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sur 3962 notes
Une question ne m'a pas lâché pendant la lecture d'En finir avec Eddy Bellegueule : quelle est la part de vrai et la part d'imaginaire dans l'histoire de ce jeune homme (l'auteur) qui raconte son enfance et sa jeunesse dans un village de Picardie dans une famille pauvre qui n'accepte pas sa différence. Eddy Bellegueule, dès son plus jeune âge, « fait des manières », a des drôles d'intonations dans la voix, n'agit pas comme un dur, comme un « vrai homme » selon les normes définies autour de lui.
La plume est fulgurante, on sent derrière les propos la grille d'analyse sociologique et les théories de Bourdieu dont l'auteur est un spécialiste, en cela le livre est bien plus qu'un récit. Néanmoins le tableau qu'il dresse du village ou de sa famille est vraiment chargé. Entre ses parents peu aimants (pléonasme), son frère (qui veut le tuer dans une des scènes du livre), sa soeur, son cousin, on se dit qu'il n'y en a pas un pour sauver l'autre…bêtes et méchants. Rien ne semble les préoccuper que le regard des voisins, le quand dira-t-on, cela revient régulièrement à travers les pages. Violent mais jamais complaisant, En finir avec Eddy Bellegueule est aussi le récit d'un jeune homme qui a réussi , avec une force et une énergie qu'on sent à travers les lignes, à prendre une autre voie que celle qui était tracée d'avance pour lui. J'aurais aimé en savoir un peu plus sur l'après…peut-être son prochain roman ?
Lien : http://www.chocoladdict.fr/2..
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Je dois dire que j'ai découvert l'auteur à La Grande Librairie et que j'ai hésité car j'appréhendais la lecture de cet ouvrage que j'ai finalement acheté.
Mais comment aborder cette critique d'une façon sereine?
À la lecture on reçoit un grand coup de poing, comment ne pas être poursuivi par les scènes violentes, bouleversantes en plein 21°siècle?

On est révolté autant que fasciné, incrédule, devant ce témoignage cru, sombre, innommable d'un milieu rural dur,dans une pauvreté matérielle,mais surtout intellectuelle et culturelle, où l'alcoolisme, la haine de soi et de l'autre, les handicaps sociaux et physiques, l'absence de sentiments ont la part belle......
Le plus important c'est le rejet hallucinant,le dégoût, les coups, les crachats immondes, un enfer,quoi!!le portrait sans concession du milieu d'origine à tel point que l'on se demande si cela n'est pas une caricature?
La Bêtise, les préjugés, la redite idiote de certaines litanies toutes faites, le racisme , l'abrutissement devant une télévision allumée toute la journée, (un appareil quasiment dans toutes les pièces)!!!! , la honte, les humiliations continuelles, une espèce d'évidence quotidienne....
C'est un réquisitoire contre la Bêtise avec un grand "B" jusqu'à la toute fin où l'on découvre enfin le début de l'émancipation...
Ce livre coup de poing pose beaucoup de questions et nous interpelle:Comment échapper à la discrimination ?
Comment surmonter sa différence?
Comment chaque être peut - il inventer sa liberté?
Comment échapper à l'intolérance dans un milieu fermé ?
Un témoignage vraiment poignant, dérangeant, difficile de ne pas repenser cette lecture et relire plus tard, moins sous le coup de l'émotion? Peut -être?


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Comme l'écrit un Babeliote dans une très longue chronique de ce roman (à laquelle je souscris globalement même si le nombre respectif d'étoiles est très différent), il est difficile d'avoir un avis tranché de ce roman. J'aurais dit "un avis objectif". Mais il n'est certainement pas nécessaire d'avoir un avis tranché ou objectif.

J'ai pris le roman dans les tripes. OK, il y a un étalage malsain. OK, Edouard Louis dit du mal -abondamment- de sa famille. Familles, je vous hais... comme disait l'autre. OK, OK, OK, mais comme Springora dans le Consentement, il y a bien davantage que cela dans cet "étalage"...

