J'avais adoré
Betty et l'écriture sublime de
Tiffany McDaniel, alors évidemment j'ai eu envie de découvrir son roman suivant, qui en réalité a été écrit avant. Et je dois dire que dès la première (demie) page, mon petit coeur s'est senti enveloppé, avec délice, de soyeuses volutes de poésie.
Pourtant, après quelques pages, mon intérêt a eu un peu de mal à décoller.
Une bigote qui perd subitement la foi, son fils qui doute de la force du Bien contre le Mal, tel est le point de départ de ce roman. le narrateur est
Fielding, treize ans, le fils de cet homme, Autopsy Bliss, qui a un jour invité le Diable à se présenter. Et il s'est présenté ! C'était un enfant de treize ans, noir, aux yeux verts. Évidemment personne n'a cru qu'il était ce qu'il prétendait être. Pourtant il a semblé parfois doué de prescience. Assez rapidement des événements étranges vont se produire.
Alors que l'histoire se passe en 1984, je n'ai pas réussi à voir autre chose que les années 50. de la tenue vestimentaire du père, de la mère, qui ne sort jamais par peur de la pluie et qui donc tient sa maison en parfaite femme au foyer, en passant par la bigoterie et les descriptions de la ville comme des gens, je n'ai absolument pas vu les années 80. Ni même dans le futur avec les années 2050 quand le narrateur, devenu vieux, poursuit dans ses souvenirs.
On passe sans cesse et sans transition de 1984 aux années 2050 avec
Fielding devenu un vieil homme aigri et bourré de remords, qui n'a plus posé le pied sur le sol de l'Ohio depuis soixante-dix ans, et la question est : pourquoi ?
La curiosité m'a fait poursuivre ma lecture mais hélas j'ai peiné à m'immerger dans l'histoire. Je suis restée un peu en dehors sans parvenir à m'intéresser à l'intrigue malgré les questions qui m'ont taraudée. Qui est Sal ? Pourquoi
Fielding est-il devenu un vieil homme triste et seul ?
Pourtant j'ai aimé tous les membres de la famille Bliss. Généreux, bienveillants, équilibrés à part la mère et son étrange phobie de la pluie même en pleine sécheresse. Mais tous ont ouvert leurs bras à Sal, faisant de lui le cinquième membre de la famille.
On se trouve au coeur de cette Amérique bigote, raciste et homophobe. Les bien-pensants prêts à lyncher un enfant noir car tout le monde prétend avoir vu quelque chose que personne n'a vu. C'est fascinant et effrayant. Cette petite ville a son fanatique, le fauteur de troubles Elohim, dont le nom est une des appellations de Dieu et qui harangue les fidèles. Serait-il déterminé par le nom qu'il porte ?
En fait, mon intérêt pour ce roman a été en dents de scie. Par moments j'ai été captivée, puis je me suis ennuyée, parce que trop lent à mon goût. Et puis à partir de la moitié du roman j'ai été très émue, parfois attristée, mais conquise. Car c'est une belle histoire d'amours. Amour familial, immense amour fraternel, amour pour son prochain, et aussi de cette forme d'amour qu'est l'amitié, au milieu de l'intolérance, de l'obscurantisme et de la haine aveugle qui cherche quelqu'un à punir pour ses malheurs ou simplement pour ses convictions. Et puis parfois l'amour fait qu'on meurtrit profondément, bêtement, maladroitement, ceux qu'on aime le plus.
Avec cette histoire
Tiffany McDaniel nous rappelle que la vie est un long chemin semé d'embûches, que trop souvent ce qui est perdu l'est pour toujours, que le mal est partout et, fréquemment, pas où on l'attend.
Ni la quatrième de couverture ni même le début du roman ne m'avaient préparée à ce que j'allais trouver dans ce récit. Au fond, c'est l'histoire de la vie, des familles, des lieux, des gens et leurs tragédies, de la violence du monde et celle cachée derrière les murs, de l'Amérique profonde… et un peu du Moyen-âge qui perdure chez certains.
Tiffany McDaniel nous emmène tout doucement vers un dénouement tragique. C'est beau et douloureux, laid parfois et tellement triste.
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