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Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Beyrouth, 15 juillet 2020
"Ce matin, en sortant des bureaux d'une amie qui a proposé de mettre son coursier à notre service pour des formalités administratives liées à l'achat du terrain à la montagne, j'ai vu une femme assise dans un grand canapé complètement usé, à l'ombre d'une benne à ordures, en train d'effeuiller du persil ; persil qui, contrairement au canapé défraîchi et à la benne à ordures souillée, paraissait frais et d'un vert presque émouvant." Tableau surréaliste, un parmi tant d'autres, dans un Beyrouth dévasté par les guerres, les conflits politiques et trente ans de corruption indescriptible, que le Covid-19 et l'explosion du 4 août 2020, une mise à mort en cinq secondes, finiront par achever.
De ce pays qu'on comparait à la Suisse au temps du romantisme, et qui fit encore rêver pendant une grande partie du xxe siècle les touristes du monde entier, suscita la nostalgie des libanais exilés et où l'eau était une précieuse fortune inépuisable, aujourd'hui il n'en reste plus rien. Il n'y a plus d'eau, ni d'électricité , ni autre chose.
Un pays érodé par une corruption à son paroxysme où même avec le ramassage d'ordures on devient facilement milliardaire, ("Un monde d'affairisme glauque, environné de dorures et les pieds dans les ordures"), et dont les responsables, les oligarques au pouvoir déjà d'une malhonnêteté extrême, en outre se permettent de s'octroyer une désinvolture et une arrogance qui laissent pantois, "L'arrogance a culminé le 22 janvier 2019, durant le forum de Davos, quand ce ministre libanais, gendre du président Aoun de surcroît, a déclaré fièrement que le Liban pourrait donner des leçons de gestion au monde entier et apprendre aux grandes nations, telles par exemple la Grande-Bretagne et les États-Unis, à se gouverner sans budget."

Charif Majdalani, grand écrivain libanais dont je suis une inconditionnelle, dans son dernier livre-essaie, nous autopsie son pays gravement malade au seuil de la mort.
Bien que l'autopsie soit extrêmement complexe, même sans rien savoir de l'histoire du pays on ne peut pas s'y perdre tellement c'est bien construit, et les détails qu'il fournit suffisants pour suivre le désastre en directe. Dans ce champs de ruines, son ultime acte de résistance contre l'idée même de l'effondrement sera de s'échiner à s'acheter une terre dans la montagne avec les derniers sous qui lui restent, rêvant de construire dessus quelque chose.

Un témoignage poignant de la plume d'un grand écrivain que je recommande absolument, vu que c'est un témoignage qui concerne toute l'humanité, ce mot "humanité" qu'on prononce à tout bout de champs mais que finalement on en a qu'un vague aperçu superficiel à travers les réseaux sociaux et les médias.

"....ce silence, cette paix immense des montagnes, comme ultimes témoins de ce que dut être le statisme éternel de la planète avant l'irruption du temps et de l'Histoire, et avant le désordre, la ruine et l'entropie que les hommes ne cessent de produire depuis qu'ils ont commencé à s'agiter sur la Terre."
"Nos destins comme cette canette et ce cigare, jetés aux vents."
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Le constat est amer, le Liban d'aujourd'hui a perdu tout ce qui faisait sa brillance dans le passé. Les hommes politiques véreux, les hommes d'affaires et entrepreneurs malhonnêtes ont eu raison de ce pays magnifique. La ruine et la faillite sont désormais le quotidien des Libanais victimes de ceux qui pratiquent des détournements de fonds publics à grande échelle, et autres malversations destinées à leur l'enrichissement au détriment du pays tout entier.

Un phénomène qui n'est hélas pas récent, Charif Majdalani écrit que durant la guerre civile : « la dérégulation totale, l'anarchie et l'absence d'autorité pour faire appliquer les lois entraînèrent une urbanisation sauvage encouragée par les déplacements de populations, par la spéculation et par une évidente opulence, elle-même due à l'afflux de l'argent des ventes d'armes et des drogues régentées par les milices et au développement d'une activité commerciale intense et totalement libre d'entraves. »

A l'origine de dégâts écologiques irrémédiables, cette urbanisation effrénée s'est poursuivie sous la IIe République, où « tous les excès furent légalisés, tant qu'ils pouvaient rapporter de l'argent. » Une logique mortifère, qui a conduit à l'explosion catastrophique sur le port de Beyrouth du 4 août 2020, qui laisse Charif-Majdalani profondément triste et désabusé. Et s'il envisage d'acheter un terrain dans la montagne c'est peut-être une façon de mettre à distance ce Liban qu'il dénonce pour retrouver celui qu'il a toujours chéri au plus profond de lui-même.

