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Hier soir, la bibliothèque de D., où j'ai fait mon stage, proposait une lecture autour du Discours, lecture assurée par M. Hervé Colin, de la compagnie du Globe.

Une très bonne soirée à écouter l'adaptation de ce texte (car trop difficile à lire dans sa langue originale, le français du XVIème siècle) et évidemment raccourci.

Pourtant, le Discours est plutôt bref, dans mon édition GF, si on enlève la préface et l'appareil critique, il doit faire une quarantaine de pages.

Selon son ami Montaigne, La Boétie écrivit ce texte à l'âge de 16 ans (voir ses Essais, mais Etienne devait avoir plutôt 18 ou 19 ans), probablement à la suite du soulèvement de la Guyenne contre la gabelle, impitoyablement réprimé.

Si ce texte est toujours d'actualité, c'est certainement parce que, non seulement le monde n'a pas changé depuis 1561 (ou si peu...), mais aussi parce que l'auteur utilisait l'histoire ancienne pour réfléchir sur sa propre actualité, artifice régulièrement employé quelle que soit l'époque.

La Boétie ne pouvait évidemment pas faire allusion à des événements récents, à sa propre époque, par peur des représailles, il utilisait donc avec habileté les exemples du monde antique entre autres, pour inciter son lecteur à la réflexion.

J'ai étudié ce texte l'année dernière, en 2ème année de licence en lettres modernes, dans le cadre de mon cours sur l'éloquence. le DIscours relève de l'éloquence politique, et du genre judiciaire. La Boétie démontre en effet de manière imparable comment des peuples entiers en arrivent à se soumettre à l'autorité d'un seul homme, le tyran.

Si le désir d'être libre fait défaut, on est donc esclave parce que l'on consent à cette servitude. Point de lâcheté ou de couardise ici, La Boétie part du principe que la servitude s'installe par le biais de la coutume. Des habitudes. Mais cela seul ne suffit pas à asservir un peuple.

Point besoin d'une armée pour rendre docile, le tyran impose efficacement sa volonté grâce à un réseau. Cette fameuse chaîne de la servitude, la pyramide la tyrannie qui s'exerce encore aujourd'hui, jusque dans nos démocraties.

Par effet de ricochet, la servitude amollit le courage. le tyran compte également sur un autre moyen pour asservir ses sujets : l'abêtissement. du pain et des jeux...et la télévision !

La Boétie place tout de même quelques hommes au-dessus de la plèbe. Seuls les intellectuels, et les plus courageux sont les plus aptes à se dresser contre la tyrannie. Tout n'est pas perdu, ouf...

Bref, une lecture qui n'a rien perdu de son attrait, une oeuvre qui devrait inciter chaque citoyen à repenser profondément sa manière de peser sur les décisions politiques. pour ma part, je crois que ce sont cette apathie, cette faiblesse qui nous enchainent et qui sont la cause de tous nos maux, de ce mal-être en société, de cette absence de volonté politique.

Lien : http://lectures-au-coin-du-f..
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« Soyez donc résolus à ne plus servir et vous serez libres. »

Étienne de la Boétie est né en 1530 à Sarlat dans le Périgord, décédé en 1563, à l'âge de trente-trois ans. Il fut écrivain, poète, philosophe, conseiller au Parlement de Bordeaux et fut l'ami de Montaigne.
Les historiens sont d'accords sur ce point. Son essai le "Contr'un" qui constitue une très sévère critique contre la tyrannie, fut écrit à l'âge de dix-huit ans.
Ce n'est qu'en 1574, que fut publié en vieux français, dans un recueil, le « Contr'un » appelé communément « le discours de la servitude volontaire »

Mais que contient ce « discours » d'Etienne de la Boétie. ?
Et dont la transcription très rigoureuse de 1836, établie par Charles Teste, figure dans l'édition « Petite Biblio Payo »
Le philosophe fait une analyse sur l'état et le fonctionnement actuelle des sociétés.
Pour lui, les hommes naissent tous égaux dans une fraternelle affection. Et en conséquence tous devraient être naturellement libres, et que la Nature n'a jamais mis aucun en servitude.
L'homme ne devrait point avoir de maître.

Mais, comme dans l'analyse de Pierre Leroux en 1847, que je cite :
- « Tant que le problème de n'avoir plus de maitre ne sera pas résolu, préférer la monarchie aux autres formes politiques ou à l'anarchie. C'est préférer l'unité à la division, c'est espérer l'avènement de l'unité véritable. Voilà pourquoi la monarchie et la papauté subsistent encore aujourd'hui, malgré tant de révoltes. »

Le philosophe est surpris, il s'interroge, de voir « des millions et millions d'hommes, misérablement asservis, et soumis, tête baissée, à un joug déplorable » (ce sont ses mots).
Il avance l'hypothèse, que tous ces hommes et ces femmes ne sont pas seulement contraints par la force, mais qu'ils sont souvent fascinés, ensorcelés par un seul homme, un seul chef parfois des plus injustes et des plus cruels, un seul seigneur ou roi redouté par ses sujets et qui les dirige d'une main de fer.
D'autre part, Etienne de le Boétie, a du mal à concevoir qu'une minorité de minorité, identifiée dans son discours, comme des « maîtres », des « tyrans » réussissent à imposer l'obéissance totale à l'ensemble de leur peuple.
Et que le fait que ledit peuple qui obéit à leur tyran, s'éloigne de leur propre liberté.
Et que malheureusement, un peuple qui nait sous le joug et qui est élevé dans cette servitude, prend conscience de sa nature « d'esclave » dès sa naissance et se contente de vivre comme un serf, durant toute leur vie.

