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Voilà un grand roman.
Leonardo Padura est, notamment, écrivain et journaliste. Il est cubain et écrire des polars représente une gageure : pas de criminalité officielle à Cuba. Alors, pour parler de son pays, il triture les enquêtes ou évoque des intrigues survenues dans d'autres contrées.
Avec L'homme qui aimait les chiens, il fait coup double.
Leonardo Padura nous emmène à la découverte des destins convergents de Trotsky et de Ramón Mercader, son assassin à Mexico. le premier est une figure du bolchevisme qui a dû s'exiler pour échapper à la haine de Staline. le second est un soldat de la République espagnole qui a lutté en vain contre Franco. Rallié au communisme, il sera volontaire pour sacrifier sa vie à la grande cause. Mais sacrifier sa vie ne signifie pas mourir. C'est bien pire.
Un troisième personnage occupe une place très importante dans la narration : il s'agit de Ívan, le narrateur, écrivain cubain raté, qui, à travers l'histoire de ces deux personnages historiques, va décrire sans concession la vie cubaine des années 1970 à nos jours.
Si ce roman peut être qualifié d'historique et de politique, il est néanmoins à la littérature tout entier. Les sentiments de chacun n'ont pu qu'être extrapolés sur la base d'archives et la sensibilité fictionnelle de l'auteur fait le reste. Si la construction est assez conventionnelle : un chapitre par personnage comme une valse, 1-2-3, 1-2-3, le lecteur y trouve son compte car la somme d'informations à enregistrer rend bienvenues les ruptures dans le récit. Et puis, cela a du sens : il est important de comprendre comment les personnages vivent simultanément les événements et les introspections et digressions du narrateur sont indispensables à la démonstration par laquelle conclut l'auteur.
Le rythme ainsi donné tient le lecteur en haleine car si la fin est connue, les circonstances le sont beaucoup moins.
Je découvre avec ce roman une très belle plume.
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Quand j'ai commencé ce récit je ne m'attendais pas à une lecture aussi intense. Sous couvert d'un titre anodin, nonobstant sympathique, ce roman historique m'a tenue en haleine quatre jours durant. le point d'orgue c'est l'assassinat de Trotski en 1940 à Mexico. Au-delà de cet événement trois histoires en parallèle vont se croiser. le long exil de Léon Trotski, la préparation et le crime du meurtrier Ramón Mercader et en toile de fond la difficile subsistance du narrateur, Ivan, vétérinaire cubain de fortune meurtri par la vie. C'est lui qui va recueillir les confidences de Ramón Mercader. le point commun de ces 3 personnages mais aussi le point de départ du roman c'est l'amour des chiens, comme un supplément d'âme qui serait accordé à chacun, un peu comme si quelqu'un qui aime les chiens n'est finalement pas foncièrement mauvais. (Je vous rassure les chats aussi ! Je désamorce aussi la remarque « Ils aiment plus les chiens que les hommes ». Encore que !)
On va évidemment croiser Frida Kahlo, Diego Rivera et même André Breton mais surtout un labyrinthe de personnalités réelles, une multitude de clandestins aux pseudonymes multiples, des victimes des purges staliniennes, aux combattants communistes de la guerre d'Espagne, des militants et politiques européens ou mexicains. Bizarrement - mais peut-être pas ! le roman ayant été publié en 2009 - Castro n'est pas cité une seule fois. Proche des personnages la peur nous accompagne à chaque page. Leonardo Padura est un auteur de roman policier et sait nous accrocher. L'issue est connue, pourtant il parvient à décrire l'intensité de la préparation de l'assassinat pendant près de 100 pages. Plusieurs vaines tentatives nous laissent sur notre faim, partagés entre le refus de cet acte odieux et le fait de passer à autre chose de moins lourd.
Le regard de Padura est sans concession, ni pour Staline et ses proches, ni pour le régime cubain, ni pour les communistes staliniens intransigeants français comme André Marty ou espagnols, comme la Pasionaria,Dolores Ibarruri. En revanche en nous faisant suivre Trotski et Mercader, en restituant leur portrait psychologique, on accède, non pas à l'empathie, mais à une approche distanciée. Il n'en fait pas des héros positifs mais des victimes d'un système.
La dernière partie se situe 25 ans plus tard à l'heure où les chars entrent dans Prague. Ramón Mercader réside à Moscou, son mentor a lui aussi payé au prix fort son implication sans faille. Les rescapés ne peuvent que constater la faillite du système et l'échec de leurs idéaux.
Un tableau d'une époque terrifiante. Passionnant ! Une belle lecture sur un sujet qui n'est pas aisé !

