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EAN : 9782493801005
560 pages
NOIR ABSINTHE (25/03/2023)
4.37/5   27 notes
Résumé :
Miroir, miroir... connaissez-vous son histoire ?

Bien avant qu'elle soit reine ou sorcière, Violaine, guerrière décelant les destins, était loin de se douter que le pouvoir coulant dans ses veines lui vaudrait tant d'attentions. D'abord de la part de cruels étrangers, prêts à l'arracher à sa famille et à sa patrie pour s'approprier ses pouvoirs...
Puis d'un royaume menacé et de sa reine, dont elle deviendrait le dernier espoir... Et enfin de ce... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (23) Voir plus Ajouter une critique
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Appréciant les réécritures de contes et la plume de Magali Lefebvre, créatrice du blog Les histoires de Lullaby et autrice du très bon roman La captive de Dunkelstadt, je me suis lancée avec beaucoup d'enthousiasme dans cette lecture. Un enthousiasme récompensé dès les premières pages, la magie de la prose de l'autrice ayant de nouveau opéré sur moi. J'ai aimé la manière dont chaque mot est à sa place, la poésie de cette plume riche mais pourtant accessible, et cette impression d'être plongée dans l'histoire comme on le serait dans un (bon) film.

Cette histoire, qui se termine en apothéose, m'a captivée et fait passer par moult émotions ; des émotions exacerbées par le côté particulièrement immersif du récit. Si j'ai eu l'impression d'un passage un peu plus creux en milieu de roman, avec du recul, j'ai réalisé que c'était en raison de mon impatience. Je désirais, en effet, absolument comprendre par quel tour de force, l'autrice allait transformer Violaine, cette femme et héroïne exceptionnelle qu'on apprend à aimer inconditionnellement, en Reine-Sorcière. Pour le découvrir, il vous faudra, aux côtés de Blanche, prendre un siège et écouter Violaine se raconter. Se raconter et raconter sa vie d'avant qu'elle ne devienne cette belle-mère détestable, obsédée par son miroir magique, que l'on connaît tous.

On découvre alors une jeune femme douée dans l'art du combat, à l'aise avec sa sexualité et animée par une volonté farouche de liberté ! Une liberté impossible ou presque dans son monde, où une femme se doit d'enfanter à un moment ou un autre, et dans lequel elle doit cacher sa magie pour sa propre sécurité. Bien que ses élans passionnés et sa nature profonde soient brimés, j'ai aimé suivre Violaine dans son cadre familial et la voir profiter de son droit bientôt abrogé de combattre pour son pays. Une vie pas parfaite mais une vie heureuse, du moins, jusqu'au jour où l'impensable se produit…

Déracinée, déboussolée et torturée, Violaine va devoir lutter pour sa survie et trouver sa place dans un environnement qui n'est pas le sien. Un endroit où la magie existe mais aussi les monstres qu'ils prennent la forme d'une araignée géante ou d'un roi ambitieux et sans scrupule. Au fil des épreuves, notre héroïne fera différentes rencontres, dont celle d'un ennemi aux valeurs morales fortes et proches des siennes, grâce auquel elle s'ouvrira à de nouveaux et inattendus sentiments... Je n'en dirai pas plus, si ce n'est que la relation entre les deux sert parfaitement l'intrigue en plus de se révéler terriblement touchante ! Elle prend tout son sens et nous dévoile sa pleine puissance progressivement, à mesure que l'on tourne les pages.

Intelligente, courageuse, déterminée, éprise de justice, forte autant psychologiquement que sur un champ de bataille, Violaine m'a impressionnée. Malgré les injustices dont elle est victime, les actes ignobles auxquels elle est soumise et les dangers qui ne cessent de croiser sa route, la jeune femme garde la tête sur les épaules. J'ai d'ailleurs eu un coup de coeur pour cette héroïne qui fait de son mieux, alors même que les siens lui manquent, que les cartes du jeu ne cessent d'être redistribuées et qu'elle ne maîtrise pas les enjeux politiques de son nouvel environnement.

Mais là où l'autrice a su faire montre d'une réelle finesse dans la construction de son personnage, c'est qu'elle n'en a pas faire une femme toute-puissante sans faille ni reproche. Violaine a ses faiblesses et ses propres peurs, notamment liées à ses puissantes capacités qui, si elles lui seront indispensables, pourraient la faire basculer du mauvais côté… À cet égard, j'ai aimé chez elle cette volonté de se montrer juste face à ses ennemis en les éliminant à arme égale, épée contre épée, et non en les balayant par la magie. Cela la rend d'autant plus admirable et vaillante !

