J'ai porté la chienne jusqu'à la maison. Elle était plus lourde que je ne l'aurais imaginé. Les morts sont toujours lourds. Puis je suis allé chercher une pioche et j'ai réussi à creuser, après beaucoup d'efforts, un trou suffisamment grand sous le pommier. La chatte me regardait faire du haut du perron. Le corps de la chienne était raide quand je l'ai enfoui avant de combler le trou.
J'ai rangé la pioche et la pelle contre le mur de la maison. La brume du matin était de retour sauf que, maintenant, elle venait de moi; c'étaient mes yeux qui s'embuaient. Je pleurais ma chienne.
Les vieux à notre époque doivent être transparents comme du verre. On leur demande de se rendre invisible.
- Le plus beau, c'est quand il pleut. Je me demandre s'il existe quelque chose au monde de plus beau qu'une douce averse d'été en Suède. D'autres pays ont des monuments remarquables, des cimes ou des gouffres vertigineux. Nous, nous avons nos pluies d'été.
- Et le silence.
La vie est une branche fragile suspendue au-dessus d'un abîme.
Il y a une mélancolie particulière qui accompagne le départ des oiseaux migrateurs.
L'envers exact de la joie qu'on éprouve à leur retour au printemps.
L'automne refermait son livre, l'hiver approchait de jour en jour.
Il y a une beauté spéciale qui n'appartient qu'aux femmes très âgées. dans leurs rides sont inscrites toutes les marques, tous les souvenirs de la vie écoulée. je parle des femmes très âgées, celles dont la terre réclame le corps.
- Il n'y a pas de gens normaux. C'est une fausse image du monde, une idée que les politiques veulent nous faire avaler. L'idée que nous ferions partie d'une masse infinie de gens ordinaires, qui n'ont ni la possibilité ni la volonté d'affirmer leur différence. Le citoyen lambda, l'homme de la rue, tout ça - c'est du flan. Ça n'existe pas. C'est juste une excuse que se donnent nos dirigeants pour nous mépriser.
La plupart des voyages dont on rêve n’ont jamais lieu. Ou alors on les accomplit intérieurement. L’avantage, quand on emprunte ces vols intérieurs, c’est qu’on a de la place pour les jambes.
C'était un soir où les morts et les vivants pouvaient faire la fête ensemble. Un soir pour ceux qui avaient encore longtemps à vivre et pour ceux qui, comme Harriet, se tenaient déjà au bord de la frontière invisible et attendaient le passeur.
La haine peut servir de moteur pendant un certain temps pas davantage. Elle peut te donner une force un peu illusoire, mais elle reste toujours en premier lieu un parasite qui te dévore.