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sur 303 notes

Critiques filtrées sur 4 étoiles  
Gordana n'a pas trente ans.
Elle est caissière au Franprix du numéro 93 de la rue du Rendez-Vous dans le douzième arrondissement de Paris.
La narratrice, elle, Jeanne est une retraitée qui passe à la supérette deux fois par semaine, le mardi et le vendredi. Elle observe des personnes et leur invente des vies ("J'ai l'oeil, je n'oublie à peu près rien, ce que j'ai oublié, je l'invente.J'ai toujours fait ça, comme ça, c'était mon rôle dans la famille,...).
Un homme sombre, la quarantaine, Horacio passe aussi à la caisse de Gordana, une fois par semaine, le vendredi. "L'homme du vendredi".
Horacio et Gordana, deux êtres qui suent la solitude, comme d'ailleurs notre narratrice.....
Marie Hélène Lafon dans son dernier livre descend de la campagne à la ville donnant la parole à une narratrice, probablement son alter-ego ("À Paris, dans le métro, pendant quarante ans, j'ai happé des visages, des silhouettes de femmes ou d'hommes que je ne reverrais pas, et j'ai brodé, j'ai caracolé en dedans, à fond, mine de rien,.....pendant quarante ans je me suis enfoncée dans le labyrinthe des vies flairées, humées, nouées, esquissées, comme d'autres eussent crayonné, penchés sur un carnet à spirale.") qui alterne l'histoire de sa propre vie avec celles inventées de ses personnages. Dans le fond elles n'ont rien de particulières, sinon que c'est Lafon qui écrit, et ca devient forcément intéressant avec un rythme trépidant. Elle raconte les immigrés, le racisme, la solitude des villes, la trahison,la vie matrimoniale rangée de nos pères et mères contre la notre souvent plus éphémère, décousue ,vouée à l'échec, la province, la campagne.......bref des vies tout en couleur. Elle nous fait vibrer avec les émotions, les voix, les rires, les odeurs, les goûts, les descriptions visuelles à fleur de peau.
Mais pour en revenir au fond , dans ces histoires de solitudes, celle de la narratrice est de loin la plus intéressante que celles inventées de ses personnages. Donc, à chaque fois qu'elle change de registre, on a qu'une envie c'est qu'elle retourne à la sienne. À mon avis, elles manquent un peu de consistance, s'amenuisant encore plus vers la fin.
Mais c'est quand même Lafon, j'aime ce qu'elle écrit bien que l'histoire de Gordana et d'Horacio m'ont un tout petit peu laissée sur ma faim.
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La narratrice, Jeanne Santoire aime épier, observer : « J'ai l'oeil, je n'oublie à peu près rien, ce que j'ai oublié, je l'invente.» Elle poursuit dans « Nos vies » ce qu'elle a toujours fait pour sa grand-mère Lucie qui disait qu'avec elle, « elle voyait mieux qu'avant son attaque. » Elle a continué à regarder le monde à «faire moissons et brassées» comme elle le faisait pour cette grand-mère « encalminée pour toujours devant la fenêtre. »

Jeanne nous découvre progressivement les vies qu'elle prête à Gordana caissière au Franprix de la rue du Rendez-vous et Horatio l'un de ses habitués qui comme Jeanne, depuis qu'elle est à la retraite, vient faire ses courses le vendredi en milieu de matinée.

Gordana, Horatio sont d'abord des êtres qu'elle observe, épingle, dont la vie se déroule en dehors de la sienne. Mais progressivement en revenant sur son passé tandis qu'elle imagine le leur, elle les relie à elle et les intègre à sa vie. Gordana et Horatio auraient pu être les enfants qu'elle n'a pas eu.

