Marin Ledun a pour habitude de nous livrer sa vision du monde sans concession...
Ses polars sont imprégnés des recherches et rencontres qu'il fait pour étayer son sujet, mais aussi, il me semble, de ses révoltes personnelles.
Plus qu'un bon polar, c'est donc un sujet de réflexion puissant qui s'impose ici au lecteur (et c'est forcément perturbant).
Il nous propose un thriller militant et inspiré de l'état de corruption et de violence qui gangrène la société nigériane.
Il va concentrer son histoire sur le lobbying de l'alcool au Nigeria et la traite des femmes qui y est associée pour nous servir un roman certes engagé mais, contre toute attente, à la finalité plutôt pessimiste (je vous laisse découvrir pourquoi !).
Très vite dans la lecture, on est happé par un sentiment d'étouffement caractérisé par le fait des dérives et de l'impuissance du monde à changer une réalité brutale, injuste.
Les contrastes sont d'autant plus incisifs que pendant qu'une majorité de la population peine à vivre au quotidien, d'autres se prélassent dans leurs duplex "avec vue" et multiplient les orgies grâce au commerce des femmes, de la bière et la suprématie de la violence légitimée.
Car il y a 2 Lagos, mégalopole vertigineuse de 20 millions d'habitants : celui des bidonvilles et celui des milliardaires…
C'est aussi un livre qui interroge sur la place des femmes en Afrique, la responsabilité des pays riches qui siphonnent ressources, savoirs, cultures et alimentent les trafics en tout genre.
Et puis, c'est surtout un roman qui parle de sororité (un lien de femme à femme sans frontières), avec des portraits de femmes puissantes et militantes à l'image des fondatrices de l'association des
Free queens, qui s'allient contre la corruption de l'état pour venir en aide à celles qui sont les premières victimes : les femmes.
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