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sur 401 notes
Ca commence tranquillement, à pas feutrés. Nous entrons dans la vie d'Helen, la narratrice et de Franck Appledore à l'occasion de cette rencontre fortuite sur un trottoir londonien. Cela fait vingt-trois ans qu'ils ne se sont pas vus.

Une fois lu le premier chapitre qui divulgue quelques bribes du présent et du passé sans vraiment nous éclairer, nous entrons de plain-pied dans l'histoire. Julia Kerninon dépeint avec force et délicatesse ce qu'ils ont traversé ensemble, ce qui les a rapprochés, les a liés si intimement et les a finalement séparés.

C'est comme un concerto (je ne connais pas grand chose en musique, veuillez me pardonner), avec des mouvements qui se succèdent, sur des tempos différents, agencés à la perfection, entrecoupés de brèves respirations, avec ce thème au fond, présent en permanence, longtemps en sourdine puis qui prend peu à peu le dessus, nous laissant envahir par une tension palpable de plus en plus poisseuse jusqu'à atteindre un paroxysme sans doute inévitable.
C'est beau, très beau. J'ai été complètement embarquée par cette confession qui m'a peu à peu submergée.

Challenge ABC 2020/2021
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"Si je t'avais parlé à temps, Frank. Si je t'avais, une seule fois, dit quelque chose au lieu de simplement faire, toujours faire, toujours tout faire, si j'avais su utiliser les mots qui étaient pourtant, sous leur forme écrite, ma compétence la plus achevée, si j'avais su les dompter pour qu'ils portent ma voix, rien de tout cela ne serait arrivé, n'est ce pas ? C'est pour ça que je parle, maintenant, et que tu dois m'écouter".

Installez-vous confortablement, prenez le temps d'admirer cette superbe couverture, de répéter peut-être ce joli titre à voix haute histoire de vous mettre dans l'ambiance. Bienvenue dans l'univers de Julia Kerninon, celui qui avait tant ébloui lors de la parution de son premier roman, le très remarqué Buvard. Dès les premières pages, on retrouve la force et la fluidité de l'écriture de ce premier opus, dès les premiers mots, on est pris, happé, on mesure déjà la tension naissante dont le crescendo ne se démentira à aucun moment. J'ai aimé tous les précédents romans de l'auteure. J'ai adoré celui-ci.

Ce roman est une longue confession, le discours d'une femme qui tente enfin, au crépuscule de sa vie de se dire la vérité. La vérité sur sa relation avec l'homme qui a le plus compté pour elle et qui n'était ni un père, ni un frère ni même un mari. Un homme qu'elle appelle son meilleur ami. Alors qu'ils ne se sont pas vus depuis vingt-trois ans, Helen et Frank se croisent par hasard à Londres. Les deux octogénaires ne savaient même pas qu'ils habitaient si près l'un de l'autre. Cette rencontre déclenche alors chez Hélène la nécessité de ce récit, les yeux dans les yeux. Car Frank est l'homme avec lequel elle a vécu le plus longtemps, mais également celui sur lequel elle a veillé, dont elle a fait naitre la vocation avant de le soulager de tous les soucis matériels qui auraient pu entraver l'expression de son art. Si Frank Appledore est devenu un peintre aussi célèbre, c'est aussi à Helen qu'il le doit.

Je ne vais rien raconter ici, le plaisir du lecteur étant de découvrir peu à peu le cheminement de cette relation, depuis Rome où les parents diplomates des deux adolescents sont en poste lorsqu'ils se rencontrent, jusqu'en Normandie où ils vivront leurs dernières années ensemble, en passant par Amsterdam et Boston. Sachez simplement qu'on a l'impression d'assister à une mise à nu des sentiments, avec une force que l'on rencontre rarement. Hélène gratte la surface, brise les apparences, arrache les peaux mortes pour tenter d'arriver à la vérité, malgré les couches de mensonges accumulés. A commencer par ceux qu'elle s'est fait à elle-même.

"Tu ne cessais de revenir vers moi. C'était ma position dans le monde - j'étais le lieu où tu revenais. Comme d'autres font des voyages de santé dans leur village de naissance, il me semblait que toi, tu revenais irrésistiblement dans mes parages, comme si c'était moi ta maison, moi ton essence, ton centre. C'était moi qui te protégeais, depuis toujours, et, avant tout, je te protégeais de toi-même. Tu ne m'avais rien demandé, c'est exact - mais, Frank, depuis le premier jour de notre rencontre, ton incompétence m'appelait comme une sirène dans la brume".

