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Elles étaient 5 les soeurs Bronte ou plutôt Brunty (origine irlandaise du père), les deux ainées sont mortes jeunes après leur passage dans un pensionnat pour leurs études, les 3 autres connurent le destin que l'on sait : 3 auteurs, des romans et une puissance d'écriture exceptionnelle comme si de leur univers clos avait jailli le feu.
De Charlotte, on connaît le magistral "Jane Eyre", d'Emily "Les hauts de Hurlevent" (pas si facile à lire) et d'Anne la moins connue, on peut apprécier le surprenant "La dame de Wildfell Hall" (un roman féministe et très moderne dans ses réflexions). Les lecteurs français connaissent moins les troublants poèmes d'Emily (à lire en VO pour entendre la magie des mots que ne peuvent à moins transcrire la traduction).
Denise LE DANTEC est aussi poète et c'est peut être pour cela que j'ai eu quelques difficultés à rentrer dans ce livre qui raconte la vie d'Emily : peut être un peu trop de "grandeur", alors que paradoxalement, Emily menait une vie très routinière, "vissée" à Haworth, dédiée au quotidien de la maison et soutenant son frère, Branwell, durant les dernières années. Pour ma part, je souhaiterais recommander le très beau film "To walk invisible" (uniquement en vo mais sous-titrage en anglais possible) pour appréhender encore mieux la famille Bronte et sa singularité créatrice.
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"Elle regardait vers un monde divisé en un gigantesque désordre et sentit en elle le pouvoir de l'unir en un livre" écrivait Virginia Woolf à propos de Emily Brontë et de son chef d'oeuvre, le Hauts de Hurlevent. Ces deux phrases, reprises par Denise le Dantec en page 257 de son "Emily Brontë : une vie" sont peut-être ce qui m'a le plus marqué de toute cette biographie.

Il est forcément difficile de retracer la vie d'une personne morte si jeune, d'une femme ayant vécu durant l'ère victorienne, d'une autrice dont la majeure partie des oeuvres de jeunesse ne sont pas parvenues à la postérité. Pourtant, la proportion de récit entre la petite enfance d'Emily et son âge adulte m'a désagréablement surprise : comme si finalement tout s'était joué avec les deuils successifs de sa mère et de ses deux soeurs aînées. C'est une thèse qui pourrait se tenir mais qui donne lieu ici à des extrapolations sur ce que ressentait, pensait, disait une enfant de moins de 7 ans avec assez peu de crédibilité. Sous la plume de Denise le Dantec, la toute jeune Emily pense et converse avec sa petite soeur Anne comme si elles étaient adultes. On y passe des chapitres et des chapitres alors qu'à l'inverse, l'écriture et la publication des Hauts de Hurlevent sont expédiés en moins d'un chapitre, comme si son seul roman laissé à la postérité n'avait que peu d'importance. Encore une fois, pourquoi pas, si on estime que pour Emily, SA grande oeuvre, celle où elle avait mis son âme, c'était Gondal, ce royaume imaginaire épique et poétique qu'elle tissait patiemment avec sa soeur Anne depuis l'enfance. Cela aurait mérité un récit plus argumenté.

J'ai aussi été un peu attristée de lire le sort fait à Charlotte dans cette biographie : décrite comme dure, autoritaire, peu compatissante. Clairement, l'aînée des Brontë n'a pas les faveurs de Madame le Dantec. Dommage !

Je recommande chaudement la lecture des Lettres choisies de la famille Brontë, un recueil passionnant et très bien contextualisé de Constance Lacroix, beaucoup plus fidèle à mon sens à la réalité historique de cette famille de prodiges.
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Tout d'abord, un immense merci aux éditions L'Archipel pour l'envoi de cet ouvrage. J'étais très intriguée à l'idée de lire cette biographie traitant de la vie d'une romancière que j'admire tant depuis l'âge de mes douze ans, période de mes touts premiers grands classiques, notamment ceux de la littérature anglaise du dix-neuvième siècle que je chéris de tout mon coeur. Les Hauts de Hurlevent est peut-être le seul roman qu'elle, Emily Brontë, ait jamais écrit, mais quel monument, quel chef d'oeuvre stupéfiant et immortel, cela ne fait pas le moindre doute, c'est comme gravé dans le marbre. Quand j'ai lu ce livre, j'ai été imprégnée et transportée par cette description si réaliste et saisissante de cette nature violente et tourmentée, sur tous les plans : la Mère Nature, la nature des sentiments, la nature humaine dans ce qu'elle a de plus faible, mais aussi de plus enragée et torturée aussi. Il y a une réelle beauté qui se dégage de cette peinture qu'Emily Brontë fait de la complexité de l'humanité. Peintre virtuose, mais aussi peintre avec des mots, je pouvais grâce à elle sentir la terre des moors sous mes pieds et le vent de la lande mugissant dans mes cheveux et me transperçant toute entière. J'étais donc très excitée de découvrir le récit de la vie de cette femme à mes yeux extraordinaire et fascinante en tout point.

