Ce roman au temps suspendu rapporte le cours d'une demi année dans une famille américaine au quotidien serein, qui va voir sa vie bouleversée par l'irruption de la maladie.
Cet été là, les parents de Molly et Meg décident de s'installer dans une petite maison ancienne en forêt pour permettre au père, écrivain, d'achever l'écriture de son livre. Les deux adolescentes se retrouvent isolées, loin de leur amis et de l'environnement urbain auquel elles sont habituées, et sont contraintes de partager leur chambre. Les jours se succèdent et s'étirent, le père écrit enfermé dans son bureau, la mère confectionne une couverture en patchwork, et tandis que la petite Meg se passionne pour la photographie et se lie d'amitié avec les voisins – un vieil homme et un couple de hippies –, Molly tombe malade et dépérit peu à peu.
A travers le récit de Meg la narratrice, qui porte sur le monde un regard très juste, mature, réfléchi,
Lois Lowry s'intéresse aux personnages des deux jeunes filles, à leur personnalité et à leur évolution dans le temps au gré des rencontres et des incidents de la vie.
A début du roman Molly est belle, souriante, pleine de vie, sociable, ambitieuse et confiante en l'avenir, presque superficielle dans ses préoccupations, tandis que la jeune Meg, curieuse, mature et intelligente, a une conscience aiguë de la précarité de l'existence, elle doute, manque d'assurance, se dévalorise et se laisse souvent envahir par la tristesse et le pessimisme. Pourtant une étrange inversion va s'opérer dans leur rapport au monde et à elles-même, et à mesure que la maladie va s'emparer de Molly, celle-ci va s'éteindre, s'affaiblir, se renfermer alors que Meg va prendre confiance en elle, découvrir ses dons et s'enrichir du regard bienveillant de ses amis.
Lois Lowry décrit avec finesse les relations fraternelles qui peuvent être celles de deux soeurs à l'adolescence, faites de rivalité, d'envie et de jalousie, mais de complicité, d'admiration et d'un amour profond malgré les anicroches, elle met en évidence l'équilibre subtil entre besoin de son espace intime et besoin de l'autre, individualité et mimétisme.
Le lecteur est plongé dans la douceur, la lenteur, la réflexion psychologique tout comme ces personnages qui goûtent jour après jour au calme, à la tranquillité, à la solitude et aux plaisirs simples, à l'authenticité des relations aux autres et à la nature. Rien d'extraordinaire ne se produit, nulle péripétie, presque aucun sursaut perturbateur ni événement exceptionnel. Même les sentiments et les émotions semblent lissés sur le temps long et se fondre dans le décor.
Cinq centièmes de seconde est simplement la description d'un quotidien, le patchwork, le thé, les fleurs, le poêle à bois, la neige, parsemé de souvenirs d'enfance et de réflexions sur le monde à auteur d'ado. L'ennui guettera inévitablement le lecteur en attente d'aventure et de rebondissements.