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sur 877 notes

Critiques filtrées sur 3 étoiles  
"La beauté sauvera le monde" dit le Prince de Dostoïevski ; cette phrase a résonné en moi pendant ma lecture.
Car le Narrateur est plongé depuis l'enfance dans une quête de la beauté, de la Beauté même comme concept abstrait plutôt que concrète et réelle. Il fixe donc son regard sur des petites choses, attiré notamment par des couleurs, pour y trouver l'essence même de ce qu'il cherche : des feuilles argentées sous la lune, le blanc d'un sein, le rouge des lèvres, le bleu d'un kimono, le jaune du duvet d'un oiseau, et par la perfection architecturale du Pavillon d'or...
Oui, le personnage principal cherche la beauté dans un tout qui unit à la fois le paysage et les corps féminins réifiés. J'ai d'ailleurs trouvé certaines scènes assez dérangeantes, toutes celles en réalité où une femme ou une jeune fille est présente, une sensation de malaise se dégage : le Narrateur est un voyeur pervers, qui observe et jouit de loin du corps des femmes.
Et progressivement, le Narrateur s'aperçoit que cette quête de la beauté absolue est vouée à l'échec. A nouveau, mêlant femmes et nature, il s'aperçoit que la corruption et la pourriture s'immiscent partout, en lien avec la modernité économique et la défaite militaire - dans de brèves et rares allusions au contexte historique, que j'aurais aimé plus approfondies : la plage est sombre sous la pluie, les kimonos n'ont pas d'éclat à cause des restrictions, les usines crachent des suies et des fumées noires, les occupants américains avilissent les geishas... La quête de la beauté devient donc une quête de la laideur, qui se transforme en pulsion de vie. La tonalité devient alors pessimiste, morbide même, notamment avec Kashiwagi, figure de mauvais génie, de mauvaise conscience, du Narrateur, qui l'initie à voir le mal partout.
Or, je n'ai pas apprécié ce Narrateur, je n'ai pas pu ressentir d'empathie pour lui, éprouvant un certain malaise à nouveau face à cette accumulation de bassesse, de crudité - voire de cruauté - et à cette volonté d'humiliation du Narrateur qui insiste sans cesse sur sa laideur, sa pauvreté, son bégaiement, qui humilie sa pauvre mère car s'estimant humilié par sa pauvreté, qui maudit sa misère... tout en faisant preuve d'un immense orgueil puisque considérant que le monde entier devrait lui prêter attention, voire tourner autour de lui. Et qui, voyant que ce n'est pas le cas, s'enfonce encore plus dans sa misanthropie et son goût pour la laideur. Pour reprendre des mots chers à Victor Hugo, aucun sublime n'est opposé à cette monstruosité et à ce gouffre.
Je citais Dostoïevski pour commencer car, tout au long de la lecture, je me disais que, même si je ne connais pas la société et la culture russes, j'apprécie beaucoup Dostoïevski. Or, ne connaissant pas non plus la société et la culture nippones, je n'ai pas réussi à être sensible à cette écriture. Je n'ai pas lu des évocations de la beauté, mais des descriptions forcées d'un auteur qui, pour moi, voulait donner l'impression d'écrire de la prose poétique en parlant des nuages changeant, des reflets dans l'eau ou des découpes des feuilles.
Une lecture qui m'a déçue tant j'avais lu du bien de cet ouvrage, et qui me laisse un goût amer, un goût de cendres.
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Le Pavillon d'or retrace un fait divers. Pour ce qui est de cet aspect, il est très intelligemment traité. Mishima tisse l'une de ses plus belles métaphores en faisant du Pavillon le symbole d'une beauté à laquelle le narrateur, de par sa laideur, ne se sent pas le droit d'accéder. Toutes les descriptions du pavillon, qui devient le reflet des états d'âmes du protagoniste, sont magnifiques. Mishima a ce talent de nous faire voyager, de nous emmener au Japon avec lui. On retrouve les thèmes chers à l'auteur : la perversité, la pulsion de mort, le voyeurisme, l'aspiration à quelque chose de plus grand qui finit par fuir.
Ceci dit, j'ai été moins convaincue par ces longues réflexions parfois absconses qui freinent le récit. Certaines sont très pertinentes, d'autres un peu moins, si bien qu'il m'est arrivé de m'impatienter. Il faut lire le Pavillon d'Or pour ce qu'il laisse d'héritage (l'influence sur Amélie Nothomb est ainsi absolument criante), mais pour découvrir Mishima, je conseille davantage Confession d'un masque ou La Mer de la Fertilité, mieux narrés.
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S'inspirant d'un fait divers ayant marqué le japon d'après guerre , Mishima raconte le parcours d'un jeune bonze shintoiste emmuré dans un schéma mental destructeur , tortueux , complexe mais fascinant .....
Mizoguchi , bègue et dénué de tout attrait physique , a fait le choix ou le non choix de se retirer dans une bulle , le mettrant à l'abri du regard du monde .
Citation :
"Je ne différais des autres que par mon bégaiement , et parce que j'étais un tantinet plus laid" .


