Voilà un livre lu lors d'une lecture commune, ce que j'ai particulièrement apprécié, car, si je l'avais lu seule, je l'aurais très probablement abandonné.
Pourquoi ? Car le roman souffre d'un gros coeur mou dans lequel je me suis engluée. On se perd dans des réflexions philosophiques autour de la Beauté et de la laideur, de l'identité, du mal. Non pas qu'elles soient particulièrement compliquées (quoique les multiples références au cas « Nansen tue un chaton » ne m'aient pas aidé à en comprendre la moralité ? la finalité ? l'intérêt ?), mais parce qu'elles sont extrêmement redondantes. J'ai eu longtemps l'impression de tourner en rond face aux désirs paradoxaux du narrateur entre faire le mal et atteindre une certaine pureté, une « âme de lumière » semblable à celle de son condisciple Tsurukawa. Une dualité à l'image de celle amour/haine éprouvée envers ce trésor architectural dont je me suis également lassée des multiples descriptions.
Quelques chapitres se sont ainsi révélés d'une lenteur pétrifiante : mes yeux avaient alors envie de se lancer dans une lecture fortement diagonale et je ne comprenais plus grand-chose à ce que je lisais…
Ce roman est une sorte de parcours initiatique qui conduira Mizoguchi à la pyromanie. Son bégaiement et sa laideur, une trahison de sa mère. L'impunité des soldats américains et la soumission des Japonais aux vainqueurs. le cynisme d'un ami. Un éloignement du temple et de l'université, une perte de respect pour le Prieur. Des désillusions, des regards désappointés sur les autres (même ceux qu'il jugeait favorablement, détruisant alors un idéal).
Et puis, il y a ce Pavillon d'Or, d'abord fantasme né des récits émerveillés de son père. Obsession par laquelle le temple s'interpose sans cesse entre lui et le monde. Relation oscillant entre fascination et déception. Désir d'en devenir le maître ou de leur détruire, impérieux besoin de se libérer de son influence pernicieuse.
Malgré ces quelques chapitres qui ont failli me perdre, le roman redevient plus lisible – peut-être car plus linéaire – à compter du chapitre 7. On finit par se prendre d'intérêt, voire de pitié pour Mizoguchi ; des événements surviennent, une évolution de ses relations avec différents personnages est notable ; son projet criminel apparaît ainsi que des atermoiements, de faibles tentatives pour s'en décourager et un report de la faute sur autrui qui engendre une certaine attente, un quasi-suspense (en dépit du fait que la fin est connue)… Les derniers chapitres ont clairement remonté l'ouvrage dans mon estime, allant jusqu'à conclure sur une note plutôt touchante.
Il faut aussi reconnaître que la traduction est belle. J'ai retrouvé des échos à Confession d'un masque dans les instincts destructeurs de Mizoguchi, son appétit pour la souffrance et la mort qui le fera appeler de ses voeux les bombardements et les incendies sur Kyoto : une atmosphère sombre, parfois malsaine qui avait tout pour me plaire. J'ai également aimé le regard sur la nature – une tempête qui approche, un bord de mer… – et les descriptions précises qui en jaillissent.
De plus, Mishima sait aller là où on ne l'attend pas. Certaines scènes, notamment avec les personnages féminins qui émaillent le récit, au-delà de leur caractère troublant voire dérangeant, m'ont surprise en prenant une direction tout à fait contraire à mes suppositions.
Ce roman possédait des atouts pour me plaire : la thématique, l'atmosphère, l'évolution psychologique du personnage, l'écriture… Et pourtant, on a frôlé le naufrage et je ne peux partager les critiques dithyrambiques car il y a, à mon goût, des longueurs et des répétitions d'un ennui abyssal au milieu du roman.
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