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Au risque de me répéter (mais est-ce ma faute si tant d'excellents livres sont venus à moi depuis le début de l'année ?), "L'homme qui aimait les chiens" est un très grand roman, le premier que je lis du cubain Leonardo Padura (*).

Padura nous raconte de façon parallèle l'histoire de trois personnages : celle de Trotsky depuis son exil en Turquie jusqu'à son assassinat au Mexique, en 1940, commandité par Staline; celle de Ramon Mercader, son assassin, depuis son enrôlement dans le camp républicain pendant la guerre d'Espagne jusqu'à sa fin mystérieuse; celle enfin d'Ivan, un cubain, double de l'auteur, que les circonstances politiques de son pays ont empêché jusqu'alors de réaliser son rêve de devenir écrivain et qui devient un jour dépositaire de l'histoire de ce Ramon Mercader.

Quoi de plus périlleux que de se lancer dans une saga historique à la fois si célèbre (le destin tragique de Trotsky est bien connu par quiconque s'intéresse un peu à l'histoire du XXe siècle) et dont tant d'aspects ne sont que des conjectures ? Comment nous faire comprendre les ressorts qui font agir d'un côté le vieux révolutionnaire bolchévik en rupture de ban, fuyant de pays en pays les sbires de Staline, accompagné de sa femme et de quelques rares amis, et de l'autre le jeune communiste catalan Mercader, recruté par la police politique de Staline et modelé en un ennemi juré du "traître" Trotsky ? Et finalement, de quelle liberté peut jouir un écrivain cubain vivant encore sur cette île, pour rendre compte de cette tragédie historique, sachant les liens étroits qui ont lié Cuba et l'URSS ?

Le miracle de ce roman tient justement dans cette liberté de ton qu'a su trouver Leonardo Padura. Même si sa sympathie penche évidemment du côté du "Vieux", comme l'on surnommait Trotsky, il réussit à nous peindre un Mercader sinon attachant du moins très intéressant et toute la préparation de l'attentat est digne des meilleurs romans d'espionnage. Et la sympathie pour Trotsky ne va pas sans une lucidité à l'égard du compagnon de Lénine qui n'est pas totalement épargné dans ce récit. Et c'est là où le personnage d'Ivan est essentiel au roman pour nous montrer sans complaisance les tristes résultats d'une application rigoureuse des préceptes castristes, déclinaison latino-américaine mais relativement fidèle (sans jeu de mots) du credo léniniste.

D'un point de vue historique, ce roman porte aussi un éclairage passionnant sur toute la période de la guerre d'Espagne (avec notamment la prise de contrôle du camp républicain par les staliniens, éliminant progressivement leurs alliés socialistes, anarchistes et trotskystes, et notamment le leader du POUM, Andreu Nin) et aussi sur la période des procès de Moscou, où Staline, avec avec férocité inouïe, fait le ménage parmi les anciens bolchéviks, et aussi parmi les officiers et médecins juifs, préparant et consolidant le pacte Ribbentrop-Molotov de 1939 avec l'Allemagne nazie. La triste ironie de l'histoire est que c'est Trotsky qui était accusé par Staline de vouloir pactiser avec Hitler !

Au-delà de l'intérêt historique, Padura s'est attaché à restituer mille et un petits détails de la vie de ses personnages, ce qui rend son récit très crédible et très vivant. Ainsi les chiens ont une place particulière dans ce roman et c'est aussi un tour de force de Padura d'avoir trouvé pour titre de son roman une périphrase qui peut désigner l'un ou l'autre de ses trois personnages principaux.

