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EAN : 9781632153340
152 pages
Image Comics (28/04/2015)
4/5   1 notes
Résumé :
Humanity has been overthrown. Mutated animals run amuck in a post-apocalyptic world. Think you've seen this type of thing before? Well, not the way Ted McKeever tells it. Follow the last remaining human, HE, as he encounters every manner of bizarreness the devastated town of Blackwater has to offer, in this collection of McKeever's brooding, darkly humorous series, The Superannuated Man. Contains a substantial amount of bonus material, including doodles.
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Critiques, Analyses et Avis (1) Ajouter une critique
Ce tome constitue une histoire complète, indépendante de toute autre. Il comprend environ 130 pages de bandes dessinées, parues initialement sous la forme de 6 épisodes en 2014/2015. le récit est en noir & blanc, écrit, dessiné et encré par Ted McKeever, également l'auteur de récits comme Mondo, Miniature Jesus, Meta 4, Eddy Current.

Dans un futur plus ou moins proche, un grand désastre est survenu et l'humanité a été décimée. En plus les animaux ont subi une mutation qui leur a donné une morphologie anthropomorphe, et une intelligence leur permettant de parler, même si leur comprenette reste limitée.

Dans une bourgade isolée en bord de mer, Happy Pappy (un être humain normalement constitué) vit à l'écart, dans un grand bateau échoué. Il se rend de temps en temps en ville pour faire du troc afin de s'offrir de quoi se nourrir. Il parle tout seul, ou avec un mannequin qu'il appelle Capitaine. Il finit par se retrouver mêlé aux affaires de Bosco Poponopolis.

Le lecteur qui a déjà lu du Ted McKeever sait qu'il va se retrouvé embarqué dans un récit aux résonnances métaphysiques, dans un environnement en déchéance. le lecteur qui tombe par hasard sur ce récit le feuillète rapidement et constate un noir & blanc somptueux, et une narration visuelle qui s'étale, à raison de seulement 2 ou 3 cases par page en moyenne.

Tout au long du récit, le lecteur s'arrête interdit devant une case qui prise hors de son contexte apparaît comme métaphorique. Ça commence dès la deuxième case du récit, avec ce poisson mort surnageant à la surface de l'océan. La catastrophe écologique tant redoutée et tant annoncée a bel et bien eu lieu. L'homme a fini par empoisonner toutes les ressources lui permettant d'entretenir sa propre vie. Ça continue avec la case adjacente qui représente une basket chaussant un pied qui se balance au-dessus de l'eau. La texture du plastique est impeccable.

Quelques pages plus loin, le lecteur découvre le visage d'une hyène anthropomorphe le regardant droit les yeux, pour un effet très déstabilisant, en particulier grâce à la texture du pelage, et au regard chargé. Au gré de sa sensibilité, le lecteur arrête son regard sur le robinet d'un lavabo dans les toilettes des hommes, les rues en enfilades avec l'océan au loin, ou encore Pappy en train de manger du popcorn dans une salle de cinéma.

L'histoire déroule son intrigue, avec des rebondissements, un peu de violence, des animaux anthropomorphes décalés (l'éléphant ou le rhinocéros), une ambiance de fin du monde en train de se déliter lentement mais sûrement, jusqu'à une conclusion sans grande surprise. Quand même, le lecteur finit par remarquer que Ted McKeever glisse quelques indices quant à la dimension métaphysique de son oeuvre. Lorsque Happy Pappy tient un poisson dans les mains et l'élève au niveau de sa tête pour le regarder droit dans ses yeux morts, en évoquant à haute voix l'impossibilité d'oublier d'où on vient, le lecteur y voit comme un reflet de la tirade d'Hamlet tenant un crâne dans ses mains

Du coup, le lecteur se dit que les 2 citations d'Hunter S. Tompson, celle de Frank Zappa et celle de Wiliam Burroughs ne sont pas juste là que pour faire joli. Derrière la narration nonchalante et la résignation du personnage principal, Ted McKeever a inclus une réflexion discrète sur l'état du monde et la place de l'individu dans la société. Justement cette hyène qui épie à la jumelle Happy Pappy peut se voir comme une métaphore du voisin curieux, très intéressé par la vie privée des autres.

