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3,43

sur 304 notes

Critiques filtrées sur 4 étoiles  
Après "Le Portrait de mariage" de Maggie O'Farrell, "Des jours sans fin" et "Des milliers de lunes" de Sebastian Barry, j'ai voulu profiter du bookclub organisé par le Prix Bookstagram pour découvrir une dernière oeuvre de la littérature irlandaise : "Grace" de Paul Lynch. Cette lecture a confirmé que les auteurs irlandais sont de véritables poètes avec, dans ce roman en particulier, une langue absolument flamboyante pour laquelle j'ai eu un coup de coeur immédiat ! Oxymores, allégories et métaphores viennent servir des descriptions pleines d'embruns et à l'odeur de tourbe.

Dans une scène d'ouverture presque biblique, la mère va sacrifier sa fille de quatorze ans, Grace, car leur famille meurt de faim. Tragique et sublime s'allient lorsqu'elle coupe finalement ses cheveux dans l'espoir de lui offrir une nouvelle vie en l'envoyant sur les routes détrempées par une pluie qui semble ne jamais cesser à la recherche d'un travail. Avec ses fantômes à sa suite, Grace s'improvise vachère, puis est obligée de voler avant de rejoindre un chantier public, mais ces solutions n'offrent pas de réelle sécurité alors que la grande famine irlandaise (1845-1852) sévit.

La couronne anglaise n'apporte aucune aide à l'Irlande et le mildiou ravage les cultures alors que la population se déchire dans une violence terrifiante qui atteint son paroxysme au chapitre six intitulé "Corbeau" où la faim mène à l'innommable, représenté par trois pages intégralement noires. Comme l'a déclaré l'auteur à propos de son sujet : « Je ne voulais rien savoir là-dessus. C'était trop sombre, scandaleux, culpabilisant. […] Et puis un jour, je me suis dit : ‘Si ça t'arrête, c'est que tu dois l'écrire.' Alors je m'y suis mis. Je me suis obligé à parler de l'indicible. Écrire les premières pages m'a pris plusieurs mois. »
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L'Irlande du 19ème siècle. Rien de très réjouissant car la vie y est très difficile. aux temps de la "grande famine"
Le livre s'ouvre d'ailleurs sur une scène sacrificielle qui prend à l'estomac.
Le livre est une litanie de drames contrebalancés par le courage inoui des protagonistes pour y survivre.
C'est superbement bien écrit et d'un lyrisme fou mais je me suis surpris à quelque fois m'ennuyer en suivant le parcours de Grace.
Trop de "sinistre" nuit parfois au récit.
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« À l'époque où l'on vit, songe-t-elle, il faut se faire à la fois loup et anguille. » Elle, c'est Grace, quatorze ans, mise sur la route par sa mère dans une scène glaçante qui ouvre le roman. La grande famine irlandaise sévit alors durement, planant sur les champs de pommes de terre pourries par le mildiou, condamnant des centaines de milliers d'habitants à la mendicité et à l'abjection la plus totale. Pour Grace, le salut consiste à se trouver du travail hors de son village et gagner suffisamment pour subvenir aux besoins de sa famille. Son frère Colly, douze ans, la suit en cachette de sa mère, et l'accompagne sur un parcours qui se révélera plus que chaotique.
Je découvre l'écriture hallucinée de Paul Lynch avec ce roman impressionniste sur un des chapitres les plus tragiques de l'Irlande. D'une grande beauté, le récit s'avère aussi d'une grande noirceur, déployant autour de l'adolescente errante, songes, superstitions et croyances, seuls refuges pour celle qu'on a forcé à devenir une adulte avant l'âge.
Un tour de force littéraire qui m'a fait penser à La Route de Cormac McCarthy, roman de fin du monde.
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"Affleurant d'un lieu où les mots n'ont pas cours, lui vient la conscience d'un détraquement de l'ordre des choses."

***

Conteur prodigieux,  Paul Lynch rouvre un chapitre tragique de l'histoire de son pays en nous plongeant dans l'épisode particulièrement meurtrier de la Grande famine qui a ravagé l'Irlande - alors colonie britannique, au milieu du XIXème  Siècle. Pour cause - l'émergence du mildiou sur l'île, une maladie parasitaire responsable de l'anéantissement des cultures de pommes de terre servant de base à l'alimentation des paysans. 

Traversé par un souffle puissant, ce récit d'une beauté ténébreuse, met en scène un personnage principal féminin absolument inoubliable dont nous suivrons pas à pas l'effroyable odyssée - du Donegal natal de l'auteur à  Limerick, sur une terre exsangue abandonnée des hommes et des dieux.

