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Ce livre aurait pu s'appeler Les hommes qui aimaient les chiens, puisque cet amour est un des points communs entre ces trois hommes. Un autre, et le plus important surement, est le rôle joué par la politique dans leur vie, la politique et tout particulièrement le communisme, système de société « en quête d'un rêve d'égalité qui, dans la vie réelle, était devenu le cauchemar de la majorité. »

Ils sont trois dans ce livre, trois narrations qui alternent, chacune centrée sur un de ces hommes.

Il y a Trotski, que l'on suit dans toutes ses années de paria, une des innombrables victimes de Staline. D'abord relégué dans le froid et l'immensité glacée du Kirghizstan, il errera ensuite de pays en pays, rejeté de toutes parts, en butte à l'hostilité des gouvernements et des partis politiques, malgré le rôle qu'il avait joué dans la révolution russe. de la Turquie, à la France, puis la Norvège et enfin le Mexique, chaque fois cantonné dans une maison de plus en plus fortifiée, redoutant de plus en plus l'attentat qui mettra fin à ses jours, mais incapable d'abandonner la politique, incapable de se contenter de sa famille, dont les membres disparaissent un à un, sacrifiés sur l'autel du communisme, victimes de l'acharnement des deux ennemis, Staline et Trotski.

Il y a aussi Ramon Mercader, ou devrais-je dire Jacques Mornard, jeune communiste espagnol, que l'on viendra trouver au milieu des combats pour le mener vers un destin qu'il ne contrôlera pas. Endoctriné en Russie, il deviendra un instrument de mort, incapable d'échapper à son destin. Était-il complètement convaincu de la justesse de son acte ?
« Il vivait pour la foi, l'obéissance et la haine. Rien du reste n'existait si on ne le lui en donnait pas l'ordre. »

Et enfin Ivan, jeune cubain, vivant les années d'instauration du communisme, en attente de jours meilleurs qui ne viendront pas. Il fait des études de lettres, est publié. Tout heureux, il écrira un second livre dont on lui expliquera qu'il ne correspond pas à l'idéologie cubaine, qu'il porte tort au rêve que doit incarner la société cubaine. Ses rêves à lui finiront au placard, oubliée sa vocation :
« Ou alors, je n'y songeais pas parce qu'en réalité, j'avais tellement oublié que j'avais un jour voulu être écrivain que je ne pensais presque plus comme un écrivain. »
Il rencontrera sur une plage déserte de Cuba, un jour d'hiver, un homme accompagné de deux lévriers Barzoï qui lui contera une drôle d'histoire.

Trois histoires qui s'entremêlent, trois histoires d'hommes broyés par le communisme, les deux premiers certainement autant coupables que victimes, le dernier pris dans le désastre qu'a été le régime communiste à Cuba.

Un roman extrêmement documenté, très riche de références historiques notamment sur la vie de Trotski et les purges staliniennes. Cette abondance de faits sur cette période a un peu freiné le début de ma lecture, je trouvais un peu répétitif cette série de procès, de condamnations, d'exécutions, un peu perdue dans cette avalanche de noms, sur une époque que je connaissais mal. Si vous rencontrez ce même sentiment, n'hésitez pas à poursuivre. Passé le premier quart du roman, j'ai été passionnée par ce que je lisais. Passionnée et en même temps, écoeurée, effarée, incrédule.

Comment cela a-t-il été possible ? Comment tant d'hommes et de femmes ont pu si longtemps croire à ce régime, y adhérer, y convertir des milliers d'autres. Ainsi que l'analyse Padura, c'est la peur qui a contribué à maintenir ce régime en place si longtemps, la peur en Russie, mais aussi à Cuba. Ce mot revient si souvent dans ce roman. Imaginez-vous vivre une vie entière dans la peur ?
« le plus terrible était de savoir que ces épurations affectaient l'ensemble de la société soviétique. Comme il fallait s'y attendre dans un État où régnait la terreur verticale et horizontale, la participation des masses à l'épuration avait certainement contribué à sa progression géométrique : il était impossible de lancer une chasse aux sorcières comme celle que vécut l'URSS sans exacerber les plus bas instincts des gens et, surtout, sans que chaque individu ne fût épouvanté à l'idée d'en être victime, pour n'importe quelle raison et même sans raison. La terreur avait eu pour effet de stimuler la jalousie et la vengeance, en créant une atmosphère d'hystérie collective et, pire encore, d'indifférence au destin des autres. L'épuration se nourrissait d'elle-même et, une fois lancée, elle libérait des forces infernales qui l'obligeaient à aller de l'avant et à s'amplifier… »

Un roman qui décrit de façon magistrale cette période et les mécanismes qui ont permis à ces régimes de prospérer. Un roman très riche, dont le souvenir me hantera longtemps.