Finalement ces animaux anthropomorphes à l'entendement limité peuvent s'interpréter comme la vision qu'a Happy Pappy des autres êtres humains au milieu de la société desquels il doit vivre. Une fois que le déclic s'est produit, le lecteur ne peut plus arrêter ces associations d'idées qui font naître une étrange résonnance dans certaines cases. Ces dernières deviennent des métaphores de la vie humaine.

La créature tapie au fond de l'eau, aux formes arrondies devient une métaphore de la mère et de l'enfantement. le trafic de chair humaine devient une image pour évoquer les individus qui ne cherchent qu'à profiter des autres pour assurer leur propre survie, ou leur propre croissance. le film fauché de science-fiction que regarde Happy Pappy au cinéma devient l'incarnation des divertissements décérébrés que l'individu est prêt à consommer encore et encore, sans avoir le recul nécessaire pour remarquer qu'on lui sert toujours la même chose, etc.

Cette oeuvre de Ted McKeever a donc le même goût que les précédentes. le lecteur familier de cet auteur constate que son travail sur l'encrage se fait de plus en précis et sophistiqué. Il voit que McKeever privilégie une narration visuelle facile à assimiler, avec un nombre peu élevé de cases par page. Cette histoire se déroule de manière très linéaire (avec 2 brefs retours en arrière sur la vie d'Happy Pappy), sans grand enjeu, même si le personnage principal est capturé et risque de se faire torturer.

Le lecteur apprécie de découvrir cette réalité très consistante, ces images souvent oniriques, souvent teintées d'une dimension horrifique. Il finit par percevoir la dimension métaphorique de certaines cases ou certaines séquences, alors même que l'auteur ne la rend pas explicite. Derrière le conte, se cache une vision noire du monde. Happy Pappy se comporte de manière détachée comme s'il ne pouvait rien arriver de grave, mais la dernière image ne laisse planer aucun doute sur la conviction de l'auteur quant au devenir de la race humaine.

Tout au long du récit, le lecteur reste décontenancé par le fait qu'Happy Pappy constitue le centre du récit, le seul point de vue de la narration. Il y a là une forme d'égocentrisme prononcé. le principe d'un personnage principal est souvent retenu pour un roman ; il facilite la projection du lecteur dans le ressenti dudit personnage, dans sa vision de la réalité. Ici cette projection s'accompagne d'une forme de malaise, car non seulement le récit est focalisé sur Happy Pappy, mais en plus tous les individus autour de lui sont des animaux anthropomorphes dotés de conscience, à l'intelligence peu élevée, d'une certaine manière inférieurs au personnage principal.

Du coup le lecteur a l'impression d'être le seul individu intelligent capable de comprendre ce qui se passe, au milieu de gens prisonniers de leur mode de pensée, incapables d'évoluer ou de voir plus loin que le bout de leur nez. Ce dispositif narratif finit par être un peu gênant car il est impossible de savoir si le comportement d'Happy Pappy est révélateur de la façon de penser de l'auteur (individu plus conscient de son humanité et au-dessus du commun des mortels), ou si l'auteur s'attend à ce que le lecteur prenne la supériorité morale affichée d'Happy Pappy comme une critique de son propre comportement.

Certes le propre de l'homme est d'appréhender la réalité du point d'un point de vue égocentrique, limité par ses sens et sa capacité à apprendre et à se remettre en question. Cependant, il est fort vraisemblable que les lecteurs de Ted McKeever soient pour la plupart des individus capables de s'ouvrir à d'autres formes de pensées, la preuve manifeste en étant le caractère hermétique des oeuvres de l'auteur qui oblige ses lecteurs à réfléchir et à remettre en question leurs certitudes. du fait de cette critique de l'individu à l'intention peu claire, le lecteur peut ressentir un léger agacement devant cette dimension hermétique.
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