Ma deuxième lecture d'un livre de
John Irving me confirme l'excellente impression de l'auteur, tout en ajoutant une nouvelle dimension à ce que je découvre de son style. Car ici, en plus de nombreux thèmes communs de l'auteur, on retrouve la patte de son humour qui est largement plus prononcé que dans
le monde selon Garp (ouvrage pourtant déjà bien humoristique également).
L'hôtel New Hampshire est un livre qui arrive à être formidablement drôle, au point que j'ai du interrompre plusieurs fois ma lecture pour éclater de rire, notamment autour de ce merveilleux chien Sorrow. Mais le livre sait aussi être grave, voir violent (et je dois dire que j'ai trouvé presque insoutenable la description qui est faite dans le chapitre 4, autour de cette incapacité d'agir pendant un acte aussi grave). L'auteur explore plusieurs thèmes importants, qui transparaissent brutalement au milieu de cette fantasy déjanté et de cette famille atypique. Cette irruption de la réalité crue, sordide et froide est d'autant plus contrastée avec ce qui se passe autour, et j'ai adoré la façon dont nous est régulièrement rappelé que tout ceci n'est pas que drôle.
Niveau thématique, nous avons l'embarras du choix, et
John Irving se permet de revenir sur des thématiques qu'il avait déjà développé dans
le monde selon Garp, notamment autour de la condition de la femme. J'aime beaucoup la façon très douce dont il peut parler de ces thématiques, notamment de la violence faite aux femmes. C'est en nuance, mais extrèmement bien représenté. Et je ne parlerais même pas de l'inventivité dans les personnages tout en les faisant d'un réalisme saisissant.
Le livre n'est cependant pas exempt de quelques petits défauts, et notamment pour moi la fin un peu trop rapide, avec quelques petites choses qui passent rapidement à la trappe (la dernière mort du livre est à peine balayé quelques pages avant qu'on ne finisse, sans qu'il n'y ait le temps de le digérer réellement). D'autre part j'ai senti que l'auteur tentait un peu trop de rendre des moments dramatiques, oubliant un peu le ton léger et humoristique de l'ambiance générale. Comme s'il s'était senti obligé de rajouter un petit drame régulièrement pour ne pas tomber dans une facilité d'humour. Pour autant, le ton général du livre est plus proche du drame que de l'humour, et ces petites touches paraissent forcées du coup.
Mais pour le reste, j'ai beaucoup apprécié cette lecture qui fait vraiment plonger dans un monde décalée. Entre les ours, les rêves, l'idée de grandir, la violence aux femmes, on navigue dans un monde étrange mais trop réel pour être fantastique. On rit et on pleure au fur et à mesure de la lecture, et j'ai refermé avec une petite pointe au coeur, simplement parce qu'on ne pourrait découvrir la suite de cette famille atypique mais ô combien adorable.
John Irving maitrise son sujet et son écriture, la découverte m'a régalé.