry-Jacques quatre ans plus tard.
Pour un peu, j'en aurai repris un bon coup de boujaron !
Mais voilà qu'au fil de ma lecture, j'ai découvert que l'un était la réécriture de l'autre, ou que l'autre était la transposition de l'un.
Un père lamentable ivrogne, une mère soûlarde comme l'autre, Jean était devenu mauvais sujet de par la déchéance de ses parents.
Finalement, la mer l'avait rendu à lui-même.
Pour l'heure, il a débarqué du "Cotentin" sur les quais de la Fosse à Nantes, et a pris pension à "la descente du fin matelot", l'auberge de la mère le Mahu ...
Ce roman est dédié aux matelots de "l'Eugénie-Fautrel" sur laquelle son auteur fût mousse.
Il s'ouvre, en guise de préface, avec "la complainte de Jean mat'lot".
"
Jean Costebelle, matelot" est un livre discret dans la bibliographie d'
Henry-Jacques.
Il n'y est pas souvent crédité, éclipsé qu'il a été par son presque mythique jumeau "
Jean-François de Nantes".
C'est que les deux récits, de manière quasiment identique, suivent la même trame, reprennent les mêmes scènes et font vivre à leurs personnages le même destin.
Cependant, à bien y réfléchir les deux livres sont différents.
Les noms des personnages, tout d'abord, ont été modifiés.
Mais aussi leurs personnalités plus exacerbées dans leur passion dans la réécriture qu'est "
Jean-François de Nantes".
Un personnage a disparu, ou presque, dans "Costebelle".
C'est la légende de la cité d'Herbauges qui vient s'y substituer au drame associé, dans "JF de Nantes", au shangaïeur du Havre.
Herbauges, la cité engloutie dont on dit parfois que ses cloches certaines nuits résonnent encore, Herbauges dont la légende sert ici de parabole à la lutte fratricide de Pierre et de Jean.
D'ailleurs, le récit initial de "
Jean Costebelle, matelot" est, me semble-t-il mieux écrit, plus soigné et abouti que sa réécriture.
Alors, pourquoi cette réécriture ?
Si ce n'est qu'en musicologue averti et en amateur éclairé de vieux chants marins,
Henry-Jacques ait voulu associer son roman à "
Jean-François de Nantes", cette ancienne chanson à hisser de la marine à voile, dont on connaît mal les origines.
S'il sont donc très proches, ces deux romans n'en sont, pour autant, pas moins splendides tous les deux.
Même si personnellement ma préférence va à "
Jean Costebelle, matelot".
J'y ai préféré la beauté des paysages dans leur description, la retenue tout en finesse des passions qui donnent aux personnages une crédibilité accrue et un ton plus apaisé dans la littérature d'
Henry-Jacques.
Finalement, j'ai repris un bon coup de boujaron ! ...