L'auteur est invité par des libraires : Michel, Marie et Nadège à venir séjourner quelques semaines, en début d'automne, dans une région forestière reculée du centre de la France, dans un petit village, Donzières.
Ils s'intéressent à ses livres et l'ont rencontré lors d'une séance de dédicaces dans une ville à une centaine de kilomètres quelques mois auparavant ; il sera logé dans un hôtel tenu par Madame Meunier et devra en échange animer ses ateliers d'écriture, des conférences à la médiathèque, l'écriture d'un feuilleton sur la région et des réceptions diverses.
Mais, un fait-divers s'est produit peu de temps avant son arrivée : Commodore, un homme haut en couleur a disparu, on le croît mort et un couple, Aurélik et Dora, locataire d'une de ses fermes est soupçonné (Aurélik est en prison alors qu'on n'a pas retrouvé le corps de ce maraîcher qui s'avèrera être un ancien militaire).
L'auteur apprend le fait-divers juste après son arrivée en feuilletant le journal local et tombe sous le charme de la photo de Dora.
Un projet du maire, la construction d'une scierie pour exploiter le bois de façon écologique, et s'en servir comme combustible propre… projet discutable qui semble tout sauf écologique car déforestation à grande échelle mais du travail dans une commune en situation économique précaire.
Ce que j'en pense :
De ce fait, rien ne se passe comme prévu, l'auteur arrive systématiquement en retard et dans une tenue approximative à tous ses rendez-vous programmés par les libraires car il sillonne le coin au volant de la voiture de Michel , se perd, chute dans la boue, s'enlise, et finit par rencontrer par Dora et va se laisser entraîner dans une aventure.
Lors des réceptions, l'auteur boit beaucoup, et finit par tomber dans le piège, entre le maire qui veut le prendre à témoin de son action, les gens du village, la bibliothécaire, Dora, Madame Meunier… bref, il se fait manipuler car chacun veut l'utiliser à ses propres fins. Totalement subjugué, il finit par aller tous les jours chez Dora, et découvre quelques uns de ses secrets.
Ce livre soulève donc plusieurs problèmes : à quoi sert un auteur caution morale pour les uns, accès à l'expression pour les autres par exemple quand il anime l'atelier de lecture avec des illettrés où il finit par écrire ce que ceux-ci voudraient exprimer mais ne le peuvent pas et essaie de les encourager et leur donner confiance en eux, comme Alex qui veut l'appeler Tonton et à qui il promet de rendre visite au travail.
De l'autre côté, il y a les femmes bien pensantes, arrogantes qui l'agressent sur son propre terrain et essaient de le tourner en ridicule, pour se mettre en valeur à ses dépens. On a ainsi des renseignements sur l'idée que se font les gens du métier et du statut de l'écrivain
Le roman aborde aussi un problème d'actualité : l'écologie et ce qu'on peut faire en son nom, un projet contestable, l'arrivée prévisible de militants purs et durs prêts à en découdre pour empêcher le projet du maire. L'écologie dans l'absolu et face à la réalité économique et au chômage.
Serge Joncour aborde sous la forme de la caricature le quand dira-t-on dans les villages, où tout le monde sait (ou croit savoir) tout sur tout le monde, le vrai, le faux, les rumeurs, alors que Madame Meunier lui conseille la prudence, dans ses actions et dans ses paroles.
L'auteur aborde également la curiosité de l'écrivain ; le fait divers (et donc Dora originaire de Hongrie) le passionne plus que la vie au village ou la région ce qui déplaît aux habitants qui les voient d'un mauvais oeil, ces étrangers, ces néo ruraux : « Dans la légende je remarquais encore une fois ce terme de « néoruraux ». Des néo, sous entendu des marginaux, des gens qui viennent s'installer à la campagne pour profiter des loyers modiques, des instables vivant généralement des allocations ou de la débrouille, des étrangers. » P 63
C'est le premier roman de
Serge Joncour que je lis et au début, j'ai été déroutée, je ne voyais pas où il allait, ce qu'il voulait transmettre au lecteur et j'ai été tentée d'arrêter plusieurs fois, car je trouvais le récit long, le comportement de l'écrivain qui se laisse entraîner vers une situation délicate m'énervait. Mais, la dernière partie m'a beaucoup plu car l'intrigue s'est emballée. Et, l'écriture est belle, comment résister à une phrase comme celle-ci par exemple : « Tomber amoureux, c'est voir l'autre comme un mystère dont on ne supporte pas d'être exclu, c'est redouter de ne pas l'atteindre, ne plus pense qu'à une chose : le revoir, le côtoyer. Plus je me disais que cette fille était un danger et plus elle en devenait désirable ». P 296
Donc une bonne expérience. J'avais envie de lire son précédent ouvrage «
L'amour sans le faire » et je le lirai peut-être, mais ce ne sera pas une priorité…
Note : 7/10
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