Merci à HundredDreams (Sandrine) et mcd30 (Marie-Caroline) avec qui j'ai partagé cette lecture. Leur enthousiasme a contribué à me faire franchir le cap un peu difficile pour moi de cette énumération de purges et de procès.
Partant en vacances demain je voulais publier avant. Je serai un peu moins présente sur Babelio tout le mois d'aout. Il y aura quelques critiques, SP oblige, mais je vous lirai moins que d'habitude. Bonnes vacances aux aoutiens, Courage à ceux qui en reviennent.
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Découverte des Barzoïs, de Cuba, de révolutionnaires... le livre alterne différentes époques, différents lieux, différents points de vue. Mystérieux comme la vérité. Ce qui lui donne toute sa fougue et sa beauté romanesque? Des personnages et des dialogues bien ciselés. On y apercoit même Frida Kahlo. Ma tendresse va pour Natalia Ivanovna Sedova, Lev Lvovitch Sedov, quelques chiens, Dax, Truco, Maya... Allez, osons l'écrire pour toi aussi camarade Trotski!
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La vie romancée de Trotski et de son assassin Ramon Mercader...
Les phrases sont longues et pesantes, la ponctuation approximative. le récit qui, ne suivant pas tout à fait la chronologie des évènements, emploie à la fois l'imparfait, le passé simple et le futur antérieur au sein d'une même phrase perd le lecteur au bord du chemin. La construction syntaxique des phrases, souvent maladroite, crée l'ambiguïté sur le sens même du récit.
Les références historiques, aussi superficielles que pléthoriques, ponctuent les chapitres sans apporter de réelle substance.
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Bon , comme j'ai lu ce livre il y a quelques temps , je vais en résumer l'essence et non la trame chronologique .
Il s'agit d'une oeuvre monumentale qui relate la vie de Léon Trotski , de sa disgrâce à son exécution. Mais sans doute, cela serait trop simple et Leonardo Padura s'attache aussi à nous décrire la vie de son assassin , ainsi que l'évolution de la mouvance trotskyste à travers le monde ou encore la stratégie de Staline.

On plonge dans un monde de paranoïa , de lutte , de conviction, de trahison .
Un monde où la foi dans la cause l'emporte sur l'amour , où la trahison est partout où les intérêts de la mouvance sont en jeu.

Un livre référence sans aucun doute mais un livre qui se mérite . 800 pages avec une foultitude de personnages , des références à foison , rendant l'ouvrage à peu de choses près exhaustif sur cette période de la vie de Léon Trotski.
L'auteur , en plaçant une partie de l'énigme sur son ile , Cuba , revient également sur le délabrement de ce pays où l'émigration devient l'activité essentielle : "Que le dernier à partir pense à éteindre le phare ".
Le travail de l'écrivain , du biographe , est exceptionnel et mérite à lui seul quelques étoiles .
Je garderai la cinquième car je ne m'attendais pas à un livre si dense . Mais la mise en place des derniers jours de Trotski, l'immersion dans la tête des principaux protagonistes et le travail de l'historien / écrivain sont remarquables .
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Le roman historique : peut-être la meilleure et la plus évidente façon pour la littérature d'être « utile » ; lorsque le romancier atteint le sommet de son art, il peut faire avaler la plus indigeste quantité de faits et de dates sans que jamais le lecteur n'ait envie de quitter la classe, ni de regarder les marronniers pousser par la fenêtre... On ne peut que le remercier de nous avoir fait revivre un pan entier de notre Histoire sans avoir à sacrifier au sacro-saint Divertissement…

La mission est ici remplie avec brio ; un colossal morceau d'Histoire, des révolutions russes à la guerre d'Espagne, avec les vies de Trotsky et de son assassin Ramon Mercader comme socles statuaires.