En imaginant leur vie, en leur faisant prendre corps, elle donne corps à la sienne et imagine aussi que son chemin aurait pu être autre.
Ce petit livre nous montre comment peuvent naître des histoires, comment naissent, se font et se défont des vies, comment l'auteur pioche dans sa propre vie pour redonner vie à d'autres et forge aussi la sienne à l'aune de la leur. Elle-aussi s'enroutine au contact de Gordana et Horatio car « il y a de la douceur dans les routines qui font passer le temps, les douleurs, et la vie… »
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L'on ne se bouscule pas vraiment au Franprix de la rue du Rendez-Vous, dans le XIIème arrondissement de Paris. Des habitués essentiellement qui, à heure plus ou moins fixe, font leurs commissions. À la caisse n°8, Gordana. Une femme blonde, de grandes jambes élancées et une poitrine généreuse, presque offensante pour certains. Gordana, un prénom qui vient de loin. Une femme jeune et cuirassée que la vie ne semble pas avoir épargnée. du moins, c'est ce que s'imagine Jeanne, une sexagénaire un peu seule, qui observe et imagine la vie des autres. Et ce vendredi, comme tous les vendredis depuis quelques mois, elle croise aussi cet homme, petit et tassé. La quarantaine, célibataire et sans enfants, suppose-t-elle. Jeanne s'imagine la vie des autres... Des vies qui s'imbriquent dans la sienne...

L'une observe tandis que l'autre agit. L'une imagine la vie de l'autre : son pays lointain, son fils laissé là-bas, l'argent qui manque, la solitude. Une vie qui, telle un entrelacs, s'entremêle dans la sienne. Une manière pour Jeanne de revenir sur son passé, son mari, ses parents commerçants ou encore la campagne qu'elle a quittée. Marie-Hélène Lafon dépeint avec beaucoup d'émotions, avec un brin de langueur aussi et de mélancolie, Nos vies. Des vies somme toute banales, dont les contours flous s'affirment et qui, sous la plume de l'auteur, exaltent un parfum à la fois doux-amer et sucré. Des personnages attachants dans une ville grouillante et anonyme, nous renvoyant à nos propres solitudes.
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Elle observe, commente, brode sur d'autres vies que la sienne. Sur la caissière du Franprix où elle a ses habitudes, sur les autres clients, sur le métro et ses voyageurs.

Rien n'échappe à celle qui raconte, invente ce qu'elle ne peut savoir. Mais ne cherchez pas de caractères remarquables ou particuliers chez ceux qu'elle observe. Sauf peut-être qu'elle leur donne le statut d'étrangers, et les pense dans une grande solitude puisque vivant dans une grande ville ; sans doute parce qu'elle, qui s'appelle Jeanne — un prénom de vieille pense-t-elle — vient de la campagne. On le sait car Jeanne livre aussi son histoire, pas inventée celle-là.

Qui s'intéresse à la vie d'une caissière de supermarché, d'un voyageur dans le métro, ou à celle qui les épie pour bâtir leur histoire ? Mais nous bien sûr, quand c'est Marie-Hélène Lafon qui raconte. Parce que son écriture belle, comme scandée, donne du relief à un sujet qu'on pourrait trouver anodin. Mais pas seulement. À travers ces existences (sûrement très éloignées des nôtres), à bien y regarder, elle parle de nous, de nos vies, de nos joies et nos peines, de l'héroïsme du quotidien qui est celui de vivre.
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Jeanne est à la retraite et elle vit dans sa solitude comme dans une armure. Son amour est parti ou plutôt a disparu il y a bien longtemps. Son père n'a jamais accepté son compagnon de culture différente et elle était un peu isolée déjà. Elle va deux fois par semaine au franprix de son quartier. Elle observe les gens et leur invente une vie, comme elle l'a fait quarante ans durant, en prenant le métro.

Sa première victime est Gordana. le mot est fort mais le prénom aussi est fort particulier. Gordana est caissière au Franprix. Elle a une poitrine généreuse que l'on ne peut éviter, du moins du regard, que l'on soit homme ou femme.

Et puis il y a Horacio qui passe toujours à la caisse de Gordana.

On découvre leur vie inventée par Jeanne en même temps que ses confidences sur sa propre vie, ses souvenirs, sa famille.

Elle les a voulus étrangers comme son compagnon et elle raconte aussi leur existence d'immigrés. Gordana a peut être un enfant laissé au pays.

Puis on découvre que Gordana au buste si généreux et au visage si beau a un pied bot. Les clients ne le voient pas et essaient souvent de charmer cette jeune personne qui les repousse d'un regard ou en les ignorant.