*

Octobre, 1845

"La récolte est perdue, tu le sais aussi bien que moi. J'ai demandé partout, mais personne n'est prêt à faire l'aumône. Moi, je suis trop avancée dans ma grossesse, il faut que tu t'occupes de toi. Tu dois te chercher un emploi (...). Reviens-nous à la fin de la saison, quand tu te seras rempli les poches."

Au sortir d'une scène inaugurale empreinte de bestialité, Grace - l'aînée d'une fratrie de bientôt cinq enfants, se voit jeter sur les routes à l'approche de l'hiver par sa génitrice. Si en cette période de misère noire, c'est une bouche en moins à nourrir, sans doute pense-t-elle également la protéger des intentions concupiscentes de Boggs, le propriétaire de la masure où la famille réside. 

Sommée de gagner sa pitance à tout juste quatorze ans, l'adolescente - travestie en garçon, quitte désemparée son petit village de Blackmountain. Y reviendra-t-elle? Serait-ce la porte de l'enfance qui se referme brusquement et définitivement derrière elle? Ainsi livrée aux caprices du hasard, n'est-elle pas vouée à une fin certaine?

"Le chagrin s'abat sur elle. le regret de ce qui n'est plus. La douleur de ce qui vient à la place."

Pareil à la nature agonisante, le lecteur se trouve lui aussi comme figé "dans la stupeur de l'attente". Enveloppé d'une atmosphère à la fois pesante et menaçante, il tourne les pages avec fébrilité, redoutant la réalisation des sombres présages qui tendent à se dessiner. Quelles perspectives d'avenir pour cette jeune fille qu'il tient déjà en affection?

*

Accompagnée de son frère, un soutien physique puis spectrale indéfectible, Grace cheminera du nord au sud du territoire - rejoignant alors les hordes faméliques de pauvres hères - vagabonds, mendiants ou brigands poussés au pire par la disette. Pluie diluvienne, froid dévorant, tortures de la faim, pénible labeur, danger omniprésent, morts et absences obsédantes,…mue par un instinct de survie incroyable, elle apprendra à composer quoiqu'il lui en coûte, avec une adversité au visage sans cesse renouvelé. Mais à quel prix?

"Elle cherche en rêve ce qu'elle a été autrefois. Je suis en train de basculer hors de ma vie pour tomber dans celle d'une autre."

Partageant intimement, ses émotions, ses souffrances, ses doutes, ses visions cauchemardesques voire hallucinatoires, ses tiraillements et questionnements existentiels, le lecteur abandonne son statut d'observateur pour faire corps avec elle. En dépit de quelques longueurs révélatrices de l'interminable périple qui s'impose à notre protagoniste, l'intérêt est continuellement tenu en éveil. 

Au gré des épreuves et rencontres jalonnant ses longues années d'errance aux allures d'épopée  initiatique, Grace connaîtra nombre de métamorphoses. Dans cet abîme de noirceur, la chrysalide deviendra papillon et s'envolera peut-être - souhaitons lui, vers une vie de lumière. Grace, toi qui a porté sur tes frêles épaules les tourments de tout un peuple soumis à une catastrophe innommable, sois-en sûre, j'emporte ton souvenir avec moi…

"Elle a beaucoup voyagé, découvert la terre avec ses mille voix (...), et au contact de cette multitude lui est venue la conviction que la terre n'était pas une,  mais qu'il en existait autant qu'il existe d'individus, et qu'une terre toujours nouvelle accueillait les mutations de nos vies. Nous vivons sous cent millions de soleils,  et chacun d'eux s'éteint sous un même soleil sans limite qui brûle dans son mystère éternel."

***

Porté par une prose lyrique et envoûtante, un roman magnifique nimbé de grâce que je vous invite à découvrir!
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Quatrième voyage avec Paul Lynch, auteur irlandais qu'on commence à bien connaître en France. Il existe à Dublin un groupe de statues décharnées, la Famine des Patates, triste et célèbre tragédie insulaire des années 1850. le mildiou, et aussi l'Angleterre un peu, ont jeté sur les routes et sur l'océan un tiers des Irlandais. Des centaines de milliers de morts, plus encore de migrants pour l'Amérique et l'Australie. Les Highlands écossais payèrent aussi très lourd lors de ce cataclysme.

Famine

Grace, octobre 1845, quitte le Donegal, envoyée par sa mère pour trouver du travail et une chance de survivre. Son jeune frère l'accompagne, à sa manière. le roman porte son nom, et elle porte le roman, camouflée en vêtements d'homme, en une quête apocalyptique sur les chemins et les forêts d'Irlande. Une Irlande bien peu hospitalière, aux mauvaises rencontres quotidiennes, sans foi ni loi, où l'on vole le moindre objet, où l'on égorge pour une miche de pain, où même les rats sont très recherchés. le roman va tambour battant, sans répit, la haine, la faim et la misère chevauchant sans trêve près de ces hordes de migrants de l'intérieur. C'est le temps où les hommes s'ensauvagent. La prose de Paul Lynch est parfois hallucinante, cauchemardesque.

