Ce tome fait suite à
The weatherman, tome 1 (épisodes 1 à 6) qu'il faut avoir lu avant. Il comprend les épisodes 1 à 6 de la saison 2, initialement parus en 2019, écrits par
Jody LeHeup, dessinés et encrés par
Nathan Fox, avec une mise en couleurs réalisée par
Moreno Dinisio, avec une conception graphique réalisée par Tom Muller. Il comprend également les couvertures originales réalisées par
Nathan Fox, ainsi que les couvertures variantes réalisées par
Andrew Robinson (*6),
Mike Mignola,
Stéphanie Hans,
Daniel Warren Johnson,
Jason Pearson,
Duncan Fegredo, Ladrönn.
Un virus ravage la population de la Terre. le gouvernement mondial s'est délocalisé sur Mars, a déclaré la mise en quarantaine de la Terre, et y a fait établir une station spatiale à proximité pour surveiller et empêcher tout départ de la Terre, mais aussi toute tentative pour y atterrir. Deux gardes viennent de prendre leur service à bord de la station, du côté espace, persuadés qu'ils n'auront rien à faire, parce que personne ne souhaite aller sur Terre. Un vaisseau de moyenne importance arrive à fond la caisse en fracassant les satellites d'avertissement de quarantaine et descend vers la Terre. le responsable de la base spatiale envoie un avertissement, mais ses écrans affichent que les armes du vaisseau sont enclenchées. Ils le laissent passer avec un autre avertissement. À bord du vaisseau,
Nathan Fox est en train de regarder la météo et il critique sévèrement son remplaçant en tant que présentateur. Pendant ce temps-là,
Amanda Cross est en train de rappeler l'origine du virus à Marshal : un virus découvert par une colonie minière sur Callisto, et modifié par l'armée américaine pour essayer de le transformer en arme bactériologique. Ce virus modifié est tombé entre les mains de
Ian Black, un ancien agent de la CIA, qui l'a remis à Jazen Jenner. Ce dernier l'a lâché sur la Terre le 23 mai 2763, 7 ans auparavant, et il a fait 18 milliards de morts. Après la catastrophe, Nyseth, une scientifique, a remplacé la mémoire de
Ian Black par une autre personnalité, celle de Nathan Bright, et Nyseth se trouve sur Terre. Seule la mémoire d'
Ian Black peut permettre de localiser le deuxième extrait de virus aux mains de l'organisation terroriste Sword of God.
Fort de ces informations, Marshal va trouver Nathan Bright dans la salle de pilotage du vaisseau, où il est en train de danser avec White Light, une membre de l'équipage, devant une de ses propres vidéos. La prise de bec entre Mashal et Nathan Bright est immédiate, mais il est l'heure de passer à table et Nathan Bright ne peut pas y résister : il s'empiffre en remerciant le chef cuistot Garren. Pendant le repas, Marshal remonte ses manches, et
Amanda Cross remarque son tatouage sur l'avant-bras droit. White Light prend la mouche à une remarque de Cross, balance son bol de ramen, et sort de table. Marshal demande vers où se dirige le vaisseau : Cross répond qu'ils se rendent à New York où il subsiste un avant-poste avec des êtres humains sains et saufs. Dans le vaisseau spatial du gouvernement, la présidente Burga joue au golf et reçoit un député représentant les intérêts de grosses firmes. Il vient négocier la possibilité de lâcher une bombe thermique pour assainir la surface de la Terre, quitte à éradiquer tous les survivants. L'enjeu est d'ordre économique : recommencer à exploiter les ressources de la Terre. Au cours de la discussion, la présidente se rend compte qu'elle n'a peut-être pas le choix, qu'elle ne peut que différer la décision.
Après avoir refermé le tome 1, le lecteur n'était pas certain que les ventes permettraient aux auteurs de continuer leur récit pourtant très divertissant. Il est donc fort aise de voir arriver la deuxième saison parce que l'histoire était loin d'être finie, et encore plus de voir qu'il s'agit des mêmes auteurs, seul le coloriste a changé. Moreno Diniso adopte une approche naturaliste au service des dessins. Il s'attache à donner une couleur à chaque forme détourée, en veillant à ce que chacune ressorte bien par rapport à sa voisine. Il n'abuse pas des dégradés, préférant les aplats de couleurs, parfois de teintes différentes pour donner une impression de source d'éclairement et d'ombrage. Il utilise les effets spéciaux de l'infographie avec parcimonie et une grande pertinence. le lecteur est toujours aussi étonné que l'éditeur ait réussi à décrocher des couvertures d'illustrateurs aussi prestigieux que
Mike Mignola,
Duncan Fegredo, Ladrönn. Il est encore plus satisfait de voir que
Nathan Fox est en très grande forme pour toute la durée des 6 épisodes. Même s'il s'est écoulé du temps entre sa lecture de la première saison et celle-ci, il reconnaît immédiatement les personnages qui sont toujours aussi expressifs :
Amanda Cross et sa coiffure élaborée, Nathan Bright avec sa houppette et ses postures dégingandées, sans oublier son franc sourire, Marshal avec sa forte carrure un peu raide et son visage fermé. Les nouveaux sont tout aussi réussis : le pauvre scientifique Argus malmené par des combattants aguerris (il faut un peu de temps pour découvrir la particularité de ses jambes, au point que le lecteur revient en arrière pour voir s'il n'a pas raté quelque chose), l'immédiatement sympathique jeune fille Pace avec ses béquilles, accompagnée par un énorme ours blanc.
