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sur 1278 notes

Critiques filtrées sur 4 étoiles  
J'ai acheté Pour que tu ne te perdes pas dans le quartier parce que j'aime lire les livres de Patrick Modiano, les prêter, les relire… Ils me touchent profondément par la qualité d'écriture resserrée de cet auteur et sa cartographie de Paris entremêlée des méandres de la mémoire.
Le voile sur les mystères n'est jamais complètement levé, ce sont juste des petits courants d'air qui entrouvrent les portes de la mémoire. Il suffit d'un nom, d'un bâtiment et soudain les remparts invisibles qui empêchent de se remémorer des choses importantes s'effondrent alors que restent en mémoire des détails insignifiants ou transfigurés par l'imaginaire.
Jean Daragane, un homme d'âge mur dont on ne sait pas grand-chose, a égaré son répertoire. Ce dernier est retrouvé par un couple étrange et envahissant qui le questionne de manière pressante sur des noms inscrits et oubliés depuis longtemps dans son petit carnet.
Avec de faux airs d'enquête policière, dans une atmosphère cotonneuse et inquiétante, commence alors une quête sobre et mélancolique sur sa vie de petit garçon délaissé par ses parents et confié à une jeune femme dans les années cinquante.
Comme Claude Monet travaillant inlassablement sur la lumière dans son jardin de Giverny, Patrick Modiano explore le Paris d'après-guerre, donnant à son oeuvre une portée universelle dans sa quête de souvenirs.
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Entre le passé et le présent, il n'y a au fond qu'une mince pellicule de cellophane. Il suffit d'une piqure d'insecte, presque rien, pour que les souvenirs reviennent par bouffées. Et chez Modiano; ce sont des patronymes, des numéros de téléphone périmés et des noms de lieux qui suscitent ce retour en arrière. Jamais anodines, ces réminiscences sont toujours d'une douceur douloureuse, puisqu'elles sont floues, forcément, et qu'elles viennent par bribes et par recoupements. Et les blancs de l'enfance se comblent peu à peu, mais jamais tout à fait. Pour que tu ne te perdes pas dans le quartier est un roman modianesque pur sucre. Et donc un régal pour les amateurs dans une tonalité sombre et mélancolique qui semble encore s'accentuer dans ses derniers livres. Jean est un sexagénaire qui, à son corps défendant, voit sa mémoire travailler à nouveau, lui qui vit dans l'oubli et dans un quotidien sans joie où seules la lecture de Buffon et l'observation des arbres lui donnent encore la sensation de vivre. Un carnet d'adresses perdu et retrouvé par un individu étrange le remet sur la piste de sa petite enfance. Et d'une femme, plus particulièrement (Anne), qui remplaça un moment sa mère et qu'il retrouva quinze ans plus tard, brièvement. le livre de Modiano vogue entre trois époques, avec cette nostalgie des années 50, les photomatons, une maison en banlieue, et Anne, dont le mystère de la profession et des (mauvaises) fréquentations ne sera jamais éclairci. Patrick Modiano, enquêteur de l'intime, nous entraîne une fois de plus dans un monde flottant et disparu. Ce ne pourrait être qu'un rêve après tout, tellement les contours en sont vagues. de ceux dont on ne perçoit au réveil que quelques impressions éparses et singulièrement tristes. Un état cotonneux que la prose fluide de l'auteur, comme toujours, rend merveilleusement bien.
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Je continue mon chemin modianesque. Après le premier roman qui fut une expérience très mitigée, un livre "star" Dora Bruder qui m'a conquis, me voici au livre de la consécration puisque sorti l'année de l'obtention du Prix Nobel.

D'abord dire que si vous voulez être surpris par Modiano, vous vous êtes a priori trompé de porte. Il fait partie de ses écrivains qui vous donnent ce pour quoi vous êtes venus. Un récit intimiste en autobiographie à peine déguisée, une plongée dans la mémoire et les souvenirs d'un écrivain, un voyage dans les rues de Paris, loin des lieux les plus touristiques (encore qu'ici on visite un petit bout de Pigalle qui a un succès avéré chez certains touristes). Oui, toutes les cases seront cochées, vous ne serez pas plongé dans un thriller aux effets spéciaux grandiloquents.