La dernière partie du roman est un peu différente et à dire vrai borde le fantastique avec la réapparition du religieux, pas forcément réconfortant. Ce septième chapitre s'appelle Lumière et, curieusement, est séparé des six précédents par quatre pages totalement noires. Il y a dans Grace de la malédiction, comme une punition divine. C'est très impressionnant. Comme j'aime ce pays, mais je sais aussi sa dureté passée.

Elle passe quelques nuits dans une église délabrée. Surplombant le porche, cinq effroyables faces sculptées dans la pierre. Ses rêves sont habités de visages affamés. Une rumeur de vent s'exhale par leurs bouches. Quand elle se réveille, la lune éclaire la pierre comme une bougie. Il lui arrive de rester allongée sans dormir, évoquant tout ce qu'elle a vu, ces routes tellement remplies de malheur qu'on os à peine les regarder. Où va ce pays? se demande-t-elle.

Grace est un roman féroce, très peu traversé d'amitiés, ou de solidarités. Un roman où le diable des Irlandais ne se contente pas de les faire joyeusement danser au son des violonneux à la lueur d'un feu de camp.
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Un livre bouleversant, surprenant et d'une grande beauté malgré sa noirceur.
On n'est plus habitué aux grandes famines comme celle de 1845 en Irlande qui a jeté sur les routes son cortège de miséreux à la recherche de travail et de moyens désespérés pour survivre.
Ici c'est l'histoire d'une jeune fille abandonnée par sa mère qui la déguise en gamin pour aller sillonner le pays et échapper au sort de sa famille promise à une mort rapide.
Les aventures supportées par Grace, rendue folle de douleur, grandissant comme un brigand, voyant les pires exactions, échappant aux dangers et apprenant vite les règles de la survie et de la débrouillardise sont pour nous très difficiles à concevoir mais l'humanité a dû en connaître beaucoup de semblables malheureusement.
La langue écrite est d'une beauté rare, ainsi que les pages noires qui précèdent des jours meilleurs.
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Irlande, la grande famine.
Paul Lynch décrit l'indescriptible, dit l'indicible, la fuite, l'horreur, la faim, la mort, le désespoir absolu, dans une langue poétique et glaçante, onirique et charnelle.
Un grand livre, poignant, sombre, avec peu, si peu de lueur.
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Irlande 1845. le mildiou détruit les récoltes, la famine s'installe et va se prolonger sur plusieurs années.
La mère de Grace travesti sa fille en garçon pour qu'elle puisse plus facilement trouver un travail et la chasse de la maison, car elle ne peut plus nourrir ses enfants.
Grace, 14 ans va entamer un long chemin dans le froid et la misère. Elle va pour survivre devenir vacher, ouvrier, et même bandit pour pouvoir manger. Et manger un chou ou boire du lait avec des épluchures à cette époque c'est la paradis !
C'est un récit très dense qui demande beaucoup de concentration. Tout est mélangé, les pensées, le récit, les dialogues. C'est un roman d'ambiance, très noir sur la misère et c'est tellement bien décrit qu'on s'y croirait, mais j'avais hâte d'en sortir.
C'est à la fois très beau et en même temps trop long. le style et l'écriture de l'auteur sont très particuliers qui peuvent demander un investissement du lecteur, parfois, je décrochais et je devais relire pour bien comprendre. Il ne se passe pas grand-chose, pas d'action, mais la misère et la famine sont toujours là. Grace va devenir une jeune femme et retournée des années plus tard chez elle à Blacmoutain...
Tout est noir, très noir et très froid...
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Amoureuse de l'Irlande depuis des années, et n'ayant pas lu beaucoup d'auteur(e)s irlandais(e)s, lorsque la libraire m'a conseillé ce roman de Paul Lynch, je l'ai gardé en mémoire et n'y tenant plus, j'ai fini par l'acheter.
Cette lecture a été compliquée et je ne la conseille pas à tout le monde. On observe sur près de 500 pages la faim, la terreur, le désespoir et la tristesse de Grace. La plume superbe de l'auteur nous fait vivre au plus près le drame d'un personnage et a travaille elle, de tout un peuple.
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Quelle idée d emporter ce roman pour en faire la lecture en vacances sous le soleil grec ? Et pourtant la magie opère, je suis avec Grace sur les chemins d'irlande, sous la pluie, dans le froid je ressens la faim, les sentiments contradictoires de cette héroïne ordinaire ! J'ai hâte de lire les autres romans de cet auteur.
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