Comme dans le premier tome,
Nathan Fox dessine avant toute chose pour raconter l'histoire, plutôt que de se mettre en avant. le lecteur se rend compte qu'il sourit devant les pitreries de Nathan Bright, mais il s'agit de montrer sa personnalité, pas d'en rajouter. Il se rend également compte que la narration visuelle est aussi fluide que dense. L'artiste représente les décors en fond de case dans plus de 4 cases sur 5, ce qui est une fréquence très élevée dans une bande dessinée. Cela génère une immersion intense quels que soient les environnements : une passerelle courant le long de la coque extérieure d'une station spatiale, une ville avec une forte densité de population, les coursives fonctionnelles d'un vaisseau spatial, un laboratoire avec des expériences comportementales sur un être humain, une mégapole en ruine, une forêt avec des arbres décharnés sans feuille, une forêt canadienne luxuriante, le cercle arctique, etc. L'artiste impressionne également fortement avec les séquences qui prennent le lecteur par surprise. Dans la quatrième page, le lecteur sourit en voyant un dessin en pleine page montrant le vaisseau d'
Amanda Cross passer au travers d'un satellite d'avertissement. Il sourit à nouveau en voyant Nathan Bright danser avec White Light dans la salle de pilotage. Il ressent tout le plaisir sadique du député à humilier la présidente en lui faisant sentir qu'elle est dans une position de faiblesse pour cette négociation. Il ressent toute la joie de vivre de Pace à chevaucher son ours blanc Pickles. Il est atterré par le traitement réservé à l'individu prisonnier dans le laboratoire.
Nathan Fox sait passer du rire bon enfant à l'horreur psychologique ou corporelle avec un naturel extraordinaire.
Bien évidemment, le lecteur est revenu pour avoir la suite de l'histoire. Durant une page,
Amanda Cross fait le point avec Marshal, ce qui permet au lecteur de se remettre en tête le fil de l'intrigue. Celle-ci est à la fois simple (essayer de retrouver la banque mémorielle de
Ian Black pour rétablir la personnalité originelle de Nathan Bright), à la fois remplie de péripéties directe (la réalité de ce qui se passe sur Terre), avec une ouverture sur les enjeux pour le gouvernement de la présidente Burga. La quête de la banque mémorielle fournit une bonne dynamique au récit, et
Jody LeHeup sait ne pas oublier ses personnages pour autant. Ils ne sont pas réduits à l'état de simple artifice narratif presque interchangeable. le scénariste n'oublie pas quelques petites touches d'humour au bon moment. Alors que les épisodes sont denses, le lecteur se rend compte qu'il ne voit pas le temps passer, que la lecture est agréable sans jamais être lourde, bien rythmée sans donner l'impression d'être épileptique, très divertissante grâce aux nombreuses trouvailles, sympathiques tout en restant adulte. Il dévore donc ces 6 épisodes avec un vrai plaisir de lecture. La dernière page annonce une troisième et dernière saison et à nouveau, le lecteur croise les doigts pour qu'elle voit le jour. En y repensant, il se dit que les personnages ne sont pas si manichéens que ça, même s'il s'agit de sauver des dizaines de millions d'êtres humains d'une deuxième hécatombe causée par une pandémie. L'ambiguïté naît du personnage principal, éminemment sympathique, mais responsable de 18 milliards de morts, dans sa précédente identité. le scénariste réussit à faire en sorte que le lecteur ne parvienne pas à condamner Nathan Bright, ce qui est une preuve de son savoir-faire. D'un autre côté, il se méfie aussi de cette poignée d'individus prêts à tout pour empêcher la deuxième pandémie, quitte à utiliser des moyens que la morale réprouve. LeHeup montre aussi que l'exercice du pouvoir par la présidente Bruga se heurte à des réalités économiques où la morale n'a pas sa place. Ainsi ce récit s'élève bien au-dessus d'une simple chasse au trésor dans un décor de science-fiction inventif.
Avec ce deuxième tome, le lecteur retrouve tout ce qu'il lui avait plu dans le premier : un scénario rapide et inventif qui ne sacrifie pas les personnages, des dessins d'un grand naturel qui assure une narration visuelle d'une grande richesse, et une situation moins manichéenne qu'il n'y paraît de prime abord. Il ne manque qu'une seule chose : le troisième tome pour avoir la fin de l'histoire.