J'ai passé trois ou quatre jours avec les personnages de ce roman. Avec une impatience réelle de les retrouver quand je posais le bouquin pour faire autre chose, comme aller ramasser les feuilles du chêne centenaire qui les balance sur ma terrasse, ou encore couper du bois pour mon barbecue d'intérieur (©AV).
Le style de
Jérôme Leroy me ramène vraiment à
Jean-Patrick Manchette et à cette époque où écrire des romans noirs revenait à parler de la société dans laquelle nous vivons. Écrire, comme Jonquet et d'autres auteurs devenus indispensables, sur ce que nous traversons, avec les peurs qui nous hantent parfois à la lecture des journaux, en tout cas de ceux qui ont encore quelque chose à dire.
Manchette disait que le roman noir n'était ni plus ni moins qu'un roman social, et
Jérôme Leroy fait partie de ceux qui nous donnent à réfléchir sur la vraie vie de la réalité. Ils sont suffisamment peu nombreux pour que je te le signale.
Ce roman s'inscrit donc parfaitement dans ce que d'aucun, encore lui, appelle la dystopie, ou encore le futur proche et possible.
Tu te souviens de ce texte de Lavilliers ?
Un roi perclus de solitude sur son trône dérisoire
Un café, une pendule, un bout de trottoir
Un réveil sinistre et drôle sur l'épaule d'un ouvrier
Qui s'en va au bout du môle, vers l'éternité…
… Les rues n'ont plus de recoins, plus d'angles morts
Ça facilite les rapports de force
Il n'y a plus d'amoureux, plus de bancs publics
Nous sommes éternellement bronzés.
Notre vocabulaire est réduit à 50 mots.
Nous branchons nos sexes dans le secteur
Et nos spermatozoïdes sont calibrés et placés dans des banques.
Ils servent de monnaie d'échange aux eunuques qui nous gouvernent.
Notre société d'abondance fait merveille, il n'y a plus qu'une classe.
Quoiqu'en y réfléchissant bien il y en a une autre, mais il est déconseillé de réfléchir.
Nous ne faisons plus jamais l'amour, sauf de temps en temps, avec les gardiens qui nous surveillent.
Le mien est frigide.
C'est la grande marée.
On est pas loin d'être dedans, dans cette grande marée dont nous parle le chanteur. Et le roman de Leroy t'y emporte, sans même que t'aies besoin de réfléchir. Parfois, faut espérer que la vague ne va pas tout emporter sur son passage.
La suite, sur le blog :
Lien :
https://leslivresdelie.net/l..