D'ailleurs, cette biographie m'a semblé au cours de ma lecture plus être un récit qu'un documentaire sur le sujet en question ici présent. Ce que je veux dire, c'est que Denise le Dantec, autrice prolifique que je ne connaissais pas jusqu'alors, a su allier ses talents d'écrivain aux formes et au style très méticuleux et pointilleux de la biographie, sans pour autant en perdre l'authenticité de sa plume, ni la véracité des informations qu'elle nous fournit. le livre sur la vie d'Emily qu'elle nous donne à lire est extrêmement détaillé, sans pour autant être rébarbatif, loin de là. Cela se boit comme du petit lait, expression qui, quand je l'emploie, n'est absolument pas péjorative à mes yeux, bien au contraire, et cela se savoure comme quand on lit une des biographies rédigées par Stefan Zweig, par exemple. C'est le meilleur comparatif que je puisse faire selon moi. J'ai beaucoup appris de cet ouvrage, et je ne peux qu'admirer l'ampleur du travail de Denise le Dantec et m'en instruire, c'est tout bonnement remarquable.

Qui plus est, la quatrième de couverture nous introduit Denise le Dantec comme une cinquième soeur qu'Emily Brontë se serait trouvée. Je trouve, après lecture, cette affirmation tout à fait pertinente et je ne peux qu'approuver. Au-delà du travail de recherche colossal de Denise le Dantec, que celle-ci n'a cessé d'approfondir depuis la première édition de cette biographie en 1995, on sent au cours de notre lecture la réelle volonté de cette dernière à comprendre l'âme éprouvée par le deuil de la si jeune Emily, sa conscience accrue de la mort, la bonté et la tendresse qu'elle témoignait à l'égard des humbles ainsi que son désir totalement inexistant d'atteindre les states de la gloire et de l'amour éternels, au contraire de sa grande soeur Charlotte.

Et, en effet, contrairement à ce que j'avais toujours cru, Emily n'avait pas que deux soeurs, les illustres Anne et Charlotte, reconnues elles aussi comme issues du génie littéraire de la famille Brontë par de nombreux biographes, historiens, critiques littéraires depuis le dix-neuvième siècle jusqu'à nos jours. Il y avait aussi Maria et Elizabeth, les deux aînées qui ont très rapidement joué le rôle de petites mères et qui sont parties bien trop tôt. Cela m'amène au fait que les parallèles que Denise le Dantec dresse entre les expériences de vie qu'ont affronté et traversé les soeurs Brontë et leur oeuvre littéraire crèvent les yeux. Denise le Dantec met cela bien en évidence, sans omettre le moindre détail. Les décès presque simultanés de Maria et Elizabeth constitueront le premier matériau nourricier des écrits majeurs de chacune. Par exemple, en lisant cette biographie, j'avais l'impression de me trouver dans l'enceinte sordide établissement de Brocklehurst dépeint avec une grande justesse dans Jane Eyre, ou de voir la figure de paria bouleversante et vengeresse du seul et unique Heathcliff en ce garçon de ferme taciturne, intrus au sein de sa propre famille lui aussi, qui seul aura réussi à faire faire au coeur d'Emily un sursaut de compréhension face à cette asociabilité qui la caractérisait elle aussi si bien. Si j'avais lu également les oeuvres de la douce et chérie Anne Brontë, ce que je me suis promis de faire un jour, j'aurais pu d'autant plus percevoir la toute beauté des échos qui saisissent le coeur du lecteur, lui font écarquiller grand les yeux à la fois de façon naturelle et magistrale. C'est là toute la puissance de cette biographie : son essence. Celle de la production littéraire d'Emily est à la fois empreinte de l'âme à la fois insoumise aux bonnes moeurs de son temps mais dévouée à sa famille, qui représente sa souffrance et son refuge ; l'âme de cette enfant sauvage des landes indomptable et qui n'est jamais véritablement devenue femme, malgré le changement du corps, les responsabilités et la vieillesse. Mais ses oeuvres sont aussi indubitablement influencées par ce monde extérieur à Haworth, le presbytère familial, et surtout par sa famille pour laquelle elle éprouvait un amour fusionnel qui en devenait presque ambigu, dans les cas de ses relations avec Anne et Branwell. Quelque soit le sentiment qui l'a ébranlée, jalousie, envie, défi, peur, chagrin, c'est bien l'oralité irlandaise de son père que l'on reconnaît dans les talents de conteuse de Nelly Dean, c'est bien ce garçon de ferme orphelin et illégitime qui a inspiré le bois dont Heathcliff est fait, et bien plus encore... Emily était à ce point liée à sa famille que, là où l'on lit son histoire, on lit aussi elle de sa famille toute entière. Et si son oeuvre est considérablement marquée par les jeux d'écriture de son enfance qu'elle réalisait avec ses frère et soeurs et par les personnalités de chacun(e), eux aussi se sont servis d'elle comme muse dans chaque chose qu'ils créaient. Ce lien familial, malgré les tentatives de rupture, n'a jamais été aussi fort que dans les chefs d'oeuvre littéraires d'Anne et Charlotte où, tout comme Emily, elles tentaient de s'extraire de l'injustice et de la façon de penser étriquée de leur temps, ou dans les portraits familiaux réalisés par le prodige Branwell et qui étayent la lecture de cet ouvrage, entre autres choses.