Ce roman de dark fantasy nous offre ainsi de belles scènes de bataille, chose que j'apprécie quand elles sont comme ici décrites avec soin, l'autrice nous plongeant au coeur de l'action sans en minimiser l'horreur. L'amatrice de stratégie et de politique en moi a également été comblée même si c'est surtout grâce à une autre femme ; une mageresse dont j'ai aimé les valeurs féministes et sa vision d'un nouvel ordre dans lequel la femme serait l'égale de l'homme. Bad Queen est ainsi une réécriture féministe intelligente de Blanche-Neige, l'autrice s'étant éloignée du conte de base, tout en puisant dans son essence pour véhiculer des messages forts poussant à la réflexion. Elle a su également créer un univers sombre et riche et développer des protagonistes nuancés et complexes pour lesquels on développe de forts sentiments.

C'est d'ailleurs la raison pour laquelle j'ai été blessée que Violaine glisse vers une version jalouse, envieuse et injuste d'elle-même. Un glissement que j'attendais avec impatience, mais qui est tellement bien amené que je l'ai vécu comme une trahison personnelle. Oui, j'ai une légère tendance à me fondre dans mes lectures quand elles savent m'emporter. Je vais rester vague pour ne pas vous spoiler, mais à travers l'évolution de Violaine, l'autrice aborde différentes thématiques, dont celle du deuil qui ici prend différentes formes. Cela n'excuse pas Violaine et son comportement vis-à-vis de Blanche, qui ne souhaitait trouver en elle qu'une confidente et peut-être un guide si ce n'est une figure maternelle, mais cela permet de comprendre comment elle en est arrivée là.

Et parce que l'autrice aime jouer avec nos nerfs, déjà à fleur de peau, un nouveau glissement s'opère et là, l'histoire ne devient qu'émotion, qu'effroi et qu'espoir. J'ai vécu presque en apnée le dernier quart du roman, complètement convaincue par le travail de l'autrice, qui reprend les éléments les plus emblématiques du conte original pour les présenter sous une tout autre perspective. Et si la méchante belle-mère n'était pas si méchante ? Et si ses actions avaient un objectif bien éloigné de celui que le conte lui attribue ? Et si après le deuil, la confusion et la douleur, la vie ainsi que l'espoir et la liberté étaient au bout du chemin ? La liberté de vivre selon ses envies et non les diktats d'une société emprisonnant les femmes dans des cases sans jamais leur laisser le choix... À cet égard, j'ai beaucoup aimé la conclusion et j'ai été émue par la manière dont des adieux signent l'arrivée du renouveau.

En conclusion, Magali Lefebvre nous offre ici une réécriture, aux élans féministes, puissante et émouvante de Blanche-Neige dans laquelle le lecteur découvre non pas l'histoire de l'innocente belle-fille, mais celle bien plus mouvementée de sa terrible marâtre. Mais terrible, cette marâtre l'était-elle vraiment ? À vous de vous forger votre propre opinion après avoir découvert la vie de Violaine, héroïne qui manie la lame avec brio et qui vivra bien des péripéties avant de devenir cette Bad Queen crainte… à tort ou à raison. Avant de vous lancer dans cette histoire, rappelez-vous juste que la vérité est toujours complexe, que chacun possède en lui sa part d'ombre et de lumière, et qu'on ne retient de l'histoire que ce que certains ont bien voulu en partager.
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Un grand merci à la maison d'éditions Noir d'absinthe pour l'envoi de ce titre. Il est vrai que derrière chaque femme adulte se cache un enfant, une adolescence, une femme ou un homme en devenir. Chaque acte, chaque geste accompli par lui-même ou un autre a des répercussions. Personne ne nait méchant, la méchanceté n'est pas dans la nature comme une pomme accrochée à sa branche d'arbre fruitier. La fameuse méchante sorcière des contes est toujours vu, décrite de manière horrible de manière à faire peur, afin de montrer aux enfants que les étrangers sont mauvais par nature. Celle de Blanche-neige n'y a pas échappé. À maintes reprises, cette femme a été décrite dans les contes pour enfant de manière terriblement machiavélique, dans les films ce n'était pas forcément mieux. Mais qui s'est réellement soucié de qui elle était derrière ce masque de froideur ? Qui s'est demandé comment elle en est arrivé à ce point si froide ? Et pourquoi est-elle vu de cette manière ? Les mauvaises langues ou langues de serpents s'amusent, tout comme les fameuses grenouilles de bénitiers, les ragots vont bon train, colporter de fausses informations est si facile pour réduire à néant une réputation. Mais qu'à cela ne tienne, Violaine n'a pas dis son dernier mot et il ne sera pas forcément celui que l'on pourrait croire. du départ, elle est dans un cachot et raconte son histoire, commencée il y a de cela bien longtemps...