Par un subtil effet du hasard, j'ai lu la vraie vie d'Adeline Dieudonné il n'y a pas si longtemps. Et il y a des similitudes dans les univers décrits. Patriarcat, racisme, idées préconçues, place de la télévision... Et j'ai aimé les deux romans, fatalement.

Edouard Louis décrit de manière cash sa relation aux autres dans son enfance. La découverte de son orientation sexuelle. Les moqueries, les coups, les crachats, les vexations et tout le reste. Ecriture rock'n'roll, sans fards ni faux-semblant. Edouard Louis appelle un chat, un chat", fatalement dirais-je. Et c'est pour cela que cela provoque le dégoût ou le malaise. le rejet. Car finalement, ce qui est décrit semblerait appartenir au XIXè siècle, à Zola. Alors que c'est quasiment du présent. Fin 1990, début 2000. Et si vous cherchez bien, cela existe encore. Il ne faut pas chercher très loin.

Il n'est pas inutile de revenir sur le costard qu'Edouard Louis taille à sa famille. On lit aussi beaucoup de tendresse envers sa mère. Il y a énormément d'empathie et de compréhension par rapport à ce qu'est devenu son père. Et même s'il éprouve de l'indignation envers les gens qui le jugent et n'ont pas les mêmes préventions envers son cousin (avec qui il a des relations sexuelles), il ne semble ni vindicatif ni en réellement en colère. Il arrive à se détacher, à regarder les choses de loin, dépassionnées.

Il est sans nul doute facile pour nous de tout remettre sur la Picardie, ben oui vous savez, le Nooooooord, que des dégénérés, consanguins comme une célèbre banderole de foot... Outreau, Fourniret... la pomme ne tombe jamais bien loin de l'arbre. Je ne serais pas aussi affirmatif pour balayer cette réalité d'un revers de main. Pour Edouard Louis, cela ne doit pas être si facile que cela de haïr sa famille, de haïr ses proches, d'avoir tracé sa route sans ami, craignant le moindre couloir de lycée, etc.

Bornons-nous à remarquer que personne ne semble avoir essayé de défendre Eddy Bellegueule... Pas le moindre oasis de tempérance, de soutien dans les mémoires de son enfance. le comble du pathétique se voit quand lui-même en arrive à exprimer sa haine des homosexuels. Cela m'a fait penser à un Australien élevé dans la haine et le mépris de l'arborigène et découvrant à 21 ans qu'il en était un lui-même (pris à sa famille alors qu'il était nouveau-né et placé dans une famille "comme il faut"). Renier, haïr, mépriser ce que l'on est, c'est la pire des tortures. Et ce roman cathartique permet à Edouard Louis de jeter cela à la face du monde. Je vois du courage dans cette remise à plat de ses origines. C'est ce que je choisis de retenir de son long cri de douleur. Je vois aussi le parcours, la résilience, le développement, l'affirmation de soi. Il dit à ses tortionnaires, ses bourreaux: "vous avez essayé de m'annihiler, vous avez loupé votre coup". Et je tire mon chapeau. Qu'aurais-je fait si j'avais croisé Eddy Bellgueule? Aurais-je tourné la tête? Aurais-je hurlé avec les loups en brandissant mon jaune à peine dilué? Aurais-je craché une bile amère, relents d'intolérance et de xénophobie, sur son corps efféminé?

Je lis pour m'instruire, pour me distraire et me délasser, mais surtout je lis pour être secoué, déstabilisé, remis en question. Sur ce point, je ne suis pas déçu par ce roman clairement autobiographique.
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A la fin des années 1990, Eddy Bellegueule, le narrateur, vit dans une commune rurale de Picardie. Son père travaille à l'usine et sa mère s'occupe des nombreux enfants. L'argent manque parfois, en tout cas après achat du tabac et des boissons alcoolisées. Une famille banale dans ce village, même si contrairement à certains voisins, le père d'Eddy met un point d'honneur à ne jamais frapper son épouse et ses enfants. Eddy ne manque cependant pas de l'agacer avec ses manières de « tarlouze » ! Ce trait de caractère en énerve d'ailleurs d'autres, notamment au collège où il est devenu le souffre-douleur de deux « durs ».

