AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
3,78

sur 464 notes
Nous sommes à l'aube des accords d'Évian dans une petite station balnéaire à la frontière suisse...qui a tout de la petite ville d'Annecy. le narrateur se souvient des quelques mois qu'il y a passé à dix-huit ans pour échapper à la conscription.
Il rencontre la sublime Yvonne, jeune actrice originaire de la région qui, malgré sa beauté, ne semble pas vraiment percer. Elle n'a joué que dans un obscur film pour un obscur réalisateur allemand. Ensemble, ils forment avec le « docteur » Meinthe, un homosexuel excentrique qui semble jouer un rôle dans les négociations avec le FLN, un trio inséparable. Les trois protagonistes, accompagnés du dogue allemand d'Yvonne, vont de mondanités en mondanités et participent même à la coupe Houligant. Ce concours d'élégance est en réalité le théâtre de toutes sortes d'intrigues ridicules de province.

Malheureusement, le roman porte bien son nom : il est triste. D'une tristesse enveloppante et protectrice, certes, mais terriblement ennuyeuse et terne. Dans cette ville dont on a vite fait le tour, la bourgeoisie en villégiature fait plus pitié qu'envie et le jeune couple semble terriblement paumé. L'un dans son exil qui ne parvient pas à le faire échapper à lui-même, même sous cette fausse identité de « comte Victor Chmara ». L'autre dans son incapacité à réussir dans le milieu impitoyable du cinéma et à s'extraire de son enracinement dans cette petite ville terne.

Bref, un roman qui a pour principale qualité sa longueur raisonnable tant il est ennuyeux…et triste. À éviter.

Lien : https://tomtomlatomate.wordp..
Commenter  J’apprécie          63
« Villa triste » (paru en 1975).

Il faut aller au-delà de l'histoire.
Pénétrer un monde de sensations.
Percer la brume qui entoure les lieux.
Parvenir aux uns et aux autres.

Ils déambulent comme fantômes dans un monde éloigné, disparu à jamais.
Seul demeure ce que l'on devine d'eux, de leur époque.
Ils se livrent peu, gardent leurs mystères et deviennent des ombres attachantes, un monde dans le monde, parallèle, miroir aux alouettes, superficialité, du moins le donne-t-il à penser…

Parfois une impression de cinéma italien des années cinquante, robes, talons aiguille, porte-jarretelles, cheveux gominés, coupe de champagne, bourgeoisie en mal-être… des images en noir et blanc qui conviennent au livre de Patrick Modiano.

Avec ces lieux qui dévorent les êtres où ils s'auto-détruisent, ces personnages louches, ce nom inventé et qu'il faut habiter, ces non-dits qui étouffent, ces questions sans réponse.

D'après une déclaration de l'auteur à la sortie de ce livre, le héros est un peu lui-même, des images de son père ont nourri l'étrangeté du Docteur, etc…

Le début des années soixante, des noms de comédiens et autres, la guerre d'Algérie, la mode, les habitudes d'une société aisée et oisive (le passage du concours de l'élégance est un régal à lire et une « anecdote » impitoyable), le chien et sa mélancolie portugaise (saudade) qui n'est que celle des êtres qui l'entourent et particulièrement celle du narrateur.

Tant et tant de moments, de petites phrases, de cheminements dans les rues, des chambres, des maisons, tout porte un ennui inexplicable, un trouble infini, une recherche inaccomplie ou contournée.

Le héros de l'histoire est retourné dans ce passé où les visages, les voix se sont évaporées peu à peu ne laissant qu'un semblant d'amertume de n'avoir pu saisir, de n'avoir pu comprendre, de n'avoir pu retenir.

Il nous transmet cette brume qui entoure le passage de certains êtres rencontrés, la marque qu'ils laissent, le mystère de certains, l'incommunicabilité, le regret, l'amour et le désespoir, la vie et la mort.