La couverture rappelle certains passages du livre, qui bien entendu reprend le conte original d'une certaine manière, dans les grandes lignes à un moment donné. Mais pour le moment, il s'agit de suivre l'évolution d'une femme qui aime les combats, qui vit dans un monde où la magie est mal vu, mais pas de prendre les armes en tant que femme. Violaine a un on, celui de sa mère, de sa grand-mère, plus puissant que les deux réunis et elle doit le cacher pour ne pas finir sur le bucher. le monde dans lequel elle vit n'apprécie pas tout ce qui se rapproche de la magie, pourtant dans d'autres contrées c'est l'inverse. Qu'importe ce royaume est souvent en guerre et Violaine a réussi à devenir une guerrière. Sa famille est ce qui lui importe le plus, au même niveau que son don de clairvoyance. Pour autant elle a la langue acérée et préfère porter des pantalons que de belles robes. Elle arrive malgré tout à se contenir un minimum devant le roi, son père étant un puissant général de guerre. le destin des autres est son malheur, sauf ceux de sa propre famille et ceux qui sont liés à elle. Alors, elle préfère se taire parfois afin de ne pas mettre plus d'idées dans la tête de certains, tel son amant du soir. Un jour débarque des gens différents, des personnages qui viennent plus loin que les cartes peuvent montrer. Si la méfiance et l'intuition de Violaine lui dise qu'elle doit se méfier, elle va l'apprendre à ses dépends. le résumé l'indique, arrachée à sa famille, elle se retrouve dans une aventure où une jeune femme de 22 ans va devoir tout réapprendre, connaitre son environnement et vivre d'une autre manière, jusqu'à ce que ceux qui lui tendent la main récoltent le destin funeste qu'elle a vu. Et ce n'est que le début de sa vie.


Violaine est un personnage fort qui va devoir se battre aussi bien sur les champs de bataille que pour protéger sa vie et celles des autres. Propulsé dans un monde inconnu où les sorcières sont mal vues, mais où les mages sont grandement appréciés (cherchez l'erreur, car les sorcières ne sont pas contrôlées par les royaume ?) Violaine va devoir se libérer de nombreux jougs. Cette femme ne se laisse pas conter fleurette et à un code d'honneur. Les armes sont ses amis et son Don, elle ne l'utilise que si elle est vraiment en danger immédiat, autrement elle use des mêmes armes que les ennemis. Obligée de se cacher, elle va comprendre que parfois c'est un bien pour un mal. Un bien de ne pas montrer ses capacités afin d'éviter de se faire malmenée une fois de plus. Son corps n'a pas que des cicatrices de combat, sa vie a souvent eu de mauvaises rencontres. Physiquement, elle est forte, mentalement aussi, mais pour que la peur arrive à lui faire tourner les talons à un moment donné de sa vie, nous le comprenons aisément en ayant eu entre nos mains ses sévices. Rien de décrits, juste les grandes lignes et cela suffit aisément pour comprendre qu'elle a un recoin en elle qui sera toujours pris dans la terreur. Un monde d'hommes où la femme doit servi, ne peut pas régner sans un roi à ses côtés, ne peut pas guerroyer sans avoir des hommes autour. Un monde d'hommes où la femme doit baisser le regard devant les plus puissants sous peine de se retrouver en fâcheuse posture. Un monde d'hommes où la femme de caractère doit se taire et apprendre à se mordre la langue afin d'éviter de se retrouver dans un cachot.


