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2,74

sur 260 notes

Critiques filtrées sur 4 étoiles  
Simon Libérati retrace ici le destin hors du commun de sa femme, Eva Ionesco.
L'amour absolu qu'il lui porte transparait tout au long de ce livre qui devient un très beau roman d'amour.
C'est aussi un livre sur la rédemption d'Eva et de l'auteur grâce à son union avec Eva qui apparait comme sa muse.

Eva est la fille de la photographe Irina Ionesco. Eva est un objet entre les mains de sa mère, un objet d'art. Irina réalise des nus érotiques d'Eva dès l'âge de 4 ans, l'utilisant comme modèle de son œuvre photographique érotique, parfois pornographique. Elle en fait une poupée, une sorte de Lolita sous son œil pervers.
Nous sommes dans les années 1970, époque libertaire où, par exemple, des expositions avaient lieu dans une galerie spécialisée dans l'art pédéraste... On croit rêver... Irina va jusqu'à exposer sa fille à 11 ans, vivante, pratiquement nue lors d'une exposition.
Eva a subi l'injustice d'être traitée d'obscène, d'être objet de scandale alors que sa mère était encensée et tirait tous les bénéfices de son art. Surnommée "baby porno" par la presse, elle est bien entendu méprisée par ses camarades de collège.
Sa mère est allée jusqu'à la prêter à des amis qui la font tourner dans des films pornographiques. Elle l'entraîne dans l'alcool, dans la drogue. Eva connait sa première expérience sexuelle à 10 ans en tournant du porno, est plongée dans la drogue dure alors qu'elle n'est qu'en 6ème. Placée à la DDASS à 14 ans, elle va de maisons de redressement en institutions psychiatriques, faisant plusieurs tentatives de suicide.

Adulte, Eva devient actrice et réalisatrice. Elle se marie, devient mère à 30 ans et commence un combat juridique contre sa mère. C'est une femme qui aura eu plusieurs vies.
Eva apparait comme une femme très forte ( dotée de "bravoure " selon Simon Libérati) qui a su faire preuve de résistance, se réfugiant dans le plaisir innocent de sa collection de poupées Barbie et dans les dessins animés de Casimir. C'est vraiment une survivante, beaucoup de figures de cette époque ont disparu victimes d'overdose.
Cette femme adulte au comportement infantile, excessive, colérique, narcissique va aller à la rencontre de Simon Libérati en 2013 sous prétexte de travailler ensemble sur un scénario. Ils ont fréquenté le même milieu, pendant toutes ces années, ils ont du se croiser à maintes reprises dans des soirées sans le savoir.

Commencera alors l'union de 2 solitaires, de 2 égoïstes, pourvus d'une même sensibilité. Simon Libérati dit très joliment qu'il l'attendu 35 ans, 300 000 heures... Leur rencontre le sauve "d'une existence parisienne sordide et mondaine" où il s'acharnait à se détruire dans une terrible fuite en avant.

Simon Libérati reconstitue le destin d'Eva sans réel souci chronologique, il nous balade d'une époque à une autre, d'un souvenir à un autre avec des allers retours entre le présent et le passé. Il cite des articles de presse, des interviews de l'époque, le tout baigné de la voix d'Eva.
Une des vies d'Eva que l'auteur n'évoque pas est sa vie de mère de son unique fils...Comment a-t-elle pu jouer son rôle de mère avec le manque total de figure parentale qu’elle a eu?
Par ces allers-retours, il nous dresse le portrait à la fois de l'Eva de sa jeunesse et de l'Eva du présent. Sa fascination pour elle, transformée en amour absolu, est également bien décortiquée.

Mon bémol sur ce livre : il faut attendre environ un tiers du livre pour que l'auteur nous plonge réellement dans l'histoire d'Eva. Je comprends qu'il ait eu besoin de situer l'époque, son parcours et leur rencontre mais j'ai trouvé ce passage un peu long. J'ai trouvé aussi la lecture parfois difficile avec des phrases tortueuses, sophistiquées, voire mystiques. Je suis restée complètement hermétique à certains passages, un exemple "Il émane d'elle une trouble impureté antique, celle de l'hermaphrodite Borghèse ou d'une petite prêtresse barbare de Piape aimée de Marcel Schwob. Elle semble avoir traversé les siècles depuis les ruelles de Subure à cheval sur un poney aux yeux de cauchemar, c'est l'incarnation même de la jeune Pannychis, que j'ai tant aimée quand j'avais dix-huit ans et que je lisais le Satiricon sur un banc des Tuileries." Heureusement tout cela est bien contrebalancé par de nombreux passages sublimes.
Le côté suffisant et snob de l'auteur, "Je n'ai jamais voulu séduire que l'élite", m'a agacée un temps; la façon dont il évoque ses propres déviances m'a gênée "Pour des raisons qui ont trait à ma peur de la prison, je n’avais jamais eu affaire avec des enfants, quoique j’adore les petites filles. Je le regrettais, sans savoir qu’il me serait donné un jour de finir ma vie avec la plus extravagante des femmes-enfants". Mais ensuite l'histoire d'Eva m'a littéralement happée.