Tout est d'une précision machiavélique, depuis l'étude des ressorts psychologiques qui guident ces deux êtres aux caractères bien trempés, élevés au sein de familles habituées à mentir jusqu'à l'irrésistible engrenage qui aboutit au drame, car drame il y a eu. Je le disais en préambule, on est ici dans la veine de Buvard, on se sent en terrain familier, la férocité est toujours là, mais la plume a (encore) gagné en force, la narration en densité pour livrer un fantastique roman.

Un énorme coup de coeur !
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Encore un roman pour lequel je suis assez partagée…… J'avais très envie de le découvrir car les éloges lues sur lui était dithyrambiques… Ma bibliothécaire m'a convaincue car pour elle c'était un coup de coeur et moi….. Et bien je ne sais pas trop, c'est assez complexe et je vais essayer de vous dire pourquoi.

Je pense, encore une fois, que dans cette lecture il faut distinguer plusieurs choses : le fond (l'histoire), les personnages, la cohérence, la construction du récit, l'écriture et comment tout cela a été traité. Commençons par l'histoire.

Deux personnes, de plus de 80 ans chacune, se croisent dans Londres et elle, Helen reconnaît son seul (et unique) amour et le retient pour lui avouer ce qu'elle a vécu auprès de lui. Qu'a-t-elle à lui dire qu'il ne connaisse déjà, sa version de leur histoire ou lui avouer autre chose….. Une belle entrée en matière mais car il y a un mais cette confession va durer 6 heures d'un long monologue, où lui, Franck, face à elle écoute et ne dit rien….. 6 heures ! Mais lui parle-t-elle vraiment ? Elle dit : « cela fait six heures que je te parle tout bas »….

Il aurait peut-être été judicieux sinon de les installer dans un café, un salon de thé, sur un banc dans un jardin public, que sais-je mais cela parait tellement peu probable qu'ils restent là plantés sur un trottoir, au milieu des gens et que lui accepte d'écouter sans rien dire ? Il est vrai que les rôles se sont inversés : elle prend l'initiative et lui écoute, attend, encaisse et ne dit rien. Ont-ils vécu la même histoire ….. Nous n'avons que la version d'Helen.

Les deux personnages : Lui égocentrique, le centre du monde, odieux, complètement axé sur sa personne, son devenir, son succès que ce soit auprès des femmes mais aussi dans son domaine artistique (la peinture). C'est un manipulateur, qui ne respecte rien ni personne. Elle, son opposée, tout ce qu'il n'est pas elle l'est et c'est peut être pour cela qu'ils s'attirent car sinon comment croire qu'une personne puisse accepter tout ce qu'elle a accepté…. C'est une soumission totale, complète, voire de l'esclavage. Oui elle l'aime et l'amour fait commettre bien des folies mais tout de même…..

Bon pour la cohérence laissons le bénéfice du doute. Que ne fait-on pas par amour.

Le dénouement : je l'ai senti venir à la vitesse grand V….. Il était évident qu'il fallait un final dramatique, comme si l'histoire ne l'était déjà pas assez (car pour moi elle a vécu un calvaire dans cette relation) avec une révélation qui faisait basculer le récit. La tension est bien entretenue, palpable, monte en puissance au fil des pages.

Pour la construction : j'ai trouvé que leur histoire durait, se répétait sans trouver d'issue car rien ne changeait finalement, rien n'évoluait dans un sens ou dans l'autre, quel que soit le lieu, la ville, leur âge : l'une souffre, l'autre profite, vit…. J'avais envie de prendre Helen et de la secouer, j'avais envie de claquer la porte au nez de Franck, ce n'est plus de l'amour mais c'est de l'assouvissement, consenti, certes, mais de l'assouvissement, pas de la dévotion mais de la soumission totale :

J'étais devenue ta servante, et comme toutes les servantes, j'ai fini par considérer que mon maître m'appartenait. (p129)

L'écriture est belle, indéniablement, bourrée de références artistiques ce qui est normal en soi puisqu'elle est écrivain et lui artiste peintre mais aussi de marques. Ils vivent depuis l'enfance dans un monde dit privilégié mais pas idéal. J'ai rapidement réalisé qu'Helen était depuis l'enfance marquée par l'autorité, le pouvoir des hommes (je veux parler de ses frères, puis de Franck, même son mari Günter sur qui elle pense pouvoir se reposer).