Encore que ce roman commence de manière assez inquiétante, cet homme qui appelle parce qu'il a trouvé votre carnet d'adresses, qui vous donne rendez-vous pour le rendre et en profite pour vous interroger, sa compagne qui vous contacte en secret pour vous révéler certaines choses... on aurait bien tendance à suivre le narrateur dans la paranoïa que cela occasionne. Ce n'est certes finalement qu'un biais pour la plongée habituelle dans la mémoire mais cela a le mérite d'être distrayant, une touche d'originalité chez Modiano, on prend.

Est-ce aussi le fait de la maturité et de la reconnaissance enfin atteinte, on sent Modiano plus à l'aise avec son lecteur. Il joue à mener son enquête habituelle d'abord avec l'aide d'Internet (quelle modernité) mais en pointant toutes les limites de l'outil si puissant. On sent qu'il s'amuse à mettre en parallèle des recherches informatiques que ces lecteurs sont tentées de faire avec tous les éléments vérifiables qu'il fournit, notamment les adresses... avec les moyens surannés qu'il utilise de son côté, un carnet d'adresse, des discussions avec le voisinage, une plongée dans des souvenirs imparfaits mais qu'il faut réinterroger pour avancer. J'ai particulièrement apprécié aussi cette protection face à soi-même qu'il semble construire pour ne pas tout redécouvrir tout en cherchant pourtant à le faire: cette valise qui contient toutes les informations et dont il a perdu la clef mais qu'il continue à transporter avec lui, ce refus face aux propositions d'aller revisiter aujourd'hui les lieux chargés de mémoire, les maisons qu'il a habité, par peur que tout resurgisse avec beaucoup trop de clarté. le plaisir du flou, comme un photographe qui cherche plus la beauté que la vérité dans les portraits qu'il dresse.

