C'est une remarque de
Virginia Woolf s'interrogeant sur ”ce qui serait arrivé si
Shakespeare avait eu une soeur merveilleusement douée, appelée, mettons Judith”, qui a donné l'idée à
Christine Orban d'écrire sur Jacqueline, la soeur merveilleusement douée de
Blaise Pascal. Cette soeur dévouée qui deviendra soeur Sainte-Euphémie en entrant à Port Royal,
Christine Orban, avec un regard de femme d'aujourd'hui, la qualifie de
soumise. Soumission au père là où il n'y a qu'obéissance et respect, soumission au frère là où il n'y a que charité et service, soumission à Dieu là où il n'y a qu'amour et fidélité. Au lieu d'une soumission considérée par l'auteure comme un asservissement, il faut plutôt y voir du dévouement et un sens du service, un chemin de sainteté. Il faut dire qu'à notre époque, servir a perdu de sa noblesse et de son élévation. Jacqueline, par contre, mettait sûrement un point d'honneur à servir.
Christine Orban qui ne comprend pas le sens de cette ”soumission”, n'épargne pas ceux qui l'exercent, le père comme le frère. Et le frère, qui n'est pas moins que
Blaise Pascal, apparaît sous une forme de tyran, exigeant et limite pervers. Étonnant !
Malgré une documentation abondante, si les faits sont fidèlement rapportés, les citations également, leurs interprétations éloignent de la réalité. Ce livre semble très romancé et fait apparaître
Blaise Pascal sous un jour peu flatteur. Ce qui est particulièrement gênant et peut choquer. Certes la santé de
Blaise Pascal n'était pas solide mais la dépendance à sa soeur paraît excessive, tout comme le lien affectif avec elle exagéré.
Jacqueline Pascal, cette ”
soumise”, n'en est pas moins forte, déterminée et influente ; admirée même, brièvement et par choix, comme poète ; vertueuse et pieuse, on ne peut en douter, mais ces qualités sont sûrement surannées pour la femme qui a écrit ce livre.
C'est dommage car vue sous un autre angle, avec un regard plus proche de la réalité et de l'époque, la découverte de la famille
Pascal et de
Jacqueline Pascal en particulier, tout comme l'approche du jansénisme, auraient pu être intéressantes. Certes tout n'était pas rose et tous n'étaient pas parfaits mais de cette famille, marquée par la mort prématurée d'une mère et grâce à l'éducation donnée par le père, a pu éclore des personnalités hors du commun.
(Le très beau livre de
Xavier Patier :
Blaise Pascal, la nuit de l'extase, pourra donner un autre aperçu de
Blaise Pascal).