J'ai adoré suivre son évolution, qu'elle ne se rabaisse pas, qu'elle tente de jouer les ingénues ? Jamais, qu'elle reste elle-même surtout et évolue autant physiquement que mentalement, sans parler de son Don. Seul regret de ne pas avoir de nouvelles de sa famille, mais cela est un point intéressant dans la tête de Violaine qui ne les oublie jamais. Sa vie n'a que peu de temps morts, de moments de calme. Impossible d'imaginer une vie uniquement de souffrances ou de bonheur pour cette femme qui va devenir quelqu'un par la force des événements. Les différentes rencontres qu'elle fera vont la forger un peu plus. le livre est découpé en plusieurs grandes parties et nous avons déjà un début de promesses : celles de grandes rencontres qui vont la faire évoluer dans un sens ou dans l'autre. L'amour, l'amitié, la confiance, la famille, la déception, les trahisons, les choix à faire, le besoin de ressentir d'être femme, le besoin de tenir son propre destin entre ses mains, travailler au point de devenir quelqu'un d'autre pour éviter de souffrir, faire du mal aux autres par peur de les perdre, peur de s'attacher... le livre regorge de thèmes qui touchent forcément un peu (beaucoup) le lecteur qui tient ce récit entre les mains. le sombre se mêle aux lueurs d'espoirs. L'auteur arrive à ne pas nous plomber le moral, à parfois prendre en pitié certains personnages, à mieux les comprendre aussi. le parcours de Violaine est pavé d'embûches et si son coeur est capable d'aimer, il est capable aussi de se faire du mal. Nous avons les grandes lignes du conte original avec tout ce qui aurait pu réellement arriver à Violaine.


En plus de ce personnage central, nous avons également bien d'autres qui font leur apparition. Entre Paxt et Kyre, Vivien et Anicet, Rosalia, Ciaran et Adhamhan, Flavie, Celadon, Carmin et Blanche et bien d'autres encore. J'ai une préférence pour Ciaran, Paxt et d'autres encore. de nombreuses raisons, les méchants le sont réellement et surtout ils n'hésitent pas à détruire l'espèce humaine pour en créer de nouveaux. Pour l'aide ou l'amour qu'ils apportent à Violaine. Pour le fait d'avoir failli me faire pleurer à un instant précis du récit (j'en ai encore une gorge nouée de tristesse). L'auteur a recherché à garder les grandes lignes d'un conte connu, pour se l'approprier et donner une nouvellle version de notre méchante reine. S'il fallait avoir fait une mauvaise action dans sa vie pour en devenir une, nous le sommes tous. Chercher à comprendre ce qui s'est passé pour qu'elle arrive sur ce trône est obtienne cette réputation est instructif. L'auteur nous montre ce que les rumeurs peuvent faire, le manque de confiance, de communication aussi. Les préjugés ont la dent dure, les rumeurs vont bien plus vite que les bonnes actions. Les femmes au pouvoir ? Non, toutes ne le peuvent pas et nous le savons, choisir notre destin oui, monter au créneau si c'est possible, mais devenir un objet ? Surement pas. Nous avons de quoi imaginer les contrées également de ces royaumes, la façon dont les personnages de chaque ville vivent, voient leur monde et garde en mémoire leur passé. Si dans certaines contrées les petites fleurs sont ouvertes, dans d'autres des monstres s'amusent à manger tout ce qu'ils trouvent et cela n'est pas forcément des cadavres d'animaux.


Le récit est sombre certes, mais pas tant que cela dans le sens où l'auteur arrive à nous faire ressortir la beauté de certains gestes et le début d'un amour qui dure toujours, même par-delà la mort. le texte est riche en émotions, en descriptions, j'ai été complètement happée dans le récit sans m'en rendre compte et il a pourtant un sacré nombre de pages. Il y en aurait eu plus, j'aurais continué avec grand plaisir. La fin m'a plu, une sortie digne des personnages. J'ai adoré l'histoire du miroir et de ce à quoi il sert réellement, de la façon dont les liens se forment, le double-jeu, le chasseur, le conte de Blanche-neige qui arrive à un moment donné. Sombre, mais n'est-ce pas le parcours de ces hommes et femmes de pouvoir ? Les épreuves renforcent le mental et si parfois le deuil prend forme de différentes manières, il nous faut le surmonter. C'est douloureux et peu évident de remonter la pente après autant d'obstacles qu'elle a dû parcourir, pour autant, elle arrive à rester debout, par amour pour sa famille, son royaume, son roi, celui qu'elle a choisi. La fuite n'est pas possible tant que son coeur est mis dans la balance. Les combats sont multiples, certains sont sanglants, rapides. Chacun d'entre eux se matérialise sous mes yeux, j'avais envie de prendre le bouclier pour sauver tel ou tel personnage, apprendre la magie pour soigner ou plus encore. Car la sorcellerie prend le pas par endroit et lorsque la douleur est trop forte, s'abrutir est la première chose que l'on fait pour ne plus voir ce qui se passe autour de nous : pour ne plus souffrir, pour oublier, pour imaginer que le pire n'était qu'un cauchemar.


