Dans Electrosound : Machines, musiques et cultures, à la question de Jean-Yves Leloup*, « Y-a-t-il dans votre domaine [la musique], des territoires qui restent encore inexplorés », François Pachet, directeur du SONY CSL (Computer Science Laboratory), apporte la réponse suivante : « Il y a la question fondamentale de savoir pourquoi on aime ou n'aime pas ceci ou cela. La cognitions des goûts, quoi. Qui a toujours été un problème traité par la sociologie. Elle a des choses à dire, mais il y a beaucoup de choses à dire en dehors de la sociologie. La cognition du goût n'est quasiment pas explorée. C'est d'ailleurs ce qui me passionne depuis toujours » (p. 197).
Cette question de la cognition du goût concerne bien d'autres domaines que la musique et en particulier la littérature. Après tout, une réponse serait de rappeler que « de gustibus non est disputandum » - ce qui permet d'éviter les jugements de valeur du type : « Tu lis [l'auteur de votre choix] ?!!! Mais c'est une bouse ???!!! » - le terme de bouse me rappelle la vidéo « La musique c'était mieux avant »** de e-penser - et qu'il est difficile d'expliquer pourquoi on aime ou n'aime pas un livre.
Il y a 18 ans j'ai lu Ceux de la vierge obscure de Pierre Mezinski. Lorsque je devais faire de la place dans ma bibliothèque et me séparer de livres - le manque de place serait bien la seule raison qui me ferait adopter la lecture sur tablette -, j'ai toujours sauvé ce livre ; aujourd'hui devant économiser de l'espace, je vais encore le sauver et le conserver.
Dans mon souvenir ce livre ne m'a pas laissé un souvenir impérissable : c'est une enquête moyenne et honnête au cours de laquelle Aguilar, un ex-commandant du « service action », entre en contact avec le milieu des sectes dont l'une d'elles a enlevé son épouse.
C'est le seul livre de cet auteur - par ailleurs, auteur de livres pour la jeunesse - que j'ai lu - a priori, Ceux de la vierge obscure était le premier volet d'une série, « La Fraternité Lucifer », mais je ne trouve pas traces d'une quelconque suite.
A priori, rien ne destine à ce que je sauve ce livre - l'écriture est correcte sans des qualités exceptionnelles, l'intrigue est quelconque. Pourtant je sauve régulièrement ce livre pour au moins deux raisons. Tout d'abord, il y a la dédicace du livre « Ce livre est dédié aux chasseurs à l'arc. Aux hommes libres, aux individus. À ceux qui ne veulent pas faire le bonheur de l'humanité, et qui se tiennent loin des bandes, groupes, partis, ligues et loges, clubs et sectes » dans laquelle je me reconnais. de loin, il y a un peu de la figure du Waldgänger de Jünger dans cette dédicace, dans ces chasseurs à l'arc. Surtout un des personnages, Walder, mi-gérontologue, mi-gourou, s'exclame : « On peut prévoir n'importe quoi, dit tout à coup le gros, à très haute voix , très lentement, articulant ses mots sans la moindre trace d'accent. On peut prévoir n'importe quoi : une guerre, une révolution, mais pas les conséquences d'une chasse au loir en automne… » (p. 40). Depuis que je l'ai lu, cette phrase - la partie « On peut prévoir n'importe quoi : une guerre, une révolution, mais pas les conséquences d'une chasse au loir en automne… » - s'est imprimée dans mon cerveau et se rappelle régulièrement à ma mémoire. Rien que pour l'impossibilité de prévoir - à ce sujet la lecture de Prédire n'est pas expliquer de René Thom est instructive - les conséquences d'une chasse au loir en automne, j'aime ce livre et continuerai de le sauver.
* Le journaliste et musicien pas le théologien.
** https://www.youtube.com/watch?v=NiPSK4sOQ3s
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Attention, 19 ans après la "série" reste limitée à ce seul livre, et on comprend vite pourquoi. C'est d'un vide sidéral, juste un livre d'action qui ne se termine pas et qui n'a même pas les qualités d'efficacité de cette sous-littérature. Quant au style, mieux vaut se taire!
Avec cela, un humour de potache, du genre de cette note: "l'auteur est polyglotte" qui ne fera rire personne.
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On peut prévoir n'importe quoi, dit tout à coup le gros, à très haute voix , très lentement, articulant ses mots sans la moindre trace d'accent. On peut prévoir n'importe quoi : une guerre, une révolution, mais pas les conséquences d'une chasse au loir en automne… (p. 40)
Ce livre est dédié aux chasseurs à l'arc.
Aux hommes libres, aux individus.
À ceux qui ne veulent pas faire le bonheur de l'humanité, et qui se tiennent loin des bandes, groupes, partis, ligues et loges, clubs et sectes.