On saluera l'originalité de cette mise en BD de l'Agricola de Tacite: le dispositif fait alterner un récitatif reprenant l'essentiel du texte de l'historien, et des dialogues, d'un ton plus libre, ainsi que de nombreuses bulles de pensées qui nous révèlent les appréciations des personnages sur les situations qu'ils vivent. Quant aux dessins, il faut bien avouer qu'ils s'apparentent davantage aux miniatures des évangéliaires carolingiens
qu'aux fresques de la Villa des Mystères. Même si l'on admet que le réalisme léché et académique d'un
Jacques Martin (Alix) a fait son temps, ce traitement surprend pour illustrer celui que Racine considérait comme « le plus grand peintre de l'Antiquité ». (...)
Ce style trash présente cependant l'avantage de ne pas idéaliser la civilisation romaine de l'apogée de l'Empire, en induisant même des effets sans doute non voulus par Tacite, mais pertinents pour le lecteur d'aujourd'hui.
Le scénariste semble par ailleurs prendre plaisir à imiter la concision volontiers elliptique de son modèle, d'ailleurs présenté avec humour comme un « auteur hermétique dont le latin a résisté à des générations d'étudiants de l'époque moderne, mais sans doute aussi bien avant eux, aux contemporains mêmes de l'historien » (121).
Alain Corbellari, Lausanne (in Museum Helveticum, décembre 2023)
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