Pour conclure, que vous soyez fan des Brontë ou non, je ne peux que vous encourager à vous immerger dans cet ouvrage si complet et passionnant sur cette famille talentueuse dans de nombreux domaines et vraiment pas comme les autres. La poésie de l'âme intemporelle d'Emily ne pourra que vous séduire, et sa capacité de voir le véritable sens de chaque chose, de voir au-delà de ce qui est percevable si je puis dire, vous époustouflera.
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A une lecture assez lente pour pleinement profiter de ces mots, on se projette très facilement dans les plaines qui ont habitées et inspirées Emily Brontë. Denise le Dantec, poète, nous transporte dans la vie et les pas littéraires de la famille Brontë, bien au delà d'une lecture simplement biographique. C'est un véritable roman qui s'étale sous nos yeux, rythmé d'une poésie sans équivoque. On apprend tellement de choses sur la famille Brontë, et pas seulement sur Emily, point central de cette oeuvre, que sa richesse rend ce récit vraiment intéressant.

J'ai beaucoup aimé cette lecture, même si elle m'a pris plus de temps que prévu. C'est une lecture qui nécessite de savourer chaque mot et chaque phrase. Elle me donne envie de découvrir les écrits de chacun des Brontë ! Denise le Dantec perce le voile du monde d'Emily et partage ce destin si révolté, fort et inspiré.
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D. le Dantec, poétesse d'origine, retrace la vie de la romancière Emily Brontë avec une plume touchante et juste. On découvre la vie de l'auteure des Hauts de Hurlevent sous un angle inédit. Il ne s'agit pas d'une biographie factuelle, mais d'une interprétation de la vie d'Emily auprès de ses frère et soeurs. Même si il y a un solide matériel documentaire, agrémenté de photos, la biographe insère des dialogues qui fictionnalisent le récit et le rendent plus vivant et palpable. On ne peut ne pas être touché par cette fratrie soudée dans les jeux d'écriture auxquels ils s'adonnent mais aussi devant l'adversité de la vie qui peut se montrer cruelle.
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Cette biographie permet d'expliquer la genèse des Hauts de Hurlevent : pourquoi elle a choisi tel nom, tels décors... Emily est une jeune fille passionnée qui tire son inspiration des landes dans lesquelles elle vit, mais aussi des gens qu'elle est amenée à rencontrer. J'ai tout de suite été charmée par son caractère à la fois sensible et opiniâtre.
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C'est donc un coup de coeur pour moi, j'ai été charmée par tous les aspects de cette biographie qui m'a donné envie de me replonger dans Les hauts de Hurlevent que j'ai lus il y a quelques années et que j'avais adorés !
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Résumé Emily Brontë Une vie de Denise le Dantec
Emily Brontë meurt à l'âge de 30 ans, quelques semaines après son frère.