Le point commun entre ces trois personnages est la solitude ressentie dans une grande ville, loin de la famille, sans personne sur qui compter.

Les mots de l'auteure sont poétiques. Elle part dans son imagination, et c'est un plaisir de la lire.
Lien : http://pyrouette.canalblog.c..
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J'ai beaucoup aimé nos Vies.

C'est la plume de Marie-Hélène Lafon qui donne tout son charme au roman. Les phrases s'enchaînent, les idées s'accumulent comme des pensées s'écoulant librement, vagabondant d'un sujet à l'autre, d'un personnage à l'autre. On se laisse porter par le texte qui évoque avec simplicité et poésie le quotidien des gens ordinaires et la frontière se fait de plus en plus floue entre la réalité de ses propres souvenirs et la fiction des vies que Jeanne, la narratrice, imaginent pour les gens qu'elle observe autour d'elle.

Une très belle lecture.
Lien : http://lecturesdestephanie.b..
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Voix intérieurs du quotidien, une vie en projection permanente sur l'écran gris de la cité. Souvenirs, rues, avenues, impasses, boutiques, haines, bonheurs, faits-divers, amitiés, amours tout ce qui fait une vie.

La narratrice, jeune retraitée, un peu « enroutinée », invente une vie à un homme et une femme qu'elle croise chaque vendredi au Franprix de son quartier. Vies en miroirs qui sans prévenir vont l'aider à faire le bilan d'une vie ordinaire, mais une vie ordinaire n'existe pas, toute les vies sont extraordinaires.

Marie-Hélène Lafon creuse des vies, cherche des mots, construit des phrases et compose des images littéraires hyperréalistes. La ville s'anime sous nos yeux. C'est d'un beau gris tendre parfois traversé de brillance ou de noirceur. Paris quotidien, Paris grouillant, Paris vivant, le monde urbain tisse serré un entrelacs de solitudes.

De son écriture sincère et émouvante, l'auteur s'aventure hors de son cher Cantal, après Marie-Hélène à la campagne c'est avec bonheur que l'on retrouve Marie-Hélène à la ville.

Pour mémoire, n'hésitez pas à vous plonger dans « Joseph » une pure merveille, ainsi qu'« Histoires », Goncourt de la nouvelle 2016 tout de même.
Lien : http://www.baz-art.org/archi..
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Ce roman, c'est avant tout un style d'écriture exclusif, celui de Marie-Hélène Lafon. Elle enfile les mots comme on enfilerait des perles, avec ou sans virgules, selon les arrêts nécessaires ou non à leur lecture. Une salve ou bien une énumération hachée, un enchaînement sans halte ou avec de petits espaces respiratoires.