Le récit est poignant, parfois violent, et l'on ne peut que compatir avec le calvaire d'Eddy. Si ses souffrances sont compréhensibles, la fascination qu'il ressent pour ses bourreaux m'est restée en revanche obscure. Eddy cherche à se conformer aux comportements et aux manières d'être qui sont attendus d'un garçon dans son milieu, mais le naturel reprend le dessus. La souffrance n'est pas seulement celle des coups reçus, elle est surtout psychologique.

A la lecture d'un tel ouvrage on comprend mieux pourquoi le taux de suicide est plus élevé chez les jeunes homosexuels (surtout chez ceux qui ont de la difficulté à s'affirmer comme tel) que chez les autres jeunes.

Un livre que je recommande vivement, pour la réflexion à laquelle il invite à propos de l'homophobie ou des "simples" blagues qui peuvent être aussi meurtrières...

• http://www.huffingtonpost.fr/2015/02/05/homophobie-suicide-personnes-lesbiennes-gaies-bi-trans-campagne-choc-inter-lgbt-homosexuels_n_6612858.html
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Eddy Bellegueule a toujours eu conscience de sa différence : il est délicat, ce n'est pas un dur. Dans la famille où il est né, c'est une anomalie, une tare, une honte. « Ils pensaient que j'avais fait le choix d'être efféminé, comme une esthétique de moi-même que j'aurais poursuivie pour leur déplaire. » (p. 27) Martyrisé à l'école, moqué dans le village, humilié dans sa famille, Eddy encaisse, coup après coup, sans rien dire, parce que se plaindre, ce serait encore plus honteux pour lui et les siens. « On ne s'habitue pas tant que cela à la douleur. » (p. 41) Pendant des années, le garçon essaie de devenir ce qu'on attend de lui et lutte contre lui-même.

Le malheur d'Eddy Bellegueule, ce n'est pas tant d'être un garçon aux tendances homosexuelles, c'est d'être né dans un milieu défavorisé où la pauvreté est autant matérielle qu'intellectuelle et où il ne fait pas bon être autre chose qu'un homme, un vrai. Dans sa lutte contre le déterminisme social et familial, Eddy Bellegueule s'illustre comme un être courageux, à tel point qu'il aurait pu, sans rougir, être un personnage d'Émile Zola. « L'impossibilité de le faire empêchait la possibilité de le vouloir, qui à son tour fermait les possibles. » (p. 79) Refusant de se contenter de ce qui semble destiné et immuable, il ose voir plus loin pour vivre mieux. Se sauver de chez lui pour se sauver lui-même, c'est finalement la seule solution.

En finir avec Eddy Bellegueule est un roman autobiographique. le mot important est « roman ». Largement inspiré de son enfance et de ses souffrances, le texte appartient à la fiction et il serait vain et crétin d'y voir un simple règlement de compte à l'encontre de ceux qui ont fait de son enfance un enfer. On peut se dire que cette histoire est partielle et partiale puisqu'un seul protagoniste s'exprime au nom des autres. « Elle formule la thèse de la folie pour ne pas laisser échapper cet autre mot, pédé, ne pas penser à l'homosexualité, l'écarter, se convaincre que c'est de la folie, préférable au fait d'avoir pour fils une tapette. » (p. 123) Et alors ? Roman ou autobiographie, fiction ou réalité, En finir avec Eddy Bellegueule est un texte nécessaire sur l'homophobie qui, dans certains milieux, est plus une habitude qu'une véritable prise de position. Mais qu'elle soit pensée ou bêtement suivie, l'homophobie est un mal qui ronge les fondements d'une société qui se prétend égalitaire.
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« Il fallait fuir. Mais d'abord, on ne pense pas spontanément à la fuite parce qu'on ignore qu'il existe un ailleurs. On ne sait pas que la fuite est une possibilité. On essaye dans un premier temps d'être comme les autres et j'ai essayé d'être comme tout le monde. »
Eddy Bellegueule est coincé dans sa famille dysfonctionnelle. Entre un père alcoolo porté à des accès de violence, au chômage la plupart du temps, et une mère peu instruite, débordée de toutes parts dans ses tâches ménagères, Eddy navigue à vue. Tout comme ses frères et soeurs. Sauf qu'Eddy est différent : mal dans sa peau, souffrant de ses penchants dits efféminés (voix, posture, démarche, goûts). Intimidation à l'école et au village, Eddy subit avanies sur avanies. Constamment comparé aux autres garçons, il peine à faire bonne figure dans la masculinité qu'on lui propose. Seule issue, la fuite. Mais pour cela, il faut attendre le collège externe, sortir de la communauté étouffante qui l'a vu naître et qui l'a ostracisé.
Eddy Louis a jeté sur papier, avec une certaine violence contenue, tout le poids de sa souffrance enfantine et adolescente. Un récit choc sur l'intolérance à la différence propre aux milieux fermés et au manque d'éducation. J'ai souffert avec lui et pleuré intérieurement pour une telle négligence parentale et une telle absence d'empathie. Heureusement pour lui, il y a eu la fuite salutaire…
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Ce roman m'a largement fait penser à l'auteure Annie Ernaux. Entre auto-socio-analyse et autobiographie... On est immergé dans la vie d'Edouard Louis qui nous raconte son enfance.

