Bienvenue dans la contrée des volcans, des geysers, des nuits éternelles et des aurores boréales ! Entre feu et glace, les islandais, lorsqu'ils ne sont pas sortis en mer pour pêcher, vivent de légendes, emmitouflés au chaud, puis de longues soirées agrémentées en lectures également. J'ai beaucoup aimé l'atmosphère de ce pays intriguant, lequel sait nous imprégner avec son climat des plus particuliers, sa langue unique, aux mots interminables...imprononçables. L'Islande insaisissable. Terre de mystères, de contrastes - verte, noire, bleue, grise, rouge ou blanche, selon ses humeurs - il fait toujours un immense plaisir de partir à ta découverte !
C'est dans cet état d'esprit que nous abîme "
Miss Islande" dès les premières pages. le cadre naturel est souvent mis de l'avant puisque ce pays est justement cela: une force de la nature à l'état brut.
Comment ne pas aborder sa facette la plus représentative ?
D'ailleurs, notre personnage principal, Hekla, tire son prénom d'un volcan, l'un des plus actifs de l'île.
À vingt-et-un ans, Hekla sort du lot pour son époque ! Dans les années soixante, en Islande aussi la place d'une jeune fille est cantonnée à la maison, mariée et mère d'un ou plusieurs enfants. Cuisiner, nettoyer, vivre dans l'ombre de son mari...non merci ! Sans le sou, elle voyage avec sa machine à écrire et quitte son village pour la capitale, dormant ici et là dans de toutes petites mansardes. Sans demander quoi que ce soit, elle fonce au gré de ce qui la passionne le plus: l'écriture. Son rêve: devenir écrivain. Rien de plus. Ou rien de moins.
Hekla est déjà sur la bonne voie, pourtant, puisqu'à l'insu de tous, elle commence à être publiée...sous des patronymes masculins !
Si les éditeurs savaient, ils la jugeraient mal simplement parce qu'elle est femme. Malgré son talent, c'est donc presqu'en cachette qu'elle écrit, tout le temps.
La jeune fille écoute plus qu'elle ne parle, plongée dans ses inspirations; les scènes que nous imaginons se font à travers ses yeux, son coeur, ses pensées, surtout. Nullement vantarde, son personnage est discret, se fond dans le décor mais elle sait ce qu'elle veut - et surtout ce qu'elle ne veut pas ! - faisant d'elle un électron libre et autonome. Pour qui l'amitié compte au-delà des relations sentimentales. Parmi eux Isey et Jon John, ses deux meilleurs amis. Isey, qui adore écrire elle aussi mais bien que contente de son choix de maternité, aurait peut-être aspiré à plus grande destinée. On ressent une forme de regret à travers ses mots... Jon John, quant à lui, aime le même sexe que lui et souffre de sa différence, du rejet imposé par la société. Hekla sort du cadre mais est celle qui s'adapte le mieux aux bâtons dans les roues. Elle écoute ses pairs sans jamais beaucoup consoler mais sans jamais juger, aussi. Je me suis attachée à son personnage introverti, indépendant et avant-gardiste. Elle ressent tout sans s'exposer et j'ai aimé cela.
Lorsqu'un homme lui suggère à quelques reprises de concourir pour le titre de
Miss Islande, avec son physique et sa stature impressionnants, Hekla tourne le dos sans hésiter. L'univers des mots est son refuge, son seul amour, son seul objectif. le sujet du concours est très furtif, ici, on le contourne sans peine...
Quelque chose m'a pourtant dérangée dans cette lecture et je suis incapable de mettre le doigt dessus, ou plutôt de l'expliquer...
Tout ce qui se rapporte à l'Islande - c'est-à-dire beaucoup - j'ai adoré.
J'ai aimé le lieu, le cadre, l'époque, les personnages. Ensuite, si j'ai grandement apprécié les thèmes abordés, tels que la place de la femme dans la société et l'homosexualité, traités avec justesse, délicatesse et sans jugement, je me suis sentie moins emportée par le corps de texte. Pas que ce ne soit pas bien écrit, au contraire, mais je me suis occasionnellement sentie perdue dans les mailles du filet, à tenter de suivre certains soliloques très coq-à-l'âne, notamment dans les pensées qu'Isey exprime à son amie Hekla. Je me suis même ennuyée, par moments.
L'écrit était beau au sens poétique mais manquait de structure selon moi. Souvent embrouillé, j'en perdais le fil et du même coup, l'intérêt. Peut-être est-ce mon interprétation; d'après la construction du récit, on aurait dit plus un recueil d'idées qu'un roman, en fait. Il m'a de plus semblé que les en-têtes des chapitres n'avaient souvent aucun rapport avec ce qui suivait. Tout cela m'a donné une légère impression de désorganisation...peut-être intentionnelle cela dit, tout dépend de l'objectif de l'autrice. Remarquez, cela est un ressenti très personnel, je comprends que ce petit roman plaise à plusieurs. Si j'ai aimé celui-ci moitié-moitié, je suis cependant curieuse de m'aventurer plus loin et impatiente de relire Audur Ava Olafsdottir pour comparer avec ses autres oeuvres !
CHALLENGE PLUMES FÉMININES 2023