En conclusion, un "conte revisité" ou plutôt une vision de la méchante sorcière-reine du conte de Blanche-neige remis au gout du jour. Des thèmes forts sur la place de la femme, ses combats, la famillle, l'amour, l'amitié, les trahisons, le deuil et tout ce qui va avec. La méchanceté n'est pas innée, c'est un comportement qui ne vient pas naturellement. Est-ce que Violaine éétait vouée à devenir la méchante, ou est-ce qu'au contraire ce n'est qu'une rumeur ? Pour le deviner, il faudra lire ce récit et vous faire votre propre avis. Encore merci pour cette découverte !

http://chroniqueslivresques.eklablog.com/bad-queen-magali-lefebvre-a214141085
Lien : http://chroniqueslivresques...
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Bad Queen est un roman de Magali Lefebvre qui peut se lire comme un prequel du conte de Blanche-Neige. On y suit toute la jeunesse de la future Reine-Sorcière, prénommée Violaine. Les réécritures, parce qu'elles comblent les blancs des contes, apportent de la nuance et de l'épaisseur aux personnages. C'est le cas ici avec le personnage de Violaine. Tout l'enjeu du roman est de nous faire comprendre comment elle en arrive à être le personnage que l'on connait dans le conte des frères Grimm : l'archétype de la marâtre, vaniteuse, orgueilleuse et jalouse.
Ceci, Bad Queen le montre bien. Violaine se débat dans un monde d'hommes, avec des pouvoirs qu'il lui faut cacher. le roman met en scène cette dualité : la magie est réservée aux femmes et les rend puissantes. Bad Queen insiste sur les stéréotypes qui contraignent toutes ces femmes, restant dans l'ombre et dominées par la violence masculine. Les aventures que Violaine vit expliquent son cheminement vers la rancune et l'aigreur, et cette métamorphose tout au long du roman est très bien réalisée.
J'ai également apprécié la fin du roman, qui nous apporte un regard différent sur les événements après Blanche-Neige. Là encore l'autrice apporte de la nuance, de la complexité et de ce fait rend le personnage de la Reine-Sorcière beaucoup moins simpliste.

Mais ce prequel m'a semblé trop brièvement relié à son conte d'origine.
En effet, Bad Queen est un récit que Violaine fait à Blanche-Neige a posteriori des événements du conte d'origine. de ce fait, je l'ai trouvé trop long pour un récit raconté par une personne. Ainsi, je n'ai pas trop compris le choix de la 3e personne du singulier. Ca amoindrit énormément l'implication du personnage dans le récit. Les émotions ressenties par Violaine sont intermédiées, donc beaucoup moins vivaces, et on perd aussi la marque des souvenirs de la conteuse qui s'estompent. J'ai trouvé ça un peu dommage, ça annule l'effet testimonial du récit. J'aurais aimé un dialogue entre les deux, quelque chose de plus dynamique et moins linéaire.
Enfin, quand ce prequel rejoint enfin le conte d'origine, le lien est très bref, et le récit s'accélère. Dommage, c'est la partie que j'attendais le plus ! J'aurais aimé m'étendre plus longuement sur le point de vue de la Reine-Sorcière pendant les événements du conte. J'ai été un peu frustrée d'avoir passé les 4/5e du roman sur le passé de Violaine. Je me suis longtemps demandé si Bad Queen n'était pas un roman à part. Ca n'en aurait pas fait un roman moins bon pour autant. Mais pour qui est attaché au conte, attendre aussi longtemps pour un lien finalement assez peu exploité dans la longueur est frustrant.

