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sur 459 notes
La villa triste, « elle avait une teinte bleu-gris, une petite véranda donnant sur l'avenue » « ...on perçoit dans la sonorité du mot "triste" quelque chose de doux et de cristallin. »
Treize ans à peine et je reviens dans cet univers calme, suspendu, où flotte un doux parfum suranné autour d'un lac, une destination de villégiature, des noms d'hôtels somptueux où se côtoie une foule d'habitués privilégiés, loin du tumulte algérien et de l'OAS. Je reviens et « que leur dire à ce rendez-vous où je les ressuscite ? »
C'est beau ce que Modiano écrit. On déguste ses phrases. Des petits tours et détours d'entre les âges se dessinent des personnages fantomatiques, mystérieux, en creux et pleins. Juste ce qu'il faut pour percevoir de l'instant, triste et cristallin.
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Le narrateur a dix-huit ans en 1962. Il a fui Paris pour une ville proche de la Suisse, non désignée mais qui est semblable à Annecy, par peur de la conscription pour la guerre d'Algérie. Il rencontre une jeune femme éthérée, Yvonne, qui a joué dans un film et qui rêve mollement de devenir actrice. Souvent accompagnée de René Meinthe, un homosexuel provocateur et excentrique, elle se laisse entraîner dans des soirées louches et participe à un concours d'élégance qu'elle remporte. le narrateur, qui se fait désormais appeler Comte Chmara, partage la chambre d'hôtel d'Yvonne, qu'ils ne quittent qu'avec regret pour suivre Meinthe dans ses nuits parfois mystérieuses. Elle veut être actrice, Chmara, être écrivain. Il organise leur départ en Amérique sur les traces de Marylin Monroe et d'Arthur Miller
Dans ce livre qui est son quatrième roman, Patrick Modiano, se pose dans une ville moyenne de province, triste en hiver avec ses militaires qui transitent en gare et ses notables qui s'ennuient, de villégiature et plus animée en été avec ses soirées mondaines et ses touristes plus ou moins conventionnels.
Yvonne et Chmara sont pris de torpeur, en apesanteur. Quand Yvonne emmène Chmara chez son oncle, garagiste dans un faubourg de la ville, un calme les envahit : « Une nouvelle vie aurait pu commencer à partir de cette nuit-là. Nous n'aurions jamais dû nous séparer. Je me sentais si bien entre elle et lui, autour de la table de jardin dans ce grand hangar qu'on a certainement détruit depuis ».
Dans ce roman, plus que dans le suivant « Livret de famille », plus directement autobiographique et factuel, Patrick Modiano installe son style et sa magie qui s'épanouiront totalement à partir de « Rue des boutiques obscures ».
Ce livre, tout en atmosphère, donne envie de revoir Annecy, son lac, ses ombrages, ses avenues, si délicieusement décrits.
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Le narrateur revient dans cette ville thermale de Haute Savoie dans laquelle il a passé l'été 12 ans plus tôt alors qu'il n'avait que 18 ans, et il se souvient.
C'était au début des années 60.
Mais du narrateur nous ne savons rien, si ce n'est qu'il avait 18 ans, qu'il se faisait appeler Victor Chmara qui n'est qu'un nom d'emprunt, et qu'il allait jusqu'à dire qu'il est le Comte Victor Chmara.
Par petites bribes, nous allons savoir qu'il se cache, mais que fuit-il au juste, pourquoi se cacher ainsi ?
Déjà autrefois son père se cachait, lui le juif apatride, terré dans Paris avec la hantise des allemands.
Et il y a à nouveau la guerre, mais cette fois en Algérie, et Victor a peur, peur que la police ne l'arrête et le livre à l'armée qui l'enverra se battre ce qu'il refuse totalement.
Il va donc élire domicile dans une pension de famille de cette petite ville pour y vivre le plus discrètement de possible.
Jusqu'au jour où il rencontrera Yvonne jeune starlette énigmatique accompagnée de son chien qui ne la quitte jamais.
Très vite Victor deviendra l'amant d'Yvonne et va partager avec elle la chambre d'hôtel qu'elle loue.
Mais autour d'Yvonne tourne tout un tas de personnages tous plus intrigants les uns que les autres, dont et surtout René Meinthe et ses activités plus que louches.
Au final, Victor comprendra qu'il ne connaitra jamais réellement ni Yvonne ni René, mais eux ne le connaitront jamais non plus, et il fuira de nouveau, mais pour aller où ?
Et 12 ans plus tard Victor reviendra, mais toute les traces de cet été là ont disparu et ceux qu'il avait rencontré alors ne sont plus là non plus.
Un roman dans lequel le lecteur navigue entre non-dits et demi révélations sur les personnages dont il devra se faire lui-même une idée, et dans lequel Victor oscille entre un passé qui le hante et un présent qui l'effraie et qui l'empêchent de réussir à entrevoir un avenir.
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Il s'agit de mon premier Modiano. J'ai trouvé très intéressante sa manière de traiter ses personnages, leurs identités et leurs objectifs, de manière très énigmatique et incomplète. le revers de la médaille en est que j'ai eu de vraies difficultés à m'attacher et à m'identifier au trio de vingtenaires animant le roman.