Pour Etienne de la Boétie, il est désarmant de voir, ces hommes et ses femmes qui ont perdus quelque part le goût de se battre pour récupérer la liberté qui leur fut confisquée. Un peuple constitué de milliers d'êtres humains, qui sont souvent désunis entre eux et qui n'ont plus la synergie pour élaborer une révolte.
Les grands tyrans de ce monde, savent très bien comment élever et maintenir leurs sujets dans la servitude et l'esclavage.
Il suffit de conserver ses sujets dans l'ignorance, de semer la division entre eux, pour leur enlever toute énergie d'une rébellion et de les maintenir dans la peur.
L'esclavage semble remonter à des temps très lointains. Depuis que les sociétés, toujours plus vastes et en expansion, se sont crées, se sont formées, se sont structurées sous la forme d'une pyramide. Elles ont établi des rangs, des castes, des groupes pour chaque humain.

Les sociétés ont aussi créé des Dieux, pour pouvoir regrouper sous une même croyance, en grand plus grand nombre de personnes. Afin de pouvoir les contrôler, de les séduire, de les aveugler pour mieux ensuite les manipuler et les aliéner.

Les tyrans ont compris aussi que pour adoucir, pour abêtir et pour amollir le peuple, ils devaient les distraire, les amuser par des jeux, des loisirs et satisfaire leurs vices.
Etienne de la Boétie rappelle la célèbre phrase : « Panem et circenses »). Que déjà dans l'empire romain, il fallait donner au peuple « Pain et jeux ». Ainsi celui-ci pouvait se divertir et se nourrir. On assistait alors à une paix sociale et on évitait tous conflits et tous soulèvements.

Mais un tyran ou un despote seul ne pourrait exister et ne pourrait rien entreprendre, s'il ne bénéficiait pas du soutien d'hommes fidèles.
C'est ainsi qu'il asservi ces sujets les uns par les autres.
Ces autres, ces personnes cupides et détestables, qui se mettent au service du despote et viennent serrer à deux mains la servitude. Des personnes vils et pitoyables qui espèrent partager un butin et surtout obtenir les faveurs de leur maitre.
Ce sont ces personnes, les plus cruelles, les plus craintes par la population servile, car ce sont elles qui exécutent les ordres de leur maître, ce sont elles qui pillent, qui volent, qui violent et qui tuent.
Ce sont elles qui, en devenant aussi serviables et corvéables à merci, ont perdu toute liberté.

Je laisse à chacun de faire des liens, d'établir des parallèles et même des raccourcis, avec cette crise monumentale que nous vivons aujourd'hui et la gestion « calamiteuse » des années Covid-19, faite par nos gouvernants.
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Un très jeune homme, une acuité qui frôle le don de voyance :) !!! et tout reste frais, vrai et tristement d'actualité....
Lien : http://annabelle.mdx@free.fr
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" Soyez résolu de ne servir plus, et vous voilà libres. "
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Brillant, imparable, indispensable.
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La Boétie nous montre que la servitude réside en nous, dans l'acceptation de la tyrannie et le renoncement à la nature profonde de l'homme qui est l'amour franc de la liberté.
Tout ceci reste ma foi d'une parfaite actualité !
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Nécessaire. Passionnant. Profondément actuel.

Un essai qui m'est tombé au meilleur moment entre les mains vu le contexte politique.

La Boétie nous fait réfléchir sur les questions du pouvoir, de la soumission et de la rébellion.

C'est grandiose et écrasant de vérités.
À lire !
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C'est dingue comme un si petit livre peut avoir d'aussi grandes répercussions. Son auteur est génial. Son idée est géniale. La servitude qui est l'inverse de la liberté serait volontaire. Cette idée n'a rien perdue de sa force. Il est raconté que cette oeuvre exceptionnelle serait la copie rendue par La Boétie à un exercice donné par un professeur de l'université d'Orléans. Nous ne savons pas quelle fût sa note mais le texte est entré pour toujours dans l'histoire. L'idée est si géniale que la question est toujours posée sans que la réponse soit évidente. La Boétie ne serait pas allé au bout de la démonstration. Si vous relisez le discours, La Boétie conclue sa démonstration. La Boétie relie la servitude à l'habitude. Il n'y a rien de plus puissant que l'habitude, La Boétie nous dit que l'habitude est une seconde nature chez l'homme. A lire. A relire.
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Comme tous les commentaires les plus élogieux ont déjà été faits à l'égard de cette oeuvre, je vais tempérer le propos :

De La Boétie était jeune au moment de l'écriture, et aussi grande soit son intelligence, cela ne l'empêche pas de tomber sur des écueils tels que son manque d'expérience des rapports humains. Il n'est pas mention, à un seul passage, de psychologie ; il en parle sous un biais factuel.

J'attendais un texte qui sorte de la dimension purement politique ; de la Boétie ne parle pas des allégeances humaines telles que celles que l'ont fait à son entourage, à ses amis… il est uniquement question d'un asservissement d'un citoyen par l'État.

Sur la forme : chaque démonstration ne complète pas forcément le propos ; de la Boétie a tendance à se répéter.

Il en reste que c'est une bonne démonstration — militante — des différents piliers de la tyrannie.


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Écrit par la Boétie alors que celui-ci n'avait que 18 ans, Discours de la servitude volontaire se veut critique sur les habitudes du peuple à se laisser gouverner, et à apprécier la soumission.

Avec un regard intellectuel, critique et objectif, Discours de la servitude volontaire étonne par sa pertinence et ses exemples choisis avec soin. Les idées qui y sont explicitées demeurent pleines d'humanisme, rendant leur auteur plus que sympathique.

Bien que court, cet essai reste dense et devrait être mis entre les mains de tout citoyen, particulièrement en ces temps actuels.
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