Une lecture que je conseille vivement pour découvrir l'histoire calamiteuse du Liban contée par un témoin exceptionnel, Charif Majdalani.
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Charif Majdalani a commencé ce journal après le 1er confinement. Il y constate les dommages consécutifs à cet enfermement que les 30 ans de corruption de la IIème république libanaise n'avaient réussi à abattre ! L'inflation et la dévaluation ont plongé la plupart de la population dans la misère. A fin mars 2023 il fallait 100.000 livres libanaise pour 1 dollar !

Il n'y a plus d'électricité, plus d'eau, plus vraiment de rien du tout, le pays étant gouverné par des oligarques qui se remplissent les poches, tout comme leurs prédécesseurs. Il a été physiquement ravagé par une urbanisation galopante, catastrophique et anarchique sans que ça ne soit jamais réparable.

Il raconte sans acrimonie, mais avec une constatation glaciale, tout ce que son pays a subi depuis sa fondation de république, convoité de l'extérieur et de l'intérieur par des plus forts et plus riches !

Pour parfaire l'oeuvre de destruction il y a eu la double explosion du 4 août sur le port ! Elle a apporté la mort instantanée pour des centaines de personnes, en a blessé des milliers et détruit une bonne partie du coeur de la ville, posant une chape de béton sur l'espoir des libanais !

Ce journal est un témoignage, éclairé, du mois qui a précédé la catastrophe mais aussi un rappel de l'Histoire du pays qui a mené à cette situation.

A lire, c'est court et bien écrit, percutant, même si jamais nous ne pourrons approcher ne serait-ce que l'idée de ce qui est la réalité pour les habitants !

Challenge Riquiqui 2023
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Ma fidélité de lectrice pour les belles histoires libanaises de Charif Majdalani ne s'est jamais démentie. Ses livres m'ont un peu fait connaitre le Liban, sa culture, son histoire et sa géographie. Il a su montrer un pays carrefour de civilisations, béni par ses ressources naturelles, mais aussi meurtri et profondément divisé par des années de guerres intestines.

Qui mieux que lui pouvait nous en parler, dans sa déliquescence actuelle, cette dramatique crise économique due à la corruption de la classe politique, au clientélisme et à la voracité du voisin syrien ? Faisant suite à une guerre civile, les dirigeants de la seconde république libanaise se sont comportés en cigale, en course frénétique de richesses acquises par tous les moyens illégaux, entraînant tout un peuple vers la pauvreté et un pays défiguré vers la faillite.
Et comme si cela n'était pas suffisant, la pandémie sanitaire et la catastrophe de l'explosion de Beyrouth en août 2020 mettent le pays à genoux.

L'écrivain, qui a toujours célébré la douceur de vivre du Liban, fait ici une tribune à charge pour un déni de démocratie. Par petits chapitres il raconte le quotidien des habitants et les symptômes du pays malade, avec une grande tristesse et une bonne dose de fatalisme et de colère. Son récit fait froid dans le dos. Et en comprendre les causes est éclairant, comme en présage de notre propre futur européen.

Au pays du cèdre, la réalité a largement dépassé la fiction et le romancier n'a fait que la transcrire.
Poignant !
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Les mots saisissants, percutants et poétiques de Charif Majdalani claquent et c'est une réalité bien triste qui nous saute aux yeux : le Liban est devenu un territoire fissuré, brisé, urbanisé à outrance. À un carrefour convoité entre l'Orient et l'Occident, il n'est plus que spéculation, gouverné par une élite oligarchique.

« Sur un mur, ce graffiti que j'ai noté il y a quelques jours et qui procède à une belle inversion : le régime souhaite la chute du peuple. »
Une gouvernance orchestrée par des pilleurs, des prédateurs sans vergogne, véreux et corrompus ; et la catastrophe survenue l'été dernier est une lourde et effroyable conséquence directe de cette très mauvaise gestion de l' État.