Malgré un gros volume de descriptions dont je ne suis pas forcément adepte, j'ai adoré le Annecy peint par Modiano, me donnant même la nostalgie d'une ambiance 30 glorieuses que je n'ai pas connu.
Enfin, j'ai été très sensible à l'atmosphère mélancolique de ce Villa Triste.
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Des personnages étranges, voire louches, aux desseins mystérieux pour le lecteur et peut-être aussi pour eux-mêmes; comme toujours chez Modiano l'abondance des noms de lieux et de personnages, au lieu de donner de la précision, souligne le flou général. Comme toujours aussi les personnages centraux, qui forment un trio, n'ont pas de destinée très claire, sauf pour l'un d'entre eux, dont on connaît le sort mais pas vraiment les raisons qui l'ont entraîné.

Ce roman a le charme des romans de Modiano, il esquisse une intrigue dont on n'a pas le dénouement, mais sans que cela entraîne aucune frustration, bien au contraire. La guerre d'Algérie supplante l'Occupation en arrière-plan (quoique la Seconde Guerre ne soit pas absente à travers le personnage du père du médecin), mais n'est pas moins oppressante.

Deux originalités pour moi (je précise que je n'ai pas encore lu tous les romans de l'auteur!):
- avec la scène du concours d'élégance on n'est pas loin de la satire sociale;
- la rencontre avec l'oncle d'Yvonne, à la fois banale et poignante, sonne particulièrement juste concernant un personnage loin des déclassés, des personnages interlopes et autres trafiquants de tous ordres qui hantent l'oeuvre modianesque.
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Villa triste/Patrick Modiano/Prix Nobel de littérature 2014
Ah ! Si le temps pouvait suspendre son vol !
Ce roman paru en 1975 a obtenu le Prix des Libraires 1976.
Un homme de trente ans se remémore ses dix-huit ans et les événements qui ont accompagné son errance fortunée le long des rives du lac d'Annecy dans le début des années 60.
Comte Victor Chmara et le nom qu'il s'était alors donné, lui qui se dit apatride et semble dissimuler bien des éléments de sa vie. Il fait la rencontre d'une jolie fille qui se dit actrice, Yvonne, et de son mentor, le Dr Meinthe.
Victor et Yvonne deviennent vite amants mais la suite ne va pas se dérouler comme Victor le voudrait.
Ce roman presqu'initiatique, offre une peinture saisissante d'une aristocratie surannée en villégiature sur les bords du lac. Une galerie de portraits étonnante.
Et tout ce petit monde excentrique au possible évolue dans une ambiance de mystère, de secret et de mensonge. Victor lui-même s'invente une vie et se montre attentif, prévenant, délicat et passionné pour séduire.
Cette ambiance se teinte aussi d'une certaine nostalgie pour décrire l'amitié, l'amour et la trahison tandis que l'on se promène avec Victor sur les bords du lac à la découverte de lieux mythiques.
L'écriture subtile et élégante de Patrick Modiano comme dans ses autres romans a vite fait de séduire même si ce n'est pas l'action qui vous tiendra en haleine. C'est plutôt un roman contemplatif et un retour vers le temps passé. C'est aussi le roman du non dit, ce qui jusqu'à la dernière ligne vous laisse supposer tout les possibles.
« Sa peau avait pris une teinte opaline. L'ombre d'une feuille venait tatouer son épaule. Parfois elle s'abattait sur son visage et l'on eût dit qu'elle portait un loup. L'ombre descendait et lui bâillonnait la bouche. »
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Un roman écrit comme on peint une toile, par petites touches de couleurs, des personnages aux contours un peu flous et une atmosphère qui prévaut sur l'histoire. Un village dans les années soixante et des personnages en fuite. du Modiano pur jus, même s'il m'a manqué un petit quelque chose pour accrocher autant que sur certains de ses autres romans.
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Excellent roman, dans la lignée des boulevards de ceinture dont il constitue vaguement la suite. le narrateur, toujours en fuite d'on ne sait trop quoi, retrouve des traces de son père évanescent dans une villégiature annécienne teintée de couleurs sépia. C'est toujours magnifiquement écrit, avec une incroyable simplicité de style qui produit de la beauté à chaque page. Nostalgie de ce qui a été et n'est plus, de la jeunesse enfuie, des virages que l'on n'a pas su prendre, tout cela n'a jamais été si finement et élégamment dépeint que chez Modiano. Un écrivain de chevet, vraiment.
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Modiano, pour moi, c'était du passé : oubliée sa "Rue des boutiques obscures", déserté son "Café de la jeunesse perdue". Je ne pensais plus à le lire et, à vrai dire, aujourd'hui, j'en suis à me demander si je l'ai vraiment lu, le "Café..." D'ailleurs je ne lis pratiquement plus, occupé que je suis à la construction de mon magnum opus à moi.
Son prix Nobel de 2014 avait un instant remis le projecteur de mon attention sur cet auteur de mon âge, mais la banalité décevante de son discours de réception me l'avait fait vite oublier.
Un an auparavant, son éditeur, Gallimard, avait sorti un livre de 1088 pages, toutes signées Modiano. Il s'agit en fait de la republication de dix de ses romans.
J'ai de la chance, pour la fête des pères 2017, on me l'a offert. Alors, par politesse, j'ai lu le premier de ce volume, Villa triste.
Villa triste
(Gallimard, 130 pages, 1975, Prix des Libraires 1976. Impossible de vous donner le prix de vente, occulté par une pastille bleue, c'est un cadeau.)
Un garçon flou, incertain, dont on ne sait pas grand-chose sinon qu'il n'est pas ce qu'il prétend être, une grande et belle jeune femme molle, paresseuse, lascive, au passé mystérieux.
Un soi-disant médecin, probablement pervers, peut-être espion, peut-être ange gardien, une ville d'eau, brièvement réveillée pour la saison d'été, avec ses pianos de la plage, ses airs de rumba, ses concours d'élégance, ses oisifs, leurs automobiles, leurs femmes et leurs chiens, d'interminables après-midi, allongés n'importe où dans une chambre de palace, à regarder la lumière baisser, à faire l'amour, sans jamais le décrire ni même le dire, au son feutrés des balles de tennis, une atmosphère à la Souchon...
Un roman à lire l'été, mais pas un "roman de l'été" ; on en sort tout ensommeillé, comme après une longue sieste,
On dirait presque un premier roman, presque un chef d'oeuvre de débutant.