Concernant la polémique soulevée par le procès qu'Irina Ionesco a intenté pour empêcher la parution du livre, j'ai trouvé l'auteur factuel, implacable dans ce récit mettant en scène Irina mais sans manifester de haine ni de jugement. La relation d'Eva Ionesco avec sa mère n'est pas au cœur du livre de Simon Liberati, elle n'est là que parce qu'elle est constitutive de l'histoire d'Eva, de son itinéraire et de sa personnalité.

Ce destin extraordinaire d'Eva, que je ne connaissais pas du tout, méritait bien un livre, il me restera inoubliable.
Lien : http://leslivresdejoelle.blo..
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D'une image, d'un souvenir, d'une rencontre, Simon Liberati nous parle d'EvaIonesco, sa femme.
» Est-ce son origine slave? Elle a la tristesse des âmes errantes, des voyageuses, de celles qui savent qu'elles partent toujours la première. »
Cette Lolita exposée sous l'appareil photographique de sa mère dès sa plus tendre enfance en des positions dénudées et pornographiques, connaît une adolescence rebelle. Toujours sous l'influence maternelle, elle sombre dans l'alcool, la drogue et la prostitution. Arrêtée par la police à l'âge de douze ans, elle est confiée à la DASS. Désintoxication, thérapie, procès contre sa mère, lecture, théâtre la reconstruisent peu à peu en lui laissant pourtant des tendances suicidaires.
Lorsque Simon la croise au cinéma Trianon, il est à nouveau sous le charme de cette amie d'adolescence. Actrice, mère d'un fils de vingt six ans, elle a, malgré « quelque chose de brisé ou de bridé, une retenue« , un sérieux impeccable.
D'une narration emmêlée, à force de roues concentriques autour d'un passé difficile à assumer, il dresse le portrait d'une femme blessée mais dotée de grâce et de pureté.
L'auteur écrit une élégie, » l'éloge oisif de la jeunesse, de la grâce et de la perdition » ce qui emplit désormais toutes ses journées auparavant perdues dans la fête, l'errance et l'alcool. L'amour transparaît à chaque instant pour cette femme meurtrie mais si digne.
» Tu sais, tu peux me quitter, je n'ai pas peur d'être perdue, ça m'est arrivé si souvent. »
La narration emmêlée, les références personnelles m'ont souvent éloignée de ce récit pourtant si bien écrit, de cette histoire si prenante.
Une belle histoire intime se mérite et l'auteur préfère la qualité au nombre de ses lecteurs…
» le petit nombre de gens à avoir lu mon dernier livre ne me chagrinait pas, car je n'ai jamais cherché à séduire que l'élite. »

Un témoignage qui fait déjà polémique…mais un bel éloge à la femme aimée dont l'enfance fut brisée.
Lien : https://surlaroutedejostein...
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Un chroniqueur spécialisé dans la presse people et les horoscopes bidons, copain comme cochon avec Louboutin et Beigbeider, grand ordonnateur des nuits parisiennes poudrées et arrosées, ex-pilier des Bains-Douches et qui raconte ses amours torrides avec Eva Ionesco, une ancienne Lolita sulfureuse des années 70, aujourd’hui quinquagénaire un peu enrobée, qui défraya la chronique avec les photos pornographiques prises d’elle par sa propre mère, Irina Ionesco, et en tira un film récent - plutôt réussi d’ailleurs : vous, je ne sais pas, mais moi, ça me ferait plutôt fuir…

Un romancier qui se lance sans vergogne, après un an de mariage avec la nouvelle Shirley Temple de la photo kitch et pédophilique, dans une hagiographie amoureuse – parce que c’était elle, parce que c’était moi- en affirmant haut et fort faire de la littérature, surtout après la parution des beaux éloges conjugaux, à la fois fervents et pudiques d’un Jean-Jacques Schuhl –INGRID CAVEN - ou d’un Jérôme Garcin –THEATRE INTIME - : vous, je ne sais pas, mais moi cela me donne a priori envie de rigoler…

Pourtant, sur la foi d’une critique emballée, j’ai lu d’une traite le livre de Simon Libérati et j’avoue être tombée sous le charme…

Pas grand’ chose à se mettre sous la dent côté mère abusive et potins nauséabonds : amateurs de romans à scandales, passez votre chemin !
Quelques parisianismes récidivants et une tendance de l’auteur à ne pas se prendre pour un quartier de mandarine, mais là non plus rien de vraiment exaspérant, c’est une petite faiblesse attendrissante qu’on lui pardonne tant le livre est, à lui seul, une sorte d’OVNI…

Objet Violemment Néo Irréaliste.