La littérature française a particulièrement tendance au nombrilisme, à l'introspection et Modiano ne fait pas exception bien sûr. Son talent est, par le charme de son style et de sa méthode d'enquête, de nous donner envie tout à la fois de le suivre dans les rues de son Paris, mais aussi de revisiter les rues de notre propre histoire par la même méthode, avec à la main les adresses de nos souvenirs, pour que nous ne nous perdions pas dans les méandres de notre mémoire.
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Pour moi, ce qui fait le charme de Patrick Modiano, c'est qu'on sent les choses sans forcément les comprendre.
Quand j'achève un de ses romans, j'éprouve parfois une sorte de frustration, comme si je n'avais pas réussi à résoudre totalement une énigme, avec l'impression d'avoir regardé les choses au travers d'une vitre dépolie.
« Pour que tu ne te perdes pas dans le quartier » est un livre qui se mérite, il faut accepter ce que l'auteur nous suggère, nous laisse imaginer.
Il faut accepter de se perdre dans ses pages, se laisser glisser lentement dans une histoire qui peut devenir obsédante, tant l'on aspire à entrevoir une issue, à enfin comprendre.
Je dois avouer que je n'ai pas eu toutes les réponses, mais j'ai adoré cette réserve qui laisse libre cours à mon imagination.
J'aurais aimé trouver une indication de temporalité dans ce roman, mais au fond, cela n'aurait-il pas brisé le charme ?
J'ai aimé ce livre malgré sa part de mystère et de non-dits.
J'ai aimé l'écriture empreinte de lenteur et de mélancolie.
Peut-être que tous les romans de Modiano se ressemblent par leur obsession du passé, les déambulations dans Paris, mais je ne m'en lasse pas.
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C'est étrange, à peine terminé Remise de peine du même auteur je débute celui-ci et j'ai comme la nette impression qu'il en est la suite mais quelques années après.
On retrouve Annie, la maison, le village et M Vincent, seul quelques noms ont changé, Patoche est devenu Jean par exemple. C'est bizarre et à la fois intéressant de retourner sur les lieux, explorer le passé. Alors maintenant je comprends mieux pourquoi certains lecteurs sont restés en marge de ce livre sans avoir lu Remise de peine, ça devient plus trouble.
Par contre, la fin reste fidèle à Modiano, on se demande si c'est bien fini. On attend plus, alors la suite serait -elle dans un autre roman mais lequel ?
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Chez Modiano, les écrivains sont souvent des gloires passées, obscures, oubliées, quand ils ne décident pas de tout laisser tomber et de s'enfuir ; Ils sont connus sans l'être, amis de la solitude et de l'absence. Qu'ils soient la figure centrale du roman ou bien une image fugace dans un souvenir évaporé.
Jean Daragane a perdu un carnet d'adresse ; un homme, Gilles Ottolini, lui téléphone pour lui rendre. Cet homme qui semble le sortir d'une solitude volontaire est-il un escroc ? Un réel détective ? Il mène une enquête sur un certain Monsieur Torstel ; en cela, il est aidé par Chantal Grippay, aussi intrigante que son partenaire… Est-il son amant ? Son souteneur ? Son maître-chanteur ? Daragane se trouve englué dans l'histoire de ces deux personnages ; Ils s'immiscent dans son intimité, en même temps omniprésents et lointains ; fantômes inconnus qui errent dans les pièces vides et réveillent des souvenirs oubliés. Monsieur Torstel est dans le carnet d'adresse de Jean Daragane au milieu de noms perdus dans les limbes d'un passé brumeux. Devant « l'amnésie «  de l'écrivain, Ottolini lui transmet « un dossier » pour lui rafraîchir la mémoire. D'un fatras de pages, un nom surgit et telle une flammèche ravive la mémoire de Jean Daragane. Annie Astrand. de ce feu couvant, qu'il souhaiterait éteindre, perce son enfance, sa jeunesse, le visage de sa mère, des hommes mystérieux, peut-être oisifs, peut-être malfrats, souvent de passage.
On retrouve le monde Modianesque ; des enfants seuls, attendant quelque part un père, une mère absents dans des maisons ou des appartements anonymes ; des enfants entourés d'adultes lointains, insaisissables, menant des vies opaques ; peut-être des vies de romans de gare, peut-être des vies monotones où hautement rocambolesques, comment le savoir ? Modiano jette des petits cailloux dans l'eau et espère que les cercles concentriques finiront par toucher leur destinataire. D'où, dans ses romans, ces noms, ces détails, jetés sur le papier ; pêche à la ligne, signaux muets , à celles et ceux qui voudraient s'y reconnaître… Cette mélancolie de châteaux de sable détruits et reconstruits à l'infini...
Ces enfants observent ces adultes en silence, avec patiente et sérieux ; attentifs à leurs réactions et leurs humeurs comme un zoologue scruterait un animal inconnu.
Jean Daragane est un de ces enfants ; il se souvient qu'Annie Astrand le gardait en l'absence de ses parents. Mais est-ce la vérité ? Est-ce cette jeune femme ? Pourquoi l'a-t-elle quitté ? Disparue un jour sans crier gare ? Daragane peut-il se fier à sa mémoire ? N'est-ce pas un fantasme littéraire ? Lui qui semble ne plus trop écrire. Est-ce un désir enfoui de s'être senti, enfant, aimé et protégé ? Ses souvenirs d'enfance sont-ils brouillés par le temps ? Mystères là où il n'y que banalités ? Intrigues là où il n'y a que quotidiens limpides ? Alors il décide de mener sa propre enquête pour que les rives de son enfance et de sa jeunesse ne soient plus, à jamais, inaccessibles. Il rêve de retrouver son Paradis perdu.
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Jean Daragane, un vieil écrivain vivant seul dans le Paris d'aujourd'hui, va faire la connaissance d'un homme étrange désireux de lui rapporter un carnet d'adresses égaré. Ce que Jean Daragane ne sait pas encore c'est que cette rencontre va le conduire à faire des recherches sur son passé à cause d'un nom figurant dans le carnet d'adresses : Guy Torstel.
À partir de ce simple patronyme, le vieil écrivain va remonter le cours de sa vie, rappeler à sa mémoire d'autres noms, d'autres lieux, d'autres époques.