Elle n'a pas voulu se soigner. Elle est entourée de ses deux soeurs et son père.

Avis Emily Brontë Une vie de Denise le Dantec
Dans la famille Brontë, on demande l'auteur d'un seul roman qui aura du succès après sa mort, Les Hauts de Hurlevent. Cet auteur est Emily Brontë, morte à 30 ans des suites de maladie. Elle est la soeur d'Anne, Charlotte et Branwell Brontë. Ses frères et soeurs sont également morts très jeunes. Seules Anne et Charlotte ont connu du succès du temps de leur vivant. Deux siècles plus tard, les livres de ces femmes s'achètent toujours autant, se lisent toujours autant et sont toujours étudiés.


Emily Brontë ne laisse que ses écrits pour parler d'elle, et encore ils n'ont pas tous été retrouvés. le reste n'est qu'interprétations, études de la vie de la famille, témoignages de ceux qui lui ont survécu ou encore la passion d'un auteur qui, adolescente, découvre les Hauts de Hurlevent. Il a fallu des années pour tenter d'écrire sur un tel personnage, amasser quantité d'informations pour écrire cette biographie qui comporte de nombreux vers de l'auteur pour coller à l'époque de la vie d'Emily Brontë.

Le père d'Emily Brontë a pris en charge l'éducation de son unique fils. Ce dernier présente, déjà, des soucis psychologiques. Il doit donc être protégé. le manque d'argent est présent. Les filles, après la mort de leur mère, prendront en charge l'entretien de la maison avec leur tante qui les éduquera. Mais tous ont du temps libre pour parcourir les landes, lire encore et toujours, que ce soit des journaux, des livres, et surtout écrire à plusieurs mains. Raconter des histoires issues de leur imagination mais aussi de tout ce qu'ils peuvent lire. En ce temps-là, le père va tenter de faire instruire leurs filles. Mais cela se passe mal. Deux tombent malades et meurent. Les suivantes, Charlotte et surtout Emily, n'auront de cesse que de revenir chez elles. Charlotte, qui devient l'aînée de la famille, a toujours eu à coeur de parcourir l'Europe. Elle y parviendra en travaillant et en s'instruisant. Emily s'est rapprochée de sa jeune soeur, Anne. Une relation qui unira pendant de nombreuses années les petites filles, devenues grandes. Emily, avec son caractère entier, prompt à la colère, aide les plus faibles. Elle sera la seule à tenter d'adoucir les derniers mois de vie de son frère.

Pour ceux qui comme moi ne connaissent pas la vie des Brontë, et en particulier, celle d'Emily, on fait connaissance avec une enfant très intelligente, qui très vite connaît la nature humaine, elle qui ne se lie à personne, et donc ses faiblesses. Emily se caractérise par sa beauté, comme tous les enfants Brontë, par des attitudes très emportées, mais aussi par une propension à la solitude. Solitude due aux décès de sa mère, en premier, et de proches. Elle n'a pas pu recevoir de l'amour et donc ne sait pas comment le donner. Elle a voulu être aimée et aimer. Très vite, l'endroit où elle vit est son refuge, sa maison et en particulier la lande, source d'inspiration qui ne se tarit pas. Faune et flore, Emily a tout compris. La solitude d'Emily est due à cet abandon. le père n'est pas extrêmement proche de ses enfants. Emily ne veut aucune contrainte, elle veut être libre, même si elle réalise les nombreuses tâches ménagères qui lui incombent. Dans cette biographie, émaillée des nombreux vers d'Emily Brontë, qui permettent de comprendre son état d'esprit, on assiste à la culpabilité énormément présente chez Emily, à son évolution en tant que poétesse, écrivain, aux problèmes qu'elle a pour assumer sa féminité, à ses nombreux cauchemars. La lande, écrire lui servent de refuge. Ses différents séjours à l'extérieur ont été profitables dans une certaine mesure. Emily, tout comme ses frère et soeurs, ont pratiquement vécu en autarcie. Est-ce que cela leur a suffi ? A Charlotte, non, qui a toujours voulu partir. A Emily ? Cela ne l'a pas aidé. Mais aurait-elle, pour autant, donné toute sa plénitude à ses écrits ?