De cette légère différence , mais reliée à la laideur et l'inacceptable pour lui dans son obsession de la recherche de LA beauté dont il se sent violemment exclu , Mizoguchi s'appuiera pour bâtir tout un édifice psychique , prison égotique suprême , complexité brillante et dangereuse ; de cette souffrance narcissique naitra une personnalité bancale , mutilée et malsaine , capable du meilleur comme du pire dans sa recherche de l'inaccessible .
Ce fameux Pavillon d'or dont Mizoguchi s'accapare intérieurement pour en faire LA représentation de la Beauté ultime deviendra un pilier de son édification psychique : sans lui tout s'écroule et le sens de la vie semble disparaitre .

Tout au long de ce parcours presque initiatique , on assistera à ces oscillations intérieures , ses tentatives vaines pour "entrer dans la vie ", briser cette glace qui le coupe du monde réel , des sens et du plaisir , on se glissera dans la peau de cet être morcellé , coupé de lui même , en balancement continuel entre ce qu'il croit être le bien et le mal , en recherche éperdu d'une beauté absolue au delà des apparences , torturé et tout aussi enclin à trouver l'issue dans la pureté et la noblesse de coeur que dans les formes les plus perverses dans de subtils jeux de soumissions et dominations .....
Qu'est-ce que LA beauté , comment vivre avec la dualité du bien et du mal , où se situe la connaissance et qu'apporte-t-elle à l'humanité , l'art est-il un moyen d'accéder à l'ultime vérité ....

Mishima n'a de cesse de bousculer le mental de son lecteur , multipliant les questionnements et les approches , s'appuyant sur une culture zen qui déroute le lecteur occidental plus linéaire dans son approche .
Mishima dérange par son regard clinique de la dualité du bien et du mal , Mishima séduit par son écriture magnétique , Mishima agace par l'élégance de son discours au sommet d'une perfection de forme ....tel le Pavillon d'or dans son abstraction ....
Un ouvrage brillant , dont l'épure apparente cache une richesse de fond difficilement appréhendable en une seule lecture : les thèmes abordés sont infinis et les approches peuvent se faire sur plusieurs niveaux ( psychologie pure , analyse psychanalytique , raisonnement théologique ....)
Belle découverte pour moi pour une presque première approche de la littérature japonaise ....Il est bien évident que quantités de références culturelles m'ont manqué pour en saisir toute l'étendue mais portée par une lecture plus intuitive peut-être certaines portes se sont ouvertes autrement et ce fut un moment de grande intensité !
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Le Pavillon d'Or est un roman d'apprentissage qui nous propose de plonger dans les pensées amorales et sinueuses d'un jeune moine voué à sombrer dans la pyromanie. La traduction nous a semblé rendre à la fois la poésie et la bizarrerie qui traverse ce livre. On regrette cependant le manque d'approfondissements de ce récit qui présente des réflexions trop redondantes à notre goût !

(Retrouvez notre chronique complète sur le blog ↓)
Lien : https://albertebly.wordpress..
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