Le prix Nobel de littérature va inciter de nouveaux lecteurs à découvrir l'oeuvre de Patrick Modiano.
Les habitués retrouveront dans ce roman ses thèmes favoris : l'enfance, l'abandon, la solitude, l'oubli, le passé trouble, des personnages obscurs. Des allers et retours entre présent et passé empreints de mélancolie. Un style fait de petits détails, de bouts de ficelle qui tissent l'histoire d'un enfant abandonné où ce qui n'est pas dit semble plus terrible encore. Un Roman déchirant. Certains lecteurs seront peut-être surpris par la fin du livre, mais c'est bien dans le style de Modiano entre rêve et réalité.

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Etrange impression laissée par ce livre que j'ai lu d'un seul trait. En effet, l'on s'attend , en allant jusqu'au bout de sa lecture, à la résolution de cette énigme, révélée au personnage principal, Jean Daragane, écrivain vieillissant, à la suite de la découverte de son carnet d'adresses par un couple bizarre aux allures de maîtres-chanteurs.
A travers des noms, des lieux, refoulés par la mémoire de l'écrivain (il a lui-même détruit les premiers chapitres du roman qu'il écrivait 15 ans plus tôt, qui y faisaient référence) mais qui peu à peu deviennent autant de noms et de lieux familiers, l'intrigue policière se dessine. Daragane en semble le témoin privilégié. le lecteur croit pouvoir trouver une réponse en allant jusqu'au bout du livre, d'ailleurs le suspense est si habilement mené que l'on (en tout cas moi) se méprend sur le propos de l'auteur, ne découvrant la supercherie que dans les dernières lignes. En effet les énigmes, les motivations réelles du couple de maîtres-chanteurs, sont autant de pistes délaissées au cours du roman …
Mais c'est en se retournant sur cette histoire d'énigmes avortées que l'on sait de quoi est fait ce livre : il raconte avec une sensibilité extrême la puissance de la mémoire , le caractère sacré des souvenirs d'enfance, si sacré que seule une longue maturation peut en recréer le puzzle . La magie de cette phrase « Pour que tu ne te perdes pas dans le quartier », opère encore 40 ans après sur le vieil écrivain, et lui permet de rassembler en un tout cohérent quelques années de sa vie axées autour d'une femme protectrice et aimée. Un beau livre , très court mais intense.

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Après avoir lu "Rue des boutiques obscures" et "La Petite Bijou", j'ai bien évidemment eu envie de découvrir le dernier Modiano, d'autant qu'il vient de recevoir le Prix Nobel.
Je dirais que comme pour les deux autres titres que j'évoque ci-dessus, le dernier livre de cet auteur est de la même veine. C'est brumeux, intriguant, et très bien écrit. On retrouve aussi l'ambiance parisienne avec ses bistrots, ses rues, ses habitants d'une autre époque.
Quand je commence un livre de Patrick Modiano, je sais ce que je vais trouver, mais je ne sais jamais comment cela va se terminer !

CHALLENGE ABC 2014-2015
Lien : http://uneautrelecture.blogs..
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Un carnet égaré et la musique modianesque s'envole.
Et nous retrouvons tous les ingrédients qui tournent autour de la mémoire et de l'oubli volontaire ou pas.

Un parcours vers ce que le narrateur a vécu ou tente de se souvenir.

Tout est baigné d'étrangeté, de brouillard, de non-dits, de retrouvailles décalées dans le temps.

Des lieux précis qui se dérobent, l'enfance, l'adolescence, l'âge mûr qui créent leurs propres univers, leur mal-être.
Des vies qui déambulent au long des rues, dans les maisons ou chambres.
Des vies qui se vivent parallèles au monde qui les entoure, troubles, border line.
Des noms qui traversent les années. Des doubles.

Un chemin à l'envers, des êtres qui se donnent et se reprennent, des êtres qui furent, d'autres qui les prolongent dans une réalité fictive ou le temps lui-même est malmené : présent dans le passé, passé dans le présent, futur ignoré.

L'esprit se bloque, cherche, fait marche arrière, se révolte, attend, n'aboutit à rien.

La lecture s'appesantit, du moins la mienne et je me dis que lire deux Modiano en suivant est étouffant.
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