Commenter  J’apprécie          192
Je n'avais jamais lu de Modiano. Voilà c'est fait ! J'ai lu exactement ce à quoi je m'attendais : un style fluide, une atmosphère éthérée, une histoire sur le fil. Pour le reste il ne se passe pas grand chose même si on ne s'ennuie pas. de la littérature intellectuelle de bon aloi…
Commenter  J’apprécie          10
Quel bonheur de pénétrer dans « villa triste » ! j'ai oublié ces livres lus dernièrement, si terre à terre, ou violent, ou réalistes ou…Là, je me suis mise sur le mode « pause » et je suis retournée avec l'auteur qui revient 10 ans après, là où, âgé de 18 ans, il a séjourné sur les rives du lac d'Annecy, fuyant la perspective de se faire enrôler comme soldat dans la guerre d'Algérie. La Suisse ne serait pas loin pour s'y réfugier.
Charme suranné, images en noir et blanc des souvenirs imprécis, avec peu de descriptions, mais beaucoup de petites touches précises très évocatrices, écriture épurée et si travaillée, Modiano réussit à nous balader dans ce passé sucré salé. C'est magique.
Ce faux comte Victor Chmala rencontre Yvonne, actrice en herbe et le mystérieux René Meinthe, tous les deux plus âgés. Amoureux, notre narrateur va vivre avec eux quelque temps, de balades en automobile, promenades autour du lac, palaces, concours Houligant, et puis le chien d'Yvonne, cet énorme dogue dépressif, si aristocratique et que j'ai si bien imaginé. La guerre est présente aussi à travers les activités mystérieuses de René et son homosexualité déclarée. Et puis l'indolence de ses deux amoureux trainant, au sens propre, dans la Villa triste, avec ces appels téléphoniques à minuit, la sonnerie qui grelotte dans la nuit...
Mais Victor croit à ses rêves et veut partir en Amérique quand Yvonne, elle, reste dans l'immobilisme, cette « paresse de l'algue », accrochée à son rocher.
En fait, tout est incroyablement élégant dans ce livre, des personnes aux paysages.
Comment ne pas penser à Scott Fitzgerald et à notre cher Gatsby ?
Commenter  J’apprécie          50
Un des genres de musique les plus jusqu'au-boutistes se nomme le lowercase. Il s'agit d'un dérivé de l'ambient discret, minimaliste, au volume bas, parfois presque inaudible ; la musique qui se rapproche le plus du silence. Là encore, il en existe différents niveaux : Tetsuo Inoue est nettement plus accessible et mélodique que Bernard Günther, la palme revenant quand même à celui qui a enregistré tout un album juste avec des bruits de pliage d'origami.
Il s'agit d'une musique à laquelle il est difficile d'adhérer, mais dont il existe des portes d'entrée, et où il est possible d'éprouver du plaisir tant physique qu'intellectuel. Il est possible de l'analyser, de voir pourquoi tel élément a été mis ici plutôt que tel autre derrière cette apparence dépouillée, d'avoir de longues discussions intellectuelles dessus. Mais le piège est alors de se tourner vers des artistes de plus en plus hermétiques et ne plus se soucier de ce qui est beau ou universel.
Tout ça pour vous dire que c'est l'effet que m'a fait "Villa triste" de Patrick Modiano : une plume extrêmement minimaliste, passant inaperçue, au point qu'il serait facile de dire que le style est inexistant. Ce serait totalement stupide de ma part (Modiano est un des auteurs contemporains auxquels on consacre le plus de thèses), mais on en aboutit à tout ce que je fuis dans la littérature blanche, à savoir un roman sans action, sans divertissement, sans attachement aux personnages ni grand questionnement sur la société — quelque chose de peut-être bien plus déconnecté du réel que la trilogie de high fantasy à quatre sous.
