J'ai choisi le dernier roman de cette auteure que j'apprécie particulièrement pour son engagement écologiste et chez qui les femmes sont régulièrement à l'honneur. le sujet m'attirait : une jeune femme dont la vie quotidienne est banale et médiocre se retrouve un beau jour face à un spectacle de la nature qui va changer brusquement son existence. le phénomène en question est l'apparition d'une nuée de papillons monarques, ces insectes qui migrent tous les ans au Mexique, et qui se retrouvent, pour les besoins du roman, dans les Appalaches. Et pourtant, je me suis considérablement ennuyée à la lecture.
Il y a cependant de bonnes choses dans ce roman, à commencer par une esquisse intéressante de la vie des Rednecks (entendez par là des bouseux) : on essaie de survivre sur une exploitation agricole (ici l'élevage de moutons), peu de boulot, peu de gamins qui parviennent à l'université, mais beaucoup de réfractaires à la protection de la planète. Les gens nient le réchauffement climatique et si on peut se faire un peu de fric en déboisant, ma foi, allons-y. L'Eglise est omniprésente, tout comme les centres commerciaux. On suit, plus ou moins péniblement, Dellarobia dans sa quête désespérée : faire les courses en ayant pour seul choix des articles d'occasions, made in China, et des aliments périmés, ce n'est pas la joie. Ceci dit, on a beau être pauvre, on a quand même un téléphone portable. il ne faut pas pousser non plus.
Passons maintenant aux choses qui fâchent. J'ai peiné à reconnaître le style de
Barbara Kingsolver. Faut-il en imputer la faute à la traductrice ? Je ne sais pas, mais j'ai relevé ça et là, quelques phrases bien maladroites, et une syntaxe défaillante. Les dialogues, hormis ceux échangés entre l'héroïne et les scientifiques, sont d'une platitude absolue.
Un exemple de phrase qui m'a heurtée : "Elle contempla donc le papillon passer à travers les yeux d'Esther." je ne veux pas paraître maniaque, mais tout de même...
Les personnages principaux sont dans l'ensemble dépourvus du moindre intérêt en ce qui me concerne : Dellarobia (argh, ce prénom...), pas encore trentenaire, deux enfants et un mari gentil mais gnan-gnan (prénommé Cub ! encore pire que Dellarobia...), qui vivent plus ou plus moins de l'exploitation familiale, gérée par les beaux-parents. La meilleure amie,
Dovey (mais où est-elle allée chercher tous ces prénoms horribles ??), inutile à l'intrigue mais censée représenter un autre archétype féminin, le scientifique, Ovid Byron (et oui...), beau et intelligent mais quand même marié, comme quoi personne n'est parfait. Les gentils moutons et les gentils chiens de berger, les deux bambins de Dellarobia (rien qu'à lire leurs frasques, j'en étais épuisée...), sans parler du reste, les engueulades du couple au supermarché, les petites piques échangées avec la belle-mère... bref, du déjà lu. Rien d'original. le portrait de la jeune mère de famille pas-si-bête-que-ça coincée dans la cambrousse mais aspirant à autre chose, cela n'a quand même rien d'original. Entre deux scènes de la vie quotidienne à mourir d'ennui, on en apprend beaucoup sur ce papillon fascinant, le monarque, mais j'avoue avoir eu beaucoup de mal à faire le lien entre les deux thèmes du livre. L'un est clairement centré sur le fait que l'on peut changer son destin (sans blague ? ) et peu importe qu'un papillon en soit le détonateur, l'autre porte sur les conséquences écologiques du réchauffement climatique et du déboisement.
Un méli-mélo longuet et sans relief, où surnagent ça et là quelques beaux moments, comme les descriptions de la forêt et ce nuage de papillons. Ce n'est pas complètement un naufrage mais un beau ratage, à mon goût, dans l'oeuvre d'une écrivain que j'aime habituellement beaucoup.
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