« Rentables, très rentables en revanche, le port et le service des douanes par où passent tous les jours des milliers de tonnes de marchandises, l'aéroport, le service d'enregistrement des véhicules motorisés, le casino du Liban. Autant d'institutions qui toutes possédèrent à un moment ou à un autre leurs propres caisses noires, dont les comptes sont absolument opaques depuis trente ans et où auraient disparu plus de vingt milliards de dollars. »

Les Libanais traversent des turbulences d'une violence inouïe depuis des années.

« Il y a quelques années, une revue littéraire m'a proposé d'écrire une dystopie qui aurait pour cadre le Liban ou le monde arabe. J'ai imaginé une histoire de spéculations immobilières à grande échelle à Beyrouth, comme il y en a tant eu durant ces dernières années, de buildings et de centres d'affaires ultra-modernes bâtis par des mafias liées au pouvoir sur des terrains gagnés en compressant les millions de tonnes de déchets dans la mer. Un monde d'affairisme glauque, environné de dorures et les pieds dans les ordures. »

Charif Majdalani aime son pays et nous livre ici un témoignage absolument bouleversant et un portrait cinglant de ce Liban en déroute.

« Nous ne partirons pas de ce pays, nous resterons ici, nous serons de nouveau heureux, nous rirons de nouveau, et si les salauds que vous protégez ne partent pas , eux
, nous irons boire et danser sur leurs tombes. »
Un livre poignant !
Lien : https://seriallectrice.blogs..
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Le journal commence le 1er juillet. le confinement qui vient de se terminer a continué d'accentuer une crise économique larvée. Les Libanais ont de l'argent sur leurs comptes, mais les banques leur en interdisent l'accès. le pays est gangréné de l'intérieur, le pourvoir en place se sert, fait la fête sur le dos des Libanais, se rit même du virus.
Le peuple survit. La priorité est pour eux: avoir de l'électricité.

Le 4 aout, ce qui tenait encore debout, est soufflé en quelques secondes. Cette explosion n'est pas le fruit du hasard, n'est pas un accident. Cette explosion c'est l'aboutissement de l'état de corruption du pays.

Le 4 aout, ici, en France, nous avons été sidérés par ce qui arrivait aux Libanais.
Ce pays n'était pour moi qu'un pays en guerre depuis ma naissance. La boutade classique quand une rue est en chantier, quand une pièce est en désordre, est de dire "C'est Beyrouth ici!" Voilà ce qu'était pour moi Beyrouth: un grand bordel en guerre troué d'impacts d'obus.
Comme j'ai honte…

Sur Instagram, j'ai fait connaissance d'une jeune fille, étudiante en littérature francophone à Beyrouth. Elle s'appelle Tia. J'ai pris conscience qu'une jeunesse étudiait, parlait français, anglais, lisait… La petite occidentale paternaliste à la culture colonialiste réalisait qu'ailleurs dans le monde on avait une culture, des intellectuels, des universités, des combats écologistes.
Comme j'ai honte…

Notre monde est riche, souffre, s'enlise, se bat. J'ai du retard à rattraper. Mon regard doit se tourner vers autre chose que l'Europe. Charif Majdalani, je le sens, va m'y aider. J'ai maintenant sept ouvrages à lire de cet excellent écrivain libanais. Histoire d'avoir moins honte…

PS: Tia est immortalisée par l'auteur dans ce livre. Tia, est-ce que de toi aussi je lirai les romans un jour?