J'aime découvrir la vie des gens, que ce soit dans les romans ou dans les biographies. Cela permet de s'approprier un peu le personnage, de le comprendre surtout. Quand on ne le connait pas, on le découvre. Pour moi, cela a été le cas ici. J'avais peur de m'ennuyer, de ne pas tout comprendre. Cela a été un peu le cas concernant les vers, la poésie d'Emily Brontë. Je n'ai pas eu le temps de m'y pencher trop dessus. Je pense que, pour cela, il faut être vraiment en condition.

Je remer19cie Babelio pour cette édition Masse Critique ainsi que les Editions Ecriture.

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Grâce  à cette biographie de Denise le Dantec, je pars pour Haworth, dans le Yorshire, dans le presbytère où furent élevés les soeurs Bronte, Maria et Elizabeth, Charlotte, Emily et Anne ainsi que Branwell, leur frère, dont j'avais lu il y a quelques temps la biographie écrite par Daphné du Maurier, le monde infernal de Branwell.

Une maison sans confort, froide dont les fenêtres donnant sur le cimetière ne pouvaient occulter les pierres tombales de la famille Brontë et dans laquelle les enfants vivaient repliés sur leurs jeux, leurs études et leur complicité. 

Je connais donc déjà beaucoup d'éléments de la vie de cette famille d'écrivains, mais je voulais en savoir plus sur la personnalité de l'auteure des Hauts de Hurlevent, roman qui avait enflammé mon esprit adolescente et que j'ai relu adulte et dont je garde le souvenir d'un amour puissant, dévastateur mais où se mêlent également quête d'identité, vengeance, violence, désespoir et destruction.

Denise le Dantec retrace la courte vie de cette jeune fille secrète, discrète, silencieuse, limite agoraphobe, éprise de nature entourée de ses animaux, très attachée aux tâches ménagères qui lui permettaient de rester dans le presbytère et de consacrer son temps disponible à la lecture et l'écriture.

Emily conservera toujours le goût des choses simples de la vie, refusant ce qui, à tort ou à raison, lui apparaîtra comme sophistication. (p119)

Et pourtant quelle femme étonnante : dyslexique, enfant précoce, s'enrichissant de tout ce qu'elle entend ou lit, les quatre enfants étant avides d'écouter toutes les histoires, si possibles effrayantes, que les domestiques pouvaient raconter se déroulant dans la lande balayée par le vent.

Les quatre enfants l'écoutaient, un peu effrayés, se cachant parfois les yeux pour ne pas voir se déplacer les grandes ombres animées lancées par les flammes de la cuisinière de fonte le long des murs ou d'autres ombres encore à travers les fenêtres sans rideaux de la maison, parmi les dalles du cimetière parcouru de feux follets. Ils écoutaient la servante jusqu'à ce que le sommeil eût alourdi leurs paupières et que, lasse elle-même, Taby (la servante) entonnât les mélancoliques chansons du pays. (p102)

Admiratrice des écrits de Byron, Shelley et marquée par les deuils successifs de sa mère qu'elle perd à 3 ans, puis de ses deux soeurs, Maria et Elizabeth, mortes de tuberculose et sûrement des difficiles conditions de vie dans le pensionnat où leur père, Patrick, les avait envoyées, Emily assista également à la longue et lente déchéance de son frère Branwell.

On comprend toujours mieux la genèse d'une oeuvre romanesque quand on se penche sur la vie de son auteur. Il est fascinant de découvrir tous ces petits événements qui ont concouru à sa création, les décors, les rencontres. Quelle imagination féconde pour cette jeune femme qui vivait presque en recluse au sein de cette famille où régnait une forte complicité entre les enfants, tous animés par le même amour de la littérature, de l'écriture et de la création.

Emily rêve de créer un univers qui soit sien et dont elle saint qu'il sera "une contrée  nordique aux landes couvertes de brouillard et de rosée" : Gondal. (p110)

J'ai trouvé cette biographie très agréable dans sa lecture, même si j'ai parfois ressenti des répétitions (insistantes et inutiles) sur la santé des différents membres ( sur la perte de la vue par son père par exemple). Denise le Dantec mêle biographie et roman en imaginant certains dialogues et l'influence qu'auront eu certains événements ou rencontres. Les notes en début de chaque chapitre me semblent inutiles, j'ai préféré les ignorer et découvrir par moi-même les événements relatés.