Je le laissais casser tout ce qu'il voulait au seul prétexte que moi, il me réparait. (p154)

On parle souvent de reproduction des mêmes schémas et finalement c'est ce qu'elle fait. Il lui faut être dominée, exploitée, humiliée, utile à l'autre pour exister, peut-être inconsciemment mais je trouve qu'il y a là, de la part de l'auteure une belle étude psychologique d'un tempérament, d'une situation, d'un couple, d'un déséquilibre.

J'ai trouvé par moment les phrases longues, j'arrivais au bout comme haletante, comme la narratrice, à bout de souffle, entrecoupées de virgules donnant le rythme au récit, passant du Je au Tu, axé sur ce couple qu'il formait, dans des chapitres courts, très courts parfois, simplement composé d'une phrase, de quelques mots, comme une sanction qui tombe. Helen s'autorisait enfin à parler, à prendre le dessus, à vider son coeur, à apaiser sa conscience mais pourra-t-elle être apaisée un jour …..

C'est l'histoire d'un amour à sens unique ou peut-être partagé mais pas vécu de la même manière, mais consenti par chacun jusqu'au point de rupture.

Ce roman se lit d'une traite, on est complètement embarqué dans cette histoire qui même si elle nous révolte comme moi par le fond, elle est bien maîtrisée, exploitée, écrite. Elle se veut le reflet d'une relation déséquilibrée, d'un gâchis superbe.

Finalement, d'avoir mis des mots sur ce que j'ai ressenti et pensé me donne malgré tout un bilan positif. Je l'ai lu pratiquement d'une traite même si j'aurai tellement aimé qu'Helen se révolte, s'épanouisse dans son métier d'écrivain, vive sa vie et pas celle de Franck, même si elle se dit heureuse d'avoir été ce qu'elle a été auprès de lui.

C'est pour moi un beau travail d'auteure d'arriver à se glisser dans un personnage, peut être très loin de son propre tempérament, de s'y fondre, d'oublier ses propres sentiments pour ne plus qu'exprimer ses sentiments.

Les gens pensent que ma personnalité est un genre de bruit blanc, que le silence que je fais en société est l'écho de celui qui résonne, depuis toujours dans l'espace clos de ma tête, sous les cheveux coiffés. Mais – je le sais mieux que personne – il ne faut pas juger un livre à sa couverture.

J'ai longtemps hésité, tergiversé mais finalement …..
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Quelle jolie et surprenante découverte que ce roman.
Hélène croise Franck alors qu'ils ne se sont pas vus depuis 23 ans. Ils ont près de 80 ans et s'étaient rencontrés, apprivoisés à 13 ans ; la première phrase qui lui avait dite "toi, aussi tu détestes ta famille" puis "mais qu'est ce qu'on va faire ? comment on va s'en sortir ? ".
Et voila que 60 ans plus tard, elle lui impose de se taire et, pour une fois, de l'écouter. Dans un long monologue, elle revient sur leur passé, va enfin imposer sa vision de leur histoire.
Jamais, on ne s'ennuie en la suivant dans ses souvenirs.
Les chapitres son très courts et l'écriture ciselée.
Il y a de l'amour, de la trahison, beaucoup de renoncement, des drames, de la lâcheté.
C'est un roman qui vaut vraiment le coup.
La couverture ne lui rend pas justice.
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Bien sûr, nous eûmes des orages
Vingt ans d'amour, c'est l'amour fol
Mille fois tu pris ton bagage
Mille fois je pris mon envol
Et chaque meuble se souvient
Dans cette chambre sans berceau
Des éclats des vieilles tempêtes

Voilà ce qu'en substance cette vieille femme avoue à son vieil amant/ami/amour, croié au hasard de ses vieilles années, sur un bout de trottoir londonien. Elle qui a tout applani, tout facilité. Elle qui a tant travaillé et tant espéré. Qui a fermé les yeux, mais toujours laissé porte ouverte pour partager un bout de la vie de cet homme.