PSbis : Cette couverture…

Lien : https://carpentersracontent...
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Au début de l'été 2020, dans un Liban ruiné par la crise économique, dans un Beyrouth épuisé qui se soulève pour une vraie démocratie alors que le monde est pétrifié par le coronavirus, Charif Majdalani entreprend l'écriture d'un journal. Cette chronique de l'étouffement et de l'effondrement se trouve percutée le 4 août par l'explosion dans le port de la ville de 2 750 tonnes de nitrate d'ammonium. Dès lors, elle devient le témoignage de la catastrophe et du sursaut, le portrait d'une cité stupéfiée par la violence de sa propre histoire, le récit de "destins jetés aux vents".
Un livre indispensable. Magnifique de lucidité, sensibilité, courage, desespoir, espoir... Ht Divan. de garde.
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Ce livre m'a été recommandée par une amie libanaise et je dois avouer que même si j'ai été à Beyrouth depuis ces évènements dramatiques, le récit que livre Charif Majdalani est glaçant. La société libanaise était en proie à une situation économique extrêmement compliquée lorsque l'explosion du port de Beyrouth a dévasté une bonne partie de la ville. L'auteur, qui rédigeait son journal à ce moment-là, reprend sa plume quelques jours après pour livrer le quotidien des beyrouthins qui s'unissent et s'engagent dans un combat contre la fatalité. Ce livre est un cri, celui d'un peuple résilient qui refuse de baisser les bras contre les nombreuses adversités qu'il rencontre. La faillite de l'État et l'avidité des hommes politiques laissent les habitants seuls face à un tsunami d'obstacles pour survivre au quotidien et où l'option la plus tangible est de quitter le pays.

Un livre fort et nécessaire pour comprendre ce que les libanais traversent dans cette crise sans précédent.
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Époustouflant, Vibrant, Emouvant, ce livre nous apporte une lumière crue d un Liban qui renaîtra un jours de ses cendres.
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Le livre porte en sous-titre "Journal d'un effondrement". le monde entier connaît aujourd'hui ce qu'il s'est passé le 4 août 2020 à 18h07. Mais quel gouvernement s'est un instant préoccupé de la situation du peuple libanais ces dernières années ? Aucun. Ici, en France, par-ci, par-là, quelques articles de presse mentionnant la dévaluation de la livre libanaise et l'effondrement économique progressif du pays. Mais certainement pas à la Une des médias comme ce fut le cas quelques semaines. Ensuite, même le président Macron est allé réprimander le gouvernement libanais, avec tout ce que cela a de ridicule, vu de France, de mon point du vue.



Le livre de Charif Majdalani tombe à point nommé pour qui veut en savoir davantage ce qui s'est passé au Liban ces trente dernières années. Ou du moins avoir quelques informations sur la situation du pays avant l'explosion sur le port de Beyrouth. L'auteur lui-même ne pouvait imaginer la tournure qu'allait prendre son récit. Pourquoi en est-on arrivé à un tel désastre ?



Charif Majdalani a entrepris son journal pendant l'été 2020, le 1er juillet. Pour témoigner du quotidien, dans un Liban ruiné par la crise économique et en pleine crise sanitaire due à la pandémie du Covid-19.



A première vue, la vie est normale : "Les embouteillages ne sont pas pire que naguère, bien que les feux de signalisation soient éteints avec la pénurie de courant électrique." Ah bon, une pénurie électrique ? Oui ! Une pénurie électrique qui entrave beaucoup la vie quotidienne des habitants. Mais, rien n'est impossible dans un pays au gouvernement corrompu ! Il faut masquer les failles. Alors on peut obtenir son permis de conduire sans avoir le Code ! "(...) Ma fille a obtenu son permis de conduire dans les conditions les plus absurdes, l'absence d'électricité dans le centre d'examen l'ayant empêchée de passer le test du Code de la route." La ville n'est que partiellement illuminée la nuit tombée. du moins ETAIT. "Il n'y a plus d'électricité depuis quelques jours. Quand on tend l'oreille, on s'aperçoit que le ronron des générateurs peuple la nuit jusque dans ses tréfonds. On s'y est accoutumés, il est devenu comme une part de la texture même de l'obscurité. Certains générateurs s'arrêtent à minuit, d'autres pas. Quoi qu'il en soit, à partir de minuit, les routes deviennent des gouffres insondables (...) L'effondrement du secteur de l'électricité est le plus emblématique de la faillite générale de l'Etat. Durant trente ans, aucun des gouvernements successifs n'est parvenu ou n'a voulu parvenir à moderniser les réseaux et reformer l'ensemble de cette administration." Charif Majdalani explique qu'il s'agit d'un problème d'entente entre les différents chefs des partis au pouvoir. "Selon les chiffres qui circulent, quarante milliards de dollars se seraient ainsi volatilisés entre chantiers de centrales qui se sont avérées inopérantes, importation opaque d'électricité de Syrie, location à des prix incontrôlables de centrales ambulantes turques. Quarantaine milliards de dollars qui auraient suffit à éclairer la moitié de l'Afrique, et qui n'ont pas permis, en trente ans, d'offrir autre chose que quelques malheureuses heures de courant quotidien à un aussi petit pays que le Liban. Entre-temps, il a bien fallu s'organiser. S'est ainsi développée une offre privée, celle des générateurs de quartier alimentant les maisons et les entreprises. Comble de l'absurde : l'un des divers gouvernements qui se sont succédé a décidé, au début 2019, de contrôler ces entreprises privées. Autrement dit l'Etat s'est mis à réglementer et à taxer un service illégal instauré pour pallier ses propres carrences."

