C'est mon Jack ça. Deux courtes nouvelles. Et tout l'univers que j'aime chez
Jack London. Ce mec m'épate. Pas tant l'écrivain que l'homme. Il a été se frotter à des contrées du genre hostile, partout dans le monde, mais son domaine rien qu'à lui reste l'Alaska, le Yukon, le grand Nord.
Avec ce que ça a d'absolument terrible en conditions d'existence. Un retranchement dans lequel des humains vont se pousser tout seuls, car si on imagine bien que les natifs du froid sont plus ou moins accoutumés à ce climat depuis des générations, ceux qui sont arrivés plus tard, eux, n'ont en principe pas ça dans les gènes.
Et pourtant, justement parce que c'est extrême j'imagine, quelques-uns continuent à venir se droguer de froid.
La ruée vers l'or n'explique pas tout, il y a autre chose, cet autre chose si bien raconté par
Jack London. La fascination pour l'entrechambre des enfers, les limbes du purgatoire, l'entre-deux monde, celui des morts bleus figés et celui des vivants à peine en meilleur état, ils y viennent, et pour certains, ils y restent. A moins qu'ils n'y restent…
Ce qui restent mais n'y restent pas, ils portent ces belles notions vibrantes : la solidarité extrême, la survie dans le très strict indispensable, et le surpassement de soi qui fait de chaque survivant un héros. Les natifs sont partie intégrante de l'histoire, qui ne se mêlent pas trop à ces gens venus là de leur plein gré, ils ne font pas dans le lyrisme, pas le temps, pas l'énergie, mais sont bien là, les êtres humains. Autres éléments indispensables, les chiens, sans qui rien ne bouge, les chiens et leurs règles qu'il faut maitriser sans concessions romantiques. Il y a ces tavernes et autres abris, lieux bruns rouges oranges jaunes où l'on a chaud, où on parle, où les légendes circulent, dans les brumes alcoolisées. Et cet élan presque pas humain vers la nature transcendée par le froid, parce qu'on a fait une promesse, parce que d'autres attendent, encore moins bien lotis, parce qu'on doit livrer du courrier, parce que c'est l'entre-deux monde dans lequel on s'offre le luxe insensé de survivre et parfois même, de vivre. Et puis c'est beau, c'est tuant de beauté, c'est revigorant de beauté, cet univers autour, avec là aussi ses règles bien précises auxquelles il faut obéir impérativement.
Ce ne sont que deux nouvelles, pas forcément joyeuses, mais en quelques pages, qu'est-ce qu'il nous restitue bien ce maelström de sensations ultimes, notre
Jack London. Ça donne follement l'envie de ne pas y aller, dans ces extrêmes du froid, parce qu'on ne tiendrait pas dix minutes, mais tudieu, ça donne follement envie d'y aller parce qu'on a l'intuition que si on y survit, on touche les étoiles.
Ce ne sont que deux courtes nouvelles.