On se transpose dans le quotidien de cette famille où l'instruction et la culture étaient les priorités du père, poussant ses enfants, garçon et filles (même si Branwell fit l'objet d'une préférence de la part du révérend), on assiste aux joutes littéraires qui existaient entre les différents membres qui permirent à chacun d'écrire des références de la littérature anglaise, dans des styles différents, en particulier pour Charlotte avec Jane Eyre, Anne avec Agnes Grey et bien sûr les Hauts de Hurlevent pour Emily.

Denise le Dantec attire l'attente sur les rapprochements entre les différents membres de la famille mais aussi les affrontements, les distances parfois prises, à différentes époques en particulier entre Charlotte, assez dominatrice et Emily, rebelle :

Comme se plaisait à dire Branwell, si Charlotte représentait le jour, Emily était la nuit. D'où pouvait venir une telle antipathie entre elles ? Emily se le demandait souvent. Elle avait le sentiment que Charlotte en voulait à son corps, comme si leurs "jeux" d'autrefois avaient laissé sur elle des traces irréparables. Tel était l'amer constat d'Emily, et l'hostilité qu'elle ressentait à l'égard de Charlotte se manifestait par une angoisse dont elle ne savait comment se libérer. (p139)

La biographe a dressé le portrait d'Emily, avec les documents en sa possession, et de son univers de cette auteure dont il ne subsiste que peu d'écrits, témoignages, mais pour ma part j'ai pris plaisir à soulever le voile sur cette femme mystérieuse, qui n'a pas connu le succès à la sortie de son unique roman, paru un an avant sa mort et qui reste une référence dans la littérature anglaise.

Le péché, pour Emily Brontë, n'est pas une faute morale : c'est dans la démesure que l'être peut se connaître, car la déchéance contient une splendeur cachée. (p257)

Elle qui ne connut jamais, semble-t-il, l'amour, devait avoir une imagination et un univers romanesque immenses pour écrire une des plus belles histoires d'amour : celle de Cathy et Heathcliff.

Mes grandes souffrances en ce monde ont été les souffrances de Heathcliff, je les ai toutes observées et ressenties dès le début : ma grande pensée dans la vie, c'est lui-même. Si tout le reste périssait et qu'il demeurât, lui, je continuerais d'être, moi aussi, et si tout le reste demeurait et que lui fût anéanti, l'univers me deviendrait terriblement étranger : je ne semblerais plus en faire partie. Mon amour pour Heathcliff ressemble aux rocs éternels du sous-sol : source de peu de joie visible, mais nécessaires.... Je suis Heathcliff. (p160)

Merci aux Editions de l'Archipel et Babelio Masse Critique pour cette lecture
Lien : https://mumudanslebocage.wor..
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Née en 1818 et disparue en 1848, Emily Brontë a marqué la littérature anglaise et mondiale avec son roman Les hauts de Hurlevent et ses poèmes, cependant moins connus. Durement frappée pendant son enfance par la mort de sa mère et de ses sœurs aînées, Maria et Elizabeth, elle a vite décidé de vivre sa vie en toute indépendance, et d'écrire pour sublimer l'existence face au mystère impénétrable de la mort et de la disparition. « Rejetant toute conformité à l'usage, aux règles, à la modération et au compris, qu'elle considérait presque comme une lâcheté, Emily Brontë n'accepta jamais la mesure. Tout plutôt que la contrainte. » (p. 30) N'ayant presque jamais quitté Haworth, le village où son père était pasteur, Emily a grandi avec Charlotte, Branwell et Anne et a composé avec eux leur fameuse œuvre de jeunesse, le Gondal, qui se retrouve en partie dans le chef-d'œuvre d'Emily. Selon la volonté de son père, et à l'instar de son frère et de ses sœurs, Emily est très instruite, mais elle dispose en outre d'un esprit très vif et d'une vie intérieure intense qui la poussent naturellement à l'introspection et à la solitude.