D'un côté l'auteur nous raconte ses parents, sa famille, sa ville d'origine, son rapport à l'école, son exclusion dû à son homosexualité (avec des passages vraiment pas facile à lire)... et d'un autre côté on voit la distanciation que l'auteur a pris par rapport à tout ce qu'il a vécut.

Certains disent que l'auteur dénigre ses origines. Je n'ai vraiment pas eu ce ressenti. Pour moi, c'est plutôt admirable d'avoir réussi à analyser son propre vécu, comme si il l'avait regardé vu de haut, de loin. Et à aucun moment je n'ai senti de snobisme de la part de l'auteur. Je crois qu'il a juste réussi à mettre en lumière des conditions de vies réelles, des difficultés quand on est issu d'un milieu pauvre, ouvrier...

En bref, en finir avec Eddy Bellegueule est une bonne analyse familiale.
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Roman poignant et coup de poing à la fois.
Né dans un milieu miséreux tant sur le plan matériel que intellectuel, Eddy Bellegueule présente dès l'enfance des "apparences" d'homosexualité.
Dans le milieu machiste dans lequel il grandit, il sera victime de railleries et de haine, à l'école mais aussi dans sa famille.
L'auteur nous décrit à la fois l'atmosphère du village où il a passé son enfance et la souffrance ressentie, les tourments vécus par l'enfant qui ne se croyait pas "normal".
Un livre à lire absolument : ça se passe en France, à 2 pas de chez nous, il y a 15 ans
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Une lecture qui me laisse un vilain sentiment de malaise, moins pour le sujet pourtant glauque en diable, que d'une part pour la manière dont le petit monde de la critique littéraire l'a monté en épingle avec cette condescendance bienveillante qui le caractérise quand il s'agit de parler de "la France d'en bas", et d'autre part parce que je m'interroge sur les véritables intentions de l'auteur à mettre en pleine lumière son environnement sous une forme autobiographique à peine voilée.
Voilà, un goût de bizarre qui me perturbe au point que j'en oublie de mettre des points dans mes phrases.
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Ce texte m'a fait l'effet d'une claque en pleine figure.

J'ai souffert avec Eddy Bellegueule. J'ai été indignée par les personnes qui l'insultent, l'humilient, le frappent... tout long du livre. le manque d'ambition de son entourage m'a consternée. C'est comme si leur vie était toute tracée sans aucune possibilité de s'échapper à la misère sociale, à l'abrutissement à force de regarder la télé, de picoler et de fumer, de ne rien faire de leurs journées. Les remarques racistes, machistes, homophobes m'ont attristée et même révoltée.

J'ai bien apprécié le fait d'écouter ce texte et non de le lire, et ce d'autant plus que le CD s'achève sur un entretien avec Edouard Louis qui explique la manière dont il a écrit son livre, le style, le choix de la forme romancée même si tout ce qu'il écrit traduit son expérience personnelle.
Quelle maturité pour son jeune âge (21 ans).

Un texte qui m'habitera longtemps je pense.
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