Les larmes ont coulé quelques fois, perlé souvent.
Ce livre témoin m'a bouleversé, remué, ébloui.
Claire Oppert a touché ce noyau profond en moi, qui « nous est commun.
Il rayonne en nous, entre nous, par nous. »
Elle se souvient à quatorze ans, après son premier concert, de cette femme, qui lui dit « Si vous aviez été médecin vous m'auriez guérie. »
Ces paroles prémonitoires provoquent une onde de choc chez la jeune musicienne. Une vague déferle en elle, se coule lentement au fond de son âme. Intuition fondatrice, confirmation d'un coup de foudre pour le violoncelle, éprouvé à huit ans. Elle reconnaît au premier son, son instrument de toujours, plus tard un violoncelle italien de 1749.
La concertiste est à sa juste place, au chevet de ceux que l'on nomme autistes profonds, résidents d'EHPAD, patients déments, malades douloureux en fin de vie.
Elle applique son Pansement Schubert, elle sait quelle pièce convient à la situation, à la demande muette, au regard éloquent. Cette fois-là, le cygne de Saint-Saëns survole l'espace à l'heure de la sieste, après avoir éteint la télé et salué le grand chêne à l'entrée de la résidence.
Les corps se réveillent, les mains applaudissent, les mots fusent, poèmes spontanés et les aides-soignantes sourient. Les vibrations de l'instrument entrent en résonance avec les vibrations profondes de l'être. Les sons-amis réunissent les parties éclatées des souffrants.
« Ça fait du bien aux problèmes. »
Claire Oppert fait du bien partout, accompagne jusqu'au dernier souffle, lorsqu'elle anime et apaise la parcelle de vie intacte dans chaque corps abîmé. Elle fait merveille.
La musique soulage et calme les personnes malades, leurs familles et les soignants.
le Pansement Schubert est devenu méthode aux effets objectivés. Une étude sur 112 patients observe une diminution de la douleur de 10 à 50%. Les effets positifs sur l'anxiété sont évalués à 90% et montent à 100% sur les soignants. Les rencontres musicales à visée thérapeutique ont une action avérée. L'art-thérapeute a complété sa démarche intuitive par une formation pour mesurer une possible amélioration des symptômes des patients.
Mais le succès de cette approche non médicamenteuse tient également à un partage d'émotions non quantifiable, lors de l'unisson entre musique, souffrance et soin. L'apport de ces subjectivités mêlées est ô combien précieux.
L'auteure livre un peu d'elle-même en quelques pages brèves, respiration entre les moments musicaux, "lieu de mémoire propice à l'émergence des souvenirs". Elle met également des mots lumineux sur les effets de la musique, textes courts livrés en italique, lorsqu'elle oeuvre en unité de soins palliatifs. La musicienne jongle avec les mots comme elle module les notes, avec un talent rare et nous donne une narration multicolore, symphonique, dirais-je. Je ne compte plus les cordes à son archet.
Je me souviendrai à jamais de vous,
Claire Oppert, musicothérapeute géniale et sensible. Je vous ai écoutée à la radio, je vous ai lue, je vous ai "vue" près d'elles et eux, j'ai gouté ces morceaux choisis bénéfiques aux âmes en peine.
Que vibre
le Pansement Schubert dans tous les lieux de soins.