Au Franprix, rue du Rendez-Vous dans le XIIe arrondissement, à la caisse quatre, Gordana, sans sourire, passe les articles. D'où vient-elle ? Quelle a été son enfance ? de deux photos expulsées de son portefeuille tombé sous la caisse, Jeanne en déduit, puis invente des épisodes de sa vie, celle qu'elle a dû avoir avant la caisse du Franprix.
Jeanne est retraitée depuis un peu plus d'un an. Deux fois par semaine elle fait ses courses, voit Gordana derrière sa caisse, observe son attitude. Il y a aussi l'homme, client du vendredi matin. Quelle vie a-t-il ? « J'invente tout de cet homme, je sais son roman par coeur, je le déroule. » Voilà ce que fait Jeanne, depuis toujours, raconter et dérouler la vie des autres, de ceux qu'elle croise.
Dans sa vie à elle, il y avait grand-mère Lucie et tout ce qu'elle lui racontait pour l'occuper après son attaque. Elle réinventait des vies et Lucie les voyait malgré ses yeux devenus aveugles.
Parce que Jeanne nous parle aussi un peu d'elle, de sa vie aussi qui s'écoule, comme toutes les autres. Son vécu s'intercale. Celui-ci est réel alors que les autres naviguent dans l'imaginaire.
Associer l'homme à Gordana entraînerait d'autres possibilités, un autre chemin parce que l'homme semble tout tourné vers Gordana, mais, derrière sa caisse, elle est bien à l'abri des sentiments.
Dans la vie de Jeanne, dix-huit années se sont écoulées auprès de Karim mais son père n'a jamais voulu accepter cette relation, il ne pouvait pas faire sa connaissance, ne voulait pas après la guerre d'Algérie.
Dans sa vie, les amours se font, se défont, les morts s'insèrent, la brusque fin de sa mère, le décès de sa voisine. Des évènements brutaux posent leur marque avant que l'on s'arrange de ces moments douloureux. Les départs injustifiés, les trahisons, le silence de l'absence. Comme dans nos vies.
Les routines dans lesquelles on se laisse glisser, les infimes choses qui remplissent les vies, nos vies à tous.
Ce qui aurait pu être si… Ce qui aurait été devient d'une étrange netteté parce que les points précis donnés par l'autrice s'enrichissent de nombreux qualificatifs successifs, à la file. Les phrases s'étirent, renfermant plusieurs images hypothétiques à la fois.
On lit vite, les mots en cascade nous empêchent de ralentir, pour les prendre au vol avant qu'ils ne tombent.
C'est tout. Mais sans le prendre dans un sens restrictif. C'est un tout, celui des choses qui traversent ou pourraient traverser des vies, celle de Gordana, de l'homme, de Jeanne et aussi un peu les nôtres.
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J'avais beaucoup aimé " Joseph". Avec " Nos vies", j'ai troqué la solitude rurale pour celle des villes...

L'écriture de l'auteure est reconnaissable, superbe d'ampleur et de précision, assez singulière: des phrases hachées, énumératives, comme un trop-plein que l'on déverse. Je trouve qu'elle s'accorde bien à la narratrice du livre. En effet, Jeanne, depuis peu à la retraite, a une imagination débordante depuis l'enfance. Et , isolée, réconfortée par son monde intérieur, elle observe les autres, leur invente des vies...

Celle de Gordana, la jeune caissière du Franprix, d'Horatio, le cinquantenaire, qui ,comme la narratrice, passe toujours par la caisse de Gordana. Entre ces destins créés par l'esprit de Jeanne se glissent , peu à peu, des pans de sa propre existence qui permettent au lecteur de reconstituer son parcours, et ce qui a conduit à son quotidien solitaire . J'avoue que c'est cet aspect du roman qui m'a le plus intéressée. Car les conditionnels attachés aux autres personnages finissent par être un peu lourds à digérer pour le lecteur, le texte est pourtant assez court.

J'ai apprécié en tout cas cette radiographie psychologique et sociale, sonnant toujours juste. Il m'a manqué seulement un peu plus de profondeur dans l'approche des personnages, c'est un peu frustrant. Mais sûrement voulu.
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Tous ces gens dans nos villes....

Je fais cela souvent: être assise à la terrasse d'un café ou sur un banc public, regarder les gens et imaginer leur vie, leur quotidien, d'où ils viennent, vers où ils se dirigent et pourquoi, en passant devant moi...
Nous sommes entourés d'anonymes et nous cohabitons sans partage d'intérêt, la plupart du temps peu curieux d'autres destinées, d'autres parcours, d'autres chances de vie ou galères. Les imaginer, c'est aussi les regarder et les voir, quand notre rythme citadin s'y prête si peu.

Il faut être romancière talentueuse comme Marie-Hélène Lafon pour être aussi inventive de la vie des autres. Une caissière de petit supermarché et un client solitaire constituent le départ des idées qui vagabondent. La plume est rapide, urgente dans les descriptions de ce qu'elle imagine. Elle en fait même un peu trop dans les envolées lyriques mais les êtres deviennent réels, attachants dans leur diversité. L'ensemble se tient par un fil rouge d'un sentiment de solitude, qui englobe également la narratrice, femme seule, retraitée, amoureuse abandonnée, mais malgré tout entourée d'une chaleureuse famille.

Pour tous, la romancière construit une possibilité de partage de vies anonymes, mêlant dans son récit ses propres souvenirs familiaux, tout en pudeur et sensibilité.
Un bien joli livre.

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