Laisse-moi devenir l'ombre de ton ombre,
L'ombre de ta main,
L'ombre de ton chien.

Dans l'ombre, elle a aidé et aimé l'homme et l'artiste. Il a été si fascinant, mais si peu aimable, si fantasque, si égoïste. Alors qu'elle, elle a misé sur la dévotion. Être là coute que coute. Pas sa femme, pas sa muse. Sa compagne discrète qui 'efface pour mieux rester. Quitte à n'être que personnage secondaire. Comme un arrière plan que l'on n'efface pas et qui s'imprime sur la rétine.
Cette héroïne revient au premier plan pendant ce monologue. Elle lui montre tout ce chemin parcouru. Sans rancoeur, elle lui peint le tableau de leur histoire.
C'est beau. sans concession. On oscille entre prendre parti pour l'un ou pour l'autre, mais en fait il n'y a pas de gagnant : c'est l'amour tout court et l'amour de l'art qui tirent les ficelles, menant les personnages vers leur destion tragique et la pendule d'argent qui ronronne au salon, qui dit oui qui dit non, et puis qui les attend.

Alors, faut-il le lire ? Oui. Je ne suis pas très amatrice de romans d'amour, les trouvant souvent trop cul-cul la praline. Mais là c'est bien fait. Je valide.
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Que se passe-il lorsque une femme rencontre son grand-amour alors qu'ils sont séparés depuis plus de vingt ans et arrivent en fin de vie?
Le choix de l'auteur évite la confrontation et préfère la confession de la femme sous la forme d'un long monologue qui résume leur histoire depuis l'adolescence, leurs vies communes , leurs séparations, leurs retrouvailles.
C'est un cheminement vers la vérité, sa vérité à elle sur ce qu'elle a enduré, souffert, sacrifié pour lui, toute entière dévouée à cet homme, peintre devenu célèbre, elle dans l'ombre, sorte d'amie fidèle ou de maman effacée, facilitatrice de vie .
Magnifique analyse des rapports amoureux, de leurs non-dits, des drames qui peuvent en découler. Superbe plume qui tient en haleine.
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En tant que blogueuse, j'ai le plaisir de lire un grand nombre livres. Ceux que j'achète, ceux que des auteur.es m'envoient, ceux que je reçois des maisons d'Editions. Des livres que j'ai aimés un peu, beaucoup ou pas du tout voire même que je n'ai pas pu terminer...

Et puis, il y a les immenses coups de coeur. Ces livres que je referme en regrettant de les avoir achevés, ceux qui m'habitent pendant des jours, des mois, auquel je pense sans cesse. Ces livres qui m'ont émue aux larmes, dont la qualité de l'écriture m'a conquise, les mots, la plume, ces phrases que l'on relie tant on aime s'en imprégner. Il y a ces livres là qui donnent un sens à la lecture, l'envie de poursuivre, de recommencer. Des mots que l'on dévore absorbé par le récit, impatient d'en connaitre la suite, attentif à chaque point ou virgule. Une musicalité qui transporte. Un voyage.

Ma dévotion est un de ces livres. Je le referme et je voudrais recommencer. Côtoyer Helen et Franck, les suivre à Rome, Amsterdam ou en France, vivre à nouveau les émotions de leur passion, le gâchis, les erreurs. Reprendre l'incompréhension, les mots silencieux, ceux qu'elle n'a pu dire, la souffrance, les espoirs.

Helen s'est oubliée tout à son amour pour cet homme. C'est l'histoire d'une vie, du mal que l'on se fait, du mal que l'on accepte. L'amour absolu et l'abnégation.