Elles sont ainsi bien longues, ces 200 pages où le comte Victor Chmara se fraie un chemin dans la bourgeoisie alpine, sur fond d'une vague intrigue dans le monde du cinéma. À un moment, il nous annonce que la Suisse n'existe pas ; pourquoi ? comment le développe-t-il ? On saura seulement qu'il a tenté de rentrer dans ce pays, de saisir... quoi exactement ? son esprit ? (encore une fois, c'est vague), sans jamais y parvenir, mais mon esprit trop rationnel me souffle déjà que ce n'est pas parce qu'une chose est inaccessible qu'elle n'existe pas (et pour une fois, mon esprit croyant est d'accord aussi, puisqu'on pourrait citer Dieu comme exemple). Et quand l'auteur pourrait justement partir dans le domaine de l'irrationnel avec "Ce bleu velouté avait un pouvoir hypnotique puisque j'ai failli m'endormir, en le fixant", il utilise le connecteur logique "puisque", comme s'il y avait une relation de cause à effet, bref quelque chose de mécanique. À un autre moment, c'est tout un programme de cinéma qui nous est retranscrit tel quel, quasiment sans commentaire et sans incidence sur le reste du récit. Seuls les tout derniers paragraphes ont déclenché quelques émotions en moi, de par leur symbolique bien plus marquée que le reste du roman.
Il ne se passe rien sur la forme, mais il se passe des choses sur le fond, me diriez-vous ? Même pas. Pour reprendre les mots d'une camarade de fac qui m'avaient bien fait rire alors que je lui faisais part de mon incompréhension pour l'engouement autour de ce roman, c'est "une histoire de bourgeois en villégiature luxueuse pendant que le monde extérieur se déchire dans des conflits indépendantistes". Les personnages sont tous des riches qui se regardent le nombril avec leurs petites querelles d'égos, n'ayant même pas l'amabilité de s'envoyer de petites piques féroces au cours d'un dialogue subtil pour réveiller la curiosité du lecteur (on passe d'un langage châtié à "SA-LO-PE !") ; je ne demande pas non plus une grande fresque sur la lutte des classes, mais leur mode de vie aurait mérité d'être remis en question.
Bref, je ne remets pas en cause le talent de Modiano et je n'aurais aucune légitimité pour le faire, mais il s'agit clairement du type de littérature auquel je suis le plus insensible. Dans "L'emploi du temps", au moins, il y avait un aspect ludique, derrière la dépression spongieuse d'un héros insupportable et ses phrases à rallonge qu'on finissait très vite par lire en diagonale ; ici, il n'y a rien qu'une écriture quasi-blanche, dont la subtilité est si microscopique que seuls les gens de la haute société peuvent se vanter de la déceler. J'ai toujours préféré le baroque au minimal art, le romantisme au naturalisme, la fresque épique au Nouveau Roman. "Villa triste" est passé entre les deux oreilles du bourrin que je suis, et j'en ai déjà oublié les trois quarts ; ça tombe bien, c'est un roman sur la perte des souvenirs.
Commenter  J’apprécie          20
Victor Chmara Yvonne Jacquet René Meinthe Daniel Heindrickx Tounette et Jackie Roland-Michel....personnages dont on tente de deviner l'avant et dont on ne connaîtra pas l'après...c'est à une subtile et belle quête d'identité, où les lieux sont pratiquement les seuls indices, que Modiano nous convie. Quelques esquisses et pourtant ils vont accompagner longtemps, à jamais, le lecteur. Magnifique tout simplement.
Commenter  J’apprécie          10
C'est beau, c'est bien écrit, finement observé. En revanche, il ne se passe rien. le seul mouvement est le va et vient entre le narrateur et ses souvenirs. Je m'en suis vite lassé.