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N°1652- Juin 2022

Villa tristePatrick Modiano – Gallimard .

« Il faut boire jusqu'à l'ivresse, sa jeunesse » comme le chante Charles Aznavour . Victor Chmara a bien 18 ans, c'est un garçon modeste qui s'invente pour la circonstance un titre de comte mais traîne son ennui dans cet hôtel au bord du lac près de la Suisse. Il regarde les gens autour de lui comme s'il était au théâtre, ce vague docteur Meinthe qui se fait appeler « la reine Astrid, la reine des Belges » et qui ressemble à un vieil acteur, Yvonne Jacquet, une jeune et frivole actrice de cinéma avec qui il aura une brève relation amoureuse. Il fera un passage dans sa vie et on parle même de mariage à leur sujet. Sa jeunesse à lui est indolente et artificielle quand des jeunes comme lui se battent et meurent en Algérie et chacun se compose un personnage, avec des dialogues en sourdine, dans une sorte de lumière blafarde d'aquarium et une ambiance frivole de raout mondain. Tout commence entre eux comme une sorte de période d'observation dans un décor irréel, des non-dits, des silences et des parfums capiteux. Dans cet univers tout est mélancolique, le décor du lac avec son bateau, un vieux rafiot qui en fait le tour, le funiculaire, une vieille Dodge et même le chien d'Yvonne. le temps passe les masques tombent, les projets qui ressemblaient à des châteaux en Espagne s'évanouissent et le quotidien reprend le dessus, c'est à dire, toutes égales par ailleurs, l'ordinaire de la vie. de tout cela je retiens une grande superficialité, une solitude pesante des personnages et je ne suis pas sûr que Victor ait été enivré par sa jeunesse.
Quand je lis un roman de Modiano, c'est à chaque fois la même chose, j'ai l'impression d'être dans une autre dimension, dans un autre monde et j'aime bien.
L'auteur, comme il en a l'habitude, explore le passé, un passé vieux de 12 années. Nous sommes dans les années 60 et c'est une page qui se tourne, avec ses projets avortés, ses trahisons , cette fuite pour échapper au quotidien et sûrement à la guerre...
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