Je ne le cache pas, "L'homme qui aimait les chiens" est un des tout meilleurs romans historiques que j'ai pu lire et c'est aussi un très grand roman humaniste.

(*) J'ai eu l'occasion de voir l'adaptation qui a été tirée en 4 épisodes de 4 de ses romans policiers avec comme personnage principal le flic Mario Conde (que, par facétie, Padura cite dans son roman "L'homme qui aimait les chiens") sous le titre "Quatre saisons à La Havanne" et j'ai beaucoup aimé !
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Quel roman! L'auteur s'intéresse à la dictature stalinienne et à ses conséquences. Il choisit de se concentrer sur l'exil et l'assassinat de Trotsky, alternant les chapitres centrés sur Lev Davidovitch, sur son assassin (un républicain de la guerre d'Espagne complètement fabriqué pour devenir ce qu'il est), et un jeune Cubain qui à la fin des années 70 rencontre un mystérieux homme aux chiens qui lui raconte la vie de cet assassin. Ce choix de l'intrigue permet à l'auteur de brosser un panorama très large du règne du communisme, et c'est effrayant. Staline, c'est 20 millions de morts, des purges terribles où il élimine tous ceux qui l'entourent et le servent en leur faisant avouer n'importe quoi. Cuba c'est à cette époque une prison misérable qui broie toutes les individualités. C'est un roman extraordinaire mais très dense. J'y ai appris une quantité incroyable de choses sur l'URSS, sur Staline et son influence sur la guerre en Espagne, sur les exactions au sein des Républicains espagnols et bien sûr sur l'exil et le meurtre de Trotsky, en partie victime d'un système qu'il a lui-même contribué à édifier. Une mise en cause de la soif de pouvoir bien sûr, mais aussi de ceux qui pensent que l'idéal révolutionnaire dépasse l'importance des individus.
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En commençant la lecture de cet ouvrage, je n'avais pas pris conscience que j'allais lire une oeuvre monumentale. de plus, je pensais plus à une oeuvre fictive basé sur des faits réels. S'il est évident que la rencontre entre le personnage central du livre et "l'homme qui aimait les chiens" est une pure invention, le reste relève plus d'un document historique aux allures de roman richement documenté. Afin de bien comprendre la part du vrai et du faux, je me suis renseigné au fur et à mesure de la lecture sur les événements relatés dans le récit pour me rendre compte qu'il concordait parfaitement à la réalité. L'auteur est un merveilleux conteur qui allie faits historiques et romance d'une manière subtile et bougrement efficace. Un vrai voyage dans le temps, un véritable plongeon dans les affres d'une période trouble, marquée par la peur, les menaces, les prisons, les tortures et, au final, la mort.
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Chef d'oeuvre immense qui nous emmène au coeur des folies du XXe siècle... La traque impitoyable de Trotski par Staline, la fabrication de son assassin sur fond de guerre d'Espagne, tout ceci est minutieusement analysé par Padura dans ce roman de notre histoire sanglante du XXe siècle. Haletant et magistral.
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Ce roman raconte la vraie histoire de l'exil de Trotski de Russie jusqu'à son assassinat.
Celui-ci est la victime d'un mensonge, puis d'un nombre croissant de mensonges, énormes, comme toutes les dictatures en produisent. Ils sont allés jusqu'à faire croire aux gens que Trotski était allié avec les nazis … alors que Trotski était juif.
Staline est obsédé par Trotski, sa brutalité est en conflit avec l'intelligence et l'intégrité de Trotski. Trotski doit lutter coûte que coûte pour ne pas devenir fou.
Ce roman présente une autre figure passionnante : l'homme qui va être manipulé pour tuer Trotski, Jacques Mornard, de sa naissance jusqu'à sa chute. le lecteur sait qu'il va réussir à tuer Trotski mais il ignore ce qu'il adviendra de lui ensuite, excepté qu'il survivra blessé.
A partir de la traque, le roman prend un tour, une tonalité aigüe pour faire ressortir les couleurs, les odeurs, les sensations d'exaltation puis de peur.
La construction du livre et son rythme parfait accompagnent ces personnages subissant leur destin. C'est le roman de l'enfermement moral du totalitarisme vécu de l'intérieur par sa cible. Fascinant de se dire que tout ceci a pu exister.
Lien : http://objectif-livre.over-b..
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En voilà un roman dense, et qui peut paraitre tout autant lourd que passionnant, L'homme qui aimait les chiens est à découvrir !