Ce roman est fin et captivant, l'écriture ciselée. Un roman Coup de coeur à lire absolument.
Lien : http://aufildeslivresblogetc..
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Des retrouvailles après 23 ans, Helen et Franck se sont connus adolescents, ont vécu ensemble comme copains , ont été amants.
C'est Helen qui livre leur histoire faite de reproches, elle dénonce leur vie, tout ce qu'elle a pu lui donner pour qu'il soit un grand peintre. Ca ressemble à un procès avec toutes ses rancoeurs, des remords d'une vie ratée, subie.
Nous voyageons de Londres, à Amsterdam, Rome puis La Normandie.
C'est un peu "je t'aime moi non plus".
Helen est à fleur de peau, les sentiments sont à leur paroxysme. L'évolution de ces 2 êtres n' a pas été au même rythme; Franck a été un profiteur, un menteur.
Et puis ce drame qui rend ce roman si tragique et tellement puissant.
On ne l'oublie pas .
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Dévotion, littéralement cela signifie : Attachement quasi religieux à quelque chose ou quelqu'un ; vénération (cf : Larousse)

C'est le deuxième roman de cette auteure que je lis, après Une activité respectable publié en 2017. D'une écriture agréable, dense elle nous raconte ici une femme, Helen qui à l'aube de ses 80 ans, croise sur son chemin l'homme qu'elle a toujours aimé : Frank. Amis d'enfance, ils ont quitté leur famille ensemble, pour elle, étudier la littérature à Amsterdam et lui se chercher ! Alors qu'elle va trouver son équilibre dans son métier d'éditrice, lui va se réaliser dans la peinture. Mais qu'est-ce qui les lie véritablement ? Car lui vit sa vie, aime plusieurs femmes, et semble vivre au crochet d'Helen, c'est ce qu'elle ressent. Alors ils vont vivre l'amour, le désamour, ils vont se quitter pour mieux se retrouver jusqu'au jour où ce n'est plus possible qu'il vont devoir vivre un drame. C'est à cette croisée des chemins, qu'elle va lui raconter en 6 heures, sa vie, ce qu'il a été pour elle, elle va enfin se libérer.
L'auteure nous entraîne dans cette relation d'homme à femme, dans toute sa complexité lorsque les choses, les sentiments ne sont pas dit, que ces êtres ne parviennent à être sincères avec eux même comme avec l'autre. Étrange tout de même mais combien j'imagine assez réaliste. Une lecture que j'ai beaucoup apprécié.
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Elle n'était ni sa mère, ni sa femme, ni sa maîtresse, et pourtant Helen a dédié sa vie à Frank, du jour où ont fui Rome pour s'installer à Amsterdam jusqu'au drame qui les a séparés. Quand elle croise Frank par hasard sur un trottoir de Londres, elle ne peut plus se taire, elle a besoin de raconter sa version de l'histoire, de leur histoire, une version qu'elle a tue tout au long des années pour le protéger, pour l'assurer de son soutien.

Voir se dérouler devant ses yeux l'histoire d'une vie, racontée à la première personne, a quelque chose de très captivant. On se sent pris à parti par ce personnage qui raconte en se racontant, qui se livre et se dévoile, cherchant quelque part l'assentiment, l'absolution du côté du lecteur. C'est une forme narrative extrêmement puissante, et intime, que Julia Kerninon exploite ici dans tout son potentiel, en un savant mélange de sentiments, de rebondissements et de tension dramatique. Helen et Frank se retrouvent à quatre-vingt ans, plus de vingt ans après leur dernière année de vie commune et tout ce que nous savons, c'est qu'un drame a finalement mis fin à leur cohabitation perpétuelle. de ce simple postulat de base, Julia Kerninon tire un roman fort, foisonnant, et addictif.

J'avais découvert Julia Kerninon grâce à son premier roman, Buvard, roman qui m'avait époustouflée par son style et par cet art, déjà si présent, de contrebalancer les confessions intimes et le suspense dévorant. Ma dévotion porte cet art encore plus haut, encore plus loin. Phrases longues et rythmées, succession de courts chapitres : l'urgence de cette confession se fait sentir, l'envie de tout raconter en arrivant rapidement à l'essentiel est palpable, on imagine presque Frank, en face d'Helen, perché sur ce trottoir Londonien, et son expression qui change au fur et à mesure des paroles de sa meilleure amie. La fluidité de l'écriture nous emporte dans chacun des endroits où ils ont vécu, dans chacun des moments qu'ils ont partagé, la justesse des mots nous fait ressentir tout ce qu'Helen a ressenti, nous permet de nous identifier à elle, de partager ses fêlures et ses joies passagères.

Un roman phénoménal, à dévorer d'une seule traite – essayez aussi de lire quelques passages à voix haute, vous serez époustouflés par la musicalité des mots (larmes garanties).
Lien : https://theunamedbookshelf.c..
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