L'absurdité de la théorie religieuse de l'amour-péché, ayant engendré par réaction cette autre absurdité, l'excuse du plaisir physique par le sentimentalisme, m'a conduit peu à peu à formuler les diverses propositions de ce livre. J'ai touché ici à quelques préjugés que la plupart des hommes et des femmes éludent en secret, mais dont leur hypocrisie ne souffre guère qu'on parle librement et sans respect ni circonspection.
En réalité il existe un très grand nombre de femmes parfaitement capables de désirer une prostitution masculine réglementée comme l’autre, et plus nous irons plus le nombre de ces femmes s’augmentera parce que les conditions de la vie féminine actuelle tendent à cette fin. Et ces femmes ne sont ni des dépravées, ni des cyniques, ni des hystériques, mais simplement des créatures saines et normales que le mensonge écœuré et dont les circonstances n’ont pas permis la libre et tranquille satisfaction.
Il est évident que tout le monde, légalement ou secrètement, « fait l’amour », pour se servir d'une expression dégoûtante. Mais il est non moins évident que personne n’est censé le faire en dehors des permissions légales, et que rien n’est organisé pour cette fin. Si deux êtres veulent s’appartenir, ils entrent de plain-pied dans le mensonge et sont forcés de prendre des allures de filous poursuivis. L’amour irrégulier, puisqu’il est possible de trouver parfois que l’amour est irrégulier!