Les banques ? C'est devenue une chose impossible. On l'a bien compris avec quelques autres blogueuses en voulant aider une famille à restaurer ce qu'il restait de son appartement qu'il y avait un problème avec les banques libanaises. On va dire que l'essentiel est que l'argent est arrivé mais sans passer par elles. Tout virement sur un compte libanais est refusé. Même si vous êtes en France.L'auteur décrit sa perte de temps à tenter x combines : "Je passe ma journée à courir d'une banque à l'autre, à convertir des dollars en livres selon le taux officiel, puis à compare ce dernier à celui des banques, puis, à celui des changeurs, puis à celui du marché noir, à faire des calculs, à planifier des dépenses moitié en chèque, moitié en liquide, avant de m'embrouiller et d'envoyer tout paître."



La pauvreté croît à vue d'oeil, même chez ceux qui vivaient bien, les licenciements vont bon train, les suicides aussi... La souffrance psychique due à la situation du pays obligent certains à prendre des psychotropes, à cela s'ajoute la crise sanitaire qui en rajoute une couche.


La pauvreté des Libanais, mais aussi de ceux qui viennent des pays voisins. Notamment de Syrie. du moins c'est ce que disent ce que disent ces êtres humains qui mendient dans les rues de Beyrouth. Certains disent venir d'Alep. Mais rien n'est sûr. Des Nawars ? "ce peuple mystérieux dont certains considèrent les membres comme des cousins asiatiques des Roms. (...). il est certain que, depuis quelques années, ils ont été supplantés dans les rues par l'immense déploiement d'une population de nouveaux mendiants." Des enfants, des femmes, des vieillards syriens font partie du paysage urbain de la mendicité, chassés de leur pays par la guerre civile. "Mais nombre d'entre eux sont nés ici, dans des chantiers abandonnés, des squats ou dans la rue, et sont donc totalement apatrides, abandonnés à eux-mêmes (...) La natalité dans ce milieu est apparemment vertigineuse. L'Etat libanais ne s'en est pourtant jamais préoccupé, laissant croître la misère, la violence domestique, l'ignorance et sans doute la drogue et la prostitution."



Charif Majdalani évoque également les problèmes d'écologie. La destruction des paysages, des forêts des montagnes par les guerres. Mais pas que. Par ce qu'ont fait les gouvernements successifs, les magouilles de grande ampleur, l'afflux d'argent sale provenant de la vente d'armes, et de drogues régenté par des milices... Depuis trente ans, "le pays tout entier est devenu la chasse gardée de la caste des oligarques au pouvoir, qui a établi avec les citoyens une relation de nature mafieuse". Les anciens chefs de guerre ou leurs descendants se partagent le pouvoir, notamment "le plus dangereux de tous, le Hezbollah, encore armé sous prétexte de résistance contre l'occupation israélienne dans les provinces du Sud alors qu'il n'y a plus d'Israéliens depuis quinze ans".


On pense à peu près avoir touché le fond. Et pourtant, le pire du pire est arrivé. L'auteur ne pouvait pas le savoir lui non plus. Si je vous dis que les dernières pages du livre sont pleines d'émotion, c'est comme enfoncer une porte ouverte.



On sort de cette lecture révolté et ému. Mais aussi en ayant appris quelque chose ! Un livre qui contient un récit fort, qui n'est pas une fiction, bien malheureusement, mais la réalité insupportable bien loin de la petite Suisse du Romantisme.



Je n'avais jamais lu d'écrits de cet auteur, par ailleurs enseignant à l'université Saint-Joseph de Beyrouth. J'ai encore appris beaucoup de choses sur la situation complexe de ce pays.



Lien : http://milleetunelecturesdem..
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