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4

sur 481 notes

Critiques filtrées sur 4 étoiles  
Emerger d'un roman de la grande Joyce Carol Oates équivaut à émerger d'un cauchemar et, à l'instar des cauchemars, il y a de fortes chances pour qu'il vous poursuive et vous hante plusieurs heures voire de nombreux jours après qu'il se soit achevé.

Un titre si tendre et si sentimental pour un roman noir comme seule Joyce Carol Oates sait en produire. La sensation de ne pas savoir où vous posez les pieds ; vous glissez des petits pas craintifs dans la brume opaque qui vous entoure et dans laquelle vos chevilles sont dissimulées. Vous avancez lentement jusqu'à sentir le sol se dérober sous vos pieds. Et le chute est rude, inévitablement.

Ici, vos pieds sont chaussés de jolis patins en cuir d'agneau ; les patins artistiques de la jeune Bliss, star prodige de la glace qui a déjà conquis le coeur des Américains adeptes de la compétition sportive dès le berceau. Bliss a presque 7 ans et elle a déjà derrière elle une carrière longue de trois années de glisse, de galas, de show et de strass. Coachée par sa mère, pistée par les médias et jalousée par son frère aîné, Bliss est une marionnette si (fr)agile.

Contrairement à ce que peut donc laisser penser son titre tendre et sentimental, "Petite soeur, mon amour" est un drame. Drame familial mais aussi et surtout drame social. Dans le parcours de comète de Bliss scintille le miroir aux alouettes du "rêve américain" de la classe suprémaciste américaine : amour, gloire et beauté, le règne tout puissant de la notoriété clé du succès. "Petit soeur, mon amour" est, à l'instar de bien des romans de la géniale Joyce Carol Oates, un pamphlet qui fustige la barbarie de la quête du succès, qui met en évidence la cruauté des procédés pour y parvenir et la médiocrité des résultats si durement atteints.

"Petite soeur, mon amour" est aussi un roman psychologique puissant qui se développe sous la narration psychotique de Skyler, le frère de Bliss. Maltraitance infantile, accaparement par les parents du destin des enfants, addictions destructrices, drame psychiatrique. Vous pouvez compter sur l'impudique Joyce Carol Oates pour ne pas vous ménager.

Oui, "Petite soeur, mon amour" est à classer parmi les romans très noirs de l'auteure. Une auteure dont la plume continue à me fasciner, à me scotcher, à m'enliser dans un cauchemar dont, vicieusement, je ne souhaite pas tant sortir. La peinture au vitriol que l'auteure dresse d'une société dont elle connaît parfaitement les travers et les fantasmes, dont elle maîtrise les codes et les langages, a de quoi faire froid dans le dos. Si son style accuse toujours quelques longueurs, au final, le voyage qu'elle propose, si riche de détails et de dimensions juxtaposées, mérite vraiment le détour bien qu'il nécessite d'avoir le coeur et les tripes bien accrochés.


Challenge MULTI-DEFIS 2022
Challenge PLUMES FEMININES 2022
Challenge PAVES 2022
Challenge Joyce Carol OATES
Challenge ABC 2021/2022
Challenge SOLIDAIRE 2022
Challenge ATOUT PRIX 2022
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Ecrire cette critique, c'est presque aussi compliqué que de lire ce roman.

Lecture paradoxale que j'aime et que je déteste.

Histoire qui me fait des noeuds à l'estomac et me révulse et en même temps impossible à lâcher.

Personnages haïssables et d'autres si fragiles.

Hypocrisie vomissive. Traitements indignes.

JCO pour la troisième fois m 'a beaucoup torturée avec cette histoire.
Parce qu'elle touche à ce qu'il y a de plus précieux dans la vie, nos enfants.
Parce qu'elle s'est inspirée d'un fait divers monstrueux. L'assassinat d'une petite miss de beauté jamais élucidé.
Parce qu'elle révèle ce qu'il y a le plus sordide sous le vernis du rêve américain.

Nous avons donc cette petite fille, Bliss, de son vraie nom Edna Louise, qui est toute mignonne sur ses patins. A 4 ans, elle va ravir le coeur du public et commencer à décrocher des titres pour le plus grand bonheur de sa maman Betsey et du papa Bix. Jusqu'à ce qu'elle soit découverte morte dans son sous sol et qu'un pédophile fan de Bliss s'accuse du crime. La petite fille n'a que 6 ans.