Certes, ce roman a un titre qui peut paraître trompeur. Ivan, un jour par hasard, rencontre un homme sur la plage. Cet homme proméne 2 chiens, qu'il aime par dessus tout. Et aprés quelques rencontres, il commence à se confier à Ivan. Il lui avoue avoir bien connu Ramon Mercader, l'assassin de Leon Trotsky...



Le roman se divise alors globalement en 3 partie : Ivan nous racontant son point de vue sur l'histoire que raconte l'homme, mais aussi donc, cette histoire, suivant d'un côté Ramon Mercader, de ses débuts jusqu'à l'assassinat, et de l'autre Leon Trotsky. Bien entendu, il s'agit ici d'un roman. Donc si de nombreux faits sont avérés, certains sont imaginé, pour être plus romanesque. Mais malgré cela, le premier tiers, tout en politique, et en tractations et complots divers, peut-être lourde. Pour moi, elle l'a été, et je dois reconnaitre avoir eu peur que les 800 pages ressemblent à ça. Mais plus on approche du point décisif, plus on se laisse prendre à cette histoire, on suite les destins de ces deux personnages, leurs idéologies, et globalement la bêtise des puissants qui va les amener au résultat final, que L Histoire connait déjà. Et on va pourvoir tout autant haïr les deux, que ressentir une certaine forme de compassion, notamment pour Ramon, contrôlé à un tel point que lui même ne sait plus ce qu'il est réellement.



Alors bien entendu, on pourra critiquer la crédibilité du systéme narratif du roman (il y a tellement de détails, qu'on peut se demander qui peut connaitre à ce point la vie d'un autre), et le style parfois peu fluide de l'auteur. Mais ce sont peu de choses, comparé au travail de recherche, et à la puissance d'un roman qui prend son temps, mais marque !
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La couverture nous indique le thème d'emblée mais le titre éveille la curiosité. Il aurait pu être écrit au pluriel mais cela aurait sonné moins bien et puis, Leonardo Padura parle du héros principal de l'histoire.

« L'homme qui aimait les chiens » est raconté par trois narrateurs. Quatre, si on prend en compte le tout dernier chapitre. Ivan, un écrivain et vétérinaire cubain et ouvre le récit. Lev Davidovitch Bronstein plus connu sous le nom de Léon Trotski prend sa suite puis le troisième, Ramón Mercader, un révolutionnaire espagnol.

Ivan vit à la Havane. le gouvernement l'a frustré en l'empêchant d'écrire librement et de s'épanouir en tant qu'écrivant. Il revient sur sa rencontre avec l'homme mystérieux « qui aimait les chiens » qu'il a rencontré sur la plage en 1977 avec ses lévriers barzoï et lui a fait des confidences sur Ramón Mercader , l'assassin de Trotski. Confidences dérangeantes et éprouvantes pour l'écrivain cubain survivant dans un Cuba en crise, qu'il nous livre en parallèle.

« On peut en déduire facilement que cette histoire (que je reçus quelques années avant les révélations de la glasnost), fut comme une explosion de lumière qui vint éclairer, non seulement le lugubre destin de Mercader, mais celui de millions d'hommes. C'était la chronique même de l'avilissement d'un rêve et un témoignage sur l'un des crimes les plus abjects jamais commis, non seulement parce qu'il affectait le destin de Trotski, après tout concurrent de ce jeu pour le pouvoir et protagoniste de nombreuses atrocités historiques, mais aussi celui de millions de gens entraînés – malgré eux, bien souvent sans que personne ne se souciât de leurs désirs – par le ressac de l'histoire et la folie de leurs maîtres déguisés en bienfaiteurs, en messies, en élus, en héritiers de la nécessité historique et de la dialectique incontournable de la lutte des classes… "

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Puissant, magistral, bouleversant et terriblement émouvant. Quel livre !
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