Paule, jeune bourgeoise, s'est mariée avec le baron Galéas de Cernès, homme simple d'esprit, pour son titre et l'apparat associé à cette famille. Ils ont un garçon, Guillou, sur qui elle reporte sa frustration et sa colère. L'enfant est renvoyé de tous les établissements scolaires. Alors Paule, pour parfaire son éducation, le confie à M. Bordas, l'instituteur du village. La première visite est une révélation pour le jeune Guillou, qui découvre de l'attention, de l'affection, prend plaisir à la lecture à voix haute, se voit déjà dévorer des livres pris dans la bibliothèque de l'instituteur, imagine prendre comme modèle voire devenir l'ami de
Jean-Pierre, le fils de l'instituteur, un garçon surdoué aux résultats scolaires époustouflants, dont il voit la photo sur les murs de la chambre. Hélas, cette éclaircie sera de courte durée. L'instituteur, imprégné de lutte des classes, refuse finalement pour des raisons idéologiques de prendre en charge ce fils d'aristocrate. le lendemain, l'enfant et le père partent en promenade, le fils se jette dans l'écluse et se noie avec son père qui tentait de le sauver. L'instituteur est accablé de chagrin et du regret de n'avoir pas voulu sauver cet enfant prometteur. Bientôt, la mère attrape un cancer, sans doute généré par sa culpabilité, et meurt dans la souffrance en refusant sciemment la morphine censée la soulager.
Une nouvelle de 140 pages écrite en gros caractères. Encore une histoire sombre avec des personnages torturés incapables d'aimer ou de faire le bien autour d'eux. On peut regretter le choix de l'auteur d'avoir sacrifié cet enfant alors que tous les ingrédients étaient présents au contraire pour montrer que l'amour, l'attention et le temps consacré à un enfant pouvait le métamorphoser d'un « sagouin » en un enfant sérieux, discipliné, appliqué, engagé dans une spirale vertueuse de réussite.
Intéressant aussi est le portrait discret fait du père, ce simple d'esprit qui est le seul à aimer son fils, bien qu'incapable de communiquer avec lui, et qui l'emmène tous les jours se promener au cimetière et dans la forêt. Sa simplicité d'esprit le rapproche des choses simples, de l'amour et de l'humanisme naturels, tandis que tous les autres avec leur intelligence, leurs préjugés, leur orgueil, leurs ambitions, leur intégration sociale, sont prisonniers de leurs déterminismes. Un autre personnage aime l'enfant, l'employée de maison, "Fraülein", encore un message clair, l'instruction et l'appartenance de classe n'apportent pas forcément le bon sens, l'intelligence et le sens de l'humain.
Le scénario me fait penser de loin à
Poil de Carotte de
Jules Renard, pour la relation père-fils et mère-fils.