C'est le grand frère Skiler, 9 ans au moment des faits, 19 ans au moment de l'écriture et qui raconte.
Le masque de la famille parfaite se fissure rapidement et on ne peut assister impuissant qu'à ce désastre.


L'histoire se situe à Fair Hills dans le New Jersey.

Le papa Bix a tout pour plaire : séduisant, beau, barraqué, en pleine réussite professionelle (en témoigne la taille de sa voiture, de sa maison ou de sa montre).
Betsey s'occupe des enfants (avec des bonnes !). Elle est en quête de reconnaissance sociale. N'hésitant pas à harceler les mamans en vue au téléphone pour obtenir de précieuses invitations à des goûters. Betsey est très croyante.
Skyler c'est un brave petit gars qui ne demande qu'à plaire à ses parents jusqu'à se blesser gravement en sport et rester infirme.
Et enfin la petite Edna Louise qui devient intéressante aux yeux de sa mère le jour où elle monte sur des patins et se révèle douée.

Ca c'est le côté pile de la pièce. Une famille qui a l'air plutôt sympa.

Coté face. J'ai été horrifiée. Vraiment. Imaginer ce que certaines mères font subir à leurs petites filles pour gagner des concours.
Bliss ne va plus à l'école. Elle s'entraîne comme une forcenée. Bliss est devenue une machine à gagner. Toute sa vie et celle de sa maman tourne autour des compétitions : maquillage, coiffure, entraînement...


Skyler est franchement mis de côté. On le prie de ne pas faire ses grimaces de martyre sur les photos et de ne pas boîter en société ni de faire honte. (sérieux ??? J'ai eu de grosses bouffées de colère).

Les gamins reçoivent une quantité inimaginable de médicaments et même des piqûres pour Bliss dans le derrière. Elle ne peut même plus s'asseoir tellement elle a mal. (c'est quoi ces médecins qui prescrivent toute cette merde???)
Vous les croyez heureux les enfants Rampike??? Je ne crois pas avoir lu une ligne de plaisir pour ces pauvres gamins.
De la tristesse, de l'ennui, du désespoir et de la maltraitance.
Quant à moi, j'ai eu envie d'hurler et de punir ces horribles parents.
Je n'en dirai pas davantage car le pire est à venir dans les révélations et les souvenirs. l'après meurtre de Bliss est aussi très difficile à lire.

J'ai du m'accrocher pendant cette lecture.

Pas parce que les enfants sont frappés. Pas du tout. Il n'est pas question de ça.
C'est l'attitude des parents. Soumettre l'amour qu'ils dispensent à leurs enfants à la réussite de quelque chose. Chercher à monter les échelons de la classe sociale sur le dos de leur enfant. Etre dépourvu d'empathie devant la souffrance des enfants.
Ce manque d'amour, de générosité, de sensibilité, ce père qui ne vient même pas voir sa fille patiner parce qu'il a autre chose à faire.
Pour moi ça a vraiment été dur à lire et à encaisser.

Mais il fallait pour Bliss et pour Skyler que je poursuive ma lecture. Je voulais découvrir qui avait tué Bliss. Je voulais aussi savoir ce qu'allait devenir Skyler.

Bon cette fois j'en suis convaincue. Pas d'happy end avec JCO. Mais des romans coups de poing. Elle s'attaque à des sujets difficiles et on peut dire qu'elle n'épargne personne.

Alors c'est ça le fameux rêve américain?

Et bien je vais rester dans ma Haute Loire profonde et profiter de mes enfants que j'aime de la tête au pied, avec leurs qualités mais aussi tous leurs défauts.