Finalement, Bad queen m'a séduite pour certains aspects et mais d'autres m'ont aussi moins plu.
J'ai aimé le discours résolument centré sur les femmes et la féminité. le roman explore la féminité d'un point de vue social et sociétal. Il évoque les rapports de force entre les sexes, le positionnement de chacun et les attendus sociaux relatifs à chaque sexe. Etre une femme dans Bad Queen répond à des exigences auxquelles il ne faut pas dévier, au risque d'être considérées comme gênantes, puissantes… donc sorcières. Bad Queen émet l'idée que la figure de la sorcière n'est que le produit d'une société masculine et misogyne, effrayée par la perte de ses pouvoirs et de sa prédominance.
Le roman traite également de la question du corps. Bad Queen évoque notamment le sujet de la maternité. Et c'est là le gros point fort du roman, parce que la thématique est très bien traitée, avec tact, subtilité, mais aussi douleur. C'est un roman qui est très personnel, intime. C'est douloureux mais touchant, et je n'ai nul doute que cela parlera et touchera beaucoup de femmes concernées.
Deux thématiques plutôt bien traitées, même si j'ai trouvé la première trop répétitive et trop peu nuancée sur le long terme.

Malgré toute la force de ces thématiques, Bad Queen ne m'a pas toujours convaincue.
D'abord, parce que le roman repose, dans une grande part, sur une romance. Si je reconnais sa qualité, elle m'a cependant un peu ennuyée, je ne suis vraiment pas friande de ce genre. Je reconnais que c'est bien ficelé et que sa présence a du sens. le lien créé entre ce prequel et le conte est ainsi fort malin. Mais ça ne me réconcilie pas forcément avec ce genre.
Je dois avouer également que le discours féminin-masculin m'a un peu lassée à la longue.
Ensuite, si je reconnais la qualité d'écriture des thématiques évoquées plus haut, je dois avouer qu'elles ne m'ont pas non plus bouleversée. Bad Queen sera une lecture très importante pour certaines, salutaire aussi, peut-être. Mais cela dépendra finalement du vécu de chacun(e).
J'ai regretté la longueur du roman. Pas en tant que telle, mais parce que le roman délaye beaucoup. J'ai lu en diagonale une bonne partie du roman, sans rien perdre du fil principal. Selon moi, c'est le dernier quart qui est vraiment intéressant, mais il est trop rapidement expédié. le reste n'est pas désagréable à lire, mais j'ai trouvé qu'il manquait de force, n'apportait pas grand-chose de décoiffant ni de nouveau. A contrario, certaines scènes auraient mérité un développement supplémentaire. C'est par exemple le cas de ces mondes alternatifs ou de la scène à coloration un peu SF du début. Des choix que je n'ai pas compris, tant rien n'est expliqué, exploré ni suffisamment développé : le worldbuilding est plus que léger et c'est dommage.

Enfin, j'ai trouvé que le sujet au coeur du roman prenait trop de place dans le roman, au détriment du reste.
Ceci dit, c'est peut-être aussi l'effet recherché : c'est exactement ce que ressent Violaine à un moment, étouffée par ses pensées qui tournent sans arrêt dans le même sens et obnubilée par ce qu'elle vit. Mais je n'ai pas ressenti non plus cette pesanteur dans les mots ni le style. Peut-être parce que le récit n'était pas au « je ». Mais peut-être que cela aussi s'explique, comme une manière pour l'autrice de prendre de la distance, de se protéger de ces émotions dévastatrices.

Certes, je n'ai pas retrouvé ici la plume de l'autrice qui s'amuse des mots et des codes du genre. Mais parfois, les mots ont un rôle bien plus important : celui de guérir des blessures encore vives. Car il y a un temps pour s'amuser, et il y a un temps pour apaiser sa peine. C'est bien ce que j'ai ressenti en lisant Bad Queen : une grande peine sur laquelle les mots agissaient comme autant de petits pansements. Et c'est peut-être cela, le pouvoir le plus fort des mots.
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Une lecture très mitigée, mais qui finit bien. Je commencerai donc par ce qui m'a paru faiblard pour finir par ce qui m'a plu.