Construction en trois couches — en aller-retour temporel — trois vies, dont une contemporaine cubaine du narrateur, tentation autobiographique, racontant sa vie plutôt tragique, et comme acmé sa relation avec un Mercader en fin d'incroyable parcours, d'une existence qu'aucun romancier n'aurait osé imaginer.

La langue est discrète, efficace, et les effets narratifs s'avèrent au final plutôt rares, ce qui pour un si gros morceau d'Histoire semble à double tranchant, la sobriété finissant par lasser face à une telle montagne de faits ; ce n'est pas que l'on s'ennuie (loin de là), mais on aurait aimé davantage de changements de rythme ou de personnalité romanesque… en parler semble quelque peu difficile, tant ce qui manque à ce livre reste insaisissable, et cette critique n'aidant pas comme elle devrait à synthétiser cela…

La strate cubaine apparait comme le maillon faible : trop pleine de pathos, laissant le lecteur glacé d'effroi devant les questions qu'elle soulève, le narrateur-écrivain potentiellement victime de sa liberté de ton face à un système pseudo-communiste, stalino-castriste en voix de complet essoufflement, questionnant sur la liberté du livre tout en cherchant ce qui aurait pu être suggéré, occulté, en vue de ne pas trop froisser le Régime local, lequel n'est finalement jamais évoqué de front.
Le doute demeure face à cette possible subtilité, laissant de côté ce qui aurait pu définitivement justifier ce tiers de roman, alourdissant au final l'ensemble.

Le parti pris de s'intéresser à l'intimité de personnages dont la simple existence fût soufflé par L Histoire en marche s'affadit par la relative distance conservée. La focale employée apparait floue, incertaine, comme si l'auteur n'avait jamais su correctement établir le degré de familiarité à employer pour cette entreprise.

L'ensemble restant cependant très bien mené, jamais son côté sérieux ne tombant dans l'austérité, garantissant une lecture fluide, remplissant avec succès sa délicate mission de nous conter un si gros pan d'Histoire mondiale, ses relatifs défauts étant aussi gage de qualité, l'équilibre vie privée / vie publique — si périlleux à tenir — se portant ici comme un charme ( haaaa… le flou hamiltonien… ).

Reste que ce roman manque d'une « magie » qu'aurait pu y insuffler par exemple un Albert Sánchez Piñol, ou un Max Aub, Guerre d'Espagne oblige ; toutefois, je m'associe à tous ceux qui vous en recommande la lecture : les canons du roman historique réussi y étant largement réunis.
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Je ne sais plus ce qui m'a inspiré cette lecture, en attente depuis plusieurs années ! Je m'y suis lancé "à l'aventure" sans même connaitre le sujet, dont le titre n'est pas prémonitoire et qui de prime abord aurait pu me rebuter. Après quelques dizaines de pages, j'ai réussi à entrer pleinement dans le sujet, passionnant, qui permet d'approfondir le sujet du socialisme et du communisme vécu par des femmes et des hommes "créatures tragiques dont le destin est commandé par des forces supérieures qui les dépassent et les manipulent au point de les anéantir".
Je suis surpris aussi de retrouver régulièrement dans différentes lectures Trotsky, ce personnage central du roman dont la vie ne m'avait jamais intéressé jusqu'à présent mais que je croise régulièrement.
A noter que ce livre grand format, de près de 700 pages, très dense demande de nombreuses heures de lecture mais pour une grande satisfaction.
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Les deux personnages historiques au centre de ce roman -fleuve sont LéonTrotski et son assassin, Ramón Mercader. Trois fils narratifs alternent : une biographie de Trotski qui commence avec son exil, en 1929, très précise. Elle est suivie de celle de Ramón Mercader, communiste stalinien qui se battit dans les rangs républicains pendant la guerre civile d'Espagne avant d'être recruté (par sa mère !) pour un mystérieux projet. Sans rien en savoir, sinon que celui-ci exigeait un renoncement complet à son ancienne vie et à son identité…

