Le Café, c'est, durant les années 50 (comme le hammam pour les femmes), le lieu de rencontres incontournable des hommes du quartier ou de la cité.
A Mostaganem ville côtière de l'ouest algérien plus précisément a' Tijditt, petit port balayé par le sirocco, dans le quartier de la Souika, il y en avait quatre. Mais celui qui était toujours bondé de monde, tous les jours, c'était celui qui avait pour «enseigne» le Café maure. Des chômeurs qui ne voulaient pas travailler pour les «roumis», des chômeurs qui voulaient travailler mais qui ne trouvaient pas de travail, des talebs survivant de lectures du Coran et se chamaillant sur un détail pendant des jours, des «rebelles» (syndicalistes et politiques), dont certains revenus du bagne, des indics, des jeunes intellos discutant des «révolutions» (française, américaine, russe, chinoise...), des nationalistes partagés sur le «zaïm» à la longue barbe, des fumeurs de kif, le pêcheur magique, le derouiche silencieux... Et, au milieu de tout ça, un jeune orphelin, Fekir, ne comprenant encore rien aux discussions et aux querelles qui n'en finissaient pas. Et, avec ça, les continuelles descentes de police...juste après une chaude discussion dite (par l'indic de service !) politique.
Une société vivant à part... et, avec la population européenne, les seuls contacts (en dehors de la police) étaient les matches de football interquartiers, toujours assez rudes sinon se terminant dans les coups et le sang... les jeunes Européens ne voulant jamais admettre la défaite.
Une ambiance lourde, insupportable dans une société partagée, parfois déchirée. Heureusement, pour notre jeune héros, il y a encore beaucoup d'interrogations... il y a aussi la découverte de l'amour (impossible) pour une jeune fille en fleurs (européenne... mais non pied-noir) et de l'amour raisonné pour celle qui va devenir, très tôt, sa femme. Il y a enfin la guerre...et la mort du poète s'écriant «Liberté»... Comme dans un conte. Comme dans un songe.
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Il y a quelque chose du conte oral qui serait écrit, de la chanson populaire devenue poème dans ce roman assez stupéfiant, rempli de vie et de paroles et de colère et de beauté.
Lire la critique sur le site : LaPresse
Les gens que j’ai rencontrés dans ma vie se divisaient toujours en deux clans : ceux qui exploitaient le système en profitant des redevances et en s’exprimant avec arrogance et certitude. Et ceux qui cherchaient la vérité, et qui doutaient. Ceux-là n’avaient pas de temps à perdre. Ils chinaient à tous les instants…
Une lumière ocre diffuse, traversait les persiennes calcinées par la poussière d’or du sirocco. Les rayons se posaient tendrement sur ces ombres chuchotantes. Vapeur parfumée. Odeur de menthe. Chaleur enivrante du café à l’eau de fleur. Le sifflement du vent fou à l’ombre des murs du Café Maure, peints à la chaux, figeait les lieux.
«Tous les malheurs font de belles légendes. C'est comme ça que naissent les traditions» (p 103)
«Derrière chaque légende se cache une vérité pas bonne à révéler» (p 102