« Show, don't tell. » J'ai souvent pensé à ce fameux adage, en lisant ce roman. Je l'ai en effet trouvé assez maladroit. Beaucoup de dialogues rapportés, de scènes racontées après coup dont je vois bien qu'ils sont là pour assurer la cohérence du récit, mais qui m'empêchent de me projeter. J'ai eu l'impression que rien n'était jamais décrit, ni les personnages ni les décors ; tout était brossé à très grands traits. En même temps, et je sais combien c'est paradoxal, tout passe par ces descriptions : les personnages ne se reconnaissent pas par leurs actions, mais par le détail minutieux de pensées qui ne m'ont pourtant pas parues très approfondies.
Je crois que cela vient, peut-être, de l'univers, qui m'a semblé mal maîtrisé. Tout m'y a paru très gratuit : l'invraisemblable élément perturbateur, dont je me suis douté dès le départ qu'on n'en saurait jamais plus et m'a donné le sentiment d'avoir été tiré aux dés, la présence des monstres qui n'apportent rien à l'histoire, si ce n'est justifier l'existence des mages (un emprunt à The Witcher ?), les méchants très méchants qui cumulent les défauts… Pour moi, l'autrice n'avait qu'une idée très vague des traits culturels propres à chaque nation qu'elle évoque, on dirait qu'elle ne savait pas bien comment amener les éléments nécessaires à la construction de son histoire. Et puis certains éléments, comme la stratégie militaire, semblent lui échapper (à moi aussi, ce n'est pas un reproche), alors elle brode (« Ils discutèrent de la stratégie à adopter, réfléchirent aux possibles tactiques de l'ennemi puis décidèrent de lancer l'assaut », en gros.)
À l'exception de Violaine, aucun personnage n'a de personnalité propre. Je sais bien qu'il s'agit d'une réécriture de conte de fée – plus exactement, d'un prequel, en fait – mais justement, on ne retrouve le conte original qu'à la toute fin du roman… Cela le rend profondément bancal, de mon point de vue, et cela me semble accentué par le fait que prologue et épilogue soient contés à la première personne (au présent, ce qui m'agace), tandis que tout le coeur du récit est à la troisième personne. L'inverse m'aurait paru plus logique.

C'est dans son dernier quart que Bad Queen prend une tournure vraiment personnelle, là enfin qu'on peut y rencontrer l'autrice dans la singularité de son univers.
Si le début de la romance m'avait plus ennuyée qu'autre chose, tant les protagonistes tergiversaient (et, apparemment, se mentaient à eux-même en ayant conscience de le faire, ce qui me laisse perplexe), une fois qu'elle est installée, ça devient… beau. Violaine s'y révèle pleinement, là où elle ne se caractérisait auparavant que par son courage, sa résilience et son mépris des convenances. Elle prend chair, son amoureux prend chair, et j'ai été émue de ce qui leur arrivait. Et quand, enfin, on en vient à Blanche-Neige, là j'ai été surprise et emportée.
Je me demande si Bad Queen n'aurait pas gagné à être beaucoup plus court, car quand Magali Lefebvre cesse de se débattre dans un univers qui ne semble pas être le sien, elle révèle quelque chose d'éminemment personnel, une voix propre. On sent bien que là, on touche à ce qui la pousse à écrire, et elle transpose alors un parcours singulier dans une histoire universelle.
J'ai refermé le livre bien plus enthousiaste que je ne l'étais au début de ma lecture, et même, en regrettant que ce soit fini !
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Disclaimer :
Je me décide à poster ma chronique sur ce roman au moment où la maison d'édition, Noir d'Absinthe, annonce qu'elle ferme ses portes. Donc, si vous voulez lire ce livre et l'avoir dans son édition présente (qui deviendra collector), avec sa superbe couverture, c'est maintenant où jamais !

Mon avis :

Une belle réécriture de conte féministe, à la fin douce-amère, qui évoque un peu certaines nouvelles de Tanith Lee (qui a beaucoup réécrit ce conte, de Perce-neige à White as snow), avec le symbolisme des couleurs, le rôle des loups, de la neige, des pommes, des épées, etc. En cela, la ME a fait un très beau boulot en confiant la couverture à une illustratrice qui a tout à fait capté l'ambiance du roman, Amaryan, tout en faisant référence à la sorcière de Disney (c'est clairement celle-là qui sert de référence ici). L'idée du miroir est merveilleusement exploitée (je l'avais un peu vue venir, mais ça n'enlève en rien la façon habile dont c'est traité : c'était, d'ailleurs, l'un des éléments qui m'avait le plus intrigué dans le dessin animé). L'histoire d'amour, poignante et émouvante, entre Ciaran et Violaine est très belle. Les émotions sont bien présentes et j'avoue avoir versé ma petite larme plusieurs fois dans le roman (surtout vers la fin).