L'abondante bibliographie présentée en fin d'ouvrage prouve l'intérêt intense de Denise Le Dantec pour Emily Brontë, et l'introduction présente un projet précis. « Écrire la vie d'Emily Brontë revient-il sans doute à consoler le rêve intérieur que j'avais d'elle, et même à compenser la perte de l'élan excessif qui, jeune, m'avait entraînée vers elle. Néanmoins, loin de réinventer mon rêve, je me suis appliquée ici, au contraire, à la différencier de moi. » (p. 12) Nourrie d'extraits de lettres, de journaux et d'œuvres des Brontë, cette biographie est intéressante, mais se livre parfois à des extrapolations que je qualifierai de romanesques, notamment sur les pensées de la jeune Emily, et à des explications de texte parfois un peu audacieuses. « Ses poèmes ne sont pas pittoresques. Ils ne décrivent pas, même s'il s'agit des landes de Haworth. Emily n'est pas un poète qui exalte sa région mais, sous sa plume, jeune encore, la moindre bruyère devient toutes les bruyères du monde. » (p. 202) C'est à croire que Denise Le Dantec a quelque peu échoué dans son entreprise de se libérer de la fascination qu'elle éprouve pour l'immense autrice des hauts de Hurlevent.

Si vous cherchez un autre éclairage sur la vie de cette fratrie d'écrivains que furent les Brontë, je vous conseille l'excellent ouvrage de Daphné du Maurier, Le monde infernal de Branwell Brontë.
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Cette année, je souhaitais lire plus de classiques. Et puisque le #ReadingClassicsChallenge2018 de Juillet était dévolu à Emily Brontë et que Mylène des éditions L'Archipel m'avait gentiment envoyé cette biographie (merci!) : tout était réuni pour que je découvre l'univers de cette auteure.

Je n'ai jamais lu Les Hauts de Hurlevent, mais cela ne saurait tarder car cela fait un moment que ce titre m'intrigue. de plus, c'est évidemment un grand classique de la littérature anglaise. Néanmoins, si Emily est assez fascinante et qu'elle écrit des poésies troublantes, j'ai eu beaucoup de mal avec la lecture de cette biographie romancée.

En effet, le style de l'auteure est un peu vieillot et j'ai trouvé cela long à lire. Je ne suis pas habituée à ce genre de lectures classiques et historiques donc je pense tout simplement que ce livre n'était pas fait pour moi. Il m'a néanmoins donné envie de découvrir les poésies et l'oeuvre de cette auteure. Je dois également souligner la très belle couverture de cette réédition. À conseiller plutôt aux amoureux de l'auteure ou de littérature classique. Avez-vous lu Les Hauts de Hurlevent ?
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J'ai eu beaucoup de mal à lire et à terminer cette lecture, je n'ai pas du tout accroché à cette biographie d'Emily Brontë. Pourtant j'étais partante pour en apprendre un peu plus sur la courte vie de cette jeune auteure qui m'avait tant impressionné avec son fameux « Les hauts de Hurlevent » que j'avais pris plaisir à lire et à relire pendant mon adolescence. On sent que Denise le Dantec a fait un beau travail de recherche et j'ai aimé trouvé au centre du livre la documentation présentée avec des textes et des peintures. Cela n'a pas suffit à faire passer les chapitres indigestes car trop longs, trop alambiqués et surtout bien souvent ennuyeux. Je ne parlerai même pas de son style d'écriture à la fois désuète et gnangnan. Je ne suis certainement pas la meilleure personne pour donner mon avis car c'est la première biographie que je tente donc je n'ai pas de comparaison. J'ai eu aussi beaucoup de mal avec la partie fictive de cette biographie qui me laisse perplexe, c'est toujours délicat de faire parler les gens une fois qu'ils ne sont plus là, de se mettre à leur place, dans des lieux inconnus, une époque différente, bref un vrai travail d'équilibriste. Les dialogues sont d'ailleurs bien trouvés entre les différents membres de la fratrie Brontë mais du coup cela m'a donné un sentiment de recul et je n'ai pas réussi à investir les personnages. Il faut reconnaître que cette famille pauvre étaient atypique et recelait de nombreux talents. Emily semble avoir été une jeune femme très seule, introvertie, tourmentée et d'une psychologie éloignée de celle de sa soeur Charlotte qui était plus mondaine. Elle aimait vivre dans la nature qui bordait le Presbytère et être accompagnée de l'affection loyale de ses chiens. Ce fut pour moi une lecture laborieuse, pas assez centrée sur Emily et avec laquelle j'ai eu bien de la difficulté.

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