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La petite Bliss Rampike n'a que 6 ans quand elle est retrouvée assassinée dans le sous-sol de sa maison. Qui s'en est pris à cette minuscule star des patinoires, connue dans le pays tout entier pour son talent sur la glace ? Il y avait trop d'admirateurs autour de la fillette. Il y a eu trop d'aveux, trop d'indices, trop de sources anonymes, trop d'incertitude. Neuf ans après le drame, Skyler écrit sur la mort de sa soeur, les années qui ont précédé, les jours qui se sont précipités avant la tragédie, l'odieuse couverture médiatique et la vie après tout ça. Alors qu'il n'avait que 9 ans, le garçon a été soupçonné d'avoir tué sa soeur, par jalousie et par rancoeur. Il a toujours clamé qu'il n'y était pour rien et le répète dans son texte. « Faites-moi confiance ! Je jure de ne dire que la vérité telle que je l'ai vécue. » (p. 25) Pourtant, tout porte à croire que Skyler n'est pas digne de confiance : drogué, malade, instable, le jeune homme a bien mal abordé le virage de l'adolescence après l'horreur qui a ébranlé sa famille. de souvenirs mêlés en chronologie malmenée, Skyler tente de rassembler des faits qui expliqueraient – peut-être – pourquoi Bliss a été assassinée. Il nous fait entrer dans l'intimité malsaine de la famille Rampike où le père est un géant adoré et craint et où la mère est aussi frustrée qu'angoissée. Betsey est obsédée par la réussite de ses enfants et par la reconnaissance sociale : elle est prête à tout pour être acceptée dans la bonne société de Fair Hills, et Bliss est le tremplin parfait pour cela. « Populaire ! En Amérique, y a-t-il autre chose qui compte ? » (p. 193) Chaque évènement que raconte Skyler fissure un peu plus le portrait de famille qui se racornit jusqu'à devenir un petit bout de charbon malodorant.

Le lecteur sait le drame avant même d'ouvrir le roman puisque la quatrième de couverture l'annonce sans ambages et que l'intrigue est plus ou moins inspirée de faits réels. le récit de Skyler nous fait tourner autour de l'assassinat, aller à rebours de cette mort atroce et anticiper la suite. « de ce jour, et pour toujours, ils vécurent tous horriblement et eurent beaucoup de tourments. » (p. 373) Dans ce conte de fées qui tourne au cauchemar, il faut être très attentif aux notes de bas de page dans lesquels Skyler se livre et se raconte sans masque, se voyant lui-même comme une note de bas de page dans l'histoire des Rampike. Ces annotations symbolisent la détresse d'un petit garçon qui a vite compris qu'il était le moins aimé des deux enfants de la famille. Alors, c'est certain, Skyler était délaissé et jaloux, mais surtout profondément malheureux. Et il a porté cette peine pendant des années, car comment vivre encore quand l'enfant chérie n'est plus ? À force de ressassements, de ruminations et de pardons, Skyler saura-t-il laisser tout cela derrière lui ? « Ta soeur est morte. Tu es vivant. Et alors, ensuite ? » (p. 646) Une fois encore, Joyce Carol Oates dresse un portait amer de la famille américaine moyenne et de la société des médias. Elle lance quelques coups de griffe bien acérés contre le business des enfants stars et contre le sacrosaint modèle du self-made-man à qui tout réussit. Ce long roman fend le coeur à plusieurs reprises et interroge habilement les relations au sein d'une fratrie. Chanceuse que je suis d'avoir grandie avec des frangins et des frangines à l'écoute, généreux et heureux !
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Ça ne traîne jamais en longueurs avec Joyce Carol Oates; son immense talent d'écrivaine rend compte de façon toujours originale des histoires qu'elle se plaît à nous raconter. Petite soeur, mon amour, c'est le récit romancé d'un fait vécu, la mort violente et non résolue de JonBenét Ramsay, six ans, survenue à son domicile en 1996. Petite miss beauté américaine, elle est ici incarnée par Bliss Rampike, jeune patineuse artistique douée, entraînée à l'excès par sa mère dans une longue litanie de concours de performance. C'est la voix de son frère Skyler que l'on entend, se confiant au lecteur sur les événements funestes qui ont marqué sa vie à jamais. S'imaginant avoir été le tueur, le garçon, perturbé, connaîtra divers diagnostics de troubles mentaux traités par un grand nombre de psychotropes qui lui causeront une dépendance. Interné et confié aux soins d'écoles privées hautement spécialisées, Skyler passera difficilement le cap de l'adolescence . Au-delà de la résolution d'un meurtre horrifiant, Joyce Carol Oates pose un constat dur sur la parentalité déficiente et la surmédicalisation des problèmes de santé mentale chez l'enfant.
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Entamer la lecture d'un roman de Joyce Carol Oates me fait toujours ressentir un sentiment ambivalent. Je sais que la qualité littéraire sera au rendez-vous, je sais que je vais vivre une expérience de lecture incomparable. Mais je suis certaine aussi de m'aventurer sur un terrain mouvant sur lequel je vais être confrontée à la noirceur profonde des personnages, à la face glauque et répugnante de la société.
Et c'est exactement ce qui s'est passé avec Petite Soeur mon amour.
Dès les premières pages, l'autrice nous plonge dans un univers particulier dont subtilement mais implacablement elle met en exergue les travers. Et plus le récit avance, plus le dégoût vient au coeur du lecteur.
Pourtant, il semble impossible de le quitter car le style propre à l'autrice suscite la fascination morbide.
Pour des raisons personnelles, je n'ai pas été en mesure de lire ce roman en une fois, j'ai interrompu ma lecture à plusieurs reprises. Mais à chaque fois que je me plongeais dans cette histoire incroyable (tirée d'un fait divers, la fiction est très relative), je ressentais la puissance de l'angle adopté par Joyce Carol Oates.
Ce style si particulier est accompagné d'une typographie iconoclaste, mêlant les tailles de caractères avec des insertions de discours dans le récit. Ça donne le vertige et oblige à une lecture intense.
Si certains passages m'ont paru non indispensables, je suis ressortie de cette lecture encore plus enthousiaste et avec une envie décuplée de poursuivre la découverte de la bibliographie de cette autrice.
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Diabolique et envoutante Joyce Carol OATES !
 