Alors, oui, je veux bien croire que la mémoire est une matière inépuisable pour trouver du contenu, recyclable à l'infini... Et qu'il ne faut pas ménager ses efforts pour déchirer son voile.

Mais, comme lecteur je n'ai pas trouvé de wagon pour me raccrocher. Les personnages sont plats, sans relief, sans psychologie, médiocres et l'assument. L'intrigue brille par son absence.
Heureusement que "la reine des belges" arrive parfois à nous secouer de cette inertie.
Commenter  J’apprécie          10
Rien que le titre est beau...un roman fort sur les bords du lac d'Annecy tout en nostalgie et pudeur. J'aime cet écrivain immense qui emmène avec lui à chaque livre en nous prenant doucement par la main
Commenter  J’apprécie          10
Publié en 1975, Villa Triste n'est pas un très bon Modiano à mon sens, mais qui reflète bien les préoccupations littéraires de l'auteur déjà à l'oeuvre dans ce quatrième roman. On reconnaîtra dans l'intrigue pas mal de motifs utilisés par la suite, ainsi qu'un procédé narratif qui lui sera habituel.


Un narrateur de trente ans revient sur les lieux où, à dix-huit ans, il a rencontré deux personnes : Yvonne Jacquet, avec qui il aura une relation amoureuse, et René Meinthe. Ce narrateur est pour autant dire obsédé par les quelques semaines des années soixante passées en leur compagnie, dans une ville du sud-est de la France, et où lui-même s'était réfugié incognito afin, apparemment, d'éviter d'être envoyé en Algérie comme soldat. Malgré quelques allers-retours entre le présent et le passé, c'est ce dernier qui prend largement le dessus, dans une ambiance superficielle et mondaine, comme le sont d'ailleurs Yvonne et Meinthe.


C'est sans doute là le problème : ces deux personnages, qui incarnent des fantômes aux yeux du narrateur, sont un peu trop réels mais tout aussi creux, et manquent cruellement de l'aura mystérieuse censée les entourer. de fait, je me fichais un peu de savoir d'où ils venaient, quelles étaient les activités peu recommandables de Meinthe, ce qu'ils avaient pu devenir, étant donnés que je les trouvais assez inintéressants. Et par conséquent, la quête du narrateur concernant son passé m'a donc paru assez dérisoire, contrairement à celle du narrateur de Remise de peine, où tout une ambiance à la fois nostalgique et inquiétante était en place.


Villa Triste permet toutefois d'observer l'évolution de Modiano dans son écriture. Il y a là une claire (première?) tentative de travailler sur la mémoire, credo de l'auteur. Et comme un Modiano n'est jamais très long, et que le style est loin d'être rebutant, le roman ne m'a pas paru déplaisant, ni franchement ennuyeux. Juste un peu creux, mais il est vrai que c'est un roman de jeunesse, ce qui me rend quelque peu indulgente.



Challenge Nobel
Commenter  J’apprécie          360
Villa triste
Patrick Modiano


Le 9 octobre 2014, l'oeuvre de Patrick Modiaon est couronnée par le prix Nobel de littérature pour « l'art de la mémoire avec lequel il a évoqué les destinées humaines les plus insaisissables et dévoilé le monde de l'Occupation », comme l'expliquent l'Académie.
Villa Triste est son quatrième roman publié en 1975.
Tout au long du récit sévit une ambiance insoucieuse ; feutrée d'une communauté dans une petite ville au bord d'un lac près de la suisse. Cette communauté retrace approximativement la bourgeoise française des années 60 sur un fond de vacances éternelles (les années yéyé ; la fin progressive du colonialisme ; la revendication publique des penchants homosexuels ; le rêve américain ; le cinéma …)
Les principaux protagonistes se côtoient sans se connaitre, ils cherchent à se connaitre mais se trouvent comme face à des fantômes ; ils dépensent leurs temps et leurs imaginations à pourchasser leurs passés respectifs mais ceux-là se dérobent devant eux.
C'est un roman des impressions ; des arrêts sur images ; des non-dits ; des chimères. On évolue dans la lecture à travers la brume ; de quoi Victor avait peur ? quelle la part du passé dans la vie d'yvonnes ? quelle sont les activités secrétes de Rene ?
A travers ces personnages Modiano pratique avec abondance ses propres quêtes de l'histoire ; des histoires ; des personnages. A plus d'un passage le lecteur retrouve sa manie de cartographier les villes (Paris surtout) à travers les noms de rues ; de cafés ; de faubourgs. Si ce n'est pas les rues ce sont les bottins (le personnage principal trimbale en malle entière remplie de bottins)
Le lecteur tombe nez à nez sur :
• Un programme de cinéma d'époque
• Un annuaire de cinéma avec les adresses des acteurs et des techniciens
• Une liste des noms des sociétés cosmopolites des ports francs et des comptoirs d'outre-mer
• Des termes typiques d'époques « démarrer sur les chapeaux de roues » « demander à brûle-pourpoint »
« Il y a des êtres mystérieux – toujours les mêmes – qui se tiennent en sentinelles à chaque carrefour de votre vie »
Commenter  J’apprécie          21




Lecteurs (1052) Voir plus



Quiz Voir plus

Patrick Modiano, presque...

La place de ... ?

l'étoile
la comète

5 questions
177 lecteurs ont répondu
Thème : Patrick ModianoCréer un quiz sur ce livre

{* *}