Je me suis pincée pour y croire : Libérati et Ionesco me sont apparus comme la réincarnation de Nadja et Breton, ou je ne m’y connais pas : rêves, prémisses, prénoms, rencontres, lieux, tiers médiateurs, prophéties, coïncidences et géographie parisienne aux allures de Labyrinthe borgésien - tout destinait magiquement les deux amants à s’appartenir pour la vie …même si la rencontre a mis 35 ans à s’opérer. Cet ascendant surréaliste, cet abandon délibéré à la tyrannie du hasard et de l’irrationnel, l’auteur les reconnaît plus d’une fois : « Je retrouvais sans m’y être attendu l’atmosphère de mon enfance, influencée par le surréalisme et cette force particulière qu’ont certains hommes de dégager les croyances anciennes de la décadence universitaire pour leur rendre leur valeur de pari. »

Mais les liens avec l’Amour Fou ne s’arrêtent pas à Breton : Libérati est un malade de Nerval, au point d’avoir quitté, six ans avant sa rencontre avec Eva, son Paris des Bains-Douches pour le poétique Valois, terre de SYLVIE - une autre histoire d’amour récurrent, fatal et féerique : « Ainsi puis-je refaire à intervalles réguliers le voyage nocturne aux fêtes d’archers de Loisy et à la maison de Mortefontaine dont la treille brille pour moi d’un fanal éternel. » et l’auteur précise :« Avant même que l’événement capital, rencontre ou accident, se produise, le décor doit être planté. »

Je n’étais pas au bout de mes surprises ! D’abord l’enchantement du style :une longue phrase, quasi proustienne, qui vous envoûte et vous entraîne dans ses méandres, une érudition raffinée – les romantiques « noirs », Nerval en tête mais aussi Barbey, Gautier, Villiers – il y a du Véra dans cette Eva- et insolemment éclectique – j’ai retrouvé avec délice quelques considérations sur les pages de garde des anciennes éditions Tintin où l’auteur, enfant, cherchait « dans la galerie des personnages qui s’y trouvent accrochés sur fond bleu » des têtes qu’il ne connaissait pas et qui lui indiquaient « des albums inconnus, peut-être introuvables, un monde de découvertes »- ou encore une analyse subtile et ironique du charme un peu pervers de la Comtesse de Ségur dans la vieille Bibliothèque Rose - Sophie et ses malheurs, en héroïne néo-sadienne…après Justine ou les malheurs de la vertu !!

Avec raffinement, finesse, subtilité, donc, Simon Libérati nous conte l’histoire un peu magique, éternelle et romantique d’une Rencontre fondamentale, transcendante, entre un noceur narcissique et une femme-enfant un peu schizo –les trois voix d’Eva ravissent la diva- non pas celle, à mon sens, d’une rédemption – la cocaïne et la bibine restent leurs meilleures copines- mais celle, très faustienne, d’un Pacte –Enfer ou Ciel, qu’importe !- et d’un Pacte éminemment amoureux et littéraire : lui l’aide à faire un deuxième film à partir des souvenirs de son enfance brisée, elle lui donne sa personne pour qu’il la transmue en personnage romanesque.. Un honnête marché, somme toute, avec le Désir et la Folie comme garants…

Il y a même du Méphisto chez Libérati : je te rendrai ta jeunesse –un lifting en l’occurrence- et ta silhouette – un coach et un régime- , et tu me laisseras te tromper avec mon autre maîtresse, la littérature…. que je tromperai à son tour en ne lui parlant que de toi !

Oui, vraiment, une heureuse surprise : j’ai balayé tous mes a priori et je me suis gentiment enivrée, en suivant les conseils d’un dandy merveilleux, grand frère tutélaire de Simon Libérati :

« Il faut être toujours ivre, tout est là ; c'est l'unique question. Pour ne pas sentir l'horrible fardeau du temps qui brise vos épaules et vous penche vers la terre, il faut vous enivrer sans trêve. »

Et Baudelaire ajoutait :

« Mais de quoi? De vin, de poésie, ou de vertu à votre guise, mais enivrez-vous! »

Rajoutons à cet étourdissant cocktail : de hasard, de magie, de mystère, de désir …

EVA est l’élixir qu’il vous faut !
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