Le troisième fil, plus tardif nous emmène à Cuba en 1977. Ivan, un jeune homme qui avait publié un livre prometteur n'a pas su poursuivre son élan. Il a tenté un second livre qui a été violemment retoqué par la censure d'état. Autant dire, un enterrement de première classe pour ses ambitions littéraires… Il se reconvertit comme vétérinaire semi-officiel. Ivan va rencontrer par hasard un homme âgé qui promène ses deux chiens, deux superbes barzoïs. Il va peu à peu se lier avec cet homme à la santé chancelante. Qui finira par vouloir lui raconter, et en lui demandant de n'en parler à personne, la vie de Ramón Mercader…

Ce roman est à l'évidence remarquablement documenté. le fil narratif de la biographie de Trotski m'a toutefois paru parfois bien aride car Leonardo Padura y a inclus beaucoup du contexte politique de l'époque. de Ramón Mercader je ne savais rien. Donc sa vie mouvementée, ses changements incessants d'identité, m'ont paru plus romanesques. On sait bien comment tout cela s'est terminé à Mexico mais l'auteur parvient à créer un véritable suspense autour de ce meurtre annoncé. La partie cubaine a été pour moi la plus facile à lire et ses personnages très attachants.

Une fois qu'on a bien compris que ces figures politiques de premier plan, de grands fauves, sont en guerre totale les uns contre les autres, avec des moyens humains et financiers considérables, le détail de leurs affrontements politiques m'a paru lassant, ce qui explique ma note mitigée. Je reconnais le grand et beau travail de Leonardo Padura sur ce sujet historique, mais je serai heureux de le retrouver plutôt avec une enquête de Mario Conde.
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Difficile de critiquer ce livre.
Pour résumer, je pourrais dire que je l'ai abordé comme une fiction (ce qu'il est) mais que j'aurais peut-être dû l'aborder comme un documentaire.
L'écriture de Leonardo Padura est magnifique, c'est indéniable.
Mais j'avoue que le foisonnement de faits historiques au fil du récit m'a un peu perdue.
C'est vrai que cette période est riche et il est certain que l'auteur a fait un travail de recherche important.
Toutefois, je pense qu'il faut vraiment aimer l'Histoire pour aborder ce roman sans se perdre.
Il y est question de haine : la haine entre deux hommes (Trostski et Staline), la haine du capitalisme, la haine d'un fils pour sa mère (ambiguë quand même) ; mais aussi de peur, de suspicion et de manipulation idéologique.
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J'achève ce matin le pavé que forment les pages de L'Homme qui aimait les chiens. Je ne répéterai pas ce que d'autres contributeurs ont écrit sur les trois romans qui composent cet opus impressionnant, et le courage aussi qu'il a fallu à l'auteur pour se colleter cette difficile et douloureuse question , la question de l'utopie dévoyée. A l'heure où d'autres utopies que celles qui sont nées avec l'ère industrielle voient le jour, la question mérite vraiment d'être posée. A l'heure aussi où une guerre se déroule à l'est et menace les équilibres bien fragiles de notre monde globalisé et où nous sentons avec angoisse que nous pourrions être les victimes innocentes d'une histoire qui nous dépasse....Nous ne pouvons que remercier Padura car il pose cette question avec talent et habileté. C'est pourquoi, c'est la partie cubaine de l'oeuvre que j'ai préférée. Chapeau aussi pour la partie consacrée à Ramon Mercader, l'homme qui aimait les chiens et la mer, et sa mère aussi, sans mauvais jeux de mots. Les motifs complexes qui expliquent son geste meurtrier sont tissés avec sensibilité et intelligence. Tout cela fait de cet "Homme qui aimait les chiens" un portrait subtil de perdants magnifiques.
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Un formidable roman de 800 pages dont j'ai dévoré la moitié durant un long vol de retour de Thaïlande (cela dure 11h!).

Padura démontre un formidable talent de conteur ainsi que de documentaliste. Si j'en crois internet, il s'agit d'un livre qu'il portait en lui depuis une visite qu'il a faite en 1989 dans la maison de Trotski au Mexique jusqu'à sa parution en 2009.

Il a énormément de talent pour nous tenir au haleine aussi longtemps alors que l'on sait depuis le début du livre que Trotski sera assassiné en août 1940.

Je conseille évidemment ce livre qui m'a appris énormément sur cette partie de l'histoire que peu connaissent je pense.
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