Largement inspiré d'un fait divers qui a défrayé la chronique des années 90 aux Etats-Unis, l'assassinat, toujours non résolu à ce jour, de l'enfant « star » JonBenet Ramsey, ce roman est écrit du point de vue de Skyler, le grand frère de la petite victime, renommée Bliss dans le livre.
 
Ce récit n'aurait pu être qu'un nième roman traitant d'un crime célèbre, mais Joyce Carol Oates en a fait bien autre chose et le résultat est époustouflant.  L'auteure réussit ici, avec une précision qui fait froid dans le dos, une véritable opération chirurgicale, celle d'une famille (totalement toxique) et d'une certaine société (totalement dysfonctionnelle). Tout y passe : le culte de l'argent, la vanité du parvenu, l'hypocrisie du croyant, la toxicité du parent qui vit à travers sa progéniture et les travers d'une société qui semble valoriser et récompenser ces comportements.
 
Le récit du point de vue de Skyler, de son parcours chaotique et de ses sentiments ambivalents envers sa soeur décédée, saisit le lecteur et l'emmène dans les territoires terrifiants de l'horreur banale d'un quotidien où l'on se rend compte que le décès tragique de cette petite fille n'est finalement presque pas le pire. En effet, il n'y a pas beaucoup de lumière dans cette histoire, aucun personnage qui semble racheter l'autre, chacun étant perdu dans son propre individualisme, à se battre avec ses névroses. Parfois dur à lire, mais tellement réel et si bien écrit.
 
Il s'agit de mon roman préféré de Joyce Carol Oates (pour le moment…).
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Si comme moi vous restez souvent sur votre faim quand les caractères des personnages sont simplement efleurés, évoqués. Si vous avez envie de plonger dans l'infiniment petit et disséquer les subtilités des comportements humains et inhumains, ce livre est fait pour vous.

Quel bonheur de plonger dans le quotidien de cette famille épouvantablement américaine. Qui fait passer la réussite avant le bonheur. le paraitre est leur Graal.
Il y a le père, espèce de requin avec les dents bien blanches qui éblouissent sur les photos et rayent le parquet.
Il y a la mère, un peu trop molle, trop grasse, pas assez sûre d'elle, qui tente de se montrer à la hauteur à côté de son (trop) beau mari.
Tous les deux tentent de monter les échelons subtils de leur petite banlieue bourgeoise américaine.
Alors quand viennent les enfants, on ne cherche pas vraiment à les élever pour qu'ils deviennent des adultes heureux et équilibrés, on les élève pour qu'ils soient des faire-valoir de la réussite de leurs parents.
A tout prix.
Hélas, le grand frère n'est pas à la hauteur des attentes. Et pire, il se blesse. C'est moche pour les parents de se trimballer avec un enfant cabossé. Alors ils le planquent un peu. Beaucoup.
Mais heureusement, la petite soeur va vite l'éclipser. Une vraie petite merveille sur la glace. Ouf. Les parents, et surtout la mère, peuvent enfin tout miser sur elle. On la bichonne comme un caniche de concours. Elle est blessée, pas très en forme ? On la bourre de médocs.
Elle ne travaille pas très bien à l'école ? On change le prof particulier qui lui donne des cours.
Et même son prénom est changé, suite à un message divin reçu par la mère. Parce que Dieu parle à la mère. Il est là. Il la motive. Il lui donne la force de faire tout ce qu'il faut pour que sa fille réussisse.
On investit comme sur un pur sang. Les coachs sportifs, artistiques, médicaux. Les petits costumes sur-mesure et le maquillage, c'est mignon au début, ça penche un peu vers le vulgaire, vers le malsain.
L'univers des concours est clinquant, faux, dégoulinant de cette obstination de réussite. Avec ces mères frustrées qui tentent de réaliser leurs rêves au travers de leurs filles. Les présentateurs et certains spectateurs aux pensées plus libidineuses qu'artistiques.
Et puis un jour vlan, la petite princesse est assassinée. Dans la vraie histoire, puisque ce roman est basé sur un fait réel, on n'a jamais su qui avait tué la petite fille.
L'auteure prend parti. J'avoue, sans dévoiler l'histoire, que je partage assez son analyse.