J'avoue qu'au début, je me suis demandé où l'autrice voulait nous emmener. le démarrage, la mise en place, sont plutôt lents, et certains choix narratifs peuvent paraître déroutants, comme les éléments — discrets cela dit — de SF qui m'ont semblé un peu déplacés dans ce décor. Pour moi, toute l'intrigue politique entre les royaumes de Rosehaÿ et Talamh Dorcha n'a présenté que peu d'intérêt et j'ai eu du mal à en venir à bout. le roman m'a paru démarrer véritablement lorsque Violaine rencontre Ciaran, ce qui n'arrive pas avant la deuxième partie. Par ailleurs, j'ai eu du mal à saisir pourquoi l'autrice avait fait de la reine-sorcière de Blanche-Neige une guerrière venue d'un autre monde, et je me demandais quand exactement (et comment) elle allait raccrocher les wagons avec le conte original. J'ai parfois eu l'impression de lire un roman de fantasy qui n'avait rien à voir avec la réécriture de conte, ce qui est assez déroutant lorsqu'on s'attend à découvrir une redite du matériau original.
Mais en lisant les cent dernières pages, j'ai enfin compris où l'autrice voulait en venir. Toutes les péripéties de la future « bad queen », y compris la longue intrigue préalable à la romance entre Ciaran et Violaine (qui a une réelle utilité dans l'histoire), étaient nécessaires pour que certaines choses prennent tout leur poids à la fin. Donc, chapeau pour la construction, même si je pense que le roman aurait gagné à être un poil ratiboisé dans sa première partie, et, au contraire, développé vers la fin. Finalement, cette reine-sorcière que nous connaissons et attendons n'apparaît que dans les cinquante dernières pages. J'ai eu la même impression pour sa relation avec la princesse Blanche, qui, de par sa subtilité, aurait mérité un peu plus de détails et de développement.

Dans ce roman, il faut accepter que la reine-sorcière soit un personnage radicalement différent de celle qui apparaît dans Blanche-Neige. le trait de caractère principal de cette mauvaise reine dans l'histoire originale est sa vanité, symbolisée par son recours au miroir (« Miroir, miroir, dis-moi qui est la plus belle... »). Ici, l'autrice en a fait complètement autre chose. Violaine n'est pas vaine, et l'origine de sa jalousie envers la princesse se situe autre part.
J'ai d'ailleurs trouvé cette thématique mature, intéressante et audacieuse : c'est rare que l'on évoque ce genre de thèmes en fantasy, et là encore, ce choix d'une écriture très féminine (qui se prête très bien avec le genre du conte) m'a rappelé Tanith Lee. J'aurais aimé en lire un peu plus là-dessus...

Bad Queen est sans doute un roman qui ne parlera pas à tout le monde : ce n'est pas un page-turner, et encore moins une romantasy comme c'est la mode en ce moment. En tant que réécriture de conte, il peut aussi décevoir les attentes. Mais il m'a touché, de par ce destin de femme tragique, qui exploite avec justesse la figure de la sorcière (une femme libre, indépendante et incomprise, qui s'autorise tous les sentiments, même les mauvais) et le plot-twist audacieux et novateur qu'il propose à la toute fin. Désolé pour ce manque de détails, mais c'est le type de bouquin qu'il ne faut pas spoiler ! Lisez-le, surtout si vous croyez tout savoir de Blanche-Neige : vous serez surpris.
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critiques presse (1)
Syfantasy
22 mai 2023
Magali Lefebvre a placé la condition féminine au cœur de son récit. Un thème étroitement lié à celui de la sorcellerie, qui est présentée ici comme une magie issue de la force vitale des femmes, qui seraient toutes capables de la pratiquer si elles le souhaitaient. Certains rebondissements liés à la question de la sororité sont très plaisants à découvrir.
Lire la critique sur le site : Syfantasy
Citations et extraits (3) Ajouter une citation
Ma route, elle, se poursuit. Elle se perd dans la nuit, elle me cache encore des tournants, les obstacles ou les merveilles qu'elle me réserve. J'ai confiance. Car je sais que je ne la parcourrai pas seule. Je sais que c'est mon avenir. Et que tant que j'aurai du temps devant moi, tant que ce chemin de vie ne s'étendra sous mes pieds, je pourrai écrire mon histoire.
Je me rappelle cette jeune femme de vingt et un ans à Vielacier, dans un autre monde, une autre vie. Cette jeune femme qui devait contenir sa nature, qui se mordait les joues pendant que des étrangers apportaient, à sa place, la solution aux guerres qui menaçaient son pays...
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"Car il en faut, de la force, pour survivre dans un monde d'hommes, quand on est une femme"
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Car il en faut, de la force, pour survivre dans un monde d'hommes, quand on est une femme.
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