Toute cette folie est racontée par le frère qui tente de grandir d'aimer, de se construire au milieu de ces drames : celui de naitre dans cette famille et celui ce survivre à sa petite soeur.
La partie après assassinat souffre de quelques longueurs, mais heureusement ou malheureusement, la mère est encore divinement inspirée et parvient à transformer l'assassinat de sa fille en évènement médiatico-commercial.

Alors faut-il le lire ? Oui. Un sacré roman qui pointe du doigt les èrements de notre société accrochée à la réussite, la consommation, le paraitre.
Et si on cherchait juste à être heureux ?




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Inspiré d'un meurtre jamais résolu, l'assassinat de la jeune Jobénet Ramsey', ce fascinant thriller psychologique offre un regard intime et dérangeant sur une famille américaine, à travers les yeux du jeune frère de la victime.

Lire la prose cynique d'un adolescent névrosé, mal dans sa peau et sa famille peut vite lasser mais Joyce Carol Oates laisse le lecteur abasourdi par l'histoire de « Petite soeur, mon amour » et ébloui par son talent d'écrivain.

Trainé depuis l'assassinat de Bliss, dans de riches établissements médicalisés, Skyler n'a des nouvelles de sa mère que par le biais des médias.

Agé de dix-neuf ans, délaissé par ses parents, drogué par des médecins sans scrupules, il affronte seul ses vieux démons et vit rongé par la culpabilité.

« SKYLER AIDE MOI SKYLER JE SUIS SI SEULE ICI SKYLER
J'ai si peur J'ai si mal Skyler
Tu ne vas pas me laisser dans cet endroit horrible, dis Skyler
Cette voix dans la tête »

Bliss transformée en poupée patineuse dès son plus jeune âge était devenue une icône pour les médias tandis qu'elle s'étiolait derrière le vernis de la famille américaine parfaite.

Les parents Rampike ont en effet une soif de réussite et de reconnaissance sociale telle qu'ils vont pour cela instrumentaliser leurs enfants jusqu'à l'écoeurement le plus total du lecteur, les médias, la religion, la médication à outrance, la désocialisation progressive de leurs enfants, tout est bon pour servir leurs projets.

Mais qui a tué la jeune Bliss, âgée de six ans ? Un détraqué sexuel, ses parents ou Skyler lui-même ? La police semble incapable de faire son travail correctement.

C'est un portrait au vitriol de la société américaine qui glace le sang parce qu'il parle de l'horreur ordinaire.

Ce récit psychanalytique surprend jusqu'à la fin par sa justesse et sa profondeur tout en ménageant un suspens qui tient en haleine jusqu'à la dernière page.
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Joyce Carol Oates s'est inspiré d'un fait divers abominable, jamais élucidé, le meurtre d'une enfant de six ans, mini-miss de beauté, très célèbre aux Etats-Unis à la fin des années quatre-vingt dix.
Si elle en garde la trame, elle n'hésite pas, elle, à résoudre le mystère de la mort de l'enfant en fournissant une explication parfaitement horrible de la chose.

Conté par le frère aîné de la jeune victime, devenue, sous la plume de l'auteur, patineuse de génie et bête à concours, sous la férule de sa mère, le lecteur plonge dans un récit fiévreux, cruel.
Car Joyce Carol Oates, se livre ici à l'autopsie impitoyable d'une famille américaine aisée, bien sous tous rapports, chrétienne et pratiquante et en démonte les apparences avec une cruauté implacable.
D'abord le père, Bix Rampike, doté d'une "sacrée présence ! Epaules larges, visage taillé à la serpe, un charme rude d'américain, prompt à sourire, prompt à se vexer" séduisant et séducteur, arriviste, un vrai salaud, un vrai mâle "Alpha plus". Voilà "la ligne de touche" !
Ensuite la mère, Betsey, vivant d'apparences, adorant son fils Skyler, son petit homme, comme elle l'appelle, qu'elle délaisse au moment de l'éclosion du talent de patineuse de sa fille. Renommée Bliss, ainsi en a décidé maman, car Bliss c'est beaucoup plus glamour qu'Edna Louise pour une princesse de la glace, maman va prendre en main la carrière de sa fille, la modelant, la pliant à sa volonté, lui imposant exercices, régimes, traitements médicaux de toutes sortes pour en faire une petite poupée trop maquillée, pauvre fantoche livré aux caprices de sa mère.
Si elle veille impitoyablement à la carrière de sa fille, elle saura l'utiliser après sa mort pour se mettre elle-même en avant, par le biais de la télé-poubelle et en créant la ligne "Touche Céleste", concept fourre-tout qui va lui assurer argent et notoriété !

Comment, dans ces conditions les deux enfants peuvent-ils s'en sortir ? Choyés en apparence, ils en sont tous deux à se demander si leurs parents les aiment !

Et qui a tué Bliss ? son père, sa mère, son frère ? ou un étranger miraculeusement parvenu à pénétrer dans la demeure des Rampike ?
Dans le récit halluciné que nous livre Skyler, ce jeune homme de dix-neuf ans, hanté par son enfance brisée à la mort de sa soeur et son adolescence chaotique, nous traversons avec lui l'enfer des doutes, des drogues et des questionnements sans réponse.
Et ce récit serait envoûtant de bout en bout, si l'auteur, hélas, n'était pas atteint de logorrhée galopante et n'usait pas parfois la patience du lecteur en usant d'un verbiage dommageable à l'intérêt de son propos et à l'analyse virulente qu'elle nous livre de la société américaine.
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Le point de départ de ce roman est un fait divers des années 90 dans le Colorado. JonBenet Ramsey, 6 ans, est découverte assassinée dans la cave de ses parents le lendemain de Noël. Cette histoire a été très médiatisée aux USA puisque la petite victime était une Miss beauté devenue très célèbre. Les enquêtes se sont multipliées sans que le crime ne soit jamais résolu.
L'auteur reprend ce fait divers en construisant un roman qui propose une résolution à ce mystère.
Le personnage s'appelle ici Bliss et elle est une patineuse surdouée. Mise sur un piédestal par ses parents, elle est à la fois aimée et jalousée par son frère aîné, Skyler. C'est justement lui le narrateur de ce récit. Il oscille entre souvenirs de la période entourant le meurtre et le présent. Jamais remis de ce meurtre, ressassé par des média impitoyables, il survit dans un univers de drogues et d'assistance psychologique. Son récit est à l'image de son état d'esprit : déformé, torturé. L'auteur multiplie les effets techniques : longueur de chapitres inégale, profusion de notes de bas de pages, ratures, blancs… le caractère maladroit et opaque participe de l'atmosphère asphyxiante du roman.
Ces effets de style peuvent dérouter au début, mais ils ne manquent pas de rendre le lecteur actif, d'autant plus qu'il est souvent interpelé par l'auteur.
Sous le fil d'une narration tendue, le nom de l'assassin va émerger : le père absent, caricature du businessman opportuniste ? La mère étouffante et vaniteuse ? le fan pédophile de Bliss ? Ou le narrateur souffreteux lui-même ?
Mais détrompez-vous, ce n'est un roman policier (d'ailleurs la police n'est pas présente dans ce roman), mais l'exploration des raisons et des impacts d'un drame familial, le portrait d'une famille dysfonctionnelle avec des parents irresponsables et des enfants manipulés, une famille faisant bonne figure à l'extérieur, mais rongée à l'intérieur…un théâtre d'apparences.
L'auteur sonde ainsi les ambitions perverses de l'être humain en n'épargnant personne. le supplice de l'enfant, mis en exergue par le meurtre est en réalité lancinant et tous les personnages y